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ATHÈNES

 

 

 

 

 

 

Athènes
en grec Athínai

Nom des habitants : Athéniens
Population pour l'agglomération : 3 413 990 hab. (estimation pour 2011)
GÉOGRAPHIE
1. Le site d'Athènes
La ville déborde la plaine d'Attique, où des buttes calcaires fixèrent jadis un sanctuaire à l'intérieur (Acropole) et des ports sur le littoral (Le Pirée). La plaine d’Attique, bien ouverte au sud, est protégée des coups de froid par les massifs montagneux de l’Hymette (1 026 m) à l’est, du Pentélique (1 109 m) et du Parnis (1 413 m) au nord et au nord-ouest. À travers l’Aighaleo, qui prolonge le Parnis en direction du sud, le col de Dhafni permet d’atteindre aisément la plaine d’Éleusis, qui reste étroitement associée aux activités de l’Attique. Au nord-est, un seuil abaissé entre l’Hymette et le Pentélique ouvre sur la Mésogée, où les activités agricoles évoluent rapidement au contact de la ville, dont le voisinage transforme les villages les plus proches (mouvements quotidiens de la population, essaimage d’industries, multiplication des résidences secondaires). La plaine d’Attique, ensoleillée, bien égouttée, accidentée de quelques buttes rocheuses, parmi lesquelles l’Acropole a fixé un des premiers sites urbains, était, sur 30 km du sud au nord, propice aux bâtisseurs ; sa façade maritime, large de 20 km, est une côte basse ou un seul secteur rocheux correspondant à la colline du Pirée présente des anfractuosités qui ont fixé un port devenu trop étroit, et qui cherche de nouveaux sites dans la baie d’Éleusis, au-delà du détroit de Salamine.
2. L'extension de la ville
L'extension de la ville, sollicitée au nord (Béotie) et à l'est (Mésogée) par des axes routiers d'industrialisation et d'urbanisation, la porte au-delà du cadre montagneux défini par l'Hymette, le Pentélique et le Parnis-Aighaleo ; elle est rapide au nord-ouest (zone portuaire et industrielle d'Éleusis) et au sud-est (zone résidentielle et balnéaire de la côte d'Apollon). La ligne de rivage est repoussée au large par des remblais constructibles (Phalère). Les îles les plus proches, Salamine, Égine, sont intégrées à cet ensemble urbain devenu le plus vaste des Balkans (500 km2) en même temps qu'un carrefour majeur et un foyer d'attraction des trafics touristiques en Méditerranée.
La croissance de l'agglomération (200 000 habitants en 1900, 1 850 000 en 1961, plus de 3 200 000 en 2010, le port du Pirée inclus) tient à la multiplicité des rôles exercés par la capitale dans un État très centralisé (administration, finances, université, mais aussi commerces de gros et de détail et industries [métallurgie, chimie, textile, alimentation, tabac]). Athènes concentre une part importante des salariés de Grèce, rassemble et redistribue la plupart des capitaux, est le pivot du commerce extérieur (port du Pirée, aéroport d'Eleftherios Veniselos, à Spata) et le principal foyer du commerce intérieur ; le rayon d'action des services établis à Athènes s'étend à une partie du Proche-Orient et de l'Afrique, car la ville, ayant profité du déclin de Beyrouth, est un relais pour de nombreuses sociétés internationales.
3. Un des grands centres touristiques du monde

