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EMPIRE BYZANTIN

 


Empire byzantin


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Empire byzantin [histoire]
Empire byzantin [art et architecture]
Empire byzantin [littérature]
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Constantinople
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Justinien Ier
orthodoxie
Grand schisme d'Orient
.
L’héritage
La littérature byzantine représente moins une rupture avec l'hellénisme qu'une continuation avec des apports nouveaux. Sans doute la production ne demeure-t-elle pas égale, mais la littérature byzantine est la preuve de la permanence de l'intellectualité dans le monde hellénique ; elle constitue aussi l'une des grandes littératures de l'Europe médiévale, la première apparue, qui vaut tant pour elle-même que pour les relations de pensée entre les pays de culture et de langues différentes dont se compose le Moyen Âge.
La littérature byzantine, tout d'abord, est l'héritière de la tradition grecque antique. L'empire de Constantinople, s'il est politiquement issu de Rome, est grec de sentiment et d'intellectualité. La continuité de la langue donne aux Byzantins accès aux œuvres anciennes, dont ils font la base de l'éducation.
Par ailleurs, la civilisation byzantine est tout imprégnée de christianisme, ce qu'elle doit à la littérature grecque chrétienne des quatre premiers siècles de notre ère, qui a contribué à diffuser et à formuler le message et les dogmes de la nouvelle religion. Les Byzantins, passionnés de religiosité, épris tantôt de mystique, tantôt de raisonnement, sont parvenus à identifier hellénisme et christianisme, et à considérer le christianisme comme un fait spécifiquement grec.
L'attachement des lettres byzantines à la double tradition antique et chrétienne a eu sur l'expression linguistique une importante conséquence, encore sensible aujourd'hui : la recherche de l'archaïsme dans l'écriture littéraire, à des degrés variables, corroborée par les usages savants de la langue des institutions.
De l'hellénisme au byzantinisme (ive et ve s.)
image: http://www.larousse.fr/encyclopedie/data/images/1008548-Saint_Gr%c3%a9goire_de_Nazianze.jpg
Saint Grégoire de Nazianze
Saint Grégoire de Nazianze
Trois traits caractérisent la période couvrant les ive et ve s., qu'on peut qualifier de prébyzantine. La culture se répartit entre plusieurs centres : à côté de Constantinople, il y a la Grèce continentale (avec Athènes et Thessalonique), l'Égypte et l'Asie Mineure (notamment la Syrie, la Palestine, la Cappadoce). En outre, le latin est encore langue officielle : la concurrence du grec n'aboutira que deux siècles plus tard à une complète hellénisation. Enfin, la production littéraire présente parallèlement une double inspiration : païenne et chrétienne ; la première prolonge la pensée antique en un ultime éclat par la philosophie, la rhétorique, l'histoire, la poésie, le roman ; la seconde, remarquable surtout au ive s. avec les auteurs sacrés (les Cappadociens Basile de Césarée, Grégoire de Nazianze et Grégoire de Nysse, Jean Chrysostome d'Antioche), va réaliser progressivement la fusion du christianisme et de l'hellénisme en pénétrant peu à peu dans les genres littéraires profanes.
La philosophie ne se sépare pas de la théologie. Elle lutte contre les doctrines païennes, mais elle se trouve engagée, sur son propre dogme, dans un conflit au sujet de la personne du Christ. L'école d'Antioche insiste sur sa nature humaine, celle d'Alexandrie sur sa nature divine. Chacune de ces thèses a son défenseur : Nestorius (Homélies, traité du Théopaschite) donne son nom au nestorianisme, doctrine d'Antioche que condamne le concile d'Éphèse ; tandis que Cyrille d'Alexandrie (vers 376/380-444), lui-même inquiété pour ses idées, se réhabilite en défendant le christianisme contre les idées de Julien l'Apostat (331-363) et contre les hérésies (Catéchèses). Par ailleurs, à la violence des affrontements doctrinaux s'oppose une théologie plus édifiante, tournée vers la spiritualité et l'ascèse avec Palladios le Galate (vers 363-vers 431) [Histoire lausiaque] et Marc l'Ermite (Sur la loi spirituelle).
L'historiographie, qu'avait créée et illustrée Eusèbe de Césarée (vers 265-340), retrouve sa faveur auprès d'érudits tels que Socrate et Sozomène, qui continuent l'histoire ecclésiastique. Théodoret de Cyr, historien de l'Église pour la période de 323 à 429, est également historien des idées quand il étudie les hérésies et quand il compare les thèses des écoles helléniques et des écoles chrétiennes au profit de ces dernières.
La littérature de caractère sentimental fait son apparition dans la production chrétienne. Le roman, issu de l'épopée et du roman païen, vient s'ajouter à la littérature des idées et des événements, et faire diversion avec elle. Le récit en vers de l'impératrice Athénaïs Eudoxie (?-460) [Cyprien d'Antioche] est le premier « roman chrétien » : l'atmosphère du roman profane cède devant une vision de l'univers sensible à la nature humaine.
Le théâtre a longtemps continué les mimes romains, mais il n'en reste rien. Au contraire, le théâtre savant a servi à la propagande et aux polémiques théologiques. La manifestation la plus célèbre est le Christ souffrant, récit de la Passion avec dialogues et chœurs, dont les parties lyriques inspirèrent les mélodes.
À la fin du ve s., la pensée byzantine est déjà fortement élaborée. L'esprit théologique règne sur l'ensemble de l'activité intellectuelle. Si le paganisme se maintient encore, le christianisme s'efforce de l'éliminer et de conquérir toutes ses positions.
Première réalisation de la pensée byzantine (vie-xe s.)
Introduction
C'est à partir du moment où Constantinople exerce une action centralisatrice en tous domaines dans l'Empire que triomphe le « byzantinisme ». L'activité créatrice s'ordonne selon une certaine hiérarchie, au sommet de laquelle se situent les genres qui traitent des concepts théologiques et philosophiques ; viennent ensuite ceux qui ont trait à la vie religieuse dans le comportement humain ; enfin les genres profanes font diversion à l'austérité des précédents.
La pensée païenne cède définitivement devant le christianisme, que soutient l'Empire et dont il est lui-même le soutien (fermeture par Justinien des écoles philosophiques d'Athènes en 529). La vie intellectuelle se concentre dans la capitale. La production se manifeste d'abord avec éclat, se stabilise pendant deux siècles, pour connaître une nouvelle renaissance à la fin de la période.
Le vie s.
La littérature religieuse, abondante, atteste trois formes. Doctrinale (contre les hérésies nestorienne ou monophysite), elle trouve en Léontios de Byzance (vers 485-vers 542) un grand théologien, qui, par l'alliance du platonisme et de l'aristotélisme, fonde véritablement la scolastique byzantine. Un courant ascétique se développe dans le même temps : mysticisme populaire d'un Johannes Moschos (?-619) [le Pré spirituel], d'une part, mysticisme élevé, de l'autre, avec Jean Climaque (vers 579-vers 649) [l'Échelle spirituelle]. Cette création de prose est complétée par la haute poésie des mélodes, dont le plus célèbre est Romanos (ou Rhômanos) auquel on doit une riche production hymnographique.
La chronique et l'histoire rattachent à l'univers chrétien le monde profane pénétré de religiosité. Si les historiens religieux (Théodore le Lecteur, Evagre) ne font guère que continuer l'œuvre de leurs prédécesseurs en étudiant l'histoire ecclésiastique, les historiens profanes sont plus variés et originaux. Jean le Lydien (essai sur les Magistratures) et surtout Procope de Césarée (?-vers 562) [Histoire des guerres, Traité des édifices, Histoire secrète] sont les figures les plus attachantes de cette époque. La chronique est plus spécialement représentée par Hésychius de Milet et Jean Malalas. Voyageurs et géographes (tels Cosmas Indikopleustês, l'Exploration des mers indiennes) complètent l'œuvre historique.
Les viie et viiie s.
Les viie et viiie s. consolident les résultats de la production du siècle précédent malgré les difficultés qu'éprouve l'Empire à l'extérieur (recul devant les assauts étrangers) et à l'intérieur (crises religieuses du monothélisme et de l'iconoclasme).
Dans la production religieuse, l'orthodoxie a des défenseurs en Maxime le Confesseur (vers 580-662), mystique autant que philosophe, et en Anastase le Sinaïte, plus nettement scolastique. L'hagiographie est représentée par Léontios de Néapolis, et l'hymnographie par André de Damas, archevêque de Crète. L'iconoclasme est combattu par le patriarche Nicéphore (vers 748-829) et par Théodore le Stoudite (759-826). Mais c'est en Jean Damascène (?-vers 749) que la théologie byzantine trouve sa plus complète expression : philosophe (Source de la connaissance, Sur la doctrine orthodoxe) autant que poète (Hymnes, Canons, Nativité), il est avant le schisme le théologien de l'Orient que l'Occident ne reniera pas.
Dans la production profane, très imprégnée de religiosité, la chronique l'emporte sur l'histoire. Georges de Pisidie met en vers la Genèse, de même qu'il raconte sous forme d'épopée les expéditions de l'empereur Héraclius. Une poétesse, Cassia (ou Kassia), écrit des hymnes et des épigrammes. Le roman de Barlaam et Josaphat atteste des influences orientales par le goût du merveilleux et l'attrait du bouddhisme.
Les ixe et xe s.
Au redressement de la politique impériale correspond un renouveau des lettres aux ixe et xe s. Le goût de l'humanisme antique donne lieu à une véritable renaissance. Mais l'érudition et le culte des œuvres du passé ne se dressent pas contre le christianisme. Ainsi le patriarche Photios (vers 820-vers 895), esprit encyclopédique, qui crée en quelque sorte la critique littéraire dans son Myriobiblion (vaste compte rendu de ses lectures), reste le théologien orthodoxe, et incite à la rupture avec l'Occident romain : il contribue à former la conscience nationale dans l'Empire byzantin.
Nombreux sont les chroniqueurs. Érudits, ils édifient une philosophie de l'histoire – fait nouveau –, comme Théophane le Confesseur (vers 758-vers 818), soucieux de l'unité impériale et des principes capables de l'assurer, ou comme Georges le Moine (ou Hamartole), qui voit dans le pouvoir impérial une manifestation de la Providence.
Le goût de l'érudition, développé au xe s., est encouragé par les empereurs, souvent eux-mêmes écrivains et auteurs de traités (Léon VI le Sage, Nicéphore Phokas, Basile II). La philologie est illustrée par Suidas, auteur d'un précieux Lexique. Syméon le Métaphraste dresse une collection des Vies de saints. Constantin Képhalas compose l'Anthologie (dite Palatine) des meilleurs poèmes païens et chrétiens. Jean Cyriotis, tout en faisant œuvre d'érudit, est aussi poète et hymnographe, ce qui montre la diversité des créations chez un même esprit. De même, chroniqueurs et historiens sont volontiers théologiens ou moralistes : Syméon le Métaphraste, Théodore de Mélitène, Coméniatis, Léon le Diacre. L'œuvre de Constantin VII Porphyrogénète (905-959) présente le tableau le plus complet de l'époque du point de vue des coutumes, des institutions et de la civilisation (De l'administration de l'Empire et le Livre des cérémonies).
Les événements extérieurs, notamment la menace de l'islam, inspirent la poésie. Le xe s. voit le début des chants populaires, qui vont se répandre peu à peu sur tout le territoire hellénique. Un cycle épique se constitue autour du héros Digénis Akritas, dont il est fait un symbole ; par là, l'actualité rejoint la tradition, et le champ de la poésie s'étend de la production populaire orale à la littérature écrite et aux genres élevés.
C'est au xe s. également que se reconstitue le théâtre populaire de la liturgie. Les thèmes de la Vierge et du Christ donnent lieu à des jeux dramatiques célébrés dans les églises à l'occasion des grandes fêtes. La tradition s'est prolongée jusqu'au xve s. Mais le théâtre byzantin est demeuré religieux, au rebours du théâtre antique ou du théâtre occidental.
Nouvelle renaissance des lettres byzantines (xie-xve s.)
Introduction
Le relâchement provisoire de l'autorité impériale ainsi que les menaces extérieures permettent un développement de la pensée libre dans les lettres, alors que domine la philosophie platonicienne. Le redressement dû à la politique des Comnènes favorise une renaissance des lettres par un regroupement des activités, que suit une décentralisation, à laquelle succède une tendance contraire qui marque un dernier éclat avant la chute de l’Empire byzantin.
Les xie et xiie s.
Le schisme du xie s. a rendu définitive la rupture entre l’Orient chrétien (Constantinople) et l'Occident chrétien (Rome) : l'orthodoxie est devenue un élément national de l’Empire byzantin. Toutefois, l'humanisme tempère parfois la rigueur des positions théologiques.
Trois courants de pensée se développent parallèlement. L'un, plus philosophique que proprement théologique, pénétré de rationalisme, est représenté par Michel Psellos (1018-1078), prodigieux érudit à l'œuvre immense (Chronographie, Lettres, Démonologie). À ce mouvement s'oppose le mysticisme de Syméon le Nouveau Théologien, auteur des Amours des hymnes divines, traité d'ascèse spirituelle et de contemplation. Un troisième courant, moralisateur, ramène au réalisme et à l'action avec Kékavménos (Stratêgikon), qui définit la conduite du citoyen et du soldat défenseur de Constantinople.
L'avènement des Comnènes restaure l'autorité impériale, qui reprend le contrôle des activités littéraires : l'orthodoxie, protégée des hérésies des Bogomiles et des Pauliciens, s'accommode d'un humanisme qui ne la heurte pas systématiquement.
La philosophie a des défenseurs, par exemple en la personne de Jean Italos, néoplatonicien, et d'Eustratios de Nicée (vers 1050-vers 1120), plus aristotélicien. Elle suscite, par ailleurs, des réactions chez des mystiques comme Nicétas Stéthatos (le Paradis intelligible) et Callistos Cataphigiotis (Chapitres sur la vie contemplative), et chez des moralistes comme Théophylacte (Institution royale) ou Eustache de Thessalonique (De la simulation, étude des caractères humains).
L'historiographie compte de grands écrivains. Anne Comnène, fille de l'empereur Alexis, écrit la chronique du règne de ce souverain (Alexiade). Michel Choniate (1140-vers 1220) défend dans ses Discours les droits de l'hellénisme. Son frère Nicétas rédige l'Histoire de Byzance au xiie s. Le pessimisme apparaît chez les historiens qui pressentent la fin de l'Empire (Eustache de Thessalonique, Jean Tzetzès), cependant que Jean Zonaras (?-vers 1130), Constantin Manassès (1143-1181), Glykas (?-vers 1204) restent fidèles à la chronique universelle plus ou moins officielle.
L'esprit satirique trouve sa place, à côté des grands genres, dans les Poèmes de Théodore Prodrome (1115-1166), type du poète de cour solliciteur et malheureux.
La littérature d'imagination donne naissance, d'une part, au roman courtois (Hysmine et Hysménias d'Eumathe Macrembolitos, Drosilla et Charichlès d'Eugénianos) et, de l'autre, aux adaptations de légendes indiennes ou persanes (Syntipas, Stéphanitis et Ichnélatis).
Le xiiie s.
La prise de Constantinople par les croisés (1204) a pour conséquence une décentralisation politique et littéraire.
Dans l'État de Nicée, la tradition philosophique se poursuit avec Nicéphore Blemmydès (1197-1272), conciliateur de Platon et d'Aristote, moraliste et éducateur. Deux de ses disciples sont des humanistes historiens et philosophes : Georges Acropolite (1217-1282) et Théodore II Lascaris (1222-1258).
À l'époque des croisades appartiennent les romans en vers de caractère chevaleresque (Belthandros et Chrysantza, Callimaque et Chrysorrhoe), qui complètent la production érudite.
À Trébizonde se crée au xiiie s. un centre culturel, au milieu des activités pratiques et commerciales de cette province. Mistra, dans le Péloponnèse, est un centre d'humanisme. En Épire, l'orthodoxie antilatine est défendue par Alexis Apokaukos (?-1345), Bardanès, Chomatène. Néanmoins, certains théologiens tentent un rapprochement avec le christianisme romain, d'où deux conceptions qui partagent la pensée hellénique.
Fin du xiiie-xve s.
La reprise de Constantinople aux croisés, de même que les efforts des Paléologues n'empêchent pas l'Empire byzantin de s'acheminer vers sa ruine (effective en 1453). La littérature, pourtant, demeure riche et atteste la diversité des courants de pensée qui, depuis longtemps, s'opposent.
Une renaissance littéraire est préparée par deux grands esprits, érudits historiens et philosophes : Georges Pachymère (vers 1242-vers 1310), hostile aux Latins, et Maximos Planude (vers 1260-1310), favorable à un rapprochement entre la pensée occidentale et celle de l'Orient. Cette opposition se poursuit au xive s. chez les disciples de ces penseurs, Théodore Métochite (1260-1332), quasi nationaliste, et Mélitèniotis, universaliste.
La crise religieuse de l'hésychasme vient diviser encore la pensée théologique : Grégoire Palamas (vers 1296-1359), dans ses Oraisons, et Cavasilas préconisent le mysticisme pur, que combattent Barlaam et Démétrios Cydonès (vers 1324-vers 1400).
L'hostilité aux Latins s'exprime chez Georges Gémiste Pléthon (vers 1355-vers 1450), tandis que le rapprochement est tenté par Gennadios (Georges Scholarios, vers 1405-après 1472) et Jean Bessarion (vers 1402-vers 1472).
L'histoire compte de grands écrivains : Jean VI Cantacuzène (Mémoires), Calliste Xanthopoulos (?-vers 1335) [Histoire de l'Église]. Jean Cananos (ou Kananos) et Jean Anagnotès décrivent les sièges de Constantinople en 1422 et de Thessalonique en 1430. L'Histoire de Romanie, de Nicéphore Grégoras (1296-1360), traduit la détresse de l'Empire. Doukas décrit la fin de l'Empire jusqu'en 1462, et Georges Phrantzês (1401-1478), après 1453, se lamente sur la chute de Constantinople.
Les contacts entre l’Empire byzantin et l'Occident ont favorisé les œuvres d'imagination et d'épopée : la Chronique de Morée tient de l'histoire et montre l'interpénétration de deux cultures. Ce caractère se retrouve dans le roman de Lybistros et Rhodamné. Mais les chansons populaires contemporaines vont répandre et vulgariser les thèmes de la production savante, et préparer l'avènement du lyrisme dans la poésie nationale quelques siècles plus tard.
La littérature byzantine ne disparaît pas avec l’Empire byzantin. Son héritage sera recueilli et préservera l'hellénisme sous la domination ottomane, en attendant l'indépendance. Elle reste indispensable à la connaissance du monde grec, dont elle constitue un élément original, ainsi qu'aux rapports de l'hellénisme avec l'Occident et l'Orient.

