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L'USINE CHIMIQUE VÉGÉTALE

 

 

 

 

 

 

 

L'USINE CHIMIQUE VÉGÉTALE


Au-delà de leur capacité unique à convertir, en présence d'énergie lumineuse, le gaz carbonique de l'atmosphère en glucides, les végétaux chlorophylliens présentent collectivement une remarquable aptitude à synthétiser des dizaines de milliers de molécules différentes. Ces produits de l'usine chimique végétale relèvent de la " chimie lourde " : amidon, cellulose, lignines…polymères d'accumulation qui représentent une part importante de la biomasse végétale et ont souvent des utilisations industrielles. Ils peuvent aussi relever de la " chimie fine " illustrée par l'extrême diversité des substances naturelles végétales. Cette deuxième catégorie de composés a un impact important au niveau des relations entre la plante (organisme immobile) et son environnement biotique dans le cadre d'un subtil dialogue moléculaire. Ces composés qualifiés parfois de métabolites secondaires ont aussi des rôles déterminants dans la couleur et les propriétés organoleptiques des productions végétales. Ils sont également largement exploités en thérapeutique. Au total, ces molécules très diversifiées illustrent la diversité génétique des plantes et sont d'ailleurs exploitées pour l'analyser. Comment sont synthétisées et s' accumulent ces différentes catégories de substances ? Quel est leur rôle dans les chaînes alimentaires ? Peut-on jouer sur les profils biochimiques des plantes ? Quelles sont les exploitations de plus en plus diversifiées de l'extraordinaire panoplie chimique des plantes ? Ce sont quelques-unes des questions qui seront abordées dans cette présentation.

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Texte de la 9ème conférence de l'Université de tous les savoirs réalisée le 9 janvier 2000
par Alain-Michel Boudet
L’usine chimique végétale