Athènes est un des grands centres touristiques du monde, grâce à la beauté des monuments antiques (Parthénon, Érechthéion, Propylées, etc.) de l'Acropole et à la richesse de ses musées. L'agglomération concentre près du tiers de la population du pays. Athènes a accueilli les premiers jeux Olympiques modernes en 1896 et les Jeux d'été en 2004. La différenciation de l'espace urbain, densément bâti, s'accentue et aggrave les conditions de déplacement de la population active : quartiers centraux (gestion, affaires) dépeuplés, communes périphériques plus bourgeoises au nord et au sud-est, plus prolétariennes à l'ouest. Les embarras de la circulation et la pollution atmosphérique pèsent lourdement sur la vie quotidienne.
4. Les différents quartiers de la ville
Le centre d’Athènes, entièrement redessiné au xixe siècle par des architectes originaires d’Europe occidentale, correspond à un triangle dont la base, dominée au sud par l’Acropole, est jalonnée par la rue Ermoú, du Céramique à la place Sýndaghma (place de la Constitution), et dont le sommet est marqué par la place Omónia. Les diverses fonctions urbaines s’y trouvent rassemblées et y entretiennent une animation constante : banques, poste centrale, administrations et services ministériels, commerces (hôtellerie et grands magasins) se groupent près d’Omónia ; les halles centrales, les officines et les entrepôts consacrés au commerce de demi-gros, les ateliers de réparation se tiennent au voisinage des deux gares de chemin de fer et de la rue Athinás ; les boutiques de luxe sont particulièrement denses dans le quartier Kolonáki, à l’est, que surplombe la colline du Lycabette.
Le quartier Omónia, desservi par la principale station du métro qui relie le Pirée à Kifissiá, et où aboutissent presque toutes les lignes d’autobus interurbaines du pays, est le point de convergence et de transit des banlieusards et des provinciaux : tavernes, hôtels, boutiques de toutes sortes y attendent leurs habitués. À l’opposé, plusieurs grands hôtels de classe internationale ont contribué à faire du quartier Sýndaghma le carrefour principal des relations avec l’extérieur. De l’un à l’autre, la foule des touristes étrangers croise celle des provinciaux attirés par leurs affaires ou leurs loisirs.
Sous l’Acropole, le vieux quartier de Pláka occupe l’emplacement de la ville antique et conserve la trace de la bourgade méditerranéenne d’avant 1830 ; transformant son rôle sans en réduire le pittoresque, les emprises touristiques (restaurants, boîtes de nuit) s’y sont multipliées.
À l’opposé, les quartiers de voies en damier de Patíssia et de la place Amerikís, proches du Musée national et du Polytekhníon, sont habités par les professions libérales et les négociants. Le mouvement désordonné de densification des surfaces bâties, qui intéresse toute l’agglomération, fait que la hauteur des immeubles s’y élève régulièrement, mais la proportion des surfaces des bureaux et des commerces y est plus faible que dans le centre.
À proximité du Palais royal et de la petite place Kolonáki, des résidences plus coûteuses regroupent dans le voisinage des ambassades la grande bourgeoisie, le personnel politique et l’intelligentsia athénienne.
À partir de Sýndaghma, le long de l’avenue Vassilíssis Sofías, qui mène aux banlieues résidentielles de Psikhikó et de Kifissiá, et suivant l’avenue Amalías, amorce des axes qui conduisent au littoral résidentiel et touristique (Vieux et Nouveau Phalère [Néo et Palaió Fáliro], Ghlyfádha et, au-delà, tout le long de la route en corniche du cap Sounion), se multiplient les grands hôtels modernes (Hilton), les agences de compagnies aériennes, les bureaux d’affaires et les sièges d’entreprises parfois internationales.
6. Le climat d'Athènes
Le climat d'Athènes est méditerranéen, avec des précipitations assez faibles (402 mm par an), qui tombent surtout en automne et en hiver, et des températures qui oscillent entre 28 °C en juillet et 9 °C en janvier, pour une moyenne annuelle de 17 °C.
L'HISTOIRE D'ATHÈNES
1. Une petite bourgade qui devient cité