 

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ISRAËL - HISTOIRE

 

Israël : histoire

1. L'évolution de la vie politique

1.1. Les fondements de l'État d'Israël

Le 14 mai 1948, conformément à la résolution de l'assemblée générale de l'ONU en date du 29 novembre 1947, David Ben Gourion proclame l'indépendance de l'État d'Israël (« Medinat Israel ») et devient Premier ministre. Le nouvel État doit immédiatement faire face à l'offensive de cinq armées arabes (Égypte, Transjordanie, Iraq, Syrie, Liban) qui viennent prêter main-forte aux Arabes de Palestine, militairement défaits. La guerre s'achève par la victoire d'Israël, mais engendre un nouveau problème humanitaire et politique, celui des réfugiés palestiniens.
Si l'année 1948 marque l'accession à la souveraineté d'un nouvel État, elle constitue à bien des égards la consécration d'une réalité sociopolitique qui a pris progressivement corps dans la première moitié du siècle. Les pionniers juifs qui arrivent de Russie dès 1904 jettent en effet les premières bases d'une société juive indépendante (villages coopératifs, partis politiques, union agricole, organisation paramilitaire d'autodéfense). Ces débuts modestes connaissent d'importants développements après l'instauration du mandat britannique sur la Palestine en 1920.
Pour en savoir plus, voir l'article Palestine.
Le rôle de la Histadrout
La Histadrout (Fédération générale des travailleurs d'Eretz Israel) est, dès le départ, bien plus qu'un simple syndicat : elle agit aussi comme entrepreneur (coopératives, entreprises, kibboutzim, mochavim), pourvoyeur de soins (par l'intermédiaire de la Koupat Holim, Caisse d'assurance maladie) et « agence culturelle » (gestion jusqu'en 1951 des écoles du courant ouvrier, d'associations sportives et culturelles, de maisons d'édition, de journaux…). Elle contrôle également à l'origine la Haganah, l'embryon d'armée juive, qui s'étoffera progressivement jusqu'à rassembler 45 000 hommes en 1947.
L'Agence juive
Si la Histadrout est le véritable instrument de consolidation du sionisme, la communauté juive de Palestine (yichouv) dispose également de véritables organismes « paragouvernementaux ». Le plus important est l'Agence juive qui, dirigée par Ben Gourion à partir de 1935, fonctionne comme le gouvernement officieux des Juifs de Palestine et de la diaspora qui se reconnaissent dans le projet sioniste.
 L'Assemblée des élus et le Conseil national
Deux autres instances spécialisées représentent les seuls Juifs de Palestine : l'Assemblée des élus (Asefat ha-Nivharim) et le Conseil national (Vaad Leoumi). La première est un « Parlement des Juifs de Palestine », qui préfigure la Knesset, et permet d'organiser la vie politique naissante autour de quatre courants : le bloc socialiste, qui voit régulièrement croître son audience, les sionistes généraux (libéraux centristes), les révisionnistes (droite conservatrice), les sionistes religieux. Quant au Conseil national, émanant de l'Assemblée des élus, il constitue un organe essentiellement administratif s'occupant de l'acquisition des terres, de l'éducation, de la santé, des affaires sociales…
La prééminence du sionisme socialiste
Toute cette infrastructure institutionnelle encadre une communauté juive qui s'est renforcée démographiquement durant l'entre-deux-guerres du fait de l'immigration, passant de 56 000 en 1918 à 550 000 en 1945 (durant la même période, la population arabe passe de 600 000 à 1,2 million).
La déclaration d'indépendance en 1948 marque un tournant, mais, à bien des égards, elle constitue aussi l'aboutissement de l'entreprise de consolidation nationale menée depuis un demi-siècle. Les représentants du sionisme socialiste, qui dominent l'appareil du mouvement sioniste et les institutions du yichouv depuis les années 1930, vont conserver cette suprématie jusqu'aux élections de mai 1977 – où, pour la première fois, l'opposition de droite accède au pouvoir.
1.2. La domination de la gauche travailliste (1948-1977)

L'ère Ben Gourion (1948-1963)
Israël et les territoires occupésIsraël et les territoires occupés
Cette longue période est d'abord marquée, de 1948 à 1963, par l'« ère de Ben Gourion », dont le parti Mapai (travailliste) rassemble en moyenne 35 % des voix. Toutefois, bien que dominant, le « parti des travailleurs d'Eretz Israel » est obligé de s'allier à d'autres formations pour constituer une majorité gouvernementale. Ce recours aux coalitions est lié au mode de scrutin. Les 120 députés de la Knesset sont en effet élus tous les quatre ans, par listes, à la proportionnelle intégrale (pour être représenté, il suffit d'obtenir 1,5 % des suffrages exprimés). Aucun parti n'est donc en mesure de bénéficier à lui seul de la majorité des sièges et, pour former le gouvernement – auquel appartient le véritable pouvoir exécutif –, les alliances politiques s'avèrent indispensables.
Jusqu'en 1955, le Mapai s'est appuyé sur les sionistes généraux et les partis religieux (dont les exigences seront à l'origine de nombreuses crises gouvernementales). Par la suite, il entrera dans une alliance de plus en plus étroite avec les autres formations de gauche, Ahdout ha-Avodah (centré autour de la fédération de kibboutzim ha-Kibboutz ha-Mehouhad) et Mapam (formation marxisante centrée autour d'une autre fédération de kibboutzim, ha-Kibboutz ha-Artzi).
À l'intérieur de son parti, Ben Gourion, qui n'accepte pas facilement d'être contesté, doit faire face à des divergences d'opinion avec son ministre des Affaires étrangères, Moshe Sharett, favorable à une attitude plus modérée vis-à-vis des pays arabes. Cela le conduit à une première retraite politique (décembre 1953-février 1955) au cours de laquelle il ne cesse de réclamer une politique plus offensive envers l'Égypte nassérienne qui se fait le héraut du nationalisme arabe. La détérioration du climat politique en Israël, consécutive à « l'affaire Lavon » (du nom du ministre de la Défense israélien compromis dans une série d'attentats anti-américains commis en Égypte dans le but de provoquer une crise entre Washington et Le Caire), favorise son retour au pouvoir et lui permet de lancer, en coopération avec la France et la Grande-Bretagne, la campagne de Suez contre l'Égypte (→ canal de Suez, octobre 1956).


Shimon Peres

De nouveaux rebondissements dans l'affaire Lavon, à partir de 1960, conduisent finalement Ben Gourion à la démission (juin 1963). Sa tentative pour se doter d'une nouvelle base politique – il constitue en 1965 un nouveau groupement, le Rafi, avec de jeunes partisans comme Moshe Dayan et Shimon Peres – sera un échec. En 1968, le Rafi rejoint Ahdout ha-Avodah et le Mapai pour constituer le parti travailliste israélien (PTI).
Levi Eshkol (1963-1969) et Golda Meir (1969-1974)
Le successeur de Ben Gourion, Levi Eshkol, n'infléchit guère la ligne politique générale. La montée de la tension régionale en mai 1967 le pousse à nommer le général M. Dayan ministre de la Défense et à former un gouvernement d'union nationale où siège, pour la première fois, Menahem Begin, le leader du Gahal, un bloc de droite regroupant la droite conservatrice (Herout) et le parti libéral.

Golda Meir
Ce gouvernement bipartisan continuera à fonctionner jusqu'à l'été 1970 sous la direction de Golda Meir, nommée Premier ministre à la mort de L. Eshkol (février 1969). Celle-ci maintient difficilement l'unité du parti travailliste, traversé par des luttes sévères entre Yigal Allon et Abba Ebban d'un côté, Shimon Peres et Moshe Dayan de l'autre. De plus, elle doit faire face à un mécontentement grandissant des Séfarades, qui dénoncent les discriminations sociales dont ils sont l'objet.
Enfin, la guerre d'usure entre l'Égypte et Israël, le long du canal de Suez, entretient une tension régionale persistante qui conduit d'ailleurs à l'éclatement de la quatrième guerre israélo-arabe, en octobre 1973 (guerre du Kippour). La victoire à l'arraché obtenue par Israël engendre une grave crise de confiance qui pousse Golda Meir à démissionner en avril 1974, après des élections législatives au cours desquelles le crédit des travaillistes a été largement entamé, alors que le bloc de droite, appelé désormais Likoud, gagne du terrain.
Yitzhak Rabin (1974-1977)
Yitzhak Rabin
Les années 1974-1977, où le Premier ministre, Yitzhak Rabin, doit faire face à une opposition de droite de plus en plus virulente (y compris dans les colonies juives de Cisjordanie), sont également marquées par une rivalité grandissante entre celui-ci et son ministre de la Défense, S. Peres, pour le leadership du parti. Cette décomposition interne contribue à la victoire du Likoud, en mai 1977. En obtenant 43 sièges contre 32 à l'Alignement travailliste (PTI et Mapam), le Likoud de M. Begin met fin à l'hégémonie du sionisme socialiste et intègre définitivement le camp nationaliste de droite dans le jeu politique israélien.
1.3. Alternances politiques (1977-2000)

Menahem Begin (1977-1983)

Le Likoud doit avant tout son succès au « second Israël », ces couches populaires séfarades qui se considèrent comme des laissés-pour-compte de l'État travailliste. Le changement de gouvernement entraîne une série de conséquences : multiplication des implantations juives en Cisjordanie et à Gaza au nom de l'édification du « Grand Israël » (de la Méditerranée au Jourdain), libéralisation de l'économie, qui accroît la liberté de mouvement des capitaux mais produit aussi un emballement de l'inflation (160 % en 1983)… Le grand succès de l'ère Begin reste la paix avec l'Égypte (mars 1979), conclue grâce à l'entremise américaine (→ accords de Camp David) ; son échec le plus sérieux est la guerre du Liban, déclenchée en juin 1982, qui n'atteint aucun de ses objectifs (reconstruction d'un État libanais fort, marginalisation de la Syrie, élimination de l'Organisation de libération de la Palestine [OLP] comme acteur politique).
Yitzhak Shamir (1983-1992)

Lorsque M. Begin passe la main à Y. Shamir (août 1983), le pays est dans une situation assez médiocre. Isolé sur le plan diplomatique pour son engagement au Liban et son refus de dialoguer avec l'OLP, en proie à des difficultés économiques (inflation, grèves…), le gouvernement finit par tomber, mais les élections de juillet 1984, loin de dégager une majorité cohérente, donnent un poids parlementaire quasiment équivalent à la gauche et à la droite et contraignent le PTI et le Likoud à constituer un gouvernement d'union nationale. Ce dernier procède en 1985 au retrait de l'armée israélienne du Liban (à l'exception d'une zone dite de sécurité, au sud du pays) et stabilise l'économie nationale.