Notre attitude vis à vis du monde végétal est souvent ambivalente. D’une part, nous portons
sur les plantes un regard dominateur et anthropomorphique, Platon pensait déjà que les
plantes étaient des animaux mutilés dont les poils fichés en terre avaient donné des racines.
D’autre part, nous manifestons un intérêt latent pour les mystères et les bienfaits potentiels du
monde végétal.
Quoiqu’il en soit, une proportion limitée de nos contemporains réalise que nous sommes
totalement dépendants, pour notre survie, des végétaux dont le rôle essentiel est occulté par
toute une série d’écrans qui correspondent aux processus de transformation des productions
végétales dans un monde industrialisé.
Cette dépendance peut être facilement illustrée par deux scénarios de science fiction.
Supprimons la vie végétale sur la planète, la vie animale disparaît aussitôt. Supprimons la vie
animale, le monde des plantes continue à prospérer.
Quelles sont donc les supériorités de cet organisme végétal, apparemment si simple, avec peu
d’organes différents et une absence de fonctions qu’à notre échelle de valeur nous appelons
évoluées : locomotion, système digestif, système nerveux.
1/ Les plantes producteurs primaires dans l’écosystème
La plante, organisme se développant à l’interface entre le milieu aérien et le milieu souterrain
présente une série de capacités uniques :
- Pouvoir prélever grâce à des adaptations morphologiques des éléments qui sont présents
dans ces 2 milieux à très faibles concentrations (Co2, sels minéraux…),
- Pouvoir grâce au phénomène de photosynthèse vieux de près de 3 milliards d’années
convertir en exploitant l’énergie lumineuse le gaz carbonique en glucides simples,
- Pouvoir transformer ces produits élémentaires à la suite de nombreuses réactions
enzymatiques en des milliers de molécules diversifiées souvent complexes.
Pénétrons un peu plus avant dans les circuits de l’Usine Chimique Végétale.
Les produits finis qui en découlent appartiennent à trois catégories : la chimie du vivant, la
chimie lourde et la chimie fine.
Les premiers représentent les intermédiaires des grands cycles métaboliques, les protéines et
les enzymes impliqués dans les processus fondamentaux de réplication, transcription,
synthèse protéique, transports cellulaires, régulation, etc. Ce sont des molécules
indispensables au fonctionnement de base de l’organisme végétal qui de façon intéressante se
retrouvent très conservées dans les différents règnes traduisant ainsi l’unité du monde vivant.
Les produits de la chimie lourde sont des polymères plus spécifiques des plantes qu’elles
accumulent massivement pour répondre à des stratégies d’adaptation au niveau de leur
fonctionnement global. Ils représentent l’essentiel de la biomasse végétale.
2
Les produits de la chimie fine enfin illustrent les formidables capacités de synthèse des
plantes qui, collectivement synthétisent plusieurs dizaines de milliers de structures différentes
reflétant la diversité des espèces végétales et assurant des fonctions cruciales dans les
relations entre la plante et son environnement.
Nous considérerons dans cet exposé les seuls produits de la chimie lourde et de la chimie fine
qui expriment particulièrement les performances et la spécificité de l’Usine Chimique
Végétale.
2/ La chimie lourde : simplicité et unité du monde végétal, la base des aliments et des
produits industriels.
L’activité chimie lourde comprend l'amidon, la cellulose et les lignines, etc.
Cette liste des produits concerne les composés majeurs mais n’est pas exhaustive. On pourrait
y rajouter des protéines de réserve des graines, des polymères de surface comme la cutine et la
suberine.
De façon très constante et en relation avec les fonctions assurées, ces polymères se retrouvent
soit dans la graine (ou autres organes de réserve comme les tubercules) soit dans les parois
cellulaires qui délimitent le cytoplasme des cellules végétales et assurent la structuration et la
relative rigidité des tissus et organes.
L’amidon et la cellulose représentent deux versions d’une chimie relativement simple
reposant sur la polymérisation du glucose.
L’amidon résulte de l’association de l’anomère α du glucose par des liaisons glycosidiques
entre les carbones 1 et 4 de deux unités consécutives (liaison α 1-4). La figure 1 indique les
différentes étapes de la synthèse de l’amidon L'association d’unités glucose par
l’intermédiaire de liaisons α 1-4 conduit à une des composantes de l’amidon : les chaînes
linéaires d’amylose qui peuvent adopter dans l’espace une disposition en spirale. Sur ces
chaînes linéaires d’amylose peuvent se greffer des ramifications latérales d’amylopectine par
l’intermédiaire de liaisons α 1-6 faisant intervenir l’enzyme de ramification de l’amidon.
(SBB). L’amidon est déposé sous forme de granules de 10 à 150 μ de diamètre dans
l’albumen des céréales ou les tubercules de différentes plantes dont la pomme de terre.
L’accumulation d’amidon dans ces organes explique qu’ils représentent la partie récoltée de
la plante. Le "succès" de la graine est donc dû à sa capacité à accumuler à forte concentration
des éléments nutritifs comme l’amidon. Ainsi, les 4 premières productions agricoles
mondiales, riz, blé, maïs, pomme de terre, qui correspondent à une production totale annuelle
de 1.5 milliards de tonnes, stockent de l’amidon dans leurs organes de réserve et le riz et le
blé apportant environ la moitié des calories ingérées par l’espèce humaine. Comme nous le
verrons, l’amidon a, au delà d’un intérêt alimentaire, de nombreuses utilisations industrielles.
3
Comme l’amidon, la cellulose est un homopolymère de glucose mais dans ce dernier cas,
c’est l’anomère β du glucose qui est impliqué dans une liaison glycosidique entre les carbones
1 et 4 d’unités adjacentes. Ce type d’association conduit à un polymère linéaire dont
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différentes chaînes (une trentaine) peuvent s’associer pour donner des microfibrilles de
cellulose à l’état cristallin qui vont jouer un rôle structurant dans la paroi végétale.
La cellulose représente la molécule organique la plus abondante de la biosphère et correspond
environ à la moitié de la matière organique synthétisée chaque année par les organismes
photosynthétiques terrestres (soit environ 50 milliards de tonnes/an).
Au delà de leur rôle important chez les végétaux, ces polymères sont largement exploités dans
les activités humaines. L’amidon est à la base de l’alimentation humaine mais est aussi utilisé
industriellement dans l’alimentation : additif, liant alimentaire, iso glucosevia des procédés de
transformation… ou dans des activités typiquement industrielles diversifiées ; additif dans les
pâtes à papier, colles, matières plastiques…
La cellulose assimilée par les herbivores ruminants, rentre dans les chaînes alimentaires. Son
utilisation industrielle est cependant plus apparente. Elle représente l’essentiel des fibres
textiles ou industrielles de différentes origines : coton, lin, chanvre….
Cependant, c’est son rôle de base dans la production de la pâte à papier et de ses dérivés
(papiers, cartons) qui correspond à la plus grande échelle d’utilisation. La valeur économique
au plan mondial de la pâte à papier et des papiers cartons produits annuellement est de 735
milliards de dollars. La demande croit continuellement et est généralement proportionnelle au
degré de développement des différents pays. Le recyclage des papiers et cartons prend une
importance croissante.
L’exemple des lignines second biopolymère en abondance après la cellulose chez les
végétaux (25 % de la biomasse terrestre) nous conduit au concept d’évolution biochimique.
Les lignines ne sont caractérisables que chez les plantes vasculaires ou trachéophytes. Les
premières plantes terrestres les Bryophytes (les mousses) n’en possèdent pas. Les lignines
sont des polymères phénoliques extrêmement complexes dont une représentation est donnée
sur la figure 2. Leur synthèse résulte de la polymérisation d’un nombre limité (au plus 3)
d’unités monomères, les monolignols, mais leur complexité résulte de l’association potentielle
de ces unités par différentes liaisons chimiques sans aucun caractère ordonné ni répétitif. Il en
résulte un polymère amorphe et hydrophobe qui en se déposant dans les parois leur confère
une grande rigidité et résistance mécanique et augmente leur hydrophobicité. Les lignines ont
permis une transition importante dans l’évolution du monde végétal : le passage d’un port
rampant (mousses) à un port dressé (fougères) qui est celui que nous connaissons pour toutes
les plantes les plus évoluées gymnospermes et angiospermes. Cette nouvelle architecture
permettant une meilleure occupation de l’espace conférait un avantage adaptatif évident, la
mise en place d’un système vasculaire vrai au niveau de cellules lignifiées (vaisseaux,
trachéides) autorisant des échanges à grande distance à l’intérieur de la plante. Cette transition
s’est produite il y a environ 350 millions d’années, et il est intéressant de noter que la
complexité chimique des lignines s’est accrue au cours de l’évolution.
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La plante pour acquérir une nouvelle architecture et de nouvelles fonctions a dû mettre en
place des solutions chimiques à la fois complexes et onéreuses au plan énergétique qui
tranchent avec ce que nous avons vu dans le cas des polymères glucidiques.
Si les lignines sont indispensables aux stratégies adaptatives des plantes à port dressés,
l’homme ne sait pas, contrairement aux polymères précédents, les exploiter. Elles nuisent à la
digestibilité des fourrages par les ruminants et doivent être extraites du bois à travers des
procédés énergétiquement coûteux et polluants au niveau des industries de la pâte à papier.
3/ La chimie fine : diversité et complexité des produits, pluralité des fonctions pour la
plante et dans les activités humaines
Les composés de la chimie fine ont été parfois regroupés dans la catégorie des métabolites
secondaires parce que sur le plan de la biogenèse ils dérivent des métabolites primaires mais
aussi parce qu’ils ne sont pas nécessaires au fonctionnement de base de la cellule. Les travaux
des dernières années contribuent à démontrer que ces composés sont étroitement impliqués
dans les interactions entre la plante et son environnement et particulièrement l’environnement
biotique. Ils sont le fruit de l’évolution biochimique qui a mis en place des chaînes de
réactions enzymatiques nouvelles et souvent complexes à l’image de ce que nous avons
analysé au niveau des lignines et qui résultent souvent de phénomènes de co-évolution entre
la plante et les autres organismes de son environnement.
Les trois familles chimiques majeures représentatives des produits de la chimie fine sont les
composés phénoliques, les terpènes et les alcaloïdes. Elles comprennent chacune
individuellement une dizaine de milliers de structures chimiques différentes. Cette liste n’est
pas exhaustive pourraient s’y ajouter les saponines, les bétalaïnes (responsables des couleurs
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rouge, violet de la betterave, des fleurs de bougainvillier) les glucosinolates qui confèrent leur
saveur acre aux cruciferes, les glucosides cyanogénétiques…
Leur localisation dans la plante est très diversifiée au niveau des organes, mais au niveau
cellulaire il s'agit fréquemment d'une accumulation vacuolaire. Ils ont un rôle dans la
communication et l'adaptation à l'environnement biotique et abiotique.
Les composés phénoliques possèdent au moins en commun un hydroxyle phénolique sur un
noyau benzénique. Les flavonoïdes, composés à 15 atomes de carbone, sont souvent
responsables de la couleur des fleurs et des fruits.
La figure 3 nous donne les détails des voies de synthèse des flavonols et des anthocyanes
deux sous classes de la grande famille des flavonoïdes, à partir d’un précurseur général de la
synthèse phénolique le coumaroyl-coenzyme A (ester entre l’acide coumarique et le
coenzyme A). Les flavonols de type quercetine ou kaempferol sont souvent responsables de la
couleur jaune, les anthocyanes du bas de la planche sont bien représentées chez le pétunia. Il
s’agit de glucosides tels que la pelargonidine (couleur rouge brique) la cyanidine (couleur
rouge) ou la delphinidine (couleur bleue).
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La nature des étapes enzymatiques et les gènes correspondants, catalysant les différentes
réactions sont bien connus (ce qui n’est pas le cas pour tous les composés phénoliques ou
d’autres familles de substances naturelles). Il est de plus démontré que
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- Des variations minimes de la structure chimique d’une molécule de base, par exemple le
nombre d’hydroxyles pour les anthocyanines, sont responsables de modification de la
coloration,
Enfin ces structures sont fréquemment rencontrées sous forme de glycosides (liaisons avec le
glucose ou d’autres oses) ce qui facilite leur hydrosolubilité et permet leur accumulation
vacuolaire.
Les composés phénoliques possèdent des fonctions multiples chez les plantes. Dans de
nombreux cas, ces composés ont un rôle protecteur, dissuasif ou toxique vis à vis de
microorganismes pathogènes ou d’insectes. En ce qui concerne les microorganismes, nous
pouvons donner deux exemples :
a) des composés préformés comme les flavanes qui chez certains cultivars de bananiers
accumulés dans les tissus sous épidermiques confèrent une résistance à la cercosporiose .
b) des composés néosynthétisés en réponse à l’attaque par un pathogène dont certains
composants (les éliciteurs) vont déclencher l’apparition de produits de défense (les
phytoalexines). Le resveratrol, stilbéne de la vigne ou les isoflavones de type pisatine chez le
pois, en sont des exemples.
Des composés simples volatils sont responsables de l’arôme de divers produits (vanilline chez
la vanille, eugénol chez la banane, cinnamate de méthyle chez la fraise…). Les flavonoïdes
confèrent parfois une sensation d’astringence (tannins des pommes vertes, coings) ou
d’amertume (naringine chez le pamplemousse). D’autres composés interviennent de façon
plus négative dans les phénomènes de brunissement causés par des blessures ou des accidents
de conservation (cas des températures trop fraîches, pour de l’ananas).
Sur un plan nutritionnel, les propriétés antioxydantes des flavonoïdes de notre alimentation
peuvent être liées à un rôle protecteur vis à vis des grandes pathologies, maladies cardiaques
et cancers.
Les terpènes se caractérisent par une grande homogénéité chimique. Ilsdérivent d’un motif
structural unique, le pyrophosphate d’isopentenyle issu de l’acétylcoenzyme A dont la
polymérisation conduira à des terpènes de plus en plus complexes, le latex de l’hévéa qui
donne le caoutchouc représentant un exemple de polyterpène.
Les monoterpènes volatils représentant les principes des essences odorantes de différentes
espèces ont des structures chimiques variées : géranium (géraniol) rose (nérol) menthe
(menthol) thym (thymol….). Ces composés sont souvent regroupés sous le vocable d’huiles
essentielles et ont une utilisation importante dans les industries du parfum de la cosmétique ou
de la pharmacie.
Les terpènes volatils peuvent avoir des rôles tout à fait importants dans les relations plantesinsectes.