Athènes n'était à l'époque achéenne (IIe millénaire avant J.-C.) qu'une bourgade. Son isolement la sauva quand les envahisseurs doriens (vers le xiie s. avant J.-C.) firent décliner les cités de Mycènes et Tirynthe.
Si Athènes connaît du xie au ixe s. avant J.-C. un développement sans exemple, marqué par l'abondance et la qualité de sa céramique, elle demeure dans une pénombre relative lorsque, à l'aube du viiie s., les cités grecques sortent de ces « âges obscurs ».
Une nouvelle forme d'État se développe alors : la polis (ou cité). La polis archaïque naît d'un ensemble de villages suffisamment proches les uns des autres pour tirer parti d'une citadelle commune : à Athènes, la forteresse royale de l'époque mycénienne, sur le rocher de l'Acropole, va jouer ce rôle. Des regroupements locaux précédèrent certainement l'unification.
1.1. Thésée, roi légendaire d'Athènes
Dans la structuration de la communauté, le phénomène religieux occupe une place importante : à Athènes, il se constitue autour de la déesse Athéna. Les sources écrites, lorsqu'elles décrivent le processus de formation de la cité, renvoient au modèle classique du synœcisme (réunion de plusieurs villages en une cité) et attribuent à Thésée – dixième roi d'Athènes, selon la tradition mythique – cette unification de l'Attique (chaque année, les fêtes des panathénées célébraient ce souvenir).
1.2. Un territoire pauvre
Le territoire groupé autour de la métropole est, à l'échelle de la cité grecque, exceptionnellement vaste (2 600 km2 environ), mais il est pauvre. En effet, les montagnes occupent plus d'un tiers de la superficie de la région qu'elle commande, le littoral est pratiquement impropre à la culture.
Aussi, tout au long de son histoire, Athènes dut-elle importer des céréales qu'elle échangeait contre de l'huile, du vin, des produits manufacturés. Fort heureusement, le sous-sol était plus exploitable, de nombreuses carrières produisaient du marbre, on trouvait au Laurion du plomb argentifère. Par ailleurs, la côte découpée favorisait la navigation et la pêche.
2. La naissance d’une démocratie puissante
2.1. La société athénienne
La continuité historique entre époque mycénienne et époque archaïque se manifeste dans les institutions. La monarchie achéenne semble avoir été affaiblie progressivement plutôt que balayée ; son autorité est peu à peu réduite par le contrôle d'un conseil aristocratique siégeant sur l'Aréopage (colline d'Arès), et morcelée entre trois magistrats élus – les archontes – qui, vers 683, voient leur pouvoir limité à un an.
L'histoire athénienne des viiie et viie s. est mal connue. La cité est dominée par une aristocratie guerrière remuante et les chefs des principaux clans ou familles, les nobles (eupatrides), sont maîtres de la terre et du pouvoir politique. La masse de la population constitue une sorte de clientèle, associée au sein des phratries (groupes de familles) au culte de l'ancêtre commun.
Entre l'aristocratie et cette paysannerie plus ou moins dépendante, un groupe de citoyens, suffisamment aisés pour se procurer la panoplie de l'hoplite (fantassin lourdement armé), participe, depuis le viie s., à la défense de la cité.
Les artisans sont encore peu nombreux et Athènes ne prend aucune part au grand mouvement de colonisation qui, depuis le viiie s., étend les limites du monde grec aux rivages les plus lointains de la Méditerranée (→ histoire de la Grèce antique).
2.2. Les premières réformes
C'est sur un fond de fortes tensions sociales qu'Athènes paraît dans l'histoire. Lorsque, vers 630, un jeune noble, Cylon, s'empare de l'Acropole et cherche à établir un nouveau type de pouvoir, la tyrannie. Mégaclès, de la famille des Alcméonides, aidé par « la foule des champs », l'en déloge et le tue.
On pourrait voir dans cette tentative avortée un simple épisode de la lutte de factions entre aristocrates si Athènes n'entrait ensuite dans la voie des réformes.
Dracon
Dracon est mandaté, en 621-620, pour mettre par écrit des lois ne s'appliquant qu'aux affaires de meurtre et dont la dureté devait rester légendaire – d'où l'adjectif « draconien ». Mesure limitée qui, cependant, affirme pour la première fois l'autorité de l'État au-dessus des solidarités familiales dans le domaine de la justice, instaure un droit commun pour tous et, par là même, porte atteinte à l'arbitraire des aristocrates. Six thesmothètes (gardiens de la loi écrite) viennent alors renforcer le collège des archontes.
Le monopole économique et politique des nobles n'est cependant en rien entamé, malgré une évolution économique et militaire qui le rend moins justifié et manifestement moins bien supporté.
Comme les autres cités grecques, Athènes connaît une crise rurale qui déchire la société. Les mêmes solutions s'offrent à elle : soit l'arbitrage d'un législateur, chargé, dans une sorte de consensus, de mettre fin à des troubles qui risquent de dégénérer en guerre civile, soit la tyrannie, qui, dans l'évolution de la Grèce archaïque, apparaît bien souvent comme une solution transitoire aux problèmes de la cité. Avec Solon, le législateur, puis avec les fils du tyran Pisistrate, Hippias et Hipparque, Athènes fera successivement l'expérience de l'une et de l'autre.
2.3. Sous l'impulsion de Solon
Solon est chargé, en 594-593, de refaire l'unité de la cité. Son œuvre est essentiellement celle d'un libérateur. Par la remise du fardeau (seisachthéia), il annule toutes les créances et interdit à l'avenir la caution personnelle, donc l'esclavage pour dettes, restaurant ainsi une petite paysannerie menacée de perdre sa liberté. Solon, dans ses élégies – il est aussi le grand poète lyrique d'Athènes –, se glorifie d'avoir libéré la terre et aussi les hommes, « ceux qui, en Attique même, connaissaient la servitude dégradante et que faisait trembler l'humeur des maîtres », ceux qui avaient fui, ceux qui avaient été emmenés pour être vendus à l'étranger.
Modérée puisqu'elle ne réalise pas le nouveau partage des terres très largement réclamé, la réforme de Solon ampute cependant la richesse des eupatrides qui sans doute y ont consenti par crainte d'un soulèvement populaire et de la tyrannie.
La place du peuple (dêmos)
Avec cette solution apportée à la crise qui affecte le monde rural, l'originalité d'Athènes paraît bien résider dans les mesures politiques qui donnent au peuple un droit de regard sur l'évolution future. Un dêmos élargi est intégré dans le corps civique par des mesures politiques inscrivant la seisachthéia dans un ensemble cohérent. Les limites du dêmos sont clairement établies au sein d'une hiérarchie sociale fondée sur les revenus fonciers.
Institutions populaires et évolutions économiques
Le rôle de l'ecclésia – une assemblée du peuple jusque-là peu consultée – se renforce. Solon met en place un tribunal populaire de justice (l'héliée) qui ne fonctionne encore que comme instance d'appel, mais qui, selon le philosophe Aristote, devait être une pièce maîtresse de l'évolution démocratique d'Athènes.
La paysannerie se développera encore au cours du vie s. et, jouissant de la sollicitude du tyran Pisistrate (des prêts d'État, en particulier, la soustraient à l'influence des riches propriétaires), elle donnera une solide assise sociale à la démocratie athénienne.
Le développement de l'artisanat est, de même, étroitement lié par la tradition au souvenir de Solon, et l'archéologie révèle un essor étonnant de la production de céramiques et des échanges à partir des années 580. Des ruraux trouvent ainsi du travail à la ville et la classe des thêtes (citoyens non propriétaires, la classe la plus basse) se développe.
Des intérêts contraires
Vers 575, Athènes se donne une monnaie et, peu après, s'instaure l'équivalence entre la drachme et les mesures de capacité, ce qui témoigne d'un développement nouveau de la fortune mobilière.
L'extraordinaire ouverture d'Athènes vers l'extérieur a ainsi été préparée par Solon et par le compromis modéré recherché entre les intérêts contraires des eupatrides et du dêmos.
Solon n'a guère réussi, en revanche, dans sa volonté de restaurer la communauté de la polis en crise puisque, très rapidement, des troubles reprennent. Élus terriens conservateurs et « nouveaux riches », loin d'opposer les intérêts des eupatrides à ceux des pêcheurs et des commerçants, représentent des factions aristocratiques locales ; les paysans, sur lesquels s'appuie Pisistrate, regroupent les mécontents contre les nantis et s'identifient avec le dêmos.
2.4. Sous la tyrannie des Pisistratides
Pisistrate s'appuie sur le peuple pour conquérir le pouvoir. Maître d'Athènes une première fois en 561, il en est par deux fois chassé, mais il revient, toujours par la ruse ou par la force, et à sa mort, en 528, ses fils lui succèdent. C'est ainsi que, tardivement, Athènes connaît la tyrannie, une tyrannie modérée qui laissera à la postérité le souvenir d'un gouvernement raisonnable.
Pisistrate ne modifie guère les institutions, se dotant simplement d'une garde personnelle et confiant les magistratures à des hommes à sa dévotion. Il laisse Athènes bénéficier de l'impulsion donnée par Solon, poursuivant une politique d'équilibre social et d'affirmation de l'État, inaugurant une politique extérieure active et, à l'intérieur, un programme de grands travaux vivifiant pour l'économie.
Pisistrate et ses fils entretiennent une cour brillante et marquent leur volonté d'assumer le passé religieux et mythique d'Athènes (rédaction des poèmes homériques, des hymnes orphiques). Pour exalter la déesse Athéna, un grand temple, l'Hécatompédon, est construit sur l'Acropole, et un éclat remarquable est donné aux panathénées. Mais le pouvoir s'efforce aussi de favoriser les cultes populaires, comme celui de Dionysos.
Avec les Pisistratides, Athènes connaît donc sa première période de grandeur. Cependant, après l'assassinat d'un des fils de Pisistrate, Hipparque, en 514, la tyrannie d'Hippias le fils aîné se durcit et, en 510, ce dernier doit quitter Athènes devant l'opposition conjuguée des aristocrates et des Spartiates, et devant celle du dêmos, fortifié par le dynamisme économique d'Athènes.
2.5. La réorganisation politique sous Clisthène
Après une lutte acharnée au cours de laquelle la cité de Sparte appuie les plus durs des oligarques athéniens, Clisthène, soutenu par le dêmos, fait voter en 508 une réforme radicale de la Constitution qui établit la démocratie athénienne dans ses institutions.
L'espace civique athénien est remodelé, la ville incluse dans une nouvelle division de l'Attique. Les citoyens sont regroupés en dix tribus. Chaque tribu offre une image réduite des intérêts multiples de la cité et ses membres.
Il apparaît dès lors une réorganisation politique générale fondée sur ce cadre des dix tribus ; un secrétaire s'ajoute aux neuf archontes ; à la boulê, ou conseil des Cinq-Cents, les 50 représentants de chaque tribu gèrent la cité pendant un dixième de l'année (une prytanie). Dix stratèges assurent la direction des troupes de chacune des tribus, et ce commandement militaire, à l'épreuve des guerres médiques, donnera à ces nouveaux magistrats un pouvoir décisif dans l'Athènes du ve siècle.
Enfin, la loi sur l'ostracisme (exil dans les dix jours et pour dix ans, sur vote de l'ecclésia, d'un citoyen jugé dangereux pour la démocratie) tente de prémunir la cité contre un éventuel retour de la tyrannie.
3. Fin de la période archaïque : l'apogée d'Athènes
La cité, alors fermement unie, va cependant connaître l'épreuve des guerres médiques.
3.1. Les guerres médiques