Campagne électorale, Israël, 1992Campagne électorale, Israël, 1992
L'élection, en novembre 1988, d'une nouvelle chambre ingouvernable (droite : 47 députés ; gauche sioniste : 49 ; partis religieux : 18) entraîne de nouveau la formation d'un gouvernement d'union nationale, dirigé par Y. Shamir. Miné par des rivalités internes, le gouvernement se trouve rapidement paralysé, alors même qu'Israël est confronté à un soulèvement populaire de grande ampleur (Intifada) dans les territoires occupés depuis 1967 en Cisjordanie et à Gaza. Après une ultime crise, l'union nationale se brise en mars 1990, permettant à Y. Shamir de constituer une coalition de droite qui va diriger les affaires du pays jusqu'en juin 1992, date à laquelle le parti travailliste reprendra le pouvoir.
Pour en savoir plus, voir l'article Question palestinienne.
Yitzhak Rabin (1992-1995), Shimon Peres (1995-1996)

L'accord de Washington, 1993

La victoire du PTI sous la conduite de Yitzhak Rabin n'est pas la réédition – inversée – du triomphe électoral du Likoud en 1977. Il s'agit en effet davantage d'un vote sanction contre le Likoud pour ses échecs internes (mauvais résultats économiques, absorption imparfaite des immigrants russes) que d'un vote d'adhésion au PTI, même si le nouveau Premier ministre, leader respecté et pragmatique, paraît plus convaincant que son adversaire. Rabin place la question de la paix au premier rang de ses priorités.
En étroite collaboration avec son ministre des Affaires étrangères, Shimon Peres, il imprime à la diplomatie israélienne un tournant radical en concluant avec l'ennemi d'hier, l'OLP, lors de négociations secrètes menées à Oslo, une déclaration de principes (13 septembre 1993) qui dresse les contours d'un règlement définitif du conflit israélo-palestinien (→ accords de Washington.) Cette décision courageuse suscite des critiques véhémentes de la droite et des oppositions de plus en plus vives de certains secteurs de la société israélienne (en particulier parmi les sionistes religieux). L'hostilité au gouvernement croît d'autant plus que le processus de négociations avec les Palestiniens s'accompagne d'une montée de la violence (massacre de musulmans à Hébron par un colon juif ultranationaliste, attentats suicides du mouvement islamiste Hamas).
Dans ce climat de plus en plus tendu, l'irréparable se produit : le 4 novembre 1995, Y. Rabin est assassiné à Tel-Aviv par un ultranationaliste juif. Ce meurtre, qui traumatise les Israéliens, souligne combien la fracture est profonde entre partisans et adversaires du processus de paix. L'héritier politique de Y. Rabin, S. Peres, qui le remplace comme Premier ministre, bénéficie d'un crédit politique de courte durée. En février-mars 1996, cinq attentats islamistes extrêmement meurtriers permettent à la droite, d'abord discréditée par ses outrances verbales, de retrouver une audience plus large.
Benyamin Netanyahou (1996-1999)
Après une lutte très serrée, le candidat de la droite, Benyamin Netanyahou, remporte les premières élections directes au suffrage universel en mai et devient Premier ministre. Il parvient sans mal à constituer un gouvernement avec l'appui des formations religieuses et des partis de centre droit. Tout en ne rejetant pas explicitement les accords de Washington, le nouveau Premier ministre en donne toutefois une interprétation rigide qui ralentit considérablement le rythme des négociations, alors qu'il relance parallèlement la colonisation en Cisjordanie et à Jérusalem.
Soumis à une forte pression américaine, il finit cependant par signer, en octobre 1998, avec Yasser Arafat un mémorandum destiné à relancer le processus de paix (accord de Wye River [ou Wye Plantation]). Abandonné progressivement par ses amis politiques, opposés aux accords, et condamné par la gauche qui lui reproche d'avoir bloqué l'application de ces derniers, B. Netanyahou ne parvient pas à s'opposer au vote du Parlement en faveur d'élections générales anticipées (fin décembre). Victime de ses contradictions, il est ainsi contraint d'écourter le terme de son mandat, prévu initialement en 2001.
Ehoud Barak (1999-2001)

Ce scrutin, organisé en mai 1999, permet le retour des travaillistes au pouvoir : Ehoud Barak est élu Premier ministre (56,1 % des suffrages), succédant à B. Netanyahou (43,9 %). Cette large victoire tend à démontrer le renforcement des idées centristes, mais le résultat des élections législatives relativise cette première impression : d'abord, la fragmentation de la Knesset, qui compte désormais quinze formations politiques ; ensuite, le renforcement des tendances centrifuges qui fissurent la société israélienne (poussée des partis religieux et de ceux qui revendiquent ouvertement la laïcité).
Au terme de longues tractations, E. Barak parvient à former un gouvernement, qui lui donne une large majorité à la Knesset ; il se caractérise notamment par la participation du Shas, le parti orthodoxe séfarade, qui obtient quatre postes ministériels. Investi officiellement le 7 juillet, E. Barak réaffirme sa détermination à mettre fin au conflit israélo-arabe. Trois principaux dossiers sont à l'ordre du jour : la reprise des négociations de paix avec les Palestiniens, la normalisation des relations israélo-syriennes et le départ des troupes israéliennes du Liban.
Les négociations avec les Palestiniens reprennent en juillet 1999 et une version révisée de l'accord de Wye River est signée à Charm el-Cheikh (Égypte), par E. Barak et Y. Arafat, le 4 septembre. Mais les hésitations des négociateurs à s'engager de façon irrévocable retardent le processus qui devrait conduire à un accord de paix définitif, accord qui se prononcera, entre autres, sur le statut des territoires palestiniens.
La normalisation des relations israélo-syriennes s'avère beaucoup plus difficile que prévu, puisque les différentes rencontres initiées en décembre 1999 se soldent par un premier constat d'échec (mars 2000). Pourtant, dans la foulée, Israël annonce unilatéralement le retrait en juillet de ses troupes du Liban-Sud, finalement exécuté en mai avec plus d'un mois d'avance sur la date préalablement fixée. En arrière-plan à ces difficiles négociations, E. Barak lutte sans relâche pour conserver une coalition gouvernementale particulièrement hétéroclite. En juin 2000, les ministres du Meretz (gauche laïque) démissionnent ; ils sont suivis en juillet par les ministres de trois autres formations.
1.4. L'échec du sommet de Camp David (2000) et le retour de la violence

Les États-Unis convoquent alors en urgence un sommet israélo-palestinien, qui a pour but d'arracher un compromis historique aux deux parties. Ehoud Barak, en grande difficulté (gouvernement désormais minoritaire, motions de censure à répétition), n'a qu'une très faible marge de manœuvre et compte sur le soutien de son peuple, tandis que Y. Arafat reste étroitement dépendant d'une direction palestinienne très divisée.
Ouverte le 11 juillet 2000 à Camp David, cette rencontre s'achève deux semaines plus tard sans l'accord escompté. Pourtant les négociations ont permis de lever certains tabous.
Pour en savoir plus, voir l'article accords de Camp David.
Jérusalem

Le plus important concerne Jérusalem. Rompant avec la ligne officielle soutenue jusqu'alors par tous les gouvernements israéliens pour lesquels Jérusalem « réunifiée » est la capitale du seul État d'Israël, E. Barak propose de concéder aux Palestiniens des espaces de souveraineté dans les quartiers arabes du secteur oriental de la ville, rattaché unilatéralement à Jérusalem-Ouest dans la foulée de la victoire militaire en juin 1967. La souveraineté israélienne serait en revanche préservée dans la dizaine de quartiers juifs (180 000 habitants) édifiés depuis 1967.
Sur le kilomètre carré de la Vieille Ville, là où se trouvent la plupart des Lieux saints (→ Haram al-charif ou esplanade des Mosquées [mont du Temple, pour les Juifs], Mur occidental ou Mur des lamentations, Saint-Sépulcre), Israël est disposé à admettre une souveraineté palestinienne dans les quartiers chrétien et musulman.
Enfin, Israël souhaite se voir reconnaître la souveraineté ultime sur le mont du Temple, même si les autorités musulmanes conservaient la gestion de fait de ce site sur lequel se dressent le dôme du Rocher et la mosquée al-Aqsa qui font de Jérusalem la troisième ville sainte de l'islam. Ce dernier point, à forte dimension religieuse, est un élément majeur du blocage avec les Palestiniens.
Pour en savoir plus, voir l'article Jérusalem.
Les frontières
Si Jérusalem apparaît comme la pierre d'achoppement principale, les autres dossiers sont loin d'être réglés. Celui sur les frontières enregistre des avancées significatives mais la proposition de restituer aux Palestiniens 91 % de la Cisjordanie, les 9 % restants – où résident 80 % des colons juifs – étant annexés par Israël, aurait pratiquement coupé en trois leur futur État.
Les réfugiés
Finalement, la question des réfugiés (soit 3,6 millions de personnes) n'est qu'effleurée. Israël rejette toute responsabilité dans l'exode des 750 000 Palestiniens en 1948 et refuse de prendre en considération la résolution 194 de 1948, prévoyant soit le retour des réfugiés dans leurs foyers, soit le versement de compensations financières. Pour l'Organisation de la Palestine (OLP), qui a été pendant des décennies le porte-parole des réfugiés palestiniens, il est évident qu'accepter un compromis – pourtant nécessaire – sur ce dossier s'est avéré, pour l'heure, prématuré.
Bilan
Le bilan du sommet de Camp David est donc mitigé. D'un côté, E. Barak a incontestablement transformé les termes du débat intérieur en Israël. Sur Jérusalem comme sur les colonies, il a posé de nouveaux paramètres qui ne pourront être ignorés par ses successeurs. D'un autre côté, malgré ces avancées, le sommet n'a pas abouti à un accord concret et cet échec a pesé lourd par la suite pour les Palestiniens qui y ont vu l'illustration de l'impasse persistante du processus de Washington au cours duquel la colonisation juive s'est poursuivie sans relâche, rendant un compromis territorial de plus en plus difficile à mettre en œuvre.
Reprise de la violence
À l'évidence, cette réalité sur le terrain a nourri un profond ressentiment qu'un geste a suffi à faire éclater. La visite d'Ariel Sharon sur l'esplanade des Mosquées (mont du Temple pour les Juifs), fin septembre 2000, est l'étincelle qui met le feu aux poudres, ouvrant une phase de confrontation violente entre Israéliens et Palestiniens. Celle-ci se traduit par une militarisation croissante : liquidations d'activistes du Hamas et du Fatah, incursions prolongées de chars, raids d'hélicoptères de combat et d'avions de la part d'Israël ; mitraillages de colonies juives, tirs de mortier et attentats-suicides du côté palestinien. Le prix humain est considérable : plus de 5 800 morts (à la fin août 2007), dont les quatre cinquièmes sont palestiniens, des milliers de blessés, deux sociétés traumatisées. Dnas l'État hébreu, cette violence généralisée a alimenté un mouvement de « défense patriotique » assez large, qui a conduit à une « droitisation » de l’opinion publique.
Pour en savoir plus, voir l'article seconde Intifada.
1.5. Les droites au pouvoir (2001-2015)

