|
|
|
|
 |
|
Nutrition et santé La santé passe par l’assiette et l’activité physique |
|
|
|
|
|
Nutrition et santé
La santé passe par l’assiette et l’activité physique
PUBLIÉ LE : 13/07/2017
TEMPS DE LECTURE : 17 MIN
Les liens entre nutrition et santé sont de mieux en mieux connus, et le risque de développer de nombreuses maladies – cancer, maladies cardiovasculaires, obésité ou encore de diabète de type 2 – peut être réduit en suivant les recommandations nutritionnelles nationales. Fondées sur de multiples études scientifiques, ces recommandations évoluent avec l’acquisition de nouvelles connaissances. Toutefois, les français sont encore trop peu nombreux à se les être appropriées, en particulier parmi les moins favorisés. Des mesures permettant d’améliorer la qualité nutritionnelle et l’accessibilité (physique et économique) de l’offre alimentaire, ainsi qu’un environnement favorable à l’activité physique ont été recommandées par le Haut conseil de la Santé publique dans le cadre de la préparation du prochain programme national nutrition-santé.
Dossier réalisé en collaboration avec Serge Hercberg, professeur de nutrition à la faculté de médecine (Université Paris 13), praticien hospitalier au département de santé publique de l’Hôpital Avicenne (APHP), directeur de l’équipe de recherche en épidémiologie nutritionnelle (EREN, unité 1153 Inserm/Inra/Cnam), ainsi qu’avec Mélanie Deschasaux et Mathilde Touvier (EREN).



Comprendre comment améliorer la santé par la nutrition
La conception moderne de la nutrition intègre non seulement l’alimentation et ses déterminants psychologiques, mais aussi l’activité physique qui conditionne les dépenses énergétiques. Un déséquilibre de cet ensemble complexe est impliqué dans l’apparition et le développement de la plupart des maladies chroniques les plus fréquentes aujourd’hui. De nombreux travaux ont par exemple montré l’impact de facteurs nutritionnels sur la survenue de certains cancers, des maladies cardiovasculaires, de l’obésité, de l’ostéoporose, ou encore de troubles métaboliques comme le diabète de type 2 ou l’hypercholestérolémie. La recherche s’est dans un premier temps focalisée sur ces problèmes de santé publique, mais elle s’élargit aujourd’hui à d’autres domaines : de nouveaux travaux suggèrent en effet l’existence de liens entre la nutrition et certaines maladies inflammatoires auto-immunes, comme la polyarthrite rhumatoïde ou les maladies inflammatoires chroniques de l’intestin (MICI), ou encore les allergies, la dépression, les troubles du sommeil, le déclin cognitif et la dégénérescence oculaire (DMLA, cataracte)…
Et s’il est encore difficile de décrire les mécanismes biologiques capables d’expliquer les effets très complexes de la nutrition sur la santé, de nombreuses études épidémiologiques ont permis d’établir qu’une alimentation suffisante, équilibrée et diversifiée est indispensable à la croissance, au maintien de l’immunité, à la fertilité ou encore à un vieillissement réussi (performances cognitives, entretien de la masse musculaire, lutte contre les infections…).
Ces études montrent aussi que certains aliments, nutriments et comportements augmentent le risque de développer certaines pathologies. D’autres vont au contraire avoir une action préventive.
Bien manger, tout un programme
La nutrition constitue de ce fait un levier pour améliorer le niveau de santé de la population. Ainsi, le Programme national nutrition santé (PNNS) propose depuis 2001 des recommandations nutritionnelles pour prévenir l’apparition de certaines maladies et promouvoir la santé publique. Ces recommandations sont assorties de repères visant à favoriser une consommation adéquate des différents types d’aliments et la pratique régulière d’une activité physique. Les repères proposés permettent de couvrir les besoins nutritionnels de la quasi-totalité de la population adulte et de maximiser les bénéfices en termes de prévention nutritionnelle des maladies chroniques, dans l’état actuel des connaissances.
Ces repères nutritionnels reposent essentiellement sur des études épidémiologiques et cliniques, couplées à des données mécanistiques issues de la recherche expérimentale. Il s’agit notamment d’études dites prospectives, qui permettent d’explorer les liens entre l’exposition à un aliment et le risque de développer une maladie. Grâce à ce type d’étude, il est possible de définir des seuils de consommation en deçà ou au-delà desquels le risque de développer une maladie est significativement plus faible.
L’actualisation des repères réalisée en 2017 par le Haut conseil de la Santé publique (PDF, 630 Ko), a introduit les fruits à coque et les légumineuses et revu à la baisse la consommation de protéines d’origine animale (en particulier celle de charcuterie). Par principe de précaution, il est en outre désormais recommandé de :
* privilégier les produits non transformés, bruts et de saison, pour limiter ainsi la consommation d’additifs (émulsifiants, édulcorants, colorants…) dont les effets sont encore mal documentés
* éviter l’usage de compléments alimentaires
* privilégier les produits issus d’une agriculture limitant l’apport en pesticides
Les repères clés sont les suivants :
* Fruits et légumes : au moins 5 portions de 80 à 100 g par jour, quel que soit le mode de préparation (crus, cuits, frais, surgelés ou en conserve). Limiter la consommation sous forme de jus de fruit et de fruits secs.