Athènes est la seule cité, avec Érétrie, à porter secours aux Grecs d'Asie Mineure, révoltés contre Darius, grand Roi des Perses. Une petite expédition brûle l'une de ses capitales, Sardes, et la vengeance de Darius s'exerce essentiellement contre les deux cités.
À Marathon, Athènes fait face et, sous la direction du stratège Miltiade, ses hoplites appuyés seulement par quelques Platéens obligent les Perses à reprendre la mer en 490. Athènes a gagné seule la première guerre médique.
C'est elle encore qui, grâce à l'orientation maritime donnée par Thémistocle à la cité (création du port du Pirée), joue un rôle décisif dans la seconde guerre médique. Thémistocle convainc les Athéniens d'abandonner l'Attique et de combattre sur mer l'invasion conduite par le Perse Xerxès. À Salamine, où ils fournissent près de la moitié des contingents alliés, ils contraignent les Perses à la retraite en 480, tandis que leur flotte remporte encore des victoires capitales près des côtes d'Asie Mineure.
Plus qu'aucune autre cité, Athènes a souffert de l'invasion : l'Attique est dévastée, la ville détruite, mais, alors que la Grèce semblait perdue, la cité reconstruite par Clisthène a montré son attachement à la liberté et c'est vers elle que se tournent – craignant un retour offensif des Perses – les petites cités des îles et de la côte ionienne.
La Confédération athénienne, ou ligue de Délos (du nom de l'île où est déposé le trésor des cités alliées), simple alliance militaire constituée autour d'Athènes (478), devient la base de la puissance de la cité au ve siècle.
Pour en savoir plus, voir l'article guerres médiques.
3.2. L'Athènes de Périclès