Ariel Sharon
En Israël, le sentiment que le pays est en danger a amené une majorité d'électeurs à se rassembler autour d'Ariel Sharon, élu Premier ministre en février 2001 avec 62 % des suffrages, et à soutenir l'établissement d'un gouvernement d'unité nationale, Shimon Peres devenant ministre des Affaires étrangères.
Toutefois, une crise gouvernementale finit par mettre un terme à l'union nationale en Israël, conduisant à des élections législatives anticipées en janvier 2003. A. Sharon voit sa position consolidée : avec 40 mandats, le Likoud double sa représentation à la Knesset, tandis qu'avec 19 sièges, le parti travailliste enregistre une défaite historique. Le bloc de droite est largement dominant avec 69 sièges (sur 120), tandis que celui de gauche obtient difficilement 36 mandats, 15 sièges revenant à la formation centriste Shinouï (Changement). Fort de ces résultats, A. Sharon constitue un gouvernement rassemblant le Likoud, l'extrême droite et le Shinouï, à l'exclusion des ultraorthodoxes qui se retrouvent pour la première fois depuis bien longtemps sur les bancs de l'opposition.
Quasi-réoccupation de la Cisjordanie, élimination de cadres palestiniens et construction d'un mur de séparation
La tâche de cette nouvelle équipe est double : redresser une situation économique dégradée (hausse du chômage, reprise de l'inflation, baisse des investissements…) et sortir de la confrontation avec les Palestiniens dans un environnement régional transformé. Pour répondre au premier défi, le gouvernement a adopté un budget d'austérité qui comporte en particulier une réduction draconienne des aides sociales.
Face à la seconde Intifada, qui a conduit à la suspension des relations diplomatiques entre Israël et le monde arabe, le gouvernement a choisi l'option militaire. Elle s'est traduite par la quasi-réoccupation de la Cisjordanie (accompagnée de mesures de bouclages très sévères, d'arrestations et de destructions de maisons) ainsi que par une politique d'« assassinats ciblés » visant les cadres des groupes paramilitaires palestiniens. Au printemps 2004, Israël liquidait tour à tour le cheikh Ahmad Yassine, fondateur et chef spirituel du Hamas, et son successeur Abdel Aziz al-Rantissi. Parallèlement, la construction d'un mur de séparation, édifié depuis 2002 de manière unilatérale entre Israël et la Cisjordanie, s'est accélérée malgré sa condamnation par la Cour internationale de justice (CIJ) en juillet 2004.
L'impasse diplomatique du « Quartet »
Sur le front diplomatique, en revanche, les choses n'ont guère avancé. L'adoption, au printemps 2003, par le « Quartet » (États-Unis, Union européenne, Russie, Nations unies) d'une « feuille de route » visant à parvenir, en trois étapes, à un règlement définitif du conflit israélo-palestinien sur la base de la coexistence entre deux États, marquait une volonté renouvelée d'implication de la communauté internationale. Néanmoins, en l'absence de gestes significatifs d'Israël (sur la question des implantations et les opérations de l'armée dans les territoires palestiniens) comme de trêve inter-palestinienne durable, cette initiative a tourné court.
L'accord Nusseibeh-Ayalon et l'initiative de paix de Genève
Face à cette impasse diplomatique, les raisons d'espérer sont venues de l'intérieur des sociétés palestinienne et israélienne avec le lancement, à l'automne 2003, de deux initiatives. La première consiste en une pétition à l'origine de laquelle se trouvent Ami Ayalon, ancien chef des services de renseignements intérieurs de l'État hébreu, et Sari Nusseibeh, président de l'université palestinienne al-Quds, pétition qui précise que la solution au conflit passe par la constitution, dans les frontières du 4 juin 1967, d'un État palestinien, aux côtés d'Israël, et par le respect de certains principes (évacuation des colonies juives, souveraineté divisée à Jérusalem-Est, strict cadrage de l'application du « droit au retour » des réfugiés palestiniens).
La seconde, plus politique et dite « initiative de Genève », lancée par Yossi Beilin, au nom d'une large partie de la gauche israélienne, et par Yasser Abed Rabbo, soutenu par d'importants secteurs du Fatah, consiste en un véritable plan de paix alternatif contenant des dispositions très précises pour régler l'ensemble du contentieux israélo-palestinien.
Retrait unilatéral de la bande de Gaza et gel des négociations israélo-palestiniennes
Du côté israélien, ces propositions de paix ont suscité un vaste débat interne et contraint A. Sharon à reprendre l'initiative en annonçant son intention de procéder à un retrait unilatéral de la bande de Gaza et du Nord de la Cisjordanie. Cette initiative devrait conduire au retrait de l'armée et, surtout, pour la première fois, au démantèlement de 25 implantations juives et à l'évacuation de leurs habitants (environ 8 000 personnes). Ce projet a suscité l'opposition des partis d'extrême droite, qui ont quitté la coalition, contraignant A. Sharon à s'allier, à nouveau, au parti travailliste en janvier 2005. La constitution de ce gouvernement d'unité nationale a facilité la mise en œuvre fructueuse du plan de désengagement au cours de l'été 2005.
Concentré sur cette politique unilatérale, le gouvernement Sharon n'a guère cherché à relancer les négociations bilatérales avec les Palestiniens, malgré l'élection de Mahmud Abbas à la présidence de l'Autorité nationale palestinienne en janvier 2005. Le triomphe du Hamas aux législatives palestiniennes de janvier 2006, qui refuse de reconnaître l'État hébreu, a conduit à sa mise en quarantaine et au gel des négociations.
Contraint d'organiser des élections législatives anticipées, A. Sharon choisit de créer une formation politique plus centriste, Kadima (En avant), afin d’accroître sa marge de manœuvre politique, mais, victime d'une attaque cérébrale au tout début de l'année 2006, il disparaît brusquement de la scène politique.
Ehoud Olmert (2006-2008)
Désormais emmené par Ehoud Olmert, Kadima gagne les élections de mars 2006 (29 sièges) et constitue un nouveau gouvernement d'union avec le parti travailliste. La voie de l'unilatéralisme dans laquelle Kadima entendait persister après le triomphe du Hamas aux législatives palestiniennes de janvier 2006, est suspendue après le semi-échec de la guerre menée contre le Hezbollah au Liban au cours de l'été, qui fragilise considérablement le gouvernement.
La prise du pouvoir par la force du Hamas à Gaza, en juin 2007, contribue aussi à détériorer la situation sur le terrain avec la multiplication des tirs de roquette sur le sud d'Israël d'un côté, la poursuite des opérations militaires israéliennes de l'autre. Les conclusions de la commission d'enquête chargée de se pencher sur la conduite de la seconde guerre du Liban soulignent de graves défaillances politiques et militaires.
Bien que E. Olmert ait vu sa popularité entamée, l'absence d'alternative politique crédible contribue un temps à son maintien au pouvoir. Prenant acte de l'impasse de l'unilatéralisme, il reprend, dans le sillage de la conférence internationale d'Annapolis (États-Unis, novembre 2007), des négociations de fond avec le président M. Abbas, mais celles-ci échouent à mettre en place un accord-cadre sur le règlement final avant la fin 2008. Rattrapé par une nouvelle affaire de corruption, E. Olmert annonce fin juillet qu'il ne participera pas aux primaires de son parti et qu'il démissionnera dans la foulée.
Le retour de Benyamin Netanyahou (depuis 2009)
Tzipi Livni remporte ces primaires, en septembre, mais la nouvelle dirigeante de Kadima ne parvient pas à constituer un gouvernement autour d'elle, rendant de nouvelles élections inévitables. Tenu en février 2009, après une campagne militaire de plus de trois semaines menées contre le Hamas à Gaza, ce scrutin donne la majorité au bloc de droite, permettant à B. Netanyahou de constituer, fin mars, un gouvernement qui regroupe, autour du Likoud, formations religieuses et nationalistes (Shas, « Foyer juif », Israel Beitenou, Judaïsme unifié de la Torah) mais aussi, de façon plus inattendue, le parti travailliste (jusqu'en janvier 2011).
Ce gouvernement, très marqué à droite, doit faire face à des tensions inédites avec la nouvelle administration américaine, soucieuse de relancer le processus de paix en obtenant d’Israël un arrêt complet de la colonisation. Face à la pression américaine, B. Netanyahou finit par accepter un gel limité dans le temps (novembre 2009-septembre 2010) et à la seule Cisjordanie ; toutes choses qui ne suffisent ni à rétablir la confiance avec Washington ni à redémarrer les négociations avec les Palestiniens.
En janvier 2013, suite à de nouvelles élections législatives, B. Netanyahou est reconduit comme Premier ministre à la tête d’une coalition différente. À l’alliance entre le Likoud et Israël Beitenou s’adjoignent les partis centristes Yesh Atid et Ha-Tnouah Tnouah (créé par T. Livni en 2012), mais aussi avec le parti sioniste-religieux « Foyer juif ». L’agenda prioritaire du gouvernement est centré sur les questions intérieures : enrôlement des ultra-orthodoxes dans l’armée, budget de rigueur, question du logement.
De nouvelles élections anticipées doivent cependant être convoquées en mars 2015 après la destitution, en décembre 2014, des ministres des Finances (Yaïr Lapid, leader de Yesh Atid) et de la justice (T. Livni), tous deux opposés au projet de budget prévoyant une hausse des dépenses consacrées à la défense ainsi qu'à un projet de loi déclarant Israël « État-nation du peuple juif ».
Ce scrutin (précédé par une augmentation du seuil électoral à 3,25 % des voix), s’annonce serré, mais malgré leur alliance au sein de l’Union sioniste, Ha-Tnouah et le parti travailliste de Yitzhak Herzog, axant leur campagne sur des réformes sociales et sociétales (davantage que sur la relance des discussions avec les Palestiniens), n’obtiennent que 18,67 % des suffrages et 24 sièges. Avec un discours privilégiant les enjeux sécuritaires, déjouant les pronostics malgré un bilan plutôt médiocre, B. Netanyahou et son parti parviennent à s’imposer en remportant 30 sièges avec 23,4 % des suffrages.
Ce quatrième mandat repose toutefois sur une majorité d’une seule voix (61 sur 120), Israël Beitenou d'A. Liberman (6 sièges contre 15 en 2009) ayant décidé de rejoindre l’opposition. Au Likoud acceptent ainsi de s’allier le nouveau parti de centre droit Koulanou (fondé en décembre 2014 par Moshe Kahlon, issu du Likoud, 10 sièges), les ultra-orthodoxes ashkénazes (« Judaïsme unifié de la Torah ») et sépharades (Shas) ainsi que « Foyer juif ». Ce dernier est l’un des principaux perdants de ce scrutin avec le Shas, Israël Beitenou et Yesh Atid, tandis que la liste réunissant quatre partis arabes en vue de surmonter le nouveau seuil électoral, arrive en troisième position avec 10,6 % des voix et 13 députés. Ne se présentant pas à ces élections, le parti Kadima (2 députés en 2013) disparaît de la Knesset.
Ce gouvernement à l’assise étroite doit bientôt faire face à un regain inquiétant de la violence. À partir du mois de septembre, des affrontements renaissent à Jérusalem à la suite de heurts entre forces de l’ordre israéliennes et jeunes Palestiniens sur l’esplanade des Mosquées (ou mont du Temple). Le statu quo régissant ce lieu saint depuis 1967 cristallise les oppositions dans un contexte où les nationalismes israélien et palestinien s’imprègnent de plus en plus de tensions d’ordre religieux que les extrémistes des deux bords n’hésitent pas à attiser.
Largement spontanées et individuelles, des attaques à l’arme blanche se multiplient contre des civils et des militaires israéliens et les affrontements s’étendent en Cisjordanie, notamment à Hébron. L’engrenage de la violence et de la répression fait alors craindre la résurgence d’une nouvelle « intifada », que B. Netanyahou et M. Abbas doivent désamorcer.
2. Une société plurielle en devenir

2.1. Un pays d'immigration

Le judaïsme dans le monde aujourd'huiLe judaïsme dans le monde aujourd'hui
Parce qu'il est défini comme l'État du peuple juif, l'État d'Israël est ouvert à tous les Juifs de la diaspora qui bénéficient d'un droit naturel et inaliénable à y immigrer (réglementé par la loi du retour de 1950). La réalisation du sionisme passe avant tout par l'immigration (aliyah), qui a essentiellement touché deux zones géographiques : la Russie et l'Europe orientale, d'où vinrent les gros bataillons d'immigrants (jusqu'en 1950, puis dans les années 1970 et les années 1990), et les pays d'islam, qui se vidèrent quasiment de tous leurs Juifs en trois vagues successives entre 1948 et 1964.
Durant les quinze premières années qui suivirent sa création, alors qu'Israël accueillait plus d'un million d'immigrants, l'État défendit une intégration nationale par fusion qui supposait que les nouveaux arrivants abandonnent leurs identités d'origine et se laissent absorber dans leur nouvelle société d'accueil.
Cette idéologie du melting-pot réclamait l'assimilation des nouveaux immigrants au modèle socioculturel en place, forgé par les pionniers russo-polonais ayant immigré entre 1904 et 1923. Cette intégration, menée par l'État, passait par la mobilisation de deux instruments de socialisation, l'école et l'armée. Celles-ci ont contribué de façon déterminante à faire naître une conscience collective partagée. Elles ont nourri un patriotisme israélien, qui s'est également renforcé avec l'usage de l'hébreu comme langue parlée, abondamment diffusée par les mass media, et avec l'attachement à une territorialité spécifique (nourri par l'étude de la Bible, l'archéologie, les excursions à travers le pays). Si un sentiment d'appartenance nationale a vu le jour, la société israélienne reste toutefois fortement divisée selon trois lignes de fracture.
2.2. Les Arabes en Israël

Comme tous les États du Proche-Orient, l'État d'Israël est fondé sur la reconnaissance des appartenances communautaires. Par conséquent, Juifs, Arabes et Druzes (secte hétérodoxe de l'islam) sont officiellement considérés comme des groupes ethniques différents.
1,2 million d'Arabes et de Druzes possèdent de plein droit la citoyenneté israélienne, mais leur statut de minoritaires dans un État juif les place souvent dans une situation très délicate. Soumis jusqu'en 1966 à une administration militaire qui restreignait sévèrement leurs libertés civiles, les Arabes d'Israël virent leurs terres expropriées et remises à des localités juives et à des kibboutzim. Quant aux ressources qui leur étaient allouées, elles étaient notoirement plus réduites que celles destinées aux Juifs (subventions publiques, dotations budgétaires aux conseils locaux et municipaux…).
Bien que la situation objective des Arabes d'Israël se soit améliorée depuis les années 1970, leur intégration dans un État juif dont ils ne peuvent partager les valeurs et les symboles demeure nécessairement problématique, et leur participation à la vie de la cité, imparfaite : il faudra attendre 2001 pour voir un Arabe accéder à un poste de ministre et 2007 pour qu'un musulman devienne ministre.
Situés à la périphérie de la société israélienne, les Arabes apportent majoritairement leurs suffrages à des partis non sionistes (parti communiste, parti démocratique arabe, Alliance nationale démocratique, Liste arabe commune) et poursuivent une stratégie de consolidation communautaire qui passe de façon croissante par l'islam. De plus, tout en exigeant l'égalité de traitement avec leurs concitoyens juifs, ils ont réaffirmé, au contact des Palestiniens de Cisjordanie et de Gaza, leur identité palestinienne. La reprise de l'Intifada n'a fait que resserrer ces liens, 13 Arabes israéliens ayant été tués par la police lors de manifestations en octobre 2000.
2.3. Ashkénazes et Séfarades

Autant les différences entre Juifs et Arabes sont officiellement reconnues, autant celles entre Juifs sont récusées par un État fondé sur le postulat de l'unité du peuple juif. Pourtant, les conditions mêmes dans lesquelles la société israélienne s'est constituée progressivement (par immigrations successives) ont perpétué un clivage entre Ashkénazes et Séfarades.
Jusqu'à la récente vague migratoire venant de l'ex-URSS, la population juive était à peu près également distribuée entre les deux groupes ethniques. Bien que les Séfarades aient connu une ascension sociale certaine depuis les années 1970 (forte pour les Irakiens, normale pour les Yéménites, faible pour les Marocains) et que les phénomènes de convergence (dans les modes de vie, les pratiques familiales) soient réels, la constitution d'une nation israélienne homogène par amalgame des immigrants est loin d'être réalisée.
La persistance d'un écart ethnique important dans les domaines éducatif et professionnel au détriment des Séfarades montre que la stratégie de fusion dans un creuset commun n'est pas parvenue à ses fins. Ainsi, les élèves d'origine orientale sont concentrés dans les écoles professionnelles alors que leurs condisciples ashkénazes sont plus nombreux dans l'enseignement général. À l'université, les Séfarades ont cinq fois moins de chance d'obtenir un diplôme que les Ashkénazes.
Au niveau économique, les Juifs des pays d'islam sont concentrés parmi les cols bleus (ouvriers) alors que les Juifs d'Occident forment les gros bataillons des classes moyennes et dominent l'élite économique, universitaire et médiatique. Le mécontentement du « second Israël » par rapport au parti travailliste, accusé d'avoir conduit la politique d'intégration de façon autoritaire, s'est traduit par le soutien massif accordé au Likoud en 1977, ce qui a permis la première alternance politique du pays. Cette adhésion au Likoud demeure importante, mais l'État d'Israël a affaire aujourd'hui à une mobilisation inédite de la « séfaradité » à travers le parti Shas (« Séfarades gardiens de la Torah »), qui appelle à une pratique rigoriste du judaïsme et valorise la spécificité culturelle des Juifs des pays d'islam. En offrant un ensemble de services (jardins d'enfants, écoles primaires…), le Shas est parvenu à renforcer sa base politique et à s'imposer comme le porte-parole de l'« Israël séfarade », économiquement défavorisé et culturellement marginalisé. Son audience électorale reste forte. Si le résultat obtenu lors des élections législatives de mai 1999, avec 17 sièges, demeure exceptionnel, les 11 mandats décrochés en 2009 et 2013 montrent que le Shas est bien installé dans le paysage politique israélien, même si avec 5,7 % des voix et 7 députés, il est l’un des perdants du scrutin de 2015.
Le processus de communautarisation n'est pas limité au monde séfarade puisqu'il a touché les nouveaux immigrants de l'ex-URSS, mais il a, dans ce cas, évolué différemment. Un certain nombre de facteurs ont entretenu la tendance à la mobilisation communautaire : le poids démographique (1 million d'immigrants), le profil identitaire (forte déjudaïsation allant de pair avec la valorisation d'une identité culturelle russe), l'organisation interne très efficace (associations, presse et télévision en russe).
La communautarisation est demeurée une réalité sociale mais elle a connu des traductions politiques variables. Présentes à la Knesset à partir de 1996, les formations « russes » s'étaient fondues dans la droite israélienne en 2003 avant de renaître en 2006 avec le parti Israel Beitenou (Israël, notre maison) dirigé par Avigdor Liberman, qui est devenu en 2009 le troisième parti avec 15 sièges avant de s’allier au Likoud en 2013-2015. Cette formation revendique un nationalisme sans concession qui réclame, à terme, l'homogénéisation ethnique d'Israël par rattachement des zones peuplées d'Arabes israéliens à toute future entité palestinienne.
Qu'elle soit séfarade ou « russe », l'ethnicité est une ressource disponible pour être mobilisée politiquement dans une société israélienne plurielle mais traversée par une forte opposition entre religieux et laïcs.
2.4. Religieux et laïcs