* Fruits à coque sans sel ajouté : une petite poignée par jour pour les personnes ne présentant pas d’allergie à ces aliments (amandes, noix, noisettes, pistaches…).
* Légumineuses : au moins 2 fois par semaine : les lentilles, fèves, pois chiches, haricots secs… représentent d’excellentes sources de fibres et de protéines, pouvant aider à limiter les apports en viande.
* Produits céréaliers : tous les jours, en privilégiant les produits complets ou peu raffinés (riz, pâtes ou pain complets…).
* Produits laitiers : 2 portions par jour, une portion correspondant à 150 ml de lait, 125 g de yaourt ou 30 g de fromage.
* Viande : privilégier la volaille et limiter la consommation de viande rouge (bœuf, porc, veau, mouton, chèvre, cheval, sanglier, biche) à 500 g par semaine maximum.
* Poisson et fruits de mer : 2 portions par semaine, dont une de poisson gras (sardine, maquereau, thon, saumon). Varier les espèces et les lieux d’approvisionnement pour limiter l’exposition aux contaminants.
* Charcuterie : limiter la consommation à 150 g par semaine maximum.
* Matières grasses ajoutées : à limiter. Privilégier les matières grasses végétales, et notamment les huiles de colza, noix et olive.
* Produits sucrés : à limiter, en particulier les produits à la fois sucrés et gras, comme de nombreuses « céréales de petit-déjeuner » ou desserts (pâtisseries, desserts lactés, crèmes glacées).
* Boisson : favoriser l’eau et limiter les boissons sucrées ou édulcorées, ainsi que l’alcool. Le thé, le café et les infusions peuvent contribuer à l’apport en eau s’ils ne sont pas sucrés.
* Sel : A réduire. Attention au sel « caché » dans le pain, les plats préparés, les charcuteries, les biscuits apéritifs… Concernant le sel « ajouté », mieux vaut privilégier le sel iodé.
* Activité physique : au moins 30 minutes par jour, 5 jours par semaine. Il est recommandé de pratiquer différents types d’activité physique pour développer l’endurance, le renforcement musculaire, la souplesse et l’équilibre.
Ces régimes amaigrissants qui font grossir
Un des inconvénients majeurs des régimes amaigrissants semble être… la prise de poids ! Une expertise scientifique de l’Anses montre que la restriction calorique et les déséquilibres alimentaires entraînés par au moins quinze régimes populaires et très diffusés auprès du grand public, sont associés à une reprise de poids. En cause : des modifications du métabolisme énergétique et la diminution de la masse corporelle métaboliquement active (masse maigre). En outre, l’expertise pointe du doigt des risques pour la santé osseuse, le système cardiovasculaire et les reins, ainsi que la possibilité de perturbations psychologiques de type anorexie/boulimie en cas de régime très strict. L’Agence rappelle en conséquence qu’un régime amaigrissant n’est pas anodin et doit faire l’objet d’une prise en charge par un spécialiste en nutrition.
Nutri-Score : faciliter l’identification des aliments de bonne qualité nutritionnelle
Afin de permettre au consommateur de comparer facilement la qualité nutritionnelle des produits qui lui sont proposés, un arrêté interministériel (ministères de la Santé, de l’Agriculture et de l’Economie et des finances) a validé, en octobre 2017, l’usage officiel du label Nutri-Score. Placé sur la face avant des emballages, ce logo classe les aliments selon leur qualité nutritionnelle dans une des 5 catégories identifiées par une couleur (du vert foncé au rouge) associée à une lettre (de A à E).

Le Nutri-Score a été élaboré, étudié et testé pendant quatre ans par l’équipe de recherche en épidémiologie nutritionnelle (EREN, unité Inserm 1153). Il s’appuie sur un système établi par la Food standards agency du Royaume-Uni, adapté au contexte français. Concrètement, un algorithme mathématique validé et transparent permet de résumer la qualité nutritionnelle globale des aliments. Il prend en compte les éléments essentiels de la composition des produits (ingrédients, énergie et nutriments) pour lesquels des associations avec la santé sont avérées (obésité, maladies cardiovasculaires, cancers…), en comptabilisant les éléments favorables (fruits, légumes, fruits à coque, fibres, protéines) comme les éléments à limiter (sucre, sel, acides gras saturés, apport énergétique). Ce système a montré son efficacité sur les choix des consommateurs, notamment défavorisés, en conditions réelles d’achat.
L’application du Nutri-Score par les fabricants n’est pas obligatoire, mais plus de 70 industriels de l’agroalimentaire se sont déjà engagés à l’apposer sur leurs produits. L’algorithme est public et se fonde sur les éléments de composition déclarés de façon obligatoire. Ainsi, le Nutri-Score est facilement calculable par tous et a d’ores et déjà été intégré à différentes applications permettant de scanner le code barre des produits, notamment la base publique Open Food Facts.
L’atteinte des objectifs sous la contrainte des disparités socio-économiques
Depuis le début des années 2000, des études menées sur des échantillons représentatifs de la population permettent de suivre l’évolution des habitudes alimentaires et d’activité physique des Français.