L'espèce la plus cultivée de terre Solanum tuberosum est sensible aux pucerons
Myzus persicae qui sont des vecteurs de virus très dommageables au niveau des rendements
(figure 4). Une variété sauvage S. berthaulti n’est pas infestée par les pucerons et ce
comportement spécifique a été associée à l’émission au niveau de poils glandulaires foliaires
d’un sesquiterpène : le βfarnesene, structure chimique qui joue normalement le rôle de
phéromone d’alarme chez les pucerons. Ce signal chimique est émis par ces insectes dans des
situations de danger pour avertir les insectes au voisinage et induire leur fuite.
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D'une manière plus générale de nombreuses plantes émettent lorsqu’elles sont parasitées par
des chenilles, des terpènes volatils qui attirent des guêpes prédateurs de ces chenilles. Ce
signal chimique volatil, beaucoup plus efficace qu’une détection visuelle de ces proies, est, en
fait, produit à la suite d’une interaction complexe entre la plante et la chenille parasite.
Les alcaloïdes comprennent le plus grand nombre de structures. Les molécules sont souvent
complexes et structuralement hétérogènes. Leurs voies de biosynthèse sont souvent très mal
connues.
Leurs points communs sont :
- la présence d’un atome d’azote dans la molécule,
- une réaction alcaline en solution,
- de fréquentes propriétés biologiques et pharmacologiques au niveau de différentes fonctions
physiologiques chez l’homme.
Quelques alcaloïdes ont des noms qui nous sont familiers étant donné leurs activités
stimulantes ou leurs utilisations en thérapeutique : nicotine, caféine, quinine, codéine,
morphine, vinblastine….
L’exemple du taxol à propriétés anticancéreuses très intéressantes (ovaire, sein….) mérite une
analyse un peu plus approfondie. Cette molécule (figure 5) a été initialement identifiée dans
l’écorce d’une variété d’if de la Côte Pacifique aux USA (Taxus brevifolia). L’efficacité du
taxol a entraîné une demande importante en taxol qui pouvait conduire à la destruction
massive de cette espèce. La synthèse chimique du composé extrêmement complexe comprend
30 étapes et n’apparaît pas commercialement rentable. A la suite de différentes tentatives
infructueuses envisageant la production du composé par des cultures de cellules végétales ou
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par des cultures fongiques, la solution de l’hémisynthèse s’est avérée la plus satisfaisante.
L’équipe du Professeur Potier à Gif/Yvette a en effet découvert qu’un constituant du feuillage
de l’if européen (Taxus baccata) : la baccatine pouvait être converti par voie chimique en
taxol. Dans ce cas d’hémisynthèse, la plante assure la moitié du travail et le chimiste la
seconde moitié. Ce procédé qui a conduit en particulier à la commercialisation du Taxol par
Rhône-Poulenc (Taxotère) est tout à fait illustratif des courants de recherche actuels dans le
domaine des substances à effets thérapeutiques (criblage biologique, aide de la chimie pour la
synthèse du composé ou de dérivés...).
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La diversité chimique des substances naturelles représente le résultat d’un processus
d’évolution biochimique, souvent spécifique de groupes végétaux particuliers, ayant conduit à
de nouvelles propriétés enzymatiques. Les nouvelles enzymes résultent elles-mêmes de
l’expression de séquences géniques légèrement modifiées (mutations ponctuelles, échanges de
domaines…) au cours de l’évolution.
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Certaines substances naturelles qui ont une distribution relativement étroite parmi les
végétaux peuvent être utilisées comme marqueurs dans des études de taxonomie visant à
classer les végétaux et à définir des proximités évolutives entre familles et espèces. On parle
alors de chimiotaxonomie. Ces critères chimiques s’ajoutent mais ne remplacent pas les
critères morphologiques qui ont toujours été utilisés en taxonomie, ou les critères
moléculaires basés sur les homologies de séquences de gènes spécifiques.
La planche de la figure 6 illustre la distribution d’un flavonoide, la tricine chez les
monocotylédones . On peut noter la présence de ce composé dans les ordres qui sont
phylogénétiquement proches comme les Arecales, Cyperales ou Poales (qui regroupent
l’ensemble des graminées) mais aussi dans des ordres éloignés comme les Orchidales. Dans
ce cas, ces espèces sont si distantes que l’évolution, ayant abouti à la mise en place des gènes
du métabolisme de la tricine, a dû se faire de façon indépendante et parallèle dans ces ordres
distants au plan taxonomique. Ce qui illustre une des limitations de l'approche chimiotoxique.
4/ Flexibilité et subtilité de l’Usine Chimique Végétale
La plante ne produit pas avec la même intensité et à tout moment, les éléments de sa panoplie
biochimique. La synthèse de nombreux composés de la chimie fine est par exemple stimulée
dans différentes situations de stress en relation avec leur rôle dans la défense. Certains
composés d’accumulation se mettent en place de façon transitoire à certains stades du
développement. C’est le cas des acides alicycliques : quinique et shikimique qui peuvent
s’accumuler à fortes concentrations (plus de 10% de la matière sèche) dans les feuilles de
nombreuses espèces ligneuses. L’accumulation est maximale au printemps puis les teneurs
chutent pendant l’été, ces composés étant sans doute utilisés comme précurseurs dans les
synthèses phénoliques.
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Les conditions d’environnement, lumière, température en particulier, ont un impact majeur
sur les profils biochimiques des plantes. Un exemple spectaculaire est donné par des travaux
de mon laboratoire sur l’espèce Kalanchoe blossfeldiana. Cette crassulacée accumule
massivement des tannins en jours longs. Cependant, lors d’un transfert de la plante en jours
courts, les teneurs en tannins s’effondrent et corrélativement les teneurs en acide malique
initialement faibles augmentent considérablement. Le paramètre durée du jour influence donc
de façon décisive l’orientation du carbone vers l’un ou l’autre des produits d’accumulation.
Au plan de la localisation spatiale des composés accumulés, il existe généralement une
adéquation entre localisation et fonction. Les flavonoïdes, à rôle d’écran vis à vis du
rayonnement UV ont une localisation épidermique. D’autres composés impliqués dans la
défense peuvent avoir des localisations sous épidermiques(les flavanes du bananier). Les
composés terpéniques volatils sont accumulés dans des poils glandulaires ou des poches
secrétrices à la surface des organes.
Au niveau sub-cellulaire, le stockage de nombreux composés du métabolisme végétal a lieu
dans la vacuole. Cette enclave hydrophile de la cellule végétale, métaboliquement inerte, peut
occuper jusqu’à 90% du volume cellulaire et les substances naturelles où certains produits
d’accumulation y sont concentrés sans dommages éventuels pour les fonctions métaboliques
du cytosol. L’accumulation vacuolaire du glucoside de l’acide ortho-coumarique chez
Melilotus alba peut illustrer un des intérêts de cette compartimentation. Ce composé peut
s’accumuler dans la vacuole à de fortes concentrations sous forme de 2 isomères -cis/trans-
(jusqu’à 4% de la masse sèche chez certains cultivars). Lorsque le glucoside cis est hydrolysé
sous l’action d’une glucosidase, l’acide libéré se lactonise spontanément pour former la
coumarine composé toxique en particulier pour les animaux (anticoagulant…). Chez la plante,
la glucosidase active est strictement localisée dans la paroi. Lors d'une décompatimentation
cellulaire résultant d'une blessure ou de l'attaque par un insecte ou un herbivore, il y a mise en
contact. La formation de coumarine toxique suit l’hydrolyse du glucoside et représente un
mécanisme dissuasif vis à vis des prédateurs. La glucoside de l’acide ortho coumarique,
compartimenté dans la vacuole, représente ainsi une "bombe à retardement" dont le
déclenchement est assuré par l’organisme agresseur.
5/ Epilogue et prospective
L’organisme végétal autotrophe vis à vis du carbone mais immobile, a su définir diverses
stratégies chimiques pour s’adapter sur place à son environnement changeant. Ces stratégies
chimiques reposent sur des phénomènes d’attraction de répulsion, d’inhibition de croissance
de partenaires, parasites ou prédateurs. Elles peuvent également intervenir dans l’adaptation
aux paramètres physiques de l’environnement. (lumière, sécheresse, températures extrêmes,
salinité…). Les plantes semblent ainsi avoir mis en place des modalités adaptatives le plus
souvent efficace et étant donné l’extrême diversité chimique il est envisageable que diverses
espèces végétales aient développé différentes solutions pour résoudre un problème identique.
Si l’on revient aux composés impliqués dans les défenses naturelles des plantes, nombreux
sont ceux qui présentent une certaine toxicité ou induisent chez les productions végétales des
caractéristiques dissuasives au niveau de la consommation : astringence, amertume de certains
composés phénoliques, saveur acre causée par les glucosinolates chez les crucifères par
exemple. La sélection, pratiquée par les améliorateurs de plantes, a conduit progressivement à
éliminer ou à réduire les proportions de ces composés au niveau des grandes cultures ou des
productions végétales utilisées dans l’alimentation de façon à les rendre plus facilement
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acceptables par le consommateur. Et, c’est une sorte de paradoxe qui nous conduit maintenant
à épandre des milliers de tonnes de pesticides sur ces plantes privées de leurs défenses
naturelles.
Les exemples suivants évoquent des voies renouvelées d'exploitations des ressources de
l'usine chimique végétale.
(1) Le médicament et le criblage à haut débit
Cent vingt structures chimiques dérivées d’une centaine d’espèces végétales peuvent être
considérées comme la base de médicaments importants. Les trois quarts ont été découvertes
par exploitation des plantes utilisées dans les médecines traditionnelles, plantes utilisées
empiriquement en thérapeutique. Si l’on considère que seulement 15% des 300 000 espèces
végétales terrestres ont été systématiquement étudiées pour leurs activités biologiques, un
immense champ de prospection apparaît ouvert.
Après une phase où les dérivés de la chimie de synthèse ont été privilégiés on assiste ainsi à
un regain d’intérêt pour les substances naturelles dans le domaine du médicament et les
nouvelles potentialités du criblage à haut débit permettent d’envisager l’émergence de
nouvelles molécules actives. Ces stratégies reposent sur trois dimensions complémentaires :
- La robotisation des tests « in vitro » de criblage permettant d’évaluer jusqu’à 200 000
molécules/mois au niveau d’un site pour une activité biologique spécifique.
- La définition de plus en plus pertinente de cribles simplifiés dérivant des progrès de la
génomique et du post-génome qui permettent de mieux identifier les cibles moléculaires
importantes dans les grandes pathologies.
- L’exploitation accrue de flores déjà étudiées par d’autres tests ou non encore évaluées
(tropicale, sub-tropicale…) ce qui pose, par ailleurs, les problèmes juridique et éthique de la
propriété ou de l’appropriation des ressources génétiques et de la biodiversité végétale.
(2) La nutraceutique
Ce néologisme résultant du rapprochement entre les 2 termes nutrition et thérapeutique
recouvre des recherches et des réflexions très actuelles (on retrouve la même association de
termes dans le vocable alicament). Au delà d’une satisfaction des besoins nutritionnels de
base, il est de plus en plus envisagé que certains composants mineurs de l’alimentation (par
leur apport énergétique) peuvent exercer des effets préventifs vis à vis de grandes pathologies
(cancers, maladies cardiovasculaires…) ou des troubles associés à des transitions
physiologiques comme la ménopause.
Les études se multiplient dans ce sens et les groupes industriels de l’Agro-alimentaire
s’intéressent particulièrement à ce créneau qui vise un maintien en bonne santé par une
optimisation raisonnée de l’alimentation.
Deux niveaux peuvent être schématiquement considérés dans le domaine de la nutraceutique :
1/ Celui des carences en vitamines, acides aminés indispensables…. qui affectent
essentiellement les pays en voie de développement à l’exception du problème de la carence en
folate plus général.
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2/ Celui plus subtil des facteurs protecteurs : phytooestrogènes, antioxydants…dont les effets
positifs sont basés le plus souvent sur des corrélations, mais ne sont pas indiscutablement
démontrés. Des études épidémiologiques et des recherches approfondies visent à l’heure
actuelle à apporter une base scientifique solide à l’existence de ces effets positifs potentiels
pouvant autoriser les fameuses allégations santé que les législations des différents états
délivrent avec plus ou moins de parcimonie.
(3) La plante bioréacteur au champ
Ce dernier secteur se situe à l’interface entre réalisations effectives et scénarios futuristes. Il
s’agit en exploitant les méthodes de l’ingénierie métabolique de faire produire à des plantes
de grande culture considérées comme des bioréacteurs au champ, des molécules utiles
qu’elles produisent naturellement ou non.
Ainsi, le colza a été abondamment utilisé aux USA pour la production de matières lipidiques
enrichies en acides gras spécifiques à usages alimentaires ou industriels. Les progrès dans la
connaissance des enzymes, clés des voies de synthèse des acides gras et des gènes
correspondants et l’aptitude du colza, deuxième oléagineux au plan mondial à être transformé
génétiquement, ont conduit à retenir cette espèce, à grande échelle, pour ces manipulations
des profils lipidiques.
La figure 7 montre les modifications qui ont été ainsi induites par génie génétique au niveau
de l’huile de colza dont la composition naturelle en acide gras est donnée dans l’encadré du
bas. Des plantes transformées produisant de nouvelles proportions d’acides gras ont déjà été
cultivées au champ à grande échelle (flèches doubles) ou produites au niveau du laboratoire
(flèches simples). Cette maîtrise de la production de corps gras spécifiques devrait s’amplifier
et se diversifier dans le cadre d’utilisations industrielles.
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D’autres applications illustrent le potentiel des plantes bioréacteurs au champ. Il s’agit du
"molecular pharming" qui vise à faire produire par les plantes des produits thérapeutiques :
vaccins, protéines ou enzymes à effets thérapeutiques.
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On peut également évoquer la production par les plantes de polyhydroxybutyrates, matières
plastiques biodégradables. Le secteur des biocarburants devrait également bénéficier de ces
applications.
L’homme, dépendant des plantes pour sa survie, a cherché, depuis des millénaires, à les
exploiter de façon optimale pour en extraire un maximum de ressources. Il a acquis, depuis
peu, une aptitude supplémentaire, celle de modifier à son avantage le fonctionnement de
l’Usine Végétale. Cette capacité s’ajoutant à une exploitation raisonnée de la Biodiversité doit
apporter dans les décennies à venir de nouveaux bénéfices et produits issus du monde des
plantes.
© Utls.