Dès le départ, Israël s'est défini comme un État juif, devant donc assurer, à travers ses institutions, un projet de vie collective juive. Même si le contenu précis de cette identité nationale n'a jamais été clairement déterminé, le caractère juif de l'État impliquait que le droit de la famille et l'espace public étaient partiellement régis par une législation d'origine religieuse. D'où l'adoption d'une série de lois réglementant le respect du shabbat, la distribution de nourriture kasher dans les cantines publiques, l'élevage et la commercialisation de porc…, et attribuant la gestion des mariages et des divorces aux seules autorités religieuses.
Ce statu quo dans lequel l'État concède certains droits à la sphère religieuse s'est maintenu jusqu'à aujourd'hui, malgré de nombreuses crises. Il est toutefois malmené par un phénomène contradictoire qui voit la réaffirmation religieuse aller de pair avec l'approfondissement de la sécularisation de la société.
Le pôle religieux, qui regroupe environ un quart de la population juive, est composé de deux courants : l'un ultraorthodoxe et l'autre sioniste religieux. Bien que séparés par d'importantes controverses théologiques quant à la signification religieuse à accorder à l'État d'Israël, ces deux courants défendent une même interprétation rigoriste du judaïsme, et sont favorables à une présence plus grande de la religion dans la vie publique. Le rôle pivot que les partis religieux remplissent dans les différentes coalitions gouvernementales leur donne un moyen de pression idéal pour faire avancer leurs revendications.
Toutefois, l'activisme des groupes religieux se heurte à l'opposition d'autres secteurs de la société israélienne, qui défendent une laïcité inconditionnelle (passant, entre autres, par la séparation de la synagogue et de l'État). Cette laïcité militante a été parfois défendue par des formations politiques comme le parti Shinouï (Changement), qui obtint 15 mandats à la Knesset en 2003 au nom de la lutte contre la coercition religieuse, mais ne parvint pas à perdurer sur le plan électoral.
Le clivage religieux / laïcs se cristallise beaucoup sur la question de la conscription. En effet, alors que les Juifs laïcs et nationalistes-religieux passent, pour les hommes, trois ans sous les drapeaux puis effectuent des périodes de réserve jusque dans leur quarantaine, 60 000 étudiants des instituts d’études talmudiques sont dispensés d’obligations militaires en vertu d’un ancien accord datant de 1948 (à peine 400 jeunes gens étaient alors concernés). Cette situation nourrit un profond sentiment d’injustice chez les laïcs, poussant nombre d’électeurs laïcs à voter pour Yair Lapid, et sa formation Yesh Atid (« Il y a un avenir », 19 mandats en 2013, ramenés à 11 en 2015), qui s’est engagée à mettre fin aux exemptions systématiques dont bénéficient les Juifs ultra-orthodoxes.
En mars 2014, la loi prévoyant la conscription des ultra-orthodoxes est adoptée par 67 voix (une contre). Saluée par ses promoteurs comme une avancée significative sur la voie de l’universalisation du service militaire, la loi a été critiquée tant par les ultra-orthodoxes – qui la dénoncent par principe –, que par des laïcs qui la jugent trop timorée. Sa mise en œuvre, nécessairement graduelle, risque d'être retardée par nombre d'obstacles.
Deux mouvements contradictoires traversent la société israélienne, amenant les uns à prôner un État selon la Torah, et les autres à se faire les avocats d'un Israël post-sioniste. Entre les deux pôles, il existe toutefois un vaste conglomérat « centriste » de personnes attachées à la nature hybride de l'État d'Israël comme État juif et démocratique. La bipartition politique de la société israélienne (en particulier autour de la question déterminante du processus de paix) entretient une polarisation croissante entre un courant « normalisateur » (regroupant les laïcs de toute obédience) et un courant « identitariste » (allant des ultra-orthodoxes aux traditionalistes).
2.5. Riches et pauvres

Israël a longtemps été basé sur une économie sociale-démocrate, avec une forte présence du secteur public et parapublic, et un système d’aide à l’emploi, à la santé et à l’éducation qui assurait une distribution relativement égalitaire des ressources.
À compter des années 1980, le pays entra dans une phase de libéralisation économique, de privatisation et de dérégulation, qui eut pour effet de réduire l’ampleur de la protection sociale. Deux conséquences s’en suivirent : d'une part, la croissance régulière de l’écart entre les plus riches et les plus pauvres, qui fait d’Israël un des pays les plus inégalitaires parmi les 34 membres de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) ; d’autre part, le pourcentage des familles israéliennes vivant sous le seuil de pauvreté est important, puisqu'il représente 20 % des familles.
Cette situation d’inégalité a pourtant nourri une contestation sociale relativement limitée, sauf en 2011. L’augmentation continue du coût du logement a en effet conduit à l’apparition d’un « mouvement des tentes » qui, né à Tel-Aviv, a progressivement gagné des dizaines de villes d’Israël. D’abord sur la défensive, le gouvernement Netanyahou répondit à cette contestation sociale en mettant en œuvre certaines réformes : augmentation des impôts sur les entreprises et les hauts revenus, loi sur le logement…
2.6. Quelle identité nationale ?

Le jeu complexe des différents clivages – Juifs / Arabes, Séfarades / Ashkénazes, religieux / laïcs, riches / pauvres – définira les contours de l'État d'Israël de demain. En effet, les incertitudes sur l'évolution de l'identité nationale se multiplient, alors que le pays a gagné progressivement une légitimité internationale plus large, dont la consolidation dépendra, toutefois, d'un règlement global de l'ensemble du contentieux israélo-arabe.
3. Israël dans la communauté internationale

Paradoxe d'Israël : créé par une décision de la communauté internationale en 1947 (par 33 voix pour, 13 contre et 10 abstentions), l'État juif est sans doute l'État au monde dont l'existence a été la plus contestée dans le concert des nations. Ses relations internationales s'en sont longtemps ressenties. Depuis sa création, Israël n'a établi des rapports stables et continus qu'avec l'Occident. Le monde arabo-musulman lui a été totalement hostile pendant des décennies, alors que les pays de l'Est et le tiers-monde ont entretenu avec lui, le plus clair du temps, des relations globalement assez distantes.
Pendant longtemps, l'isolement total de l'État juif dans la région rendait impérieux l'établissement de relations fortes avec des partenaires susceptibles de le soutenir, et ceux-ci se trouvaient essentiellement en Occident.
3.1. Israël, la France et l'Europe

Israël et la France
Durant les vingt premières années de son existence, Israël est surtout soutenu par la France. Dans les années 1950, grâce aux efforts de Shimon Peres alors directeur général du ministère des Affaires étrangères, plusieurs accords d'armement sont conclus entre les deux pays, prévoyant la livraison de tanks, d'avions et de pièces d'artillerie. Le début de la révolution algérienne, en novembre 1954, amène la constitution d'une alliance encore plus étroite, dans la mesure où le principal ennemi d'Israël, l'Égypte, est aussi le soutien majeur du Front de libération nationale (FLN).
Pour en savoir plus, voir l'article guerre d'Algérie.
L'expédition conjointe sur le canal de Suez, en octobre 1956, comme l'aide française à la construction du réacteur nucléaire de Dimona, dans le Néguev, constituent les manifestations les plus fortes de cette union franco-israélienne contre le nationalisme arabe. L'instauration en France de la Ve République ne conduit pas immédiatement à une modification des rapports bilatéraux, mais la fin du conflit en Afrique du Nord pousse le général de Gaulle à renouer avec les pays arabes et à adopter, ce faisant, une position plus équilibrée dans le conflit israélo-arabe.
La guerre des Six-Jours (5-10 juin 1967) marquera un tournant de la politique française : de Gaulle déclare un embargo sur la livraison de toutes les armes à destination du Moyen-Orient, ce qui pénalise fortement Israël, tributaire de la France en matière d'armement. Cette mesure fera progressivement des États-Unis le fournisseur quasi exclusif de l'État juif, tout en refroidissant les relations franco-israéliennes.
Israël et l'Allemagne
Avec l'Allemagne, le rapprochement était à la fois extrêmement délicat et pourtant indispensable. En reconnaissant publiquement la responsabilité allemande dans le génocide des Juifs d'Europe, le chancelier Adenauer enclencha un processus qui permit la conclusion, en septembre 1952, de l'accord de Luxembourg au terme duquel l'Allemagne s'engageait à verser à Israël, à titre de réparation, pendant douze années 3,4 milliards de marks (plus les dédommagements individuels destinés aux victimes du nazisme). Cet accord facilitera l'établissement de relations diplomatiques en mai 1965, et ce, malgré l'opposition virulente de la droite nationaliste regroupée autour de Menahem Begin.
Israël et l'Europe
Pour Israël, l'Europe est aujourd'hui avant tout un partenaire commercial vital. L'État hébreu bénéficie depuis 1975 d'un accord d'association avec l'Union européenne, accord qui a été renouvelé en 1995 dans le cadre du partenariat euro-méditerranéen. Si l'Europe est un enjeu surtout économique (30 % des exportations israéliennes se dirigent vers l’Europe des 28), les États-Unis constituent véritablement l'allié privilégié sur le plan politique.
3.2. L'alliance stratégique avec les États-Unis

Bien que l'appui diplomatique américain ait été décisif dans la naissance de l'État juif, c'est la réorientation de la position française après la guerre des Six-Jours qui conduira progressivement à l'intervention de plus en plus appuyée des États-Unis aux côtés d'Israël. L'entente avec Washington concerne trois domaines : militaire (coopération stratégique : don annuel de 1,8 milliard de dollars dans les années 1990 étant passé à 3 milliards en 2010), économique (accord de libre-échange, don annuel de 1,2 milliard de dollars dans les années 1990, désormais supprimé), diplomatique.
Les États-Unis n'ont jamais ménagé leur soutien politique à Israël, en particulier à l'ONU, considérant que l'État hébreu constituait un élément de stabilité régionale et un atout stratégique (hier contre l'Union soviétique et ses alliés arabes, aujourd'hu

 
 
 
 

LE NATIONAL-SOCIALISME

 

 Le national-socialisme
Cet article fait partie du dossier consacré à la Seconde Guerre mondiale et du dossier consacré au totalitarisme.
Doctrine exacerbant les tendances nationalistes et racistes et qui a été l'idéologie politique de l'Allemagne hitlérienne (1933-1945). [Synonyme : nazisme.]
Introduction

Adolf Hitler au Reichstag
Pour beaucoup d'historiens, le national-socialisme est un mouvement né avec Hitler, chef du parti nazi depuis 1921. Cette opinion mérite d'être nuancée, car le national-socialisme, s'il exacerbe des tendances nationalistes et racistes, ne les invente pas. Une continuité de l'impérialisme allemand se manifeste de Guillaume II à Hitler en passant par la République de Weimar (1918-1933). Certains spécialistes de la pensée protestante font remonter à Luther les racines du national-socialisme, mais les travaux récents montrent combien grande fut sur Hitler l'influence du catholicisme autrichien.
1. Les sources du national-socialisme

1.1. Le pangermanisme

Le pangermanisme sous le IIe Reich (1890-1918)
Le pangermanisme apparut vers 1885, se développa après 1890 avec le gouvernement personnel de Guillaume II. Dès cette époque germent des idées telles que la domination de l'Europe centrale par le germanisme, développée par exemple par Julius von Eckardt (1836-1908), celle d'un pangermanisme continental groupant autour du Reich toutes les nations où l'on parle une langue germanique – Pays-Bas, Flandre, Alsace, Moselle, Suisse alémanique, Autriche, etc. Apparaît aussi l'idée de lutte contre la Russie et le slavisme, professée par Paul Anton Bötticher, dit Paul de Lagarde (1827-1891) ou Konstantin Frantz (1817-1891). Ce dernier souhaite une politique d'assimilation et invite les Allemands à déporter les allogènes qui habitent aux frontières à l'intérieur du Reich, pour installer sur ces mêmes frontières des populations véritablement allemandes. La Ligue pangermaniste (Alldeutscher Verband), fondée en 1891, popularise cette pensée.
Langue et race sous Weimar (1918-1933)
Les traités de Versailles et de Saint-Germain de 1919, en enlevant à l'Allemagne des terres considérées par elle comme germaniques – Alsace-Lorraine, Posnanie, corridor de Dantzig (→ Gdańsk) –, en dépeçant l'Autriche, laissent croire à certains Allemands que leur pays va vers sa fin, ce qui stimule le sentiment national. Dès 1923-1924, la République de Weimar, stabilisée, favorise ce mouvement. Pour les Allemands, toute région où l'on parle allemand est allemande ; en 1925-1926, deux ouvrages sont publiés par Wilhelm Volz (1870-1958) : Der westdeutsche Volksboden et Der ostdeutsche Volksboden, description de tous les territoires germaniques enlevés au Reich.
Le mot Volk (peuple) et tous ses dérivés (Völkisch, Volkstum, Volkswagen, etc.) – si utilisés par les nationaux-socialistes – commencent une brillante carrière à l'époque de Weimar, où l'on attache une importance primordiale au principe ethnique. Dès 1921, le Deutscher Schulverein (ligue scolaire allemande) spécifie dans ses statuts que par Deutsche il faut entendre Stammdeutsche, c'est-à-dire « Allemand de sang » : les Juifs allemands ne peuvent appartenir à cette association. On distingue couramment toute une série d'Allemands classés selon leur domicile, à l'intérieur du Reich, à la frontière, à l'étranger (Inlanddeutsche, Grenzdeutsche, Auslanddeutsche), selon leur nationalité (Reichsdeutsche, Auslandreichsdeutsche, Deutschausländer), selon des données ethno-linguistiques (Allemand de sang, Stammdeutsche ; Allemand de langue, Sprachedeutsche ; Allemand de « volonté », Gesinnungsdeutsche ; le germanisé, Eingedeutschte ; le dégermanisé, Entdeutschte). Ainsi, bien avant les lois de Nuremberg (septembre 1935), on connaît en Allemagne d'importantes distinctions fondées sur la race.
L'impérialisme allemand dispose donc de fondements pseudo-philosophiques. Il s'appuie aussi sur d'innombrables organisations : la Ligue pangermaniste et le Verein für das Deutschtum in Ausland (VDA, appelé aussi Deutscher Schulverein), qui, fondé en 1881, n'a que 58 000 adhérents en 1914, mais qui, réorganisé en 1921, se retrouve avec 2 225 000 adhérents en 1929 et dispose à Stuttgart d'un Institut de recherches inauguré par Gustav Stresemann et d'une revue à laquelle collaborent des hommes politiques, y compris des socialistes. Quant au Deutscher Schutzbund, il est créé en 1919 pour préparer l'Anschluss avec l'Autriche. En 1928, le budget du Reich distribue à ces diverses organisations, selon Raymond Poincaré, 95 millions de Reichsmark. En 1931, il leur octroie officiellement 47 millions de mark de subventions.
1.2. Les nationalistes de Weimar