L’étude Esteban montre que, malgré les actions conduites dans le cadre du programme national Nutrition-Santé pour promouvoir des choix alimentaires favorables à une bonne santé, les comportements alimentaires de la population française ont peu évolué entre 2006 et 2015. Seuls 42 % des adultes et 23% des enfants consomment au moins cinq fruits et légumes par jour, avec toujours trop d’apports en acides gras saturés, en sucre et en sel, et des apports insuffisants en fibres.
Par ailleurs, il apparaît que c’est parmi les plus riches et les plus éduqués que les recommandations nutritionnelles sont les plus appliquées, contribuant ainsi à accroître les inégalités sociales de santé en nutrition. L’étude INCA 3 montre qu’il existe une association entre faible revenu et consommation d’une alimentation de moindre qualité nutritionnelle, en moyenne plus dense en énergie, avec plus de produits sucrés et moins de fruits, de légumes et de poissons. Cette alimentation, qui favorise l’obésité et les maladies chroniques, est aussi la plus accessible aux petits budgets.
Plus largement, l’offre alimentaire (à l’école, au travail, dans les grandes surfaces accessibles), l’aménagement urbain plus ou moins propice à l’activité physique, mais aussi le marketing, les normes sociales, les filières de production et certaines régulations ont un effet déterminant sur les comportements (alimentation et activité physique) et contribuent aux inégalités de santé. De nombreuses études ont montré que les personnes ayant un accès facilité à une offre alimentaire de meilleure qualité nutritionnelle, ainsi qu’un environnement favorable à l’activité physique avaient tendance à avoir une alimentation plus équilibrée et à pratiquer davantage d’activité physique.
La nutrition de l’enfant et de l’adolescent : un enjeu de santé publique
L’effet du milieu socioéconomique sur la santé nutritionnelle est criant chez les enfants et les adolescents. Les enfants de parents sans diplôme ou aux revenus modestes, plus nombreux à être obèses ou en surpoids, ne consomment pas quotidiennement des fruits, légumes et produits laitiers et consomment plus de produits sucrés. Ils sont trois fois moins nombreux à déjeuner à la cantine, où les repas pourraient contribuer à équilibrer leurs apports nutritionnels.
Et ces inégalités démarrent très tôt : les conditions nutritionnelles lors du développement in utero et des premières années de vie ont en effet une influence sur le développement ultérieur d’un très large spectre de maladies, en particulier métaboliques telles que l’hypertension, le diabète de type 2 ou l’obésité. On parle de l’origine développementale de la santé et des maladies de l’adulte.
A lire aussi sur ce sujet : Inégalités sociales de santé en lien avec l’alimentation et l’activité physique, une expertise collective de l’Inserm publiée en 2014
Protéger les enfants de l’impact du marketing
Les enfants et les adolescents sont particulièrement ciblés par des stratégies publicitaires agressives. De nombreuses études réalisées ces dernières années montrent que la publicité destinée à promouvoir des produits trop gras, trop salés et trop sucrés (fast food, bonbons, céréales, pâtes à tartiner...) provoque une attirance pour les marques concernées et, plus largement, pour les produits de même type. Cette attirance se concrétise par une augmentation de 45 % du grignotage dans les minutes qui suivent le spot publicitaire. Elle agit particulièrement sur les enfants et les adolescents, qui ne disposent pas des capacités de résistance de l’adulte, et contribue à la mise en place de comportements alimentaires qui perdureront à l’âge adulte. Une étude américaine estime ainsi qu’un tiers des personnes obèses ne l’auraient pas été sans les spots télévisuels.
La reconnaissance de cet effet délétère a conduit la France, en 2007, à imposer l’apposition d’un message sanitaire sur les publicités diffusées sur les supports classiques (magazines, affiches, télévision). Y échappe donc le marketing numérique qui explose aujourd’hui via internet, les réseaux sociaux, les jeux publicitaires, qui mettent en scène les personnages des marques, ou les in‑game, ces messages publicitaires insérés à l’intérieur des jeux vidéo. Par ailleurs, une étude néerlandaise a montré que les messages sanitaires ne peuvent pas contrecarrer les effets néfastes des publicités. Des pays comme le Royaume-Uni, l’Irlande, la Suède et l’Islande, pour ne parler que de l’Europe, ont d’ailleurs adopté des mesures interdisant les publicités qui visent les enfants, selon des modalités diverses. Cette stratégie fait également partie des recommandations élaborées dans le cadre de l’expertise collective Agir sur les comportements nutritionnels, publiée par l’Inserm en 2017.
Les enjeux de la recherche
Des équipes de recherche, notamment à l’Inserm, travaillent sur les liens entre nutrition et santé afin de fournir des éléments de décision pour orienter les politiques publiques dans le domaine de la nutrition de santé publique.
Dans le domaine du cancer, le réseau NACRe (pour Réseau national alimentation cancer recherche,) rassemble l’ensemble des équipes de recherche travaillant sur la thématique Nutrition-Cancer, favorisant ainsi les échanges et les collaborations entre différentes expertises.
De nouvelles thématiques de recherche émergent par ailleurs dans des domaines encore peu explorés comme celle du rôle du système digestif, de la flore intestinale, du tissu adipeux, du système immunitaire (inflammation, allergies) ou encore de la toxicologie. Les sciences sociales permettent quant à elles d’apporter un éclairage complémentaire pour cerner les déterminants des comportements alimentaires.