 
 
 
 

LES ABEILLES SAUVAGES ....

 

 

 

 

 

 

 

 Les abeilles sauvages, butineuses menacées
Lise Barnéoud dans mensuel 483
daté janvier 2014 -  Gratuit
L'année 2013 signe leur revanche. Discrets et le plus souvent solitaires, les insectes pollinisateurs sauvages étaient jusqu'alors éclipsés par leur cousine domestique : l'abeille Apis mellifera, considérée comme la reine des butineuses et à ce titre vue comme un précieux auxiliaire agricole. En effet, nombreuses sont les plantes qui nécessitent, à des degrés divers, l'intervention d'insectes pour leur reproduction. Sans ces transporteurs de pollen, la plupart des fruits et légumes de nos contrées n'existeraient pas. Adieu également café, cacao, poivre ou encore vanille... Or, selon une étude internationale publiée en mars, cette distinction était largement usurpée : les abeilles sauvages (dont les bourdons), mais aussi certaines guêpes et mouches sont des pollinisateurs bien plus efficaces que l'abeille domestique [1].

De quoi réjouir les agriculteurs, confrontés à l'hécatombe de cette dernière (lire « Les abeilles domestiques s'effondrent », p. 27) ? Hélas, peut-être pas. Car la reconnaissance du rôle des pollinisateurs sauvages s'accompagne d'un signal d'alarme : eux aussi déclinent [2].

Et c'est plus qu'inquiétant puisque, comme l'a montré une troisième étude, la disparition de quelques espèces dans une zone donnée suffit parfois à diminuer la productivité des plantes [3].

Voilà des millénaires que l'homme n'en a que pour les abeilles mellifères, domestiquées dès l'Antiquité. Et pour cause : le miel qu'elles produisent en grandes quantités est l'aliment le plus concentré en sucres disponible à l'état sauvage. Reste qu'au-delà des sept espèces connues dans le monde (Apis mellifera étant la plus représentée d'entre elles), il existe environ 20 000 espèces d'abeilles sauvages, au mode de vie essentiellement solitaire, qui vivent cachées dans le sol, dans le bois, contre les murs ou les rochers. Mais aussi quelque 6 000 espèces de syrphes, petites mouches rayées qui se nourrissent de nectar, environ 5 000 espèces de guêpes, sans parler des papillons et même des fourmis qui passent de fleur en fleur.

Tous ces insectes, qui appartiennent à des groupes très différents, sont susceptibles de participer à la pollinisation des plantes en transportant les grains de pollen depuis les étamines (organe mâle) d'une fleur jusqu'au stigmate (organe femelle) d'une autre. Mais jusqu'alors, leur efficacité pollinisatrice n'avait fait l'objet que de rares études.

Tournesols, courges et amandiers
En 2006, un premier article avait montré que certaines cultures de tournesols produisaient jusqu'à cinq fois plus de semences lorsqu'elles étaient visitées par les abeilles domestiques et les abeilles sauvages [4]. Un constat complété en 2008 sur les cultures de courges puis d'amandiers : dans les deux cas, la présence d'abeilles sauvages permet d'augmenter le taux de fructification, c'est-à-dire le pourcentage de fleurs qui donnent des fruits. « Ces exemples individuels étaient intéressants, mais ils ne permettaient pas d'extrapoler à l'ensemble des cultures dites "entomophiles" qui dépendent des insectes pour leur pollinisation », retrace Bernard Vaissière, spécialiste de la pollinisation à l'Institut national de la recherche agronomique d'Avignon.

Mais en 2011, les résultats d'une première étude de plus grande envergure sont rendus publics. Coordonnée par Lucas Garibaldi et Alexandra-Maria Klein, respectivement de l'université de Rio Negro, en Argentine, et de l'université de Lunebourg, en Allemagne, cette étude a porté sur 369 parcelles et 21 cultures différentes dans 15 pays [5]. Les observations réalisées montrent que plus les cultures sont éloignées des zones naturelles telles que des forêts, des friches ou des prairies permanentes, plus le taux de fructification diminue. Or, cette diminution est corrélée à une baisse de la diversité des pollinisateurs sauvages dans les cultures en question. Ainsi, les champs situés à 1 kilomètre des zones sauvages possèdent une diversité en pollinisateurs environ 25 % plus faible et un taux de fructification inférieur de 9 % à celui des champs qui jouxtent ces milieux préservés, alors que le nombre d'abeilles mellifères qui les visitent est identique.

Déjà importants, ces résultats sont désormais surpassés par ceux que les deux scientifiques ont publiés en 2013. Avec leurs 48 coauteurs issus de 17 pays, ils ont cette fois observé 600 parcelles réparties sur les 5 continents, incluant 41 cultures différentes, c'est-à-dire la majorité des cultures entomophiles [fig. 1]. Les pratiques culturales étaient variées, allant de la monoculture intensive à la culture biologique. Et la moitié des parcelles étudiées était située à proximité de ruches, facilitant la comparaison entre les pollinisateurs sauvages et les abeilles domestiques.

Dans chacune de ces 600 parcelles, les observateurs ont compté le nombre d'espèces de pollinisateurs visitant les fleurs d'une plante ou, dans le cas des arbres fruitiers, d'une branche, sur un certain laps de temps (allant de quelques minutes à une heure). Ils ont alors constaté qu'en moyenne chaque parcelle est fréquentée par 9 espèces différentes d'insectes pollinisateurs. Essentiellement des abeilles (sauvages et/ou domestiques), mais aussi des syrphes, ainsi que quelques papillons ou guêpes. En termes quantitatifs, Apis mellifera est la plus représentée dans la plupart des parcelles.

Fructification accrue
Pour 32 cultures, ils ont ensuite mesuré le succès de ces visites en comptant le pourcentage de fleurs ayant produit des fruits ou des graines. Les résultats sont sans appel : lorsque les visites de pollinisateurs sauvages augmentent, le taux de fructification augmente aussi, quelle que soit la culture considérée. En revanche, en cas de visites plus nombreuses des abeilles domestiques, il n'augmente que pour 14 % des cultures. Plus frappant encore : l'augmentation de fructification induite par les pollinisateurs sauvages est deux fois plus élevée que celle induite par la butineuse domestique. Enfin, le taux de fructification maximum n'est atteint que lorsque ces parcelles sont visitées à de nombreuses reprises, à la fois par des pollinisateurs sauvages et par l'abeille mellifère.

« Il s'agit d'une étude majeure qui démontre clairement l'importance de ces insectes sauvages dans la pollinisation des cultures », juge Bernard Vaissière, qui regrette toutefois que les auteurs n'aient pas pris en considération les variétés des différentes espèces cultivées. « Le niveau de dépendance aux insectes peut énormément varier en fonction des variétés végétales », explique-t-il. « C'est exact, reconnaît Lucas Garibaldi. Mais nos résultats étant identiques quelles que soient les cultures, on peut penser qu'ils ne dépendent pas non plus du type de variétés utilisées. »

Quoi qu'il en soit, il y a désormais peu de doute que les insectes pollinisateurs sauvages, et surtout les abeilles sauvages, sont plus efficaces que leurs cousines domestiques pour induire une fructification. Comment cela se fait-il ? Les chercheurs ont mis en évidence un phénomène susceptible de l'expliquer, au moins en partie. Pour 14 cultures, ils ont mesuré le nombre de grains de pollen déposé sur un stigmate après la visite des différents insectes. Or, ils ont constaté que les abeilles mellifères déposent en moyenne plus de pollen que les abeilles sauvages. Ce qui veut dire qu'un même pollen est moins efficace en termes de fécondation lorsqu'il a été transporté par Apis mellifera, qu'après son transport par une abeille sauvage.

Pollen plus disponible
Pour Bernard Vaissière, cela viendrait du fait que les abeilles mellifères mélangent le pollen avec du miel dilué ou du nectar, suc produit par les glandes nectarifères situées à la base de certaines fleurs. « Ce mélange réduit la viabilité du pollen, estime-t-il. En revanche, à part les bourdons, la plupart des abeilles sauvages transportent majoritairement le pollen à sec, dans des brosses de poils situées au niveau des pattes postérieures ou de la face ventrale de l'abdomen. Il reste ainsi plus viable et disponible pour la pollinisation. »

Lucas Garibaldi, lui, privilégie une autre piste : le fait que les abeilles domestiques sont beaucoup plus fidèles que les abeilles sauvages à leur source de nourriture, allant jusqu'à privilégier une plante individuelle donnée, dans un champ donné. « Or, pour se reproduire efficacement, de nombreuses plantes nécessitent une pollinisation croisée, le pollen devant être transporté d'une plante vers une autre de la même espèce. Les abeilles sauvages procèdent bien davantage ainsi. »

Quelle que soit l'explication, les observateurs sont confrontés à un fait alarmant : tout comme les butineuses des ruches, les pollinisateurs sauvages déclinent de façon préoccupante. On s'en est d'abord rendu compte pour les bourdons. Aux États-Unis, 4 espèces ont décru en vingt ans, la diminution atteignant 96 % par endroits [6]. Et plusieurs dizaines d'extinctions de bourdons ont aussi été recensées localement en Europe [7].