De plus, sous la république de Weimar, beaucoup d'intellectuels réfléchissent sur le devenir de l'Allemagne. La plupart sont des nationalistes connus, tels Oswald Spengler, Arthur Moeller van den Bruck. Il faut aussi rappeler les idées d'un Rathenau ou d'un Thomas Mann à la fin de la Première Guerre mondiale.
Walter Rathenau et Thomas Mann
Walter Rathenau veut une révolution organique et juste : il faut que l'élite traditionnelle disparaisse et que se substitue à elle une élite fondée sur la science. Il souhaite la création d'un Volksstaat, qui serait un État adapté aux besoins du peuple, et il s'en prend à la « ploutocratie capitaliste » et au prolétariat, à l'individualisme forcené et au démocratisme occidental. Rathenau souhaite un État corporatif qui ferait de tous les Allemands des travailleurs égaux, classés par catégories professionnelles, par corporation : le Stand.
Même Thomas Mann critique la société allemande traditionnelle. Il refuse la bourgeoisie technocratique et spécialisée, et regrette presque le temps où la noblesse dominait. Il se sent profondément Européen et pense que l'Allemagne appartient au monde occidental ; mais, dans les années 1920 à 1930, il critique la France embourgeoisée et l'Angleterre impérialiste. L'Allemagne a pour mission de respiritualiser le monde, et puisque, depuis la guerre de Trente Ans (1618-1648), il n'y a plus de bourgeoisie allemande, il faut socialiser l'État et la société, construire un communisme hiérarchisé et, par l'économie dirigée, intégrer la classe ouvrière dans la nation. La pensée de Mann conduit à rétablir, en le modernisant, l'Obrigkeitsstaat, c'est-à-dire une forme de despotisme éclairé où l'équilibre économique serait recherché.
Oswald Spengler
Si des démocrates, comme Rathenau et Thomas Mann, ont pu développer des idées de ce genre, comment s'exprimera la « pensée antidémocratique » ? Oswald Spengler en devient le chantre avec deux ouvrages : le Déclin de l'Occident (Der Untergang des Abendlandes, 1918-1922) et Preussentum und Sozialismus (1920).
Selon Spengler, toute culture, organisme vivant, se fige en civilisation. L'Allemagne n'échappera à cela que si elle se replie sur elle-même et s'inspire des vertus authentiquement prussiennes. Elle doit aussi défendre la civilisation occidentale contre les peuples asiatiques et les races de couleur.
Mais surtout Spengler distingue deux Allemagnes : l'Allemagne occidentale, morcelée, corrompue par les miasmes étrangers – catholicisme, capitalisme, marxisme –, et la Prusse, marquée par la tradition du travail en commun. Pour échapper à la décadence, il faut désintellectualiser la démocratie, démarxiser le socialisme, favoriser l'intégration de toutes les classes dans la société et les incorporer dans la tradition prussienne d'autorité et de discipline. La restauration politique de l'Allemagne sera fondée sur une élite et il faudra :
– un pouvoir exécutif fort ;
– un Reichstag sans pouvoir réel ;
– une forte bureaucratie ;
– une économie réorganisée, dans laquelle l'État jouera le rôle déterminant par le moyen de l'impôt et d'une banque d'État ;
– un retour au droit germanique, car le droit romain accorde une trop grande place à la propriété ;
– une réforme de l'enseignement, de manière à forger des hommes ouverts sur le monde et non des spécialistes.
Moeller van den Bruck
Des thèmes analogues sont développés par Arthur Moeller van den Bruck (1876-1925), qui, dans trois ouvrages (Der preussische Stil, 1916 ; Das dritte Reich, 1923 ; Das ewige Reich, écrit en 1924 et publié en 1934), montre que le nationalisme allemand est nécessaire, car seul il peut maintenir l'Allemagne, pays du milieu de l'Europe et fondement solide de l'équilibre européen.
Van den Bruck donne au nationalisme allemand un caractère à la fois conservateur et révolutionnaire. Révolutionnaire dans la mesure où il se veut socialiste, mais « a-marxiste », conservateur par son attachement à la tradition, par sa critique d'un libéralisme qui forme des individus médiocres, uniquement soucieux d'égalité et de prestige personnel, par sa haine d'une démocratie qui tue l'idée héroïque et aristocratique, et assure le triomphe de l'idée romaine et latine.
L'Allemand ne peut être, selon lui, le citoyen de la Révolution française ni le prolétaire de la Révolution soviétique. Il est nécessaire de défendre le germanisme, de le fonder sur le monde et la race nordiques, car il y a eu dégermanisation accélérée par la catholicisation. Le regroupement ne peut se faire qu'autour d'une nation protestante ; la Prusse en sera le moteur, car, dans cette patrie du Volksstaat, peut grandir le socialisme national qui permet l'intégration et le maintien de la nation. Il faut donc créer le « IIIe Reich », le fonder sur le Volksgeist, sur la jeunesse dynamique, sur les chômeurs, qui, dans un État socialiste national et corporatiste, seront le moteur de l'expansion. Le IIIe Reich reposera aussi sur le Volksstaat et sera dirigé par un chef issu du peuple, der völkische Führer. Tout cela révèle l'influence de l'économiste Friedrich List, du socialisme d'État et du philosophe Nietzsche.
Van den Bruck préconise encore un Reich à la fois fédération et confédération, reposant sur des corps fédéraux, les Länder, des corporations politiques et des corporations économiques. Ainsi, l'État allemand reconstitué pourra, de nouveau, jouer un rôle dynamique et faciliter l'unité de l'Europe autour de lui. En définitive, Moeller van den Bruck apparaît comme le théoricien du néo-conservatisme, rejetant libéralisme, capitalisme, démocratie et marxisme au profit d'un État populaire et national, le Volksstaat.
Toutes ces idées ont un très grand écho en Allemagne, surtout dans les milieux intellectuels, mais aussi dans une partie importante de la société allemande, d'autant plus qu'elles sont reprises et développées par des écrivains et des intellectuels connus.
La revue « Die Tat »
La revue Die Tat (« l'Action ») joue un rôle considérable. Fondée en 1908 par des intellectuels, cette revue d'universitaires qui ne veulent pas descendre dans l'arène politique est un centre de recherches pour un État et un socialisme nouveaux. Un homme marque cette entreprise de son influence, le juriste Carl Schmitt, théoricien du parlementarisme rationalisé, qui estime qu'une Constitution n'existe que dans la mesure où elle exprime une réalité donnée.
Schmitt souhaite un véritable pluralisme, que coordonnerait le président du Reich, pôle stable de la nation, élu qu'il est par le peuple et disposant du droit de référendum. En matière économique, Die Tat critique le capitalisme. L'économiste Ferdinand Fried (1898-1967) montre que, de 1860 à 1914, le capitalisme s'est figé et bureaucratisé. Il faut donc que l'État intervienne et facilite la vie économique autonome du pays. Marqué par la pensée de List, Fried préconise une économie autarcique.
Un troisième thème paraît souvent dans Die Tat : le rôle des Églises. Pour éviter le fascisme, il faut renouveler l'élite allemande : seule l'Église luthérienne, par sa notion du pouvoir (Obrigkeit), peut y aider. Or, au temps de Weimar, on l'a oubliée à cause de l'anticléricalisme du parti social-démocrate (SPD) et du catholicisme triomphant du parti du Centre (Zentrumspartei). Il faut donc renforcer l'influence du protestantisme pour que l'idéal communautaire – conforme à la tradition protestante – puisse interdire la transformation de l'État en un État totalitaire. Cette glorification du protestantisme, que l'on retrouve chez Max Weber, tient une large place dans la pensée de cette époque.
Des héritages recueillis et dépassés par le nazisme
Ainsi, tout au long de la République de Weimar se développe une pensée antilibérale, antidémocratique, qui veut un État fort, organisé, ne laissant pas de place aux traditions non germaniques, marxisme, catholicisme, capitalisme, etc. Ces thèmes, très proches de la doctrine nationale-socialiste, vont être profondément déformés par celle-ci dans un sens totalitaire, mais d'une manière suffisamment habile pour que la masse de la population ne se rende pas compte de cette déformation. Enfin, un dernier élément de la pensée nationale-socialiste s'est considérablement développé sous la République de Weimar, l'antisémitisme.
1.3. L'antisémitisme

L'antisémitisme social
L'antisémitisme existe en Allemagne depuis le Moyen Âge, mais pendant longtemps il a surtout été virulent dans les milieux ruraux, où le Juif était assimilé à l'usurier. Dans les années 1880 apparaît un antisémitisme d'un type nouveau, lié à la notion d'appartenance sociologique. Aussi, pour lutter contre les Juifs, il faut, disait l'historien Heinrich von Treitschke, favoriser les mariages mixtes de façon à intégrer les populations juives dans le peuple allemand. Paul de Lagarde pense qu'il faut les assimiler. L'influence de cette pensée est considérable, d'autant plus que Treitschke est un historien très lu. Pour lui comme pour beaucoup de ses contemporains, les Juifs représentent un État dans l'État qu'il convient de résorber.
L'antisémitisme racial
Mais, très vite, l'antisémitisme prend une tournure différente, un aspect raciste, sous l'influence du comte Joseph Arthur de Gobineau, et surtout, de deux de ses disciples, Richard Wagner et Houston Stewart Chamberlain. Dès lors, l'antisémitisme allemand sera à la fois raciste et nationaliste. L'influence de Chamberlain, gendre de Wagner, puis conseiller de Guillaume II et qui, dès 1923, entre en relation avec Hitler, est considérable. Son livre les Assises du XIXe siècle (1899) fait l'apologie de la race aryenne (→ Aryens) et des Germains. Cette idée avait déjà été exprimée en 1881 par Karl Eugen Dühring, le socialiste adversaire de Marx et d'Engels, qui, dans Die Judenfrage, demande que l'on sépare les Juifs des autres peuples et que l'on crée un État juif pour y déporter tous les Juifs.
L'antisémitisme devient le thème essentiel du parti social-chrétien d'Adolf Stoecker (1835-1909). Sous l'influence de Dühring, ce parti préconise l'exclusion des Juifs de l'enseignement et de la presse, un numerus clausus à leur égard dans le barreau et la magistrature, l'interdiction des mariages mixtes, la confiscation des biens des capitalistes juifs.
Ce mouvement s'accentue avec l'apparition de sociétés antisémites, comme la société Thulé (Thulegesellschaft), fondée en 1912. Ainsi se constitue un courant profond dans la bonne société allemande, qui se développe particulièrement au moment des crises politiques et économiques marquant le début et la fin de la République de Weimar.
L'antisémitisme chrétien
Ce mouvement a d'ailleurs un caractère antichrétien, car, à la suite du philosophe Fichte, puis de Dühring, bon nombre d'antisémites dénoncent la falsification des Évangiles par la pensée juive. Fichte ne reprochait-il pas à Luther d'avoir fait une place trop importante à saint Paul, qui avait judaïsé le christianisme ? Paul de Lagarde, quant à lui, transforme Jésus en un rabbin de Nazareth. Il n'est pas le Fils de Dieu, comme le prétend la « légende biblique du Nouveau Testament ». Chamberlain, lui, voudrait prouver que Jésus n'est pas Juif, mais, comme David, le descendant d'une famille aryenne.
Tous ces thèmes seront repris à l'époque nationale-socialiste par le mouvement chrétien allemand, dirigé par le pasteur Ludwig Müller (1883-1945) – le futur évêque du IIIe Reich.
Ainsi, l'antisémitisme hitlérien plonge-t-il très loin ses racines et sera-t-il pendant très longtemps dans la tradition de la pensée allemande. Il ne s'en écartera qu'à partir du moment où il passera à la liquidation des Juifs d'Europe.
Toutefois, c'est par la pensée autrichienne qu'a été nourri l'antisémitisme de Hitler ; celui-ci a subi en particulier l'influence de Georg Schönerer (1842-1921), dont s'inspire le Deutsche Arbeiterpartei Österreichs, et de Karl Lueger (1844-1910), chef du parti chrétien social autrichien.
La pensée nationale-socialiste s'épanouit donc dans un cadre idéologique aux assises profondes. Adolf Hitler se contente de développer cette pensée, de l'exacerber, et – par son magnétisme – il popularise des idées qui avaient surtout cours dans les classes moyennes et la bourgeoise allemandes.
2. Hitler et le nazisme

2.1. L'ascension du parti nazi

Défilé de SA devant Hitler, Nuremberg, 1927.Défilé de SA devant Hitler, Nuremberg, 1927.
Après la Première Guerre mondiale, à laquelle il participe avec courage, Hitler adhère en 1919 au parti ouvrier allemand (Deutsche Arbeiterpartei), fondé par un ouvrier de Munich, Anton Drexler. Il y rejoint un ingénieur, Gottfried Feder, le premier théoricien du parti, et le capitaine Ernst Röhm, le futur chef des SA, une des milices du parti.
Très vite, Hitler entre au comité directeur, puis en prend la direction, change son nom dès 1920 en « parti national-socialiste des travailleurs allemands » (Nationalsozialistische Deutsche Arbeiterpartei, NSDAP). De ce groupuscule qui, en 1919, comptait 60 membres, il fait un parti dont le journal –Völkischer Beobachter – tire en 1922 à 20 000 exemplaires. Dès lors, la vie de Hitler se confond avec celle de son parti.