Les différentes approches de la recherche en santé et nutrition
La recherche expérimentale – conduite au niveau moléculaire, cellulaire ou chez l’animal – permet d’étudier l’impact de certains composés nutritionnels sur des fonctions physiologiques et physiopathologiques.
La recherche clinique permet d’étudier l’impact de la consommation de certains nutriments ou de l’activité physique sur la santé de personnes malades. L’objectif est de mieux comprendre le développement des pathologies chroniques liées à la nutrition et d’innover dans la prévention comme dans les prises en charge thérapeutiques.
Enfin, les études épidémiologiques, et notamment les cohortes, permettent de suivre sur le long terme les comportements alimentaires et l’activité physique d’une population, puis de les corréler à l’état de santé. Ces études nécessitent de suivre un très grand nombre de personnes et de prendre en compte de très nombreux facteurs pouvant influer sur la survenue de maladies (antécédents de santé, milieu socio-économique, lieu de vie…).
La nutrition au-delà des aspects « nutriments »
De nouvelles préoccupations sanitaires émergent avec l’engouement pour les aliments ultratransformés qui composent la plus grande partie de l’offre des supermarchés et près d’un tiers des produits consommés par les Français. De récents résultats publiés par l’équipe de recherche en épidémiologie nutritionnelle de l’Inserm suggèrent en effet que leur consommation serait associée à un risque accru de cancer. Des travaux relatifs à leur impact potentiel sur les maladies cardiovasculaires ou sur la mortalité sont également en cours.
Pour ces produits, tenir compte des nutriments n’est pas suffisant car ils contiennent notamment un grand nombre d’additifs (près de 350 sont actuellement autorisés en Europe), dont la nature délétère de certains est suspectée. Les teneurs maximales d’additifs autorisées dans les aliments ont principalement été établies à partir d’études toxicologiques conduites in vitro ou sur l’animal. Cependant, les conséquences chez l’humain d’un apport cumulé et de potentiels effets cocktails restent peu connues. La forte hétérogénéité de la composition en additifs entre les marques (un biscuit au chocolat peut contenir de 0 à 8 ou 10 additifs !) rend difficile l’évaluation du niveau d’exposition d’un individu. Pour y parvenir, il faut collecter l’information sur les noms précis et marques des produits industriels consommés, ce que ne font généralement pas les études au niveau international. Ces données sont toutefois disponibles dans la cohorte NutriNet-Santé (cf. encadré), qui lance actuellement un grand programme de recherche sur cette thématique.
La présence de pesticides dans les aliments est un autre sujet de préoccupation. Les relations observées entre exposition professionnelle à ces produits et risques pour la santé sont documentées. Mais les données actuellement disponibles ne permettent pas de conclure à un risque pour le consommateur exposé à des résidus de pesticides via son alimentation. Cependant, de récents résultats issus de l’étude BioNutriNet suggèrent qu’une forte consommation d’aliments issus de l’agriculture biologique réduirait le risque de cancer.
Des cohortes ont également été mises en place pour étudier l’impact d’autres aspects spécifiques, comme celui de l’exposition prénatale aux perturbateurs endocriniens avec la cohorte EDEN, par exemple.
NutriNet-Santé cuisine la toile
NutriNet-Santé rassemble à ce jour près de 165 000 internautes adultes volontaires. Il s’agit de la premier « e‑cohorte » de cette ampleur dans le monde, dans le domaine des relations Nutrition-Santé. Les participants répondent très régulièrement à des questionnaires en ligne, sur leur mode de vie, leurs comportements, leurs consommations alimentaires, leur activité physique... L’objectif est de les suivre pendant plusieurs années et de déterminer les facteurs nutritionnels, les comportements et les facteurs d’environnement qui ont une influence sur la santé pour conforter et/ou affiner les recommandations nutritionnelles et orienter les politiques publiques de prévention.
Environ 20 000 NutriNautes ont accepté de fournir des échantillons d’urine et de sang pour constituer une banque biologique. Elle sert aujourd’hui à identifier des biomarqueurs spécifiques de déséquilibres nutritionnels, ou prédictifs de certaines maladies.
NutriNet-Santé fait en permanence appel à de nouveaux volontaires pour rejoindre la cohorte et faire progresser les connaissances sur les relations entre nutrition et santé : Rejoindre l’étude.
La compréhension des mécanismes biologiques reliant nutrition et santé
Des collaborations entre recherche expérimentale, clinique et épidémiologique permettent d’apporter des éclairages nouveaux sur les mécanismes impliqués dans les relations nutrition-santé chez l’humain. L’épidémiologie mécanistique, par exemple, intègre aux études de cohorte classiques des données issues d’autres approches, comme la génomique, la métagénomique ou la métabolomique.
* La génomique permet d’identifier des variations génétiques entre individus qui pourraient expliquer des différences de susceptibilité vis-à-vis de tel ou tel nutriment, en lien avec telle ou telle maladie.