Périclès fut le maître incontesté de la cité pendant près de trente ans. De la lignée Bouzyge par son père, et des celle des Alcméonides par sa mère, il est est l'un de ces aristocrates qui continuent de monopoliser les charges principales. Associé au chef du parti démocratique Éphialtès dans la lutte qui, après les guerres médiques, oppose toujours eupatrides et dêmos, les aristocrates et le peuple, il est avec lui responsable des derniers élargissements de la démocratie athénienne.
Périclès domine bientôt la vie politique et, de 443 à 431, est constamment réélu stratège. Cette autorité incontestée dans une cité où le peuple a pris en main son destin a de quoi surprendre.
La démocratie athénienne
L'ecclésia, l'assemblée du peuple, décide de tout ; elle est aidée dans sa tâche par la boulê, qui doit débattre des questions soumises à l'assemblée et émettre un avis préalable. Les magistratures, collégiales et annuelles, sont étroitement surveillées par le dêmos. La stratégie – du grec stratos, armée et agein, conduire – constitue désormais le véritable exécutif de la cité, dépossédant l'archontat, réduit, comme l'ancien conseil aristocratique de l'Aréopage, à des attributions juridiques et religieuses.
Le tribunal populaire, l'héliée (6 000 héliastes tirés au sort), juge de presque toutes les causes. Tout citoyen athénien peut donc décider du destin de sa cité à l'assemblée, siéger au tribunal, être bouleute (membre de la boulê) et exercer une magistrature au moins une fois dans sa vie. Pour que cette égalité de droit ne soit pas un vain mot, Périclès accorde une indemnité de participation à la vie civique, le misthos.
La démocratie s'efforce aussi d'atténuer les inégalités économiques et sociales par la pratique des liturgies (charges normalement assumées par l'État confiées aux plus riches des citoyens), par un système d'entraide pour les plus déshérités, par du travail pour tous.
Les contradictions de la société athénienne
Bien sûr, cette démocratie directe n'est pas parfaite. Aristophane s'est fait l'écho des critiques qui lui sont adressées par ceux qu'inquiètent ses excès. On peut remarquer que, jusqu'en 400 avant J.-C., aucun misthos n'est donné pour la participation à l'assemblée, ou encore pour l'exercice de la plus importante des magistratures – la stratégie –, que seuls les plus riches des citoyens peuvent exercer.
Enfin et surtout, cette démocratie est à l'usage d'un petit nombre de privilégiés. Au moment même où s'achève la conquête de la démocratie, en 451, il faut, pour être citoyen de plein droit, être né non seulement d'un père citoyen mais – et c'est nouveau – de mère athénienne. De surcroît, ni les femmes, ni les métèques (les étrangers domiciliés à Athènes), ni les esclaves – de plus en plus nombreux – ne participent à la vie politique.
Cela constitue l'une des contradictions majeures d'Athènes : plus la cité s'éloigne de ses origines agraires et voit son économie s'orienter vers des activités tournées vers l'échange et le profit, plus elle fait appel aux esclaves, et plus cette contradiction va croissant.
Périclès disait encore que l'exercice d'un métier ne peut empêcher le citoyen de donner un avis utile à son pays. Au ive s., déjà, Xénophon et Platon estimaient que la seule activité compatible avec la citoyenneté est l'agriculture ; Aristote, pour sa part, jugeait qu'être citoyen est un métier à part entière et proposait d'exclure tous ceux qui travaillent de la vie politique.
3.3. L'impérialisme athénien
En outre, cette démocratie qui veut ses citoyens les plus libres des Grecs admet l'impérialisme à l'extérieur.
L'historien Thucydide ne se fait pas d'illusions : la ligue de Délos, d'alliance qu'elle était, s'est transformée en empire. Les aristocrates qui conduisent la ligue à ses débuts, non seulement lui font faire des progrès décisifs, mais répriment durement les révoltes à Naxos en 470, à Thasos en 465. Les démocrates, lorsqu'ils leur succèdent, n'agissent pas autrement : la répression à Samos en 441, conduite par Périclès, n'est pas moins sanglante, et l'établissement de colons athéniens sur les terres enlevées aux cités alliées se poursuit. Au moment même où la signature de la paix de Callias avec les Perses en 449 aurait pu rendre l'alliance caduque, Athènes impose à toutes les cités de la ligue la circulation de sa monnaie et organise plus rationnellement la perception d'un tribut qui, depuis 454, n'est plus déposé à Délos mais à Athènes. Et cette dernière s'autorise à puiser dans ce trésor, destiné à la défense commune, à des fins qui lui sont propres.
Athènes, en effet, n'est pas seulement impérialiste par accident (si la ligue est née de l'initiative des alliés, leur négligence à s'acquitter du tribut explique sa transformation en empire), elle l'est par nécessité. Sa démocratie vit de l'empire. Elle a besoin non seulement de la richesse que, grâce à la maîtrise de la mer, il lui procure, mais aussi des terres prises aux anciennes cités alliées et enfin, du tribut. Tribut qui permet de distribuer des misthoi (indemnités pour ceux qui vont aux assemblées), d'aider les plus démunis et de pratiquer une politique de prestige utile à l'économie et décisive pour cimenter la communauté tout entière.
3.4. La guerre du Péloponnèse