Affiche électorale nazieAffiche électorale nazie
La crise économique et les talents d'organisateur de Hitler offrent au parti nazi toutes ses chances. En 1932, il est devenu le premier parti d'Allemagne grâce à sa démagogie, sa violence, grâce aussi à sa doctrine, qui trouve un large écho dans l'opinion publique. En 1933, quand il prend le pouvoir, il a déjà plus d'un million d'adhérents, qu'il recrute dans les classes moyennes et dans la classe ouvrière. On peut noter cette importance considérable des ouvriers et leur croissance de 1930 à 1932. Ceux-ci forment de même une part considérable de l'électorat, et beaucoup d'historiens estiment qu'il y a un lien entre extension du chômage et vote nazi. On peut aussi souligner le poids des jeunes dans le parti nazi, surtout ouvriers et étudiants et des enseignants : 2,5 % des adhérents, alors qu'ils reprsentent que 0,9 % de la population active.
2.2. Le programme du parti nazi

Le programme du parti a été publié en 25 points dès 1920 et exposé pour la première fois au cours d'une réunion publique organisée le 24 février à la Hofbräuhaus, une brasserie de Munich, devant deux mille personnes. Sans doute, ce texte est-il très sommaire, mais il insiste à peu près sur tous les thèmes chers à l'opinion publique de Weimar.
Politique raciale
Le nationalisme, le racisme en sont les thèmes essentiels. Sont seuls considérés comme citoyens allemands ceux de sang allemand. Tous les Allemands, en vertu du droit des peuples à disposer d'eux-mêmes, doivent être réunis dans une grande Allemagne. Le programme revendique ainsi l'Autriche, la haute Silésie à la Pologne, le Sleswig (au Danemark), les Sudètes (à la Tchécoslovaquie) et l'Alsace-Lorraine. Les commentaires publiés par le parti précisent que ces peuples doivent être rattachés par plébiscite, mais que le but du gouvernement allemand est de protéger les intérêts de tous les Deutschausländer.
De plus, dans son ouvrage Mein Kampf (« Mon combat »), Hitler affirme qu'il faudrait à l'Allemagne des Randkolonien ( « colonies limitrophes »), comme l'Ukraine ou la Pologne, qui permettraient à l'Allemagne de vivre normalement. Cette notion d'« espace vital » (Lebensraum) devient un des thèmes essentiels de Mein Kampf.
Politique sociale
Le programme de 1920 est nettement antiparlementaire et surtout préconise une politique économique et sociale planifiée et étatisée. Il a des aspects socialisants, car il prévoit l'étatisation des trusts, la participation des ouvriers aux bénéfices et la réforme agraire ; l'article 17 envisage même l'expropriation sans indemnité des grands propriétaires.
Mais très vite, ce programme est aménagé pour éviter de trop effrayer les possédants. Les biens concernés ne sont que les biens détenus par les Juifs. Le commentaire de Gottfried Feder en 1927 est symptomatique à cet égard, puisqu'il affirme que « le national-socialisme reconnaît comme un de ses principes la propriété privée ».
Originalité du programme
Ce programme est fondamental, car on y trouve dès 1920 tous les thèmes du IIIe Reich. On constate une nette ressemblance avec les textes de Die Tat, de Spengler ou de Rathenau. Pourtant, la différence est sensible. Ce que veulent les intellectuels antidémocratiques de la période de Weimar, c'est un nationalisme bourgeois et aristocratique, voire raffiné ; ce que proposent les nationaux-socialistes, c'est un nationalisme populaire, brutal, à la recherche de l'efficacité. Avec le « principe du chef » (Führerprinzip), on est en présence d'une pensée antidémocratique, antilibérale, antihumaniste.
2.3. Les idéologues du nazisme

Trois hommes marquent la pensée hitlérienne : Rosenberg, Darré, Hitler lui-même.
 Alfred Rosenberg
Alfred Rosenberg collabore dès 1921 au Völkischer Beobachter. Son œuvre est dominée par trois concepts : la race, l'anticommunisme, l'espace vital. D'origine balte, membre de la société Thulé, Rosenberg apporte à Hitler l'idée du Lebensraum ; mais, surtout dans le Mythe du XXe siècle (Der Mythus des 20. Jahrhunderts, 1930), il se fait le théoricien de l'antisémitisme. Il prétend apporter une image nouvelle de l'histoire de la Terre et de l'humanité. Pour lui, toute l'histoire se ramène au conflit des Nordiques aryens contre les Sémites. Il expose également une pensée anticatholique et presque antichrétienne, et développe la mythologie nationale. Il fait par exemple l'apologie du dieu Odin, dont il retrouve l'inspiration dans la chevalerie, chez les mystiques allemands, dans la pensée de Frédéric le Grand.
Walter Darré
Walter Darré, leader du mouvement agricole et Führer des paysans, est, lui aussi, raciste. Ses deux ouvrages les plus importants, la Paysannerie comme source de vie de la race nordique (1928) et Nouvelle Noblesse de sang et de sol (1930), fondent une doctrine agraire sur les liens « du sang et du sol » (Blut und Boden). Walter Darré veut montrer que la race nordique – parce que paysanne – est héroïque, colonisatrice et guerrière. Cela lui paraît lié au fait que les Nordiques n'ont jamais été nomades ; quand ils se sont déplacés, c'était pour coloniser. Le paysan nordique « est la première forme de l'officier prussien ».
Il existe des liens entre paysannerie et aristocratie, car une élite véritable est liée à une famille et non à des individus. Elle se prépare par une longue hérédité. Malheureusement, pour Darré, la noblesse allemande est en décadence, car elle s'est muée en caste et urbanisée. Il faut donc que le IIIe Reich recrée une noblesse. Darré souhaite la création de domaines héréditaires (Erbhof) et fait une longue étude de ce que devrait être le Führerblut (« le sang des chefs »).
Hitler
Toutes ces idées développées par Darré, Rosenberg ou d'autres sont orchestrées par Mein Kampf. Hitler glorifie dès les premières pages de son livre les Germains et les vrais Allemands contre les Habsbourg, qui ont contribué à dégermaniser des terres allemandes. Exaltant la nation, il s'en prend à toutes les Internationales – juive, marxiste, catholique –, quitte, d'ailleurs, à imiter leurs principes d'organisation (il y a des liens très nets entre les structures du parti nazi et celles du parti communiste de l'Union soviétique). De même, Hitler ne cache pas son admiration pour l'organisation et la discipline jésuites.
Critiquant le parlementarisme, il défend le Führerprinzip (« principe du chef »). Si l'on veut avoir les masses avec soi, dit-il, il faut prendre soin d'elles. Miséreuses et livrées à elles-mêmes, elles rêvent de socialisme international ; guidées par des chefs, elles se laissent nationaliser. Ce n'est pas difficile, car elles ont l'esprit de camaraderie, de solidarité, de sacrifice. Elles aiment l'intolérance et la brutalité. Le chef, c'est le plus fort qui mène le jeu, et le Führer, c'est le chef suprême. Il est le reflet du Volkstum (« caractère national »). Il incarne le rythme et le style de vie du Volk. « Le chef est au peuple ce que la conscience est à l'inconscience. » Il doit s'appuyer sur une institution qui dépende de lui, et le modèle pour Hitler est l'ordre Teutonique, ordre masculin hiérarchisé.
Le Führerstaat s'identifie au Volksstaat. C'est le parti unique qui doit être le fondement d'un gouvernement. L'État est une communauté d'êtres vivants, égaux, gouvernés par les meilleurs ; il lui faut faire une place importante à la jeunesse et à l'éducation, mais toujours sous la responsabilité du chef. L'État doit être centralisé pour que les directives du chef soient bien comprises de tous : comme le rappelle la devise Ein Volk, Ein Reich, Ein Führer ! (« Un peuple, un empire, un guide ! »). Dans cet État national-socialiste, on peut transformer la bureaucratie et la mettre au service du peuple. À ce peuple ne peuvent appartenir que les Allemands, et tous doivent obéir à leur Führer. Tels sont les principes que, dès son arrivée au pouvoir, le 30 janvier 1933, Hitler va appliquer.
3. L'organisation de l'État nazi

3.1. La mise au pas de l'Allemagne (janvier 1933-août 1934)

Le ministère Hitler
Le gouvernement constitué par Hitler en 1933 est un gouvernement de coalition du type le plus traditionnel. Outre Hitler, il ne comporte que deux ministres nationaux-socialistes : Wilhelm Frick et Hermann Göring. L'un est ministre de l'Intérieur du Reich et le restera jusqu'en 1943, l'autre ministre du Reich sans portefeuille, commissaire du Reich en Prusse et commissaire du Reich à l'aviation.
Dès le 1er février, toute la police allemande est contrôlée par les nazis. Aux autres postes sont nommés des sympathisants, qui très vite se convertiront au national-socialisme et, pour la plupart, restent ministres pendant la plus grande partie du régime comme le général Werner von Blomberg, à la tête de la Reichswehr (l'armée autorisée à l'Allemagne par le traité de Versailles), et qui restera ministre jusqu'en 1938. Les autres ministres sont des membres de parti national allemand (DNP) comme Alfred Hugenberg, le magnat de la presse, qui détient tous les portefeuilles économiques, mais qui se retire dès juillet 1933, et le chef de l'association d'anciens combattants Casque d'acier, Franz Seldte (1882-1947), ministre du Travail, poste qu'il conservera jusqu'en mai 1945.
Dès le 1er février, Hitler fait dissoudre le Reichstag par Hindenburg, « afin que le peuple puisse prendre position devant le nouveau gouvernement de concentration nationale ». Les élections sont fixées au 5 mars. Le 6 février, le commissaire du Reich en Prusse, Göring, se voit attribuer les pouvoirs du ministère prussien. Aussitôt après, le Landtag de Prusse est dissous. Dans le Reich, désormais, les nazis possèdent des pouvoirs considérables. Frick et Göring épurent leurs administrations respectives et prennent en main la police. En Prusse, Göring fait de la SA une véritable police auxiliaire et donne ordre à l'ensemble des forces de police de favoriser le mouvement nazi et de lutter, au besoin par les armes, contre l'agitation marxiste.
La liquidation des communistes
Utilisant avec maestria tous les pouvoirs que lui donne la Constitution de 1919 (en particulier l'article 48), Hitler fait promulguer par Hindenburg une ordonnance (4 février) qui autorise le gouvernement à interdire les réunions publiques, à suspendre les journaux, à prendre « toute mesure qu'il jugerait salutaire ». Dès lors, les nazis disposent de tous les moyens pour lutter contre les marxistes. Mais il n'est pas encore possible de dissoudre le parti communiste.
Le 27 février, le Reichstag brûle, incendié par les nazis. Un communiste hollandais, Marinus Van der Lubbe, est arrêté sur les lieux, ce qui sert de prétexte à une lutte très vive contre les communistes. Plusieurs milliers de dirigeants sont arrêtés, la presse marxiste est interdite, les sièges du parti sont occupés. Le 28 février, une ordonnance suspend les droits fondamentaux, et, le 1er mars, un autre texte décide d'assimiler à la haute trahison l'incitation à la grève. La gauche est disloquée, et aucune réaction ne se produit.
Les élections du 5 mars 1933
Hitler, notre dernier espoirHitler, notre dernier espoir
Les communistes perdent un million de voix, mais les sociaux-démocrates se maintiennent et gagnent des sièges. La situation est analogue pour le centre, qui progresse en voix et en sièges. Les nationaux-socialistes et les nationaux-allemands (parti national allemand, DNP) sont les grands vainqueurs de cette consultation. Les nazis gagnent 6 millions de voix et près de 100 sièges. Ils ont 288 sièges sur 647 députés, mais communistes, socialistes et populistes arrivent à grouper 208 députés, le Centre et les partis apparentés en ayant 96. Les nationaux-socialistes, à eux seuls, n'ont pas la majorité absolue, mais ils l'ont très largement avec les nationaux-allemands. Leur position est renforcée par la mise hors la loi du parti communiste au lendemain des élections. En effet, le parti est dissous, et Hitler dispose désormais de pouvoirs considérables.
Pourtant, dans les Länder, les nazis n'obtiennent pas toujours la majorité. Ils ne l'ont ni en Bavière ni en Prusse. Dès lors, conformément à la Constitution, Hitler nomme des commissaires du Reich dotés de pouvoirs importants, comme Göring en Prusse.
L'élimitation des partis politiques
L'ouvrier dans l'Empire de la croix gammée !L'ouvrier dans l'Empire de la croix gammée !
Le 21 mars, dans l'église de Garnisonkirche de Potsdam, a lieu une cérémonie extraordinaire. Devant les plus hautes autorités du pays, en présence du Kronprinz, fils de l'empereur déchu Guillaume II, Hitler dénonce le traité de Versailles et invite les partis à s'élever « au-dessus de l'étroitesse d'une pensée doctrinaire et partisane ». Le 24 mars, le Reichstag vote à la majorité des deux tiers les pleins pouvoirs à Hitler pour quatre ans (Ermächtigungsgesetz). Seuls les sociaux-démocrates ont voté contre. Le Centre, dont les voix sont indispensables, car une majorité des deux tiers s'impose, fait confiance à Hitler, sans doute contre la promesse d'un concordat auquel Hitler fait allusion dans son discours. Le chancelier demande aussi que le Parlement accepte de ne plus être consulté régulièrement, il réclame et obtient pour le gouvernement qu'il préside des pouvoirs considérables. Dès lors, avec la bénédiction des Églises – en particulier de l'Église catholique – Hitler est le maître absolu du Reich.
Les partis politiques croient pouvoir continuer leur action et « s'abandonnent, dit l'historien allemand Hans Rothfels, à l'illusion de la possibilité d'une opposition politique ». On voit même dans le Wurtemberg le parti social-démocrate inviter les municipalités socialistes à soutenir la politique du gouvernement. Mais, le 22 juin, le parti socialiste est dissous. Le 4 juillet, le Centre s'autodissout. Le 14 juillet, le parti nazi devient le seul parti du Reich.
L'élimination des syndicats
Le gouvernement ne se contente pas de supprimer les partis : le 2 mai, il a dissous les syndicats. Après avoir invité leurs chefs à une grandiose fête du Travail, il fait occuper leurs sièges berlinois et emprisonner leurs chefs. Tous les syndicats sont alors incorporés dans le Front allemand du travail (Deutsche Arbeitsfront, DAF), organisé par la loi du 24 octobre 1934, qui prône la solidarité entre employeurs et employés au sein de la communauté nationale, et encadre toute la population jusque dans ses loisirs à travers son organisation la Force par la Joie (Kraft durch Freude).
Ainsi, la prise en main annoncée par Goebbels dessine « les lignes normales d'une Allemagne dans laquelle il n'y aura qu'une seule opinion, un seul parti, une seule conviction ».
3.2. L'organisation de l'État nazi