* La métagénomique permet d’établir la composition de la flore intestinale, ou microbiote. Ce dernier est suspecté d’être impliqué dans le développement de différentes maladies, notamment métaboliques (obésité, diabète…), or l’alimentation joue un rôle clé dans sa composition. En favorisant la croissance de tel ou tel type de bactéries, les aliments sont ainsi susceptibles de modifier la capacité de ce microbiote à produire des vitamines et de l’énergie, éliminer les toxines, utiliser les éléments indigestibles, éduquer et réguler le système immunitaire…
* Le programme européen MetaCardis, coordonné par l’Institut cardiométabolisme et nutrition (ICAN, unité Inserm 1166), vise à mieux comprendre l’impact des changements de la flore intestinale sur l’apparition et la progression des maladies cardiométaboliques et des pathologies associées, dans le but de développer de nouvelles stratégies préventives et thérapeutiques.
* La métabolomique permet d’obtenir une vision de l’ensemble des métabolites présents dans un échantillon sanguin, d’urine ou dans un organe. Ces métabolites peuvent provenir de la digestion des aliments et devenir ainsi des « marqueurs » des consommations alimentaires. L’enjeu est ensuite d’établir si ces marqueurs d’exposition nutritionnelle sont également capables de prédire le risque de développer une pathologie. Il serait alors possible d’adopter des mesures préventives ou, grâce à une détection très précoce, de proposer des stratégies de modulation adaptées.
*
Comprendre et mesurer les évolutions des comportements alimentaires
Qu’est-ce qui détermine les choix des consommateurs quand ils font leurs courses ? Quel est l’impact des messages de prévention nutritionnelle sur les comportements alimentaires ? Les études en sciences humaines et sociales, en épidémiologie quantitative, mais également en marketing social permettent d’analyser les déterminants des comportements alimentaires et d’identifier les freins à une alimentation et une activité physique favorables à la santé.
Par ailleurs, les techniques marketing de l’industrie agroalimentaire évoluent rapidement et investissent le numérique : des recherches sont nécessaires pour comprendre leur impact sur la consommation des produits vantés et mesurer leur contribution au surpoids, notamment chez les enfants. Par exemple, l’équipe de Didier Courbet (Université d’Aix-Marseille) cherche à mieux comprendre les effets non conscients des publicités alimentaires, notamment numériques, sur les enfants et adolescents. Leurs travaux ont en effet démontré que ces publicités agissent en associant des marques à des émotions positives (mascotte de dessin animé, célébrité, histoire amusante...).
DOCUMENT inserm LIEN |
|
|
|
|
 |
|
Rémission de l’infection par le VIH-1 : découverte d’anticorps neutralisants à large spectre impliqués dans le contrôle du virus |
|
|
|
|
|
Rémission de l’infection par le VIH-1 : découverte d’anticorps neutralisants à large spectre impliqués dans le contrôle du virus
27 Juil 2023 | Par Inserm (Salle de presse) | Immunologie, inflammation, infectiologie et microbiologie

Fragments anticorps du bNAb EPCT112 découvert à l’Institut Pasteur par l’équipe d’Hugo Mouquet (bleu), formant ici un complexe avec la protéine d’enveloppe du VIH-1 (Env) (en jaune et orange) © Institut Pasteur
Certains individus porteurs du VIH-1 et ayant bénéficié d’un traitement antirétroviral précoce pendant plusieurs années ont la capacité de contrôler le virus sur le long terme après l’arrêt du traitement. Cependant, les mécanismes permettant ce contrôle post-traitement ne sont pas entièrement élucidés. Pour la première fois, une équipe composée de chercheuses et chercheurs de l’Institut Pasteur, de l’Inserm et de l’AP-HP, avec le soutien de l’ANRS | Maladies infectieuses émergentes, a investigué et mis en évidence l’implication d’anticorps neutralisants, y compris ceux dits à large spectre, dans le contrôle du virus. Ces résultats clés sont publiés le 10 juillet 2023 dans la revue Cell Host & Microbe. Un essai clinique qui intègre l’utilisation d’anticorps neutralisants à large spectre devrait être initié en France avant fin 2023.
Connus sous le terme de ‘contrôleurs post-traitement’, de rares personnes porteuses du VIH-1 et ayant bénéficié d’un traitement précoce maintenu pendant plusieurs années ont la capacité de contrôler le virus sur le long terme à l’arrêt de leur traitement. Ces personnes ont été identifiées il y a plusieurs années grâce notamment à l’étude VISCONTI[1], la plus grande cohorte de personnes contrôleuses post-traitement à long terme. Les mécanismes de ce contrôle permettant une rémission durable de l’infection VIH-1 sans traitement antirétroviral ne sont pas entièrement élucidés mais l’identification de ces cas offre une opportunité unique de les comprendre plus précisément.
Une étude, menée par l’unité Immunologie humorale à l’Institut Pasteur dirigée par le Dr Hugo Mouquet, en collaboration avec l’équipe du Dr Asier Sáez-Cirión, directeur de l’unité Réservoirs viraux et contrôle immunitaire à l’Institut Pasteur, contribue aujourd’hui à décrire davantage ces mécanismes.