Puis, début 2013, Laura Burkle de l'université Washington à Saint-Louis, dans le Missouri, a élargi ce constat. Après avoir étudié des parcelles de forêt de l'Illinois, aux États-Unis, et comparé ses observations avec des relevés effectués en ces mêmes lieux à la fin des années 1800 ainsi qu'en 1970, elle a conclu que la diversité des interactions entre plantes et insectes pollinisateurs avait diminué de moitié en l'espace de cent vingt ans. En se focalisant sur une seule espèce de plante, Claytonia virginica, petite fleur blanche très abondante au printemps, elle a découvert que ce déclin s'était en fait produit au cours des quarante dernières années. Et elle a aussi noté que chaque fleur recevait quatre fois moins de visites en 2010 qu'en 1970.

Butinage sélectif
Vu le nombre et la diversité des pollinisateurs sauvages, on aurait pu espérer que la disparition de quelques espèces n'ait pas d'impact notable sur la pollinisation. Las... L'étude publiée en août 2013 par Berry Brosi de l'université Emory, à Atlanta, et Heather Briggs de l'université de Californie montre qu'il en va tout autrement.

Les deux écologues ont d'abord délimité 20 parcelles, chacune de la taille d'un cours de tennis, dans des prairies des Rocheuses du Colorado. Ils ont ensuite déterminé quelles étaient les différentes espèces de pollinisateurs présentes. Puis, pour chaque parcelle, ils ont enlevé l'espèce la plus abondante (à chaque fois, une espèce de bourdon). Ils ont alors constaté que les pollinisateurs restants devenaient moins sélectifs. Plutôt que de butiner une seule espèce de plante, ils allaient se nourrir sur 4 ou 5 espèces différentes et en mélangeaient les pollens. Résultat : l'efficacité de la pollinisation s'en trouvait réduite, car la quantité de pollen spécifique déposé sur une plante donnée n'était pas suffisante [fig. 2]. Chez la fleur sauvage que les chercheurs avaient plus précisément choisi d'observer, Delphinium barbeyi, abondante sur le site, ils ont comptabilisé une diminution moyenne de 32 % du nombre de graines produites.

Au vu de ces résultats, il est d'autant plus important d'enrayer le déclin des abeilles sauvages afin de préserver leur apport. Comment ? « En conservant des zones naturelles intactes proches des cultures, en favorisant la diversification agricole et en évitant l'usage d'insecticides », suggèrent Lucas Garibaldi et ses coauteurs. Ce qui ne correspond pas vraiment à la tendance actuelle, qui prétend limiter l'érosion de la biodiversité, en préservant, certes, les dernières zones sauvages, mais en intensifiant les cultures. Quitte à ajouter quelques ruches pour « remplacer » les pollinisateurs sauvages.

Pratiques agricoles à réviser.
Publiée en juillet 2013, une étude financée par l'Union européenne dans le cadre du programme STEP (acronyme anglais de « situation et tendances des pollinisateurs européens ») confirme la nécessité de changer en profondeur les pratiques agricoles [8]. En comparant 71 sites de cultures et de prairies à travers l'Europe, ses auteurs montrent que la mise en place de pratiques agro-environnementales telles que la conservation des talus et des bosquets, la création de bandes fleuries ou encore un usage limité de produits phytosanitaires, augmente la richesse et l'abondance des pollinisateurs sauvages les plus communs.

Un avantage en termes de productivité agricole, certes, mais pas seulement. Car ces insectes ne butinent pas que nos plantes cultivées ! Au-delà de leur intérêt économique pour l'agriculture, les insectes pollinisateurs sont les véritables artisans de nos paysages puisque près de 80 % de notre flore en dépend. Sans eux, plus de couleurs éclatantes chaque printemps, plus d'odeurs enivrantes dans la garrigue, plus de framboises ni de mûres sauvages à déguster au détour d'un chemin. Un service inestimable, impossible à chiffrer.
L'ESSENTIEL
UNE ÉTUDE menée sur les cinq continents prouve que les abeilles sauvages sont des pollinisatrices plus efficaces que l'abeille domestique.

LES PLANTES visitées par ces pollinisateurs sauvages produisent plus de fruits et de graines.

EN DÉPIT DE LA DIVERSITÉ de ces pollinisateurs, la disparition d'une seule espèce à un endroit donné réduit la productivité.
LES ABEILLES DOMESTIQUES S'EFFONDRENT
À l'automne 2006, aux États-Unis, David Hackenberg tire la sonnette d'alarme. Cet apiculteur loue ses 2 900 colonies d'abeilles à des agriculteurs pour la pollinisation. Or, un après-midi de novembre, il découvre que plusieurs centaines de ses ruches sont vides. Les oeufs, les larves et les nymphes sont encore là, ainsi que la reine et quelques mâles, mais plus aucune ouvrière. Et pas un seul cadavre. Son alarme prend un écho particulier lorsque d'autres apiculteurs rapportent une mésaventure identique.

Dès janvier 2007, des scientifiques se penchent sur le phénomène et en chiffrent l'ampleur : durant l'hiver 2006-2007, entre 651 000 et 875 000 colonies sur les 2,4 millions que compte le pays ont ainsi subitement disparu. On parle dès lors du « syndrome d'effondrement des colonies ». Les études actuelles montrent que cette surmortalité est toujours en cours. En temps normal, le taux annuel de mortalité dans les colonies s'établit entre 10 % et 14 %. Désormais, il est de 19 % à 30 %, notamment en Europe et en Amérique du Nord. Il atteint même 80 % en Irak et en Syrie.

La plupart des spécialistes estiment qu'il s'agit d'une crise multifactorielle. Ils mettent en cause des virus, des parasites et des espèces invasives, ainsi que les pratiques agricoles : la fragmentation des habitats et les monocultures, qui réduisent la biodiversité végétale et donc les ressources nutritives ; mais aussi les pesticides. On sait désormais que certains d'entre eux, les insecticides néonicotinoïdes, altèrent le sens de l'orientation des abeilles [1]. Mais ce n'est pas tout. « Les preuves qu'ils affaiblissent l'immunité des insectes s'accumulent, commente Cyril Vidau, écotoxicologue à l'Institut de l'abeille. Et l'on se rend compte que même à des doses subléthales, ils influencent la mortalité des abeilles exposées à des agents infectieux [2]. »

En mai 2013, la Commission européenne a décidé d'interdire, pour une durée de deux ans, les trois néonicotinoïdes les plus utilisés (la clothianidine, l'imidaclopride et le thiaméthoxame) pour le traitement des semences, l'application au sol en granulés et le traitement foliaire de certains végétaux qui attirent les abeilles.

[1] M. Henry et al., Science, 336, 348, 2012.

[2] C. Vidau et al., PlosOne, 6(6), e21550, 2011.
« L'IMPORTANCE ÉCONOMIQUE DES INSECTES POLLINISATEURS EST CONSIDÉRABLE »
Jean-Michel Salles est économiste de l'environnement au laboratoire montpelliérain d'économie théorique et appliquée.

Quelle est l'importance économique des pollinisateurs ?

J.-M.S. Elle est considérable. Plus des trois quarts des espèces cultivées nécessitent, à des degrés divers, l'intervention des pollinisateurs. L'étude que nous avons menée en 2009 avec l'économiste Nicola Gallai, de l'École nationale de formation agronomique, et l'entomologiste Bernard Vaissière, de l'INRA, montre que la disparition de l'ensemble des insectes pollinisateurs ferait baisser de 30 % en moyenne les récoltes alimentaires mondiales de ces espèces végétales dites « entomophiles » [1]. En se référant aux prix du marché de 2005, cela représentait une perte d'environ 153 milliards d'euros, soit 10 % de la valeur totale de la production alimentaire mondiale. Et cela, alors que nous n'avons pas pris en compte l'importance des pollinisateurs pour la production de miel, ni pour les produits issus des jardins ou de la cueillette, par exemple les baies sauvages.

Quelles cultures seront les plus affectées ?

J.-M.S. Le café, le cacao et tous les fruits sont les cultures les plus dépendantes des insectes pollinisateurs. D'après notre étude, l'Asie sera le continent le plus touché, ainsi que la région de l'Afrique de l'Ouest, gros producteur de cacao et de café. Les zones qui cultivent surtout les céréales, comme l'Europe du Nord, devraient être beaucoup moins atteintes.

On sait que les pollinisateurs sauvages sont plus efficaces que leurs cousine domestique. Cela peut-il modifier votre évaluation économique ?

J.-M.S. Non, car nos calculs sont fondés sur la dépendance des cultures aux insectes pollinisateurs, indépendamment de la nature de ces derniers. Le problème auquel nous nous sommes heurtés était d'une autre nature : il est très difficile de donner un coefficient moyen de dépendance pour une culture. Par exemple, selon les différentes études, 10 % à 100 % de la production des pommiers résultent de la pollinisation par les insectes. Cela dépend de la variété cultivée, des conditions de culture. De plus, l'impact des pollinisateurs se situe parfois à plusieurs niveaux. Ainsi, pour le kiwi, l'absence de pollinisateur se traduit par une diminution de la taille des fruits mais aussi de leur qualité. Nous avons donc fait des choix pour établir un coefficient de dépendance moyen pour chaque culture, avant de calculer, sur la base du prix du marché et des statistiques de production, l'impact de la disparition éventuelle des insectes pollinisateurs.

Commence-t-on déjà à voir les premiers impacts économiques de ce déclin ?

J.-M.S. Aucune baisse des rendements des cultures dépendantes des pollinisateurs n'est encore constatée. Mais suite à l'effondrement des insectes pollinisateurs dans la province du Sichuan, en Chine, à cause d'une utilisation intensive de pesticides, de nombreux arboriculteurs ont cessé leur activité. D'autres sont passés à la pollinisation manuelle, ce qui représente un surcoût important. Aux États-Unis, la profession des apiculteurs spécialisés dans la pollinisation, qui louent leurs ruches aux agriculteurs, est en difficulté. Nombre d'entre eux auraient abandonné leur métier ces dernières années.