C'est de cette dernière contradiction que naît la guerre du Péloponnèse (431-404). La politique intransigeante d'Athènes incite les alliés à la révolte et ses prétentions à l'hégémonie dressent contre elle ses vieilles rivales : Sparte et Corinthe.
Le conflit, acharné, dure près de trente ans. La stratégie voulue par Périclès paraît être l'aboutissement logique d'une évolution longue de deux siècles ; la cité s'était, en effet, tournée vers la mer. La création du port du Pirée par Thémistocle puis son développement, la réalisation des Longs Murs avaient fait de la ville et de son port une sorte d'île dont le salut dépendait de la mer et de la flotte. L'Attique abandonnée aux incursions périodiques des Lacédémoniens (autre nom des Spartiates), la population athénienne se retranche à l'intérieur des murs reliant le port à Athènes, et résiste, tandis que les contre-attaques sont menées sur mer.
La peste et la mort de Périclès, en 429, laissent Athènes affaiblie. La guerre se traîne avec des fortunes diverses et si la paix de Nicias, en 421, met fin pour un temps aux hostilités, celles-ci se rallument avec la désastreuse expédition de Sicile (415-413), voulue par le stratège Alcibiade.
Après la perte de 12 000 citoyens, Athènes remporte encore quelques succès en mer Égée, mais elle est définitivement défaite à la bataille d'Aigos-Potamos en 405. L'année suivante, les Spartiates entrent dans la cité qui doit livrer sa flotte, détruire ses murailles, abandonner son empire, dont toutes les cités sauf une ont d'ailleurs fait défection.
Pour en savoir plus, voir l'article guerre du Péloponnèse.
4. Le déclin d'Athènes
La guerre a sérieusement altéré le fonctionnement de la démocratie. En 411, les oligarques sont même parvenus à renverser le régime, mais leur tentative a échoué. Les  Trente tyrans, dont la dictature est imposée par Sparte à la fin de la guerre, ne réussissent pas plus à se maintenir.
Les Athéniens tiennent à leur démocratie et la restaurent en 403. Ils jouent alors un jeu habile entre les cités qui prétendent à l'hégémonie et reconstituent même, en 377, une seconde Confédération maritime. Celle-ci leur redonne, pour un temps, la maîtrise des mers, mais, affaiblie par la révolte des alliés (357-355), elle sera disloquée par Philippe de Macédoine.
4.1. Athènes face à la conquête macédonienne
Athènes doit alors affronter un danger nouveau, celui que le roi de Macédoine fait courir à toute la Grèce. Philippe II triomphe des cités coalisées à Chéronée en 338. Il se montre généreux envers Athènes : la cité conserve son autonomie, mais doit entrer dans la ligue de Corinthe, qui regroupe toutes les cités grecques sous hégémonie macédonienne.
Après la mort du fils de Philippe, Alexandre, et une tentative malheureuse de révolte (→ guerre lamiaque), les Athéniens doivent, en 322 avant J.-C., accepter d'Antipatros une garnison macédonienne et une Constitution oligarchique qui contraint les plus pauvres d'entre eux à l'exil.
Dès lors, tiraillée entre les successeurs du conquérant macédonien et caressant toujours le vain rêve d'une vengeance, Athènes n'est plus que l'ombre de ce qu'elle avait été. Même la création littéraire s'affaiblit, et seule la comédie de mœurs reste vivante, avec Ménandre. En revanche, Athènes, où se développent les écoles épicurienne et stoïcienne, demeure le centre le plus actif de la pensée philosophique.
4.2. Sous la domination romaine
Lorsque, après la défaite du dernier roi de Macédoine, Persée à Pydna en 168 avant J.-C., l'hégémonie de Rome se substitue à celle de la Macédoine, Athènes retrouve quelque vitalité ; les Romains, en particulier, lui donnent Délos, et le Pirée tire encore profit de la destruction de Corinthe, en 146.
Elle périclite, cependant, dès le ier siècle de notre ère (pillage par les troupes de Sylla en 86). Et si elle bénéficie de la paix romaine et reste une cité libre et fédérée, les honneurs dont la comblent les empereurs sont inversement proportionnels à sa faiblesse réelle. Ils témoignent cependant de l'immense prestige que conserve la cité qui domina la Grèce.
4.3. Les derniers feux d'Athènes
Le triomphe définitif du christianisme dans l'Empire romain contribue à la décadence de la cité des dieux. En 393, les jeux Olympiques sont interdits par Théodose Ier ; mais, en partie sous l'influence de Julien l'Apostat et des néoplatoniciens, Athènes reste longtemps encore un pôle de résistance du paganisme.
Cependant, en 529, ses écoles sont fermées par Justinien et peu à peu ses temples transformés en églises. Athènes était alors complètement éclipsée par Constantinople, qu'on embellit en la dépouillant.
Pour en savoir plus, voir les articles histoire de la Grèce antique, Macédoine, Rome.
4.4. Dans l'Empire byzantin
En 857, Athènes devient le siège d'un archevêché, dont la cathédrale – dédiée à la Vierge – est installée dans le Parthénon. À partir du xie siècle, de nombreux monastères s'y fondent : Athènes allait être, face à Rome, l'un des bastions de l'orthodoxie.
Après la prise de Constantinople par les Francs, en 1204, la ville devient la capitale du duché latin d'Athènes, qui se maintient jusqu'en 1456 après être passé des mains des Français à celles des Catalans, d'ailleurs plus ou moins vassaux de Venise.
4.5. Athènes dans l'Empire ottoman
Prise par Mehmet II en 1456, Athènes reçoit des Turcs quelques privilèges, ce qui n'empêche pas que le Parthénon soit transformé en mosquée et l'Érechthéion en harem pour le gouverneur turc.
Aux xvie et xviie s., Athènes n'est plus qu'une bourgade de 8 000 à 10 000 habitants. En 1678, la ville se réveille avec Michaïl Linbonos, dont la révolte fut durement réprimée par les Turcs. Afin de mieux résister aux Vénitiens de Morosini, ces derniers ravagent l'Acropole et transforment le Parthénon en poudrière : une bombe vénitienne, en y éclatant, endommage gravement le monument (1687).
Au xixe s., Athènes se trouve naturellement au cœur de la guerre d'indépendance grecque. Tombée aux mains des Turcs, qui se maintiennent dans l'Acropole jusqu'en 1833, elle est désignée l'année suivante comme capitale du royaume indépendant de Grèce : son histoire se confond désormais avec l'histoire souvent tragique du jeune État.
Pour en savoir plus, voir l'article histoire de la Grèce moderne.
L'ART ET L'ARCHÉOLOGIE
De Pisistrate à Périclès