Comme l’explique Asier Saéz-Cirión, « En étudiant la réponse immunitaire des personnes contrôleuses post-traitement en 2020, nous avions fait un premier grand pas en démontrant la mise en place chez certains de ces individus d’une réponse immunitaire efficace et robuste contre le virus qui pourrait contribuer à ce contrôle[2]. Aujourd’hui, notre nouvelle étude fait encore progresser cette connaissance. En étudiant le rôle des anticorps chez un cas particulier de ‘contrôleur post-traitement’ présentant un taux particulièrement haut d’anticorps neutralisants à large spectre, nous avons découvert que la rémission était probablement possible grâce à l’intervention de ce type d’anticorps. »
Hugo Mouquet détaille cette découverte : « Notre étude a permis d’identifier pour la première fois une famille d’anticorps neutralisants à large spectre (broadly neutralizing antibodies – bNAbs), dont l’anticorps EPTC112, qui cible la protéine d’enveloppe du VIH-1, est un des représentants les plus actifs de cette famille. »
En effet, l’anticorps EPTC112 neutralise environ un tiers des 200 variants viraux du VIH-1[3] testés in vitro, et est capable d’induire l’élimination de cellules infectées en présence de cellules Natural Killer (NK), des cellules immunitaires chargées d’éliminer les cellules anormales de l’organisme.
Cette étude fournit donc des informations importantes sur la façon dont les anticorps neutralisants modifient le cours de l’infection par le VIH-1 chez cette personne de la cohorte VISCONTI. Bien que le virus du VIH-1 circulant chez ce sujet soit résistant à EPTC112 à cause de mutations dans la région ciblée par cet anticorps, il est par ailleurs efficacement neutralisé par d’autres anticorps de type IgG isolés du plasma sanguin. L’étude suggère donc que les anticorps neutralisants de la famille EPTC112 imposent une pression de sélection sur le virus du VIH-1. Bien qu’échappant à l’action de ces bNAbs, le virus reste sensible à la neutralisation par d’autres anticorps anti-VIH-1 produits chez cette personne. Cette observation témoigne ainsi d’une forme de coopération entre les différentes populations d’anticorps neutralisants.
« Le fait de pouvoir étudier ce cas particulier et de découvrir un lien entre la production d’anticorps neutralisants y compris à large spectre et le contrôle de la circulation du VIH-1 est enthousiasmant pour affiner la compréhension des mécanismes en jeu, notamment chez les personnes contrôleuses post-traitement avec des profils similaires. Nous aimerions en effet pouvoir étudier à court terme si les réponses anticorps chez d’autres ‘contrôleurs post-traitement’ participent aussi à la rémission durable de l’infection », explique Hugo Mouquet.
Cette découverte ouvre la voie vers l’établissement de nouvelles pistes de traitement contre le VIH-1, et nourrit les espoirs pour des approches thérapeutiques favorisant une rémission sans traitement antirétroviral grâce au rôle clé des anticorps neutralisant à large spectre.
A cet effet, un essai clinique qui intègre l’utilisation d’anticorps neutralisant à large spectre[4] devrait être initié en France avant fin 2023.
« Cet essai de phase II réalisé par le consortium ANRS RHIVIERA en partenariat entre l’Institut Pasteur, l’AP-HP, l’Inserm et l’université Rockefeller à New York consiste à étudier l’association d’un traitement antirétroviral en primo-infection avec deux anticorps neutralisants le VIH-1 contre placebo afin de déterminer si ces anticorps peuvent contribuer à établir une rémission virale après arrêt des antirétroviraux. Il est prévu d’intégrer 69 patients en phase de primo infection[5] du VIH-1 qui recevront d’abord un traitement antirétroviral sur une courte période puis le traitement à base d’anticorps neutralisants ciblant deux domaines différents de la protéine d’enveloppe du virus. Après un an de suivi rapproché et sur la base de critères précis, le traitement pourra être stoppé. Cet essai va nous permettre de déterminer si cette stratégie thérapeutique est capable d’induire une réponse immunitaire suffisante pour contrôler l’infection après l’arrêt du traitement antirétroviral » conclut Hugo Mouquet.

Fragments d’anticorps du bNAb EPCT112 découvert à l’Institut Pasteur par l’équipe d’Hugo Mouquet (bleu), formant ici un complexe avec la protéine d’enveloppe du VIH-1 (Env) (en jaune et orange) © Institut Pasteur
[1] VIH – Les anticorps des « contrôleurs post-traitement » (pasteur.fr)
[2] Transient viral exposure drives functionally coordinated humoral immune responses in HIV-1 post-treatment controllers study, Nature Communication, 11 avril 2022
[3] Il existe deux types de VIH, le VIH-1 et VIH-2 avec des différences moléculaires. Et au sein de ces deux types, il existe des variants en lien avec différentes mutations leur conférant des différences de transmissibilité, de virulence ou d’immunogénicité.
[4] https://rhiviera.com/project/anrs-rhiviera-02/
[5] Primo infection : phase précoce de l’infection par le VIH-1 durant laquelle la charge virale est importante. Le virus du VIH envahit l’organisme en s’attaquant au système immunitaire avec la destruction ses réservoirs de lymphocytes CD4.