Propos recueillis par Lise Barnéoud


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A D N: DU CALCUL À L'ASSEMBLAGE

 

 

 

 

 

 

 

ADN : du calcul à l'assemblage
Bernard Yurke dans mensuel 347
daté novembre 2001 -  Réservé aux abonnés du site


Depuis une dizaine d'années, on sait réaliser directement des calculs complexes en manipulant des fragments d'ADN. Mais l'apport principal de la biologie moléculaire à l'informatique résidera vraisemblablement dans l'assemblage automatique de circuits intégrés dont chaque composant ne sera pas plus gros qu'une molécule.
Si vous avez acheté un jour un ordinateur personnel, vous en avez fait l'expérience : la puissance de calcul de ces machines s'améliore bien plus vite que n'importe quelle autre caractéristique de n'importe quel autre produit grand public. Quelques années suffisent pour ravaler un appareil dernier cri au rang d'antiquité ! Cette progression n'est pas nouvelle. Depuis une quarantaine d'années que des ingénieurs fabriquent des circuits intégrés en silicium, le nombre de transistors par unité de surface ne cesse d'augmenter de façon exponentielle, doublant à peu près tous les deux ans.

Les dix prochaines années seront-elles aussi florissantes ? Beaucoup en doutent, car si la réduction de la taille des composants électroniques se poursuit au même rythme, ceux-ci ne seront bientôt constitués que de quelques atomes chacun. Saurons-nous surmonter toutes les difficultés qui se présenteront alors pour les fabriquer ? Des physiciens et des chimistes ont décidé d'attaquer le problème à sa base : plutôt que de réduire progressivement la taille des composants actuels, ils ont imaginé de se placer d'emblée à la plus petite échelle possible, et de construire des calculateurs directement avec des molécules.

A vrai dire, ils n'ont fait ainsi que copier des principes existants. L'évolution naturelle a en effet depuis quelques milliards d'années sélectionné des procédés de stockage et de manipulation des informations qui résolvent des problèmes aussi complexes que se nourrir, se déplacer, croître ou se reproduire. L'un des principaux supports de ces traitements d'informations chez les êtres vivants est l'ADN : dans nos gènes, c'est cette molécule qui contient les informations biologiques spécifiques à chacun d'entre nous. Pourrait-on utiliser l'ADN comme support d'un nouveau type d'informatique ?

Information naturelle. L'ADN a plusieurs qualités pour cela. D'abord, c'est un moyen de stockage d'informations compact. La molécule d'ADN ressemble en effet à une longue chaîne, un brin, dont l'un des côtés porte, à intervalles réguliers, des groupements chimiques que l'on nomme des bases, et dont il existe quatre modèles différents : l'adénine, la cytosine, la guanine et la thymine. Les informations génétiques sont codées par l'ordre dans lequel apparaissent ces bases. Chaque base mesure à peine un nanomètre de long, et les bases sont espacées d'un tiers de nanomètre environ. Si l'on imaginait par exemple de coder chaque caractère imprimé sur cette page par une suite de trois bases ce qui permet de coder 64 signes différents, on obtiendrait un brin d'ADN d'à peine vingt micromètres de long.

L'intérêt de l'ADN pour le calcul réside aussi dans la façon particulière avec laquelle les brins interagissent deux à deux. Si leurs séquences de bases sont complémentaires, c'est-à-dire si chaque adénine d'un brin correspond à une thymine de l'autre brin, et chaque cytosine à une guanine, alors les brins se lient l'un à l'autre et s'enroulent, formant une double hélice : on dit qu'ils s'hybrident c'est d'ailleurs sous cette forme de double hélice que l'on rencontre l'ADN la plupart du temps dans les organismes biologiques. Cette hybridation est spécifique : deux brins qui ne sont pas complémentaires ne peuvent pas se lier l'un à l'autre. Cette propriété permet de concevoir des brins d'ADN qui, lorsqu'on les mélange dans un tube à essai, s'assemblent en structures complexes prédéterminées.

Enfin, l'usage de l'ADN pour réaliser des calculs est favorisé par l'existence d'une « boîte à outils » qui permet de manipuler et de modifier les chaînes de bases. Les constituants de cette boîte à outils sont les enzymes, de grosses molécules, parmi lesquelles par exemple les ligases épissent deux brins d'ADN ensemble, les enzymes de restriction coupent un brin à un endroit précis, défini par une suite de bases spécifique, et les polymérases fabriquent des copies des brins. On dispose aussi, grâce aux développements de la biologie moléculaire, de nombreuses techniques de séparation et de purification de l'ADN.

En utilisant toutes ces qualités de l'ADN, Leonard Adleman, de l'université de Southern California a montré en 1994 que cette molécule permettait de résoudre un problème de calcul difficile, en l'occurrence le problème du chemin hamiltonien1. De quoi s'agit-il ? Imaginons une île avec un réseau de routes, dont certaines sont à sens unique, et dont quelques-unes en enjambent d'autres à l'aide de ponts. Les points de départ et d'arrivée étant donnés, existe-t-il un chemin qui passe une fois, et une fois seulement, par chaque croisement, tout en respectant les sens uniques ?

Calcul chimique. L. Adleman a codé les routes et les intersections avec des brins d'ADN, en particulier de façon que les brins représentant des routes qui se croisent aient à leurs extrémités des séquences complémentaires, qui leur permettent de s'hybrider. Lorsqu'il a mélangé ces brins, ils se sont assemblés en longues doubles hélices, dont chacune représentait un chemin respectant les sens uniques. Il obtenait ainsi tous les chemins possibles en une seule opération. Bien entendu, il fallait ensuite séparer toutes les doubles hélices, afin de repêcher celles qui correspondaient à un chemin hamiltonien, mais le nombre d'étapes nécessaires à cette opération n'augmente que de façon polynomiale avec le nombre d'intersections. Avec un ordinateur numérique, le nombre d'étapes nécessaires à la résolution de ce problème est beaucoup plus grand, et il augmente plus vite avec le nombre d'intersections.

Depuis, d'autres méthodes analogues ont été proposées pour résoudre avec de l'ADN divers problèmes complexes de calcul. Chaque fois, leurs promoteurs faisaient remarquer que le parallélisme massif, qui résulte de l'interaction simultanée d'un grand nombre de brins d'ADN différents, devrait permettre à un ordinateur à ADN de surpasser les ordinateurs électroniques.

Cette proposition est toutefois restée à l'état d'hypothèse. D'abord, les calculs effectivement réalisés avec de l'ADN ont porté sur des problèmes certes complexes, mais toujours dans des cas simples. L. Adleman, par exemple, n'a démontré expérimentalement la validité de sa méthode qu'en résolvant un problème de chemin hamiltonien à six intersections.

Lenteur rédhibitoire. Plusieurs difficultés pratiques ont aussi tempéré l'enthousiasme initial. D'abord, l'hybridation de l'ADN est un mécanisme infiniment lent par rapport à la fréquence des horloges des microprocesseurs actuels. En outre, plus le problème est complexe, plus le nombre de brins différents est grand : le volume d'ADN nécessaire croît souvent plus qu'exponentiellement avec la taille du problème à résoudre. Cela est dû au fait que, par exemple pour le problème du chemin hamiltonien, il faut construire effectivement tous les chemins possibles, dont le nombre augmente extrêmement vite avec le nombre d'intersections. Or, plus les brins d'ADN sont nombreux, plus ils mettent de temps à trouver un partenaire avec lequel ils puissent s'hybrider.

Je crains d'ailleurs que ce problème de vitesse ne soit un handicap fondamental vis-à-vis de l'ordinateur électronique. Quoi que l'on fasse, les électrons seront toujours plus mobiles, plus rapides, que des brins d'ADN, sauf à communiquer à ceux-ci une énergie considérable.

Enfin, les enzymes utilisées pour manipuler l'ADN font parfois des erreurs. Les méthodes de séparation et de purification ne sont pas parfaites non plus, et elles sont d'autant plus complexes que le nombre de brins à séparer est grand.

L'ordinateur à ADN ne serait-il alors qu'un gadget inutilisable, simple curiosité de laboratoire que les gens sérieux devraient s'empresser d'oublier ? Il est encore prématuré de conclure. Mais dans l'avenir proche, le principal intérêt du calcul avec l'ADN résidera à mon avis sur un autre terrain : l'assemblage d'ordinateurs électroniques à l'échelle moléculaire. Il n'est pas là en concurrence avec le calcul électronique : on ne peut pas construire d'objets physiques simplement en faisant circuler des électrons dans des plaques de silicium !

Cette idée a en fait été émise avant même que les premiers calculs ne soient réalisés avec de l'ADN. Dès 1987, Bruce Robinson, de l'université de Washington, et Nadrian Seeman avaient proposé d'assembler un réseau de mémoire à l'aide d'ADN2. Ils imaginaient que des blocs d'ADN pourraient s'assembler en réseaux cristallins tridimensionnels. Ces blocs porteraient les molécules analogues à des composants électroniques, fils électriques ou commutateurs par exemple, auxquelles les chimistes songeaient déjà à l'époque voir l'article de Christian Joachim, Jean-Pierre Launay et Ramon Companó. Leur proposition était toutefois restée théorique, faute de composants moléculaires adéquats, et faute de savoir concrètement comment assembler des blocs d'ADN.

C'est sur ce deuxième point que les résolutions de calculs avec de l'ADN ont permis de progresser. La relation entre le calcul et l'assemblage est en effet étroite. Dans chaque cas, on suit une procédure, un algorithme. Nous avons vu, avec l'exemple du chemin hamiltonien, que la mise au point d'une méthode de calcul par ADN est surtout la transformation d'un problème de mathématiques en un problème d'assemblage d'ADN. La spécificité de l'hybridation de l'ADN rend possible qu'un tel assemblage se déroule automatiquement dans le mélange. On pourrait donc utiliser les méthodes de calcul par ADN pour programmer l'auto-assemblage algorithmique de nanostructures.