C'est avec Pisistrate que commence la « grande » histoire artistique d'Athènes. Les vestiges des civilisations antérieures furent alors attribués à des héros mythologiques et à des peuples légendaires : Pélasges, Cécrops, Érechthée, Thésée. L'archéologie va plus loin que la fable, et nous savons que, plusieurs millénaires avant qu'on y ait adoré Héphaïstos, les arts du feu étaient pratiqués dans le secteur du Céramique.
Pisistrate, quand il entreprit de restaurer et d'embellir l'Acropole, où il avait établi sa résidence, y trouvait des temples en tuf polychrome, dédiés à des cultes primitifs. On en a conservé quelques débris, notamment la pièce dite « fronton de l'Olivier », maquette d'un temple double d'Athéna et d'Érechthée. L'édifice principal était le temple de cent pieds consacré à Athéna, l'Hécatompédon, datant de Solon. Il fut pourvu d'une colonnade dorique et orné de métopes et de frontons racontant les exploits d'Héraclès. Autour du sanctuaire furent répartis des serviteurs et des servantes de la déesse, des sacrificateurs, des porteurs et porteuses d'offrandes. Après les destructions de l'armée perse, ce qui subsistait de cette statuaire fut pieusement enseveli. Retrouvées il y a un siècle encore revêtues de leurs vives couleurs, ces pièces (Kouroi athlétiques, korês aux drapés ioniens, au sourire hiératique, monstres mystérieux) ont été une révélation éblouissante. Parmi les autres travaux de Pisistrate et de ses fils, il faut mentionner les portiques de l'Agora – au centre de laquelle un autel de la Pitié marquait le point de départ des chemins de l'Attique – et la construction d'un temple colossal à Zeus. Les tambours en tuf de cet édifice resté inachevé furent incorporés au mur de Thémistocle, où ils sont encore. De l’époque des Pisistratides date aussi le premier état du théâtre de Dionysos, à l'origine simple enclos où dansaient les chœurs.
Après la chute des tyrans, un groupe de bronze représentant les tyrannicides fut dressé près de l'Acropole : il devait être emporté à Suze par Xerxès. On prépara la construction d'un grand temple à Athéna, pour lequel il fallut élargir par des soutènements la plate-forme rocheuse de l'Acropole. Par ailleurs, la cité dut se consacrer surtout à l'architecture militaire : mur de Thémistocle, Longs Murs, forteresses d'Éleuthères et de Phylè. Tout fut emporté, ruiné ou détruit par l'armée de Xerxès.
Trente ans après Salamine, la paix enfin assurée, Périclès conçut un vaste programme pour renouveler les lieux consacrés de toute l'Attique. (« La Grèce, disait-il, doit être le modèle du monde, et Athènes celui de la Grèce. »). Il en confia la réalisation à Phidias, dont les récentes créations d'Olympie provoquaient l'admiration universelle. Ce programme ne put être exécuté qu'en partie, et, après le Théséion, seul le Parthénon – qui en était à vrai dire la pièce maîtresse – fut achevé du vivant de Périclès. Le Théséion est, de tous les temples doriques d'époque classique, celui qui nous est parvenu dans le meilleur état. Situé dans la ville basse, au-dessus de l'agora, il était consacré à Héphaïstos, mais sa décoration illustrait les exploits du héros local Thésée.
Les monuments de l'Acropole
Le Parthénon