DOCUMENT inserm LIEN |
|
|
|
|
 |
|
Décrypter la parole : un puzzle à deux pièces |
|
|
|
|
|
Décrypter la parole : un puzzle à deux pièces
22 Jan 2025 | Par Inserm (Salle de presse) | Neurosciences, sciences cognitives, neurologie, psychiatrie
Comment le langage est-il traité par le cerveau ? Quels mécanismes lui permettent d’extraire du sens à partir des sons émis par la parole ? C’est à ces questions que s’est intéressée une équipe de recherche de l’Inserm et d’Aix-Marseille Université, en collaboration avec l’université de Cambridge. Ses travaux montrent que, pour comprendre la parole, le cortex auditif humain suit simultanément deux rythmes essentiels : celui des syllabes (lent) et celui des phonèmes (rapide). Ils montrent également que ces rythmes caractérisent la parole à travers les langues, et qu’ils sont traités simultanément par les régions auditives du cerveau. Ces résultats, publiés dans Science Advances, ouvrent la voie à une meilleure compréhension du traitement du langage et des troubles qui y sont associés.
Lors d’une discussion, quels sont les mécanismes qui permettent au cerveau d’extraire et de reconstituer les informations données à partir du flux continu de parole ? Les sciences cognitives continuent encore aujourd’hui d’essayer de les décrypter.
Pour mieux les appréhender, elles nous invitent à imaginer la parole comme un puzzle. Les syllabes, telles que « ma » dans « maman », sont les grandes pièces, tandis que les phonèmes, les sons individuels qui composent les syllabes, comme « m » et « a », sont les petites pièces. Les grandes pièces (les syllabes) sont produites à un rythme lent et sont principalement reflétées par des variations de l’amplitude sonore (volume) du signal vocal au fil du temps. Les petites pièces (les phonèmes), quant à elles, surviennent à un rythme beaucoup plus rapide et se manifestent par des changements abrupts dans le contenu spectral[1] du signal vocal. Pour comprendre la parole et la « traduire » en mots isolés successifs, reconnaissables et porteurs de sens, le cerveau doit analyser ces deux types de pièces en même temps.
Une équipe de recherche menée par Benjamin Morillon, directeur de recherche Inserm, au sein de l’Institut de neurosciences des systèmes (Inserm/Aix-Marseille Université), s’est intéressée à ces mécanismes cérébraux de traitement du langage et à la façon dont le cerveau parvient à analyser les syllabes et les phonèmes pour reconstituer une information compréhensible à partir du signal sonore continu associé à la parole. Les scientifiques ont analysé l’activité cérébrale de 11 personnes (déjà porteuses, pour des raisons cliniques, d’électrodes qui enregistrent l’activité neuronale dans différentes régions du cerveau), durant l’écoute de 315 phrases en français, jouées à différentes vitesses et contenant un nombre fixe de mots, mais des nombres variés de syllabes et de phonèmes.
Leurs résultats montrent que dès le traitement du signal vocal par le cortex auditif (une région du cerveau chargée de traiter les sons), les rythmes lents des syllabes et les rythmes rapides des phonèmes sont suivis en parallèle par le cerveau. Cette capacité à détecter, isoler et décoder en simultané les 2 types de « pièces du puzzle » lui permet de segmenter le signal continu de parole.
En outre, en analysant la façon dont la parole est construite dans 17 langues différentes, les scientifiques ont constaté que, quel que soit le langage, le signal vocal présentait systématiquement les mêmes rythmes lents et rapides, assimilables à ceux des syllabes et des phonèmes.
« Cette universalité suggère l’existence d’un mécanisme biologique de production et de perception de la parole commun à tous les humains », indique ainsi Benjamin Morillon.
L’équipe de recherche espère que cette avancée permettra de mieux comprendre le processus complexe et fascinant du traitement de la parole et des troubles qui y sont associés.
« Ces découvertes ouvrent de nouvelles perspectives dans la compréhension des troubles du langage, comme la dyslexie, précise Benjamin Morillon. Un déficit dans la capacité du cerveau à suivre ces deux rythmes pourrait, par exemple, expliquer certaines difficultés de compréhension orale », conclut-il.
[1] Le contenu spectral du signal vocal pourrait se définir comme la « texture sonore » d’une voix ; il est ce qui rend chaque voix unique. Il se compose de trois caractéristiques : la fréquence de base, liée à la vibration des cordes vocales, qui détermine la hauteur du son (grave ou aigu), les harmoniques, qui sont des fréquences multiples de la fréquence de base et enrichissent le son, et enfin, les formants qui correspondent à des pics dans les harmoniques et qui sont liés aux résonnances des structures du tractus vocal comme la bouche, la gorge, la glotte, les cordes vocales ou encore les narines. L’anatomie de ces structures étant propre à chaque personne, elles font la spécificité d’une voix et des sons qu’elle émet.
DOCUMENT inserm LIEN |
|
|
|
|
 |
|
La rétinopathie diabétique altère l’horloge biologique centrale |
|
|
|
|
|
La rétinopathie diabétique altère l’horloge biologique centrale
* PUBLIÉ LE : 11/09/2014 TEMPS DE LECTURE : 3 MIN ACTUALITÉ, SCIENCE
Les animaux diabétiques ont une horloge biologique perturbée et adaptent plus difficilement leur comportement au degré de luminosité extérieur. Le phénomène en partie est lié à la dégénérescence de cellules de la rétine, entrainant une baisse de sensibilité à la lumière et une moins bonne resynchronisation de l’horloge centrale dans le cerveau. Il en est à priori de même chez l’Homme, ce qui pourrait expliquer de nombreux dysfonctionnements métaboliques associés au diabète.