Comment concrètement passer des calculateurs à ADN à l'assemblage de nanostructures ? L'idée originale de B. Robinson et de N. Seeman était d'utiliser des blocs tridimensionnels. Nous n'en sommes pas encore là, et nous nous contentons pour l'instant, ce qui n'est déjà pas si mal, d'apprendre à assembler des blocs bidimensionnels, des structures nommées tuiles d'ADN imaginées par Erik Winfree, de Caltech3.

Une tuile d'ADN est formée de deux doubles hélices entrecroisées : chaque brin d'une double hélice devient à un endroit membre de l'autre double hélice. A leurs extrémités, les deux doubles hélices se prolongent chacune par deux brins simples, qui ne sont pas complémentaires l'un de l'autre, et qui peuvent donc s'hybrider avec des brins portés par d'autres tuiles voir la figure ci-dessus. Pour le problème qui nous occupe, on peut se contenter de décrire ce type de structure de façon plus abstraite, comme une tuile d'où sortent quatre brins d'ADN, voire simplement comme une tuile dont chacun des bords est pourvu d'une attache colorée. Une tuile ne s'accroche à une autre que si les deux bords en contact portent des attaches de même couleur. Avec deux types de tuiles d'où émergent des brins complémentaires dont les attaches sont de même couleur, Erik Winfree et l'équipe de Nadrian Seeman, à l'université de New York, ont, les premiers, fait croître en 1998 des feuillets d'ADN qui ont la régularité d'un réseau cristallin simple4. Avec plus de tuiles et des règles d'interaction un peu plus complexes, on peut construire des structures plus élaborées. On y parvient en choisissant un ensemble approprié de séquences de bases pour les différents brins d'accrochage des tuiles. Les tuiles peuvent ainsi être programmées pour réaliser un calcul ou, ce qui revient au même, pour former un pavage prédéterminé voir l'encadré : « Des tuiles à calculer ».

L'industrie électronique pourrait-elle réellement utiliser cette technique pour assembler des cir- cuits ? Il faudrait pour cela maîtriser le problème de formation des défauts. E. Winfree a étudié ce problème d'un point de vue théorique5. La formation d'un pavage en tuiles d'ADN est analogue à la croissance d'un cristal. Or, la meilleure façon d'éviter la formation de défauts dans un cristal est de faire croître celui-ci à une température juste inférieure à son point de fusion, c'est-à-dire dans des conditions où le cristal, solide, est presque en équilibre thermodynamique avec le liquide. Autour d'un défaut, le cristal fond en effet à une température légèrement inférieure à son point de fusion : si la croissance est assez lente, les défauts qui se forment ont donc le temps de fondre et de disparaître au fur et à mesure.

Fusion d'ADN. Aux températures proches du point d'ébullition de l'eau, tous les brins d'ADN, même complémentaires, restent séparés les uns des autres. Puis, à mesure que la température diminue, les brins complémentaires d'ADN s'hybrident, et le restent de plus en plus longtemps. On peut définir le point de fusion d'une double hélice d'ADN comme la température où la moitié des brins complémentaires est hybridée les uns avec les autres. A cette température, les brins d'ADN s'associent aussi vite qu'ils se séparent. Cette température dépend de la concentration de l'ADN dans la solution, puisque plus le système est dilué, plus il faut de temps à deux brins complémentaires pour se rejoindre et s'hybrider.

De la même façon, pour un ensemble de tuiles tenues ensemble par des brins d'ADN complé- mentaires qui ont tous la même force de liaison, il existe une température de fusion, où la vitesse avec laquelle elles sont incorporées dans le réseau est égale à la vitesse à laquelle elles s'en séparent. En réalisant l'auto-assemblage à une tempéra- ture légèrement inférieure à cette température de fusion, on devrait obtenir des structures sans défauts.

La conséquence en est que moins on tolère de défauts dans la structure finale, plus il faut travailler près de la température de fusion et avec une faible concentration de tuiles, de façon que les défauts aient le temps de fondre. La croissance en est d'autant plus ralentie. Ce résultat n'est pas agréable pour les industriels, qui cherchent toujours à fabriquer leurs produits le plus vite possible pour une qualité donnée. Encore une fois, des limitations intrinsèques rendraient-elles l'ADN inutilisable pour l'électronique moléculaire ?

L'observation de ce qui se passe chez les êtres vivants nous laisse penser que non : la réplication de l'ADN dans les cellules, qui se déroule rapidement, dans des conditions bien différentes de l'équilibre thermodynamique, ne produit pourtant pas plus d'une erreur sur cent millions. Cette réplication de l'ADN est réalisée par une machine moléculaire nommée ADN polymérase qui, en plus de fabriquer la copie complémentaire d'un brin d'ADN, vérifie la conformité de cette copie avec l'original, et corrige les éventuelles erreurs.

Pourrions-nous fabriquer et utiliser des machines moléculaires aussi performantes pour l'assemblage algorithmique ? Nous sommes encore loin de savoir le faire. Mais nous pouvons essayer d'apprendre : c'est dans ce but que je me suis intéressé aux moteurs moléculaires en ADN. Mon équipe a mis au point des moteurs moléculaires simples, mus par l'énergie libérée lorsque deux brins d'ADN complémentaires s'hybrident et forment une double hélice6. Nous avons utilisé ces moteurs pour ouvrir et fermer une structure en V, une sorte de « pince moléculaire » faite aussi en ADN. L'ADN est un matériau très adaptable, qui peut être utilisé pour l'assemblage de structures complexes, mais aussi de structures complexes contenant des parties mobiles.

Dans tous les cas, l'auto-assemblage algorithmique ne remplacera pas du jour au lendemain la technologie de lithographie utilisée aujourd'hui pour la gravure des microprocesseurs en silicium. Cette dernière permet d'entasser cinquante millions de transistors sur un carré de 2 centimètres de côté, et ce chiffre n'a pas encore fini d'augmenter. La maîtrise acquise avec cette technologie en fait un concurrent redoutable pour la fabrication d'ordinateurs électroniques : nous ne sommes pas près de produire des structures aussi complexes que les circuits actuels, et avec une aussi bonne fiabilité, par auto-assemblage algorithmique. En outre, les composants moléculaires que l'on pourrait assembler de cette façon en les accrochant sur les tuiles, suivant la proposition initiale de B. Robinson et de N. Seeman, sont tout juste fabriqués dans les laboratoires de chimie.

Structures compactes. Toutefois, comme une double hélice d'ADN a un diamètre de 2 nanomètres, et que deux bases successives sont espacées de 0,34 nanomètre, les tuiles d'ADN ont réellement une taille nanométrique. Celles d'E. Winfree et N. Seeman ont des dimensions de 2 nanomètres par 4 et par 13 : c'est beaucoup plus petit que la largeur des transistors actuels, qui atteint environ 100 nanomètres. Comme les molécules utilisables comme composants ont une longueur de l'ordre du nanomètre, on peut envisager de placer dans des microprocesseurs moléculaires une densité de composants beaucoup plus grande que dans les microprocesseurs actuels.

Plus modestement, l'électronique pourrait entrer dans l'échelle moléculaire par une approche hybride, qui combinerait des techniques de lithographie actuelles et les techniques d'auto-assemblage moléculaire. De la même façon que les circuits intégrés sont, dans nos ordinateurs, connectés à des cartes qui sont, à leur tour, connectées à un châssis, on pourrait greffer de petits circuits électroniques moléculaires sur les circuits intégrés eux-mêmes. Cette technique permettrait dans un premier temps l'utilisation de circuits moléculaires simples, puis de plus en plus complexes à mesure que nous apprendrons à mieux manipuler l'ADN.
1 L.M. Adleman, Science , 266 , 1021, 1994.

2 B.H. Robinson et N.C. Seeman, Protein Engineering , 1 , 295, 1987.

3 E. Winfree, in DNA Based Computers, « Proceedings of a DIMACS Workshop », 4 avril, 1995, Princeton University, R.J. Lipton et E. B. Baum éd., volume 27 of DIMACS : Series in Discrete Mathematics and Theoretical Computer Science , p. 199-221, Providence, 1996. American Mathematical Society.

4 E. Winfree et al., Nature , 394 , 539, 1998.

5 E. Winfree, Ph. D. Thesis, California Institute of Technology 1998.

6 B. Yurke et al., Nature , 406 , 605, 2000.

7 C.T. Clelland, V. Risca, et C. Bancroft, Nature , 399 , 533, 1999.

8 P.K. Rothemund et E. Winfree, The Thirty-Second Annual ACM Symposium on Theory of Computing STOC 2000, 21-23 mai, Portland, Oregon USA, 2000.
DES TUILES À CALCULER
Comment programmer des tuiles d'ADN pour s'auto-assembler ? Eric Winfree, de Caltech, et Paul Rothemund, de l'université Southern California8, ont imaginé un procédé pour écrire en binaire la liste des nombres jusqu'à une valeur prédéterminée en utilisant de telles structures. Ainsi 24 tuiles sont nécessaires pour compter jusqu'à 15 A. Les règles d'assemblage sont les suivantes : une tuile ne peut adhérer à la structure en construction par un bord seulement que si la couleur rouge y est présente, et que les autres couleurs correspondent aussi ; s'il n'y a pas de rouge sur les bords de la structure, une tuile ne peut être ajoutée que si elle a deux bords en contact, et que les couleurs correspondent sur ces deux bords ; si un bord est complètement vert, il ne peut coller à aucun autre bord ; si un bord porte un chiffre, la tuile n'adhère à la structure que si les chiffres et les couleurs correspondent tous les deux.