Un État unitaire et répressif
La mise au pas hitlérienne arrive peu à peu à ses fins. Le 1er décembre 1933 est promulguée la loi pour la garantie de l'« unité du parti et du Reich ». À la tête du parti se trouve Hitler, aidé par un état-major de 17 personnes, dirigées par le lieutenant du Führer, Rudolf Hess. En dessous viennent des Gaue (provinces), menées par des Gauleiter. Les Gaue sont divisées en Kreise (arrondissements), cantons (Ortsgruppen), et ceux-ci en cellules (Zellen). Partout une hiérarchie stricte, que complètent les organisations parallèles : SA (Sturmabteilung), SS (Schutzstaffel), HJ (→ Hitlerjugend, Jeunesse hitlérienne), DAF, associations féminines, universitaires. À partir du 1er décembre 1936, tous les garçons et les filles doivent adhérer à la Jeunesse hitlérienne, qui compte 8 millions de membres en 1939. Tout cela contribue à faire de l'Allemagne une machine bien huilée, surveillée, contrôlée et endoctrinée.
C'est ainsi qu'apparaissent les premières mesures antisémites. On épure la presse et l'on commence à contrôler l'édition. Le 13 mars 1933, Paul Joseph Goebbels devient ministre de la Propagande. Son ministère contrôle toute la vie intellectuelle, organise des autodafés de livres d'auteurs libéraux, socialistes, communistes, pacifistes, juifs, notamment le 10 mai 1933 lors de la Nuit de cristal. Tous les moyens modernes de communication et d'information sont utilisés : la radio, qui retransmet les discours, surtout ceux de Hitler et de Goebbels, la presse (particulièrement le journal du parti, le Völkischer Beobachter), la musique, les marches, les grands rassemblements.
Deux premiers camps de déportés sont créés : à Oranienburg, près de Berlin, et à Dachau, près de Munich. Dès le mois d'avril, on y trouve 30 000 déportés politiques, socialistes ou communistes.
Le 1er mai 1933, Göring fonde la police secrète d'État prussienne, dont la fusion, sous la direction de Heinrich Himmler et de Reinhard Heydrich, avec les autres organisations policières allemandes donnera naissance à la Gestapo (Geheime Staatspolizei).
Le rôle fondamental de la SS
Instituée en 1923, la SS (Schutzstaffel, « échelon de protection ») n'était au départ que la petite garde personnelle d'Adolf Hitler. Dès 1931, elle est chargée de « nettoyer » le parti nazi, le NSDAP, des éventuels saboteurs ou agents qui auraient pu y être infiltrés. Lorsque le NSDAP devient une organisation de masse, après que la SA fut décapitée lors de la Nuit des longs couteaux (30 juin 1934), la SS devint la gardienne de la pureté idéologique et raciale, le vecteur principal de la révolution nationale-socialiste. Selon le journaliste et sociologue Eugen Kogon (l'État SS, 1946), son but est de « former la nouvelle couche de chefs et d'éliminer toute opposition ».

Heinrich HimmlerHeinrich Himmler
Heinrich Himmler, membre du parti dès août 1923 et l'un des participants – aux côtés d'Ernst Röhm –, au putsch de Munich tenté par Hitler le 8 novembre 1923 contre le gouvernement bavarois, est nommé Reichsführer des SS le 6 janvier 1929. Il parvient à faire intégrer à son organisation la police du Reich. En 1936, le « fidèle Heinrich » est nommé chef de toute la police. Il n'obéit qu'à Hitler et dirige alors une organisation composée de plusieurs corps :
– la SS générale (Allgemeine SS), dont les membres militants continuent par ailleurs d'exercer leur profession ;
– la SS armée (Waffen SS), dont les effectifs s'enflent jusqu'à devenir, après l'entrée en guerre contre l'URSS le 22 juin 1941, une véritable armée à côté de la Wehrmacht, et comptant en 1945 900 000 hommes dont un grand nombre de volontaires étrangers ;
– les « unités Tête de mort » (SS-Totenkopfverbände), qui assurent la surveillance des camps de concentration ;
– l'Office pour la race et la colonisation, chargé de veiller à la pureté raciale du peuple allemand et d'organiser la colonisation et la germanisation des nouveaux territoires ;
– l'Office central pour l'économie et l'administration (Wirtschafts und Verwaltungshauptamt,WVHA ), dirigé par Oswald Pohl et responsable des entreprises contrôlées par la SS, de la gestion des camps de concentration et de la main-d'œuvre forcée qu'y constituent les déportés.
Mais surtout – dès septembre 1939 – le redoutable Service central de la sécurité du Reich (Reichssicherheitshauptamt, RSHA), qui regroupe, sous la direction de Reinhard Heydrich, la police secrète d'État, la Gestapo, le service de sécurité (Sicherheitsdienst, SD) et la police criminelle (Kriminalpolizei), la Kripo.
Avec la guerre, la SS atteint l'apogée de sa puissance. Elle étend son emprise non seulement sur le Reich, mais également sur les territoires occupés et sur le réseau de camps de concentration, qui ne cesse de se développer. C'est elle qui met en œuvre le programme d'anéantissement des « ennemis du Reich », mais aussi qui est chargée de terroriser les populations.
3.3. Réforme de l'enseignement et de l'Administration

Réforme de l'enseignement
Propagande nationale-socialistePropagande nationale-socialiste
Les hitlériens complètent leur propagande par une réorganisation de l'enseignement et une mise au pas des universitaires. Hitler proclame : « Dans un État national-socialiste, l'enseignement doit tendre non pas à entasser des connaissances, mais à obtenir des corps physiquement sains. »
Les professeurs opposants sont mis à l'écart, qu'ils soient communistes, Juifs ou simplement hostiles au régime. Il est vrai que Hitler peut s'appuyer sur une bonne partie du corps enseignant : 30 % des instituteurs, 35 à 40 % des professeurs du second degré, plus de la moitié des professeurs du supérieur sont proches du parti nazi.
Dès 1933, on réorganise la formation des maîtres. Les Hochschule für Lehrbildung prennent les élèves-maîtres pour quatre ans d'internat, et maîtres et élèves doivent aller aux cours en uniforme du parti. Directeurs et professeurs sont à la fois fonctionnaires de l'État et chefs de Jeunesse hitlérienne. Le but est que l'instituteur soit dans sa commune à la fois un maître, un instructeur politique et un officier de réserve.
En 1939, l'association nationale-socialiste des enseignants fournit 7 Gauleiter, 78 Kreisleiter et 2 668 Ortsleiter ; 18 000 instituteurs et institutrices encadrent la Jeunesse hitlérienne. L'objectif est une politisation de l'enseignement, qu'on veut au service de la nation, de la défense et de la politique. Il faut inculquer aux enfants l'idée de race, de supériorité des peuples germaniques, la conviction que le destin de l'Allemagne est à l'Est et que l'armée est la force éternelle du Reich.
En même temps sont instaurées des écoles de formation politique, les Nationalpolitische Erziehungsanstalten (NAPOLA). Leur but est de « préparer par une solide éducation nationale-socialiste des jeunes gens au service du Reich, du peuple et de l'État ». Il faut fournir des diplômés conscients de l'unité des caractères physiques et mentaux de leur race, sûrs d'eux, fidèles, sérieux, entreprenants, physiquement forts, intellectuellement armés. Pour la formation des maîtres du parti sont créés des Adolf Hitler-Schulen et des Ordensschulen, centres supérieurs de formation des cadres.
Réforme de l'Administration
Tout au long de l'année 1933, on assiste à une réorganisation des administrations. Le gouvernement intervient dans la vie de la justice et donne à l'adjoint du Führer la possibilité de casser les jugements trop indulgents. Un tribunal du peuple est créé pour les crimes politiques. En mai 1933, on s'attaque à l'économie. Walter Darré devient ministre de l'Agriculture et Führer de la paysannerie du Reich. Hitler ordonne un programme de grands travaux sous la direction de Fritz Todt, en particulier d'autoroutes.
On crée dans le parti une série d'organisations destinées à doubler et à contrôler les administrations. Mais surtout un essor considérable est donné à la propagande. La radio en est un élément essentiel, ainsi que le cinéma et les écrivains. Il ne faut pas oublier les cérémonies grandioses qui frappent les foules, comme le congrès de Nuremberg (1er-3 septembre), la fête de la moisson, les quêtes sur la voie publique. Toutes ces cérémonies sont autant de parades, comme des films à grand spectacle.
Une loi du 30 janvier 1934 unifie le Reich. Déjà le 31 mars 1933, une loi a dissous les parlements locaux et décidé qu'il n'y aurait plus de Landtage, mais que, dans chaque Land, les assemblées locales seraient constituées dans les mêmes proportions que pour les élections au Reichstag. En avril, à la tête de chaque Land sont placés des Statthalter. Enfin, en Prusse, le chancelier lui-même est Statthalter. Désormais, les Länder n'ont plus aucune autonomie : la loi du 30 janvier 1934 les supprime purement et simplement. Les Statthalter deviennent des hauts fonctionnaires sous l'autorité du ministre de l'Intérieur du Reich. Il n'y a plus de fédération des Länder allemands, mais un État allemand centralisé. Peu à peu, les divers services des Länder disparaissent à leur tour, et, comme il n'y a plus de Länder, le Reichsrat (Chambre haute) est également supprimé (14 février 1934).
3.4. Une politique expansionniste

Défilé des troupes nazies à DantzigDéfilé des troupes nazies à Dantzig
Motivé par un pangermanisme et un nationalisme d'action, le national-socialisme pratique très vite une politique expansionniste. En 1935, la propagande hitlérienne détermine le choix des Sarrois, qui, par plébiscite, décident de la réunion de leur territoire au IIIe Reich (→ Sarre).
– En 1936, Hitler – au mépris des traités – fait réoccuper militairement la zone rhénane (→ Rhénanie) ;
– en 1938, c'est l'Anschluss (rattachement de l'Autriche) et l'invasion de la région tchécoslovaque des Sudètes (→ Tchécoslovaquie) ;
– en 1939, celle de la Bohême et de la Moravie, de Memel (→ Klaipeda) puis de Dantzig (→ Gdańsk). L'occupation de cette dernière ville prélude à la Seconde Guerre mondiale, qui verra l'Allemagne nazie dominer une bonne partie de l'Europe.
Pour en savoir plus, voir l'article Seconde Guerre mondiale.

 

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1, place Igor-Stravinsky
75004 Paris
tél. : 01 44 78 48 43 - fax 01 44 78 15 40
En 1970, le Président Georges Pompidou demande à Pierre Boulez de créer et de diriger un institut de recherche musicale associé au futur Centre national d'art contemporain et dès 1973 est mis en chantier le bâtiment conçu par les architectes Renzo Piano et Richard Rogers, au pied de l'église Saint-Merri, sous le bassin de la place Igor-Stravinsky.

Les missions de l'IRCAM

L´ Ircam accueille et suscite une interaction féconde entre création et recherche musicales. Dans la fidélité à sa vocation originelle, tout en réfléchissant l´urgence des mutations.

Une recherche multiforme

Mutuellement enrichissante pour les chercheurs et les compositeurs, la recherche se construit autour de projets concertés, accordant les technologies les plus récentes aux exigences et à la cohérence d´un contexte musical. Elle utilise les meilleures compétences scientifiques ; elle bénéficie de nombreuses collaborations extérieures, ainsi que d´une véritable valorisation des produits.

Un espace de création en temps réel

Ouvert sur la communauté musicale internationale, l´Institut accueille chaque année de jeunes talents et des créateurs affirmés. Il souhaite offrir aux compositeurs un cadre de réalisation technique performant. Le contexte pluridisciplinaire du Centre Georges-Pompidou suscite l´émergence d´oeuvres de collaboration (danse, cinéma, vidéo, installations sonores). La diffusion des commandes est favorisée par des relations privilégiées avec l´Ensemble Intercontemporain et d´autres institutions musicales (festivals, opéras, théâtres, sans oublier les maisons de disques).

Un grand pôle pédagogique

En amont et en aval de la recherche et de la création, l´Ircam propose des formations et des repères. Le compositeur doit pouvoir se familiariser avec le maniement des technologies contemporaines. L´étudiant doit avoir accès aux démarches qui guident la recherche et la création musicales d´aujourd´hui. Enfin, le public doit trouver les repères qui lui permettent de mieux s´orienter dans une aventure musicale en train de s´élaborer.

Une médiation active

L´Ircam développe ses activités éditoriales, afin de constituer une documentation sur les musiques d´aujourd´hui et de saisir aussi de manière critique les enjeux technologiques et artistiques qui se font jour. Parallèlement, la nouvelle médiathèque dote son fonds de moyens informatiques de consultation et permet d´accéder à nombre de produits multimédias. Enfin, en multipliant les journées portes ouvertes et les manifestations diverses en collaboration avec les autres composantes du Centre Georges-Pompidou, l´Ircam, plus que jamais, s´expose et se donne à voir.

Quelques dates importantes dans l'histoire de l'IRCAM

1976 Mise au point du processeur de sons numériques 4A, premier développement scientifique conduit à l'Ircam.
1979 Première version du programme Chant (sons synthétiques générés par modélisation de la voix chantée), ultérieurement complétée par le langage de contrôle Formes.
1981 Mise au point du système 4X, dernier maillon de la série de processeurs de sons numériques développée depuis 1976 et création de la version initiale de Répons, dans le cadre du festival de Donaueschingen, première oeuvre de Pierre Boulez réalisée à l'Ircam.
1983 Concept de recherche en musique, cycle de créations et de conférences. L'Ircam en réseau informatique international (et sur l'Internet dès 1989).
1984 Organisation de l'ICMC, colloque international en informatique musicale. Réalisation du logiciel Iana permettant l'analyse psychoacoustique des sons.
1986 Tournée américaine de l'Ircam, associé à l'Ensemble Intercontemporain.
1988 Finalisation du langage de programmation graphique Max, logiciel conçu par Miller Puckette, favorisant l'interaction directe entre interprète et ordinateur, utilisé par Philippe Manoury dans Pluton. Première version de Modalys, logiciel de synthèse par modèles physiques.
1991 Mise au point de la Station d'informatique musicale, plate-forme de traitement audionumérique pour la recherche, la création et la production musicales.
1992 Laurent Bayle succède à Pierre Boulez à la direction de l'Ircam.
1994 Finalisation d'AudioSculpt, logiciel graphique permettant de manipuler le son.
1995 L'Ircam et le CNRS s'associent autour d'une unité mixte codirigée par Hugues Dufourt et Hugues Vinet. Finalisation du Spatialisateur, logiciel conçu par Espaces nouveaux et l'Ircam, destiné à l'acoustique des salles, à l'espace sonore urbain et au concert.

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