Le diabète affecte le fonctionnement de l’horloge biologique, au moins chez les rongeurs. Des chercheurs Inserm* viennent de confirmer cette association et pointent du doigt le rôle de certaines cellules de la rétine qui transmettent le message lumineux jusqu’au cerveau. Dès lors, comment ne pas imaginer un phénomène identique chez l’Homme ? De nombreux patients se plaignent en effet de problèmes de sommeil et de troubles métaboliques souvent associés à des dérèglements de l’horloge biologique, comme des troubles digestifs et urinaires.
L’horloge biologique centrale, localisée dans les noyaux suprachiasmatiques régule la plupart des fonctions biologiques et comportementales sur un cycle de 24 heures : sommeil, cognition, digestion, humeur... Elle est synchronisée en permanence par différents facteurs, la lumière étant le plus puissant d’entre eux. Or, il se trouve qu’un diabète mal contrôlé finit par altérer la rétine, tissus où se trouvent les cellules qui transmettent au cerveau les messages relatifs à la lumière : les cellules ganglionnaires exprimant la mélanopsine.
Les chercheurs ont donc voulu savoir si ces cellules pouvaient entrainer une perturbation de l’horloge biologique chez des animaux diabétiques. « Nous avons utilisé des souris présentant un diabète de type 1 évoluant depuis 12 semaines pour modéliser un stade tardif de la maladie avec atteinte rétinienne et avons compté et étudié chez elles ces cellules particulières », explique Hasna Lahouaoui, co-auteur des travaux.
Un comportement déréglé
© Inserm/Lahouaoui, Hasna Rétine à plat de rétine de souris, montrant la répartition spatiale des cellules ganglionnaire à mélanopsine.
Au préalable, les chercheurs ont soumis ces animaux à des tests comportementaux en les exposant à différents degrés de luminosité et en leur imposant un décalage horaire de six heures en avance sur le rythme jour/nuit habituel. Ils ont alors constaté une réduction de l’activité locomotrice des animaux pendant la nuit alors qu’il s’agit d’une espèce nocturne. En outre, les souris commençaient à s’activer avant l’extinction de la lumière alors que des rongeurs sains attendent en général l’obscurité pour s’agiter. Ce phénomène était particulièrement marqué en cas de faible intensité lumineuse. Enfin, les animaux diabétiques ont eu beaucoup plus de mal à s’adapter au décalage horaire de six heures.
Dégénérescence cellulaire
Les auteurs ont ensuite étudié les cellules ganglionnaires exprimant la mélanopsine. Ils ont également mesuré le niveau d’expression de gènes de l’horloge biologique sensibles à la lumière ainsi que l’expression d’un gène c‑fos permettant de vérifier que le message lumineux était bien transmis au cerveau.
Il est apparu que 6 % des cellules ganglionnaires à mélanopsine présentaient des anomalies morphologiques. Les chercheurs ont également observé une diminution de l’expression des gènes de l’horloge biologique ainsi que de c‑fos, indiquant une perte de sensibilité des rongeurs à la lumière. « Ces résultats confirment non seulement la perturbation du rythme biologique en cas de diabète chez ces souris, mais aussi l’implication des cellules à mélanopsine. Néanmoins il ne s’agit probablement pas du seul facteur impliqué dans cette dérégulation. Le taux de glucose élevé chez les animaux pourrait également altérer l’horloge biologique via d’autres mécanismes comme cela a été suggéré par de précédents travaux », précise Ouria Dkhissi Benyahya, responsable de l’étude.
Un problème plus large
Tout porte à croire qu’un phénomène similaire pourrait survenir chez les humains diabétiques puisque leurs rétines sont également affectées après plusieurs années de maladie. Mais ce phénomène pourrait aussi concerner d’autres pathologies : « Toutes les pathologies rétiniennes entrainant la dégénérescence de cellules photoréceptrices, comme le glaucome et la DMLA, sont également susceptibles d’entrainer une perturbation de l’horloge biologique si on en croit ces travaux. Il serait pertinent d’interroger les patients souffrant de ce type d’affection au sujet d’éventuels troubles du sommeil ou métaboliques », suggère Ouria Dkhissi Benyahya.
En attendant, les chercheurs poursuivent leur étude, en espérant découvrir des cibles thérapeutiques qui permettraient de mieux réguler l’horloge biologique et, ainsi, de pallier au moins partiellement différents problèmes de sommeil, métaboliques ou encore de l’humeur.
Note
*unité 846 Inserm/ Université Claude Bernard Lyon 1, Institut cellule souche et cerveau, Lyon
Source
H Lahouaoui et coll. Clock Genes and Behavioral Responses to Light Are Altered in a Mouse Model of Diabetic Retinopathy. PLoS ONE 9(7): e101584. doi:10.1371/journal.pone.0101584
DOCUMENT inserm LIEN |
|
|
|
|
Page : [ 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25 26 27 28 29 30 31 32 33 34 35 36 37 38 39 40 41 42 43 44 45 46 47 48 49 50 51 52 53 54 55 56 57 58 59 60 61 62 63 64 65 66 67 68 69 70 71 72 73 74 75 76 77 78 79 80 81 82 83 84 85 86 87 88 89 90 91 92 93 94 95 96 97 98 99 ] - Suivante |
|
|
|
|
|
|