On fabrique des tuiles d'ADN qui obéissent à ces règles de construction en choisissant convenablement les séquences de base et la longueur des brins, de façon que les brins correspondant aux bords de tuile en rouge se lient plus fortement que les autres. On y parvient car la liaison entre la guanine et la cytosine est plus forte que celle entre l'adénine et la thymine, et parce que des brins d'ADN complémentaires se lient d'autant plus fortement qu'ils sont longs. Lorsque l'on a deux séries de brins avec deux forces de liaison différentes, on peut trouver une température à laquelle les brins les plus faiblement liés ne maintiennent une tuile en place que si les brins de deux autres bords ou plus participent à la liaison. A cette température, l'auto-assemblage se déroule conformément aux règles. Les tuiles qui s'assemblent pour former la première ligne ont du rouge sur leurs bords de contact. Lorsque la première structure dessinée est assemblée, deux bords de contact deviennent disponibles, et la rangée suivante est complétée. Ainsi, l'assemblage procède par allers et retours entre deux bords B. Les 24 tuiles différentes de l'ensemble ont été choisies de façon qu'à un certain point aucune autre tuile ne peut plus être ajoutée parce qu'il n'y a plus de bords correspondants : la croissance s'arrête.

Le motif bleu foncé du pavage d'ADN correspond à la disposition des 1 dans la suite des nombres de 0 à 15 écrits en binaire C. Le choix judicieux des couleurs sur les différents bords des tuiles a donc permis de les programmer pour écrire une liste de nombres en binaire de 0 à 15. En augmentant un peu le nombre de types de tuiles, en particulier en ajoutant des tuiles avec des paires de nombres 0,1, 1,2, 2,3, 3,4, ... n-1, n, les tuiles écriront de 0 à 2n - 1.

L'assemblage de pavages analogues permet d'exécuter des opérations mathématiques et logiques. L'avantage de l'auto-assemblage algorithmique est que le nombre de types de tuiles est souvent bien inférieur au nombre total de tuiles nécessaire. Par exemple, pour le compteur binaire présenté ici, 20 + n types de tuiles sont utilisés pour fabriquer un pavage de n par 2n + 1+ 1 tuiles.

Ce pavage d'ADN peut être utilisé comme support d'un circuit électronique, en accrochant sur les tuiles les composants adéquats. Si l'on indique en entrée en bas du pavage un nombre binaire correspondant à l'une des lignes, la valeur de sortie de cette ligne, et de cette ligne seulement, passe de 0 à 1, ce qui permet de commander une cellule mémoire.
SAVOIR
A lire :

-N . C. Seeman , Acc. Chem. Res., 30 , 357, 1997.

-C.M. Niemeyer, Angew. Chem. Int. Engl. , 36 , 585, 1997.

-C.M. Niemeyer, Appl. Phys. A , 68 , 119, 1999.

 

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CELLULES GLIALES

 


Cellule gliale

Dans le système nerveux, les cellules gliales (parfois nevroglie ou tout simplement glie, du grec γλοιός (gloios), « gluant ») sont les cellules qui forment l'environnement des neurones. Elles assurent le maintien de l'homéostasie, produisent la myéline et jouent un rôle de soutien et de protection du tissu nerveux en apportant les nutriments et l'oxygène, en éliminant les cellules mortes et en combattant les pathogènes.
Les cellules gliales représentent environ 50 % du volume cérébral1 et au plus 50 % des cellules du cerveau2, contrairement à l'assertion très répandue affirmant des ratios de 10:1 à 50:13, sans aucune référence sérieuse. On distingue en général 4 principaux types de cellules gliales :
    •    les astrocytes ;
    •    les oligodendrocytes ;
    •    les cellules de Schwann ;
    •    la microglie.
Contrairement à la grande majorité des neurones, les cellules gliales peuvent se diviser par mitose.
Pendant longtemps, l'implication des cellules gliales dans le traitement de l'information nerveuse a été ignorée par rapport au rôle proéminent des neurones, mais il est aujourd'hui reconnu qu'elles exercent une action modulatrice sur la neurotransmission bien que le détail de ces mécanismes reste mal compris.

Astrocyte

Les astrocytes sont des cellules gliales du système nerveux central. Elles ont généralement une forme étoilée, d'où provient leur étymologie : Astro - étoile et cyte - cellule. Elles assurent une diversité de fonctions importantes, centrée sur le support et la protection des neurones. Ces cellules participent au maintien de la barrière hémato-encéphalique, régulent le flux sanguin, assurent l'approvisionnement en nutriments et le métabolisme énergétique du système nerveux, participent à la neurotransmission et maintiennent la balance ionique du milieu extracellulaire. Les astrocytes jouent également un rôle dans la défense immunitaire, la réparation et la cicatrisation du cerveau ou de la moelle épinière après une lésion3.
Les recherches récentes révèlent la complexité et l'importance de cette population cellulaire. Les astrocytes sont capables d'assurer une certaine forme de communication, reposant sur des vagues intracellulaires de Ca2+, et peuvent également libérer certains neurotransmetteurs (appelés gliotransmetteurs). Cette forme de communication, que l'on croyait spécifique aux neurones, leur confèrerait un rôle beaucoup plus actif dans le fonctionnement du cerveau, notamment sur la plasticité des communications neuronales. Il a également été montré que certaines sous-populations d'astrocytes ont des propriétés de cellules souches neurales et sont à la source du mécanisme de neurogenèse adulte.


Oligodendrocyte

Un oligodendrocyte est une cellule de la névroglie interstitielle. Sa principale fonction est la formation de la gaine de myéline entourant les fibres nerveuses (axones) du système nerveux central (SNC); la formation de la myéline au niveau du système nerveux périphérique étant assurée par les cellules de Schwann. La gaine de myéline permet d'augmenter la vitesse de propagation et la fréquence des influx nerveux. Un seul oligodendrocyte est capable de myéliniser jusqu'à 50 axones1.


Cellule de Schwann

Les cellules de Schwann (ou neurolemmocytes) sont une variété de cellules gliales qui assurent principalement l'isolation myélinique des axones du système nerveux périphérique des vertébrés (on les classe donc parmi les « cellules gliales périphériques »). Comme les oligodendrocytes du système nerveux central, elles assurent la myélinisation—c'est-à-dire l'isolation électrique—des axones mais dans le système nerveux périphérique. Il existe néanmoins de petites différences entre ces deux types de cellules.
Leur nom est un hommage au physiologiste allemand Theodor Schwann.


Microglie

La microglie (ou microgliocytes) est une population de cellules gliales constituée de macrophages résidents du cerveau et de la moelle épinière formant ainsi la principale défense immunitaire active du système nerveux central.

Cellule gliale

Dans le système nerveux, les cellules gliales (parfois nevroglie ou tout simplement glie, du grec γλοιός (gloios), « gluant ») sont les cellules qui forment l'environnement des neurones. Elles assurent le maintien de l'homéostasie, produisent la myéline et jouent un rôle de soutien et de protection du tissu nerveux en apportant les nutriments et l'oxygène, en éliminant les cellules mortes et en combattant les pathogènes.
Les cellules gliales représentent environ 50 % du volume cérébral1 et au plus 50 % des cellules du cerveau2, contrairement à l'assertion très répandue affirmant des ratios de 10:1 à 50:13, sans aucune référence sérieuse. On distingue en général 4 principaux types de cellules gliales :
    •    les astrocytes ;
    •    les oligodendrocytes ;
    •    les cellules de Schwann ;
    •    la microglie.
Contrairement à la grande majorité des neurones, les cellules gliales peuvent se diviser par mitose.
Pendant longtemps, l'implication des cellules gliales dans le traitement de l'information nerveuse a été ignorée par rapport au rôle proéminent des neurones, mais il est aujourd'hui reconnu qu'elles exercent une action modulatrice sur la neurotransmission bien que le détail de ces mécanismes reste mal compris.

Astrocyte



Les astrocytes sont des cellules gliales du système nerveux central. Elles ont généralement une forme étoilée, d'où provient leur étymologie : Astro - étoile et cyte - cellule. Elles assurent une diversité de fonctions importantes, centrée sur le support et la protection des neurones. Ces cellules participent au maintien de la barrière hémato-encéphalique, régulent le flux sanguin, assurent l'approvisionnement en nutriments et le métabolisme énergétique du système nerveux, participent à la neurotransmission et maintiennent la balance ionique du milieu extracellulaire. Les astrocytes jouent également un rôle dans la défense immunitaire, la réparation et la cicatrisation du cerveau ou de la moelle épinière après une lésion3.
Les recherches récentes révèlent la complexité et l'importance de cette population cellulaire. Les astrocytes sont capables d'assurer une certaine forme de communication, reposant sur des vagues intracellulaires de Ca2+, et peuvent également libérer certains neurotransmetteurs (appelés gliotransmetteurs). Cette forme de communication, que l'on croyait spécifique aux neurones, leur confèrerait un rôle beaucoup plus actif dans le fonctionnement du cerveau, notamment sur la plasticité des communications neuronales. Il a également été montré que certaines sous-populations d'astrocytes ont des propriétés de cellules souches neurales et sont à la source du mécanisme de neurogenèse adulte.


Oligodendrocyte

Un oligodendrocyte est une cellule de la névroglie interstitielle. Sa principale fonction est la formation de la gaine de myéline entourant les fibres nerveuses (axones) du système nerveux central (SNC); la formation de la myéline au niveau du système nerveux périphérique étant assurée par les cellules de Schwann. La gaine de myéline permet d'augmenter la vitesse de propagation et la fréquence des influx nerveux. Un seul oligodendrocyte est capable de myéliniser jusqu'à 50 axones1.




Cellule de Schwann


Les cellules de Schwann (ou neurolemmocytes) sont une variété de cellules gliales qui assurent principalement l'isolation myélinique des axones du système nerveux périphérique des vertébrés (on les classe donc parmi les « cellules gliales périphériques »). Comme les oligodendrocytes du système nerveux central, elles assurent la myélinisation—c'est-à-dire l'isolation électrique—des axones mais dans le système nerveux périphérique. Il existe néanmoins de petites différences entre ces deux types de cellules.
Leur nom est un hommage au physiologiste allemand Theodor Schwann.


Microglie

La microglie (ou microgliocytes) est une population de cellules gliales constituée de macrophages résidents du cerveau et de la moelle épinière formant ainsi la principale défense immunitaire active du système nerveux central.



















 

 
 
 
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