Le Parthénon est un temple dorique, dédié à Athéna, dont il abritait la statue chryséléphantine. Il fut construit par les architectes Ictinos et Callicratès sous la direction de Phidias. De dimensions moyennes (70 sur 31 m), entouré de 46 colonnes, il diffère un peu du canon dorique traditionnel par une largeur relative plus grande, un moindre écrasement des chapiteaux, un galbage des fûts, une certaine courbure du stylobate qui donnent une impression de parfait équilibre. Il réalise l'harmonie des deux grands styles dorique et ionien. À l'intérieur, un mur divisait l'édifice en deux salles inégales qui ouvraient, l'une à l'est et l'autre à l'ouest, par une porte monumentale. Dans celle de l'ouest et la plus grande, la cella, où une colonnade ménageait un déambulatoire, se dressait l'effigie d'Athéna, œuvre de Phidias (l'autel de la déesse était à l'extérieur, au bas des degrés). Devant la statue – faite de revêtements d'or et d'ivoire sur un bâti de bois –, un plan d'eau entretenant l'humidité qu'exige l'ivoire reflétait l'image divine ; haute d'environ 15 m, celle-ci atteignait par le sommet du casque le toit de l'édifice. L'autre salle contenait des trésors et des trophées, sur lesquels veillaient des jeunes filles – réelles ou en effigies ; de là son nom de chambre des vierges (parthenôn), qui devint celui de l'édifice tout entier.



Les métopes, les frontons et la frise intérieure du temple étaient ornés de sculptures peintes en ocre, en rouge et en bleu, protégées par un enduit à la cire et complétées par des accessoires de bronze. Les métopes étaient en haut relief. Elles montraient des scènes guerrières : combats de Thésée contre les Centaures et les Amazones, chute de Troie, lutte des Dieux et des Géants. Sur les frontons, de grandes figures en ronde bosse représentaient la naissance et le triomphe d'Athéna. À l'est, Héphaïstos fendait d'un coup de hache la tête de Zeus, d'où la Vierge divine sortait tout armée. Répartis de part et d'autre, couchés, assis, debout, épousant l'espace triangulaire, les dieux regardaient naître la Raison. Dans un angle disparaissait le char de la Nuit. Dans l'autre surgissaient les chevaux du Soleil. Sur le fronton opposé, on voyait s'affronter Athéna et Poséidon, la lance contre le trident. Ce duel, dont devait dépendre le sort d'Athènes, avait pour témoins des personnages symbolisant les forces et les beautés de la nature attique : collines, sources, rivières, arcs-en-ciel.
Les bas-reliefs de la frise, derrière la colonnade, déroulaient le cortège des Panathénées, par lequel tous les quatre ans la cité entière, gravissant la Voie sacrée, allait remettre à la déesse un voile neuf. La procession s'ordonnait sous le fronton ouest et se divisait, comme les demi-chœurs des tragédies, sur chacun des longs côtés. Elle se reformait sous le fronton est, où l'attendaient le grand prêtre et la prêtresse entourés d'Athéna et des dieux protecteurs des arts. Ce cortège, long de 160 m, comptait plus de 350 figures : ouvrières, magistrats, sacrificateurs, cavaliers, musiciens, porteurs et porteuses d'offrandes.
Athènes a été relativement épargnée par les séismes qui ont dévasté presque toute la Grèce : c'est par les hommes que le Parthénon, au cours des âges, a été ruiné. Au ve s., quand le christianisme fut imposé par Théodose, la statue d'Athéna disparut, emportée à Constantinople, et le temple fut transformé en église, non sans de graves mutilations. Sous les Turcs, le Parthénon devint mosquée, puis magasin à poudre, ce qui causa sa destruction quand l'armée du doge Francesco Morosini vint mettre le siège devant l'Acropole : le toit, la moitié du mur extérieur, près de la moitié des colonnes et tout un fronton sautèrent. Un siècle plus tard, lord Elgin, l'ambassadeur britannique, ayant fait déposer certaines pièces des frontons, de la frise et des métopes, cette opération, mal conduite, entraîna la chute de nombreux éléments.
Sur les 92 métopes, il en subsiste 18 à peu près lisibles, dont 16 au British Museum, 1 au Louvre et 1 en place. Du fronton ouest, il reste en place des têtes de chevaux dans les deux angles. Quelques personnages mutilés sont au British Museum. Sur le fronton est encore visible un groupe ruiné.
De la frise, il reste en place les plaques de l'ouest, malheureusement menacées par la pollution de l'air ; parmi les autres, 3 sont au musée de l'Acropole, 1 au Louvre et le reste au British Museum. Ce sont ces sculptures de la frise, d'une incomparable beauté, qui sont le mieux conservées.
Le Parthénon, temple des Victoires, célébrait certes la gloire militaire d'Athènes et son triomphe sur l'Asie, mais il prétendait aussi symboliser la victoire de l'humain sur le bestial, de l'ordre sur le chaos, de l'intelligence sur la démesure, de la liberté sur la contrainte. Il signifie l'aboutissement de l'évolution politique et religieuse d'Athènes, où bientôt devaient s'ouvrir l'Académie et le Lycée.
La sensibilité moderne est sans doute déconcertée par l'esclavage et par l'anthropomorphisme qui déparent la démocratie et la philosophie religieuse dans l'Athènes de Périclès. Cependant, l'art du Parthénon – art engagé s'il en fut – exprime une idéologie qui est l'une des sources fondamentales dont prétend s'inspirer la civilisation occidentale.
Les Propylées, portes monumentales conçues par l'architecte Mnésiclès, commandent l'entrée de l'Acropole par sa pente accessible du versant ouest. Ce sont des parvis majestueux de 60 m de façade sur 30 m de profondeur, où les processions pouvaient se recueillir et s'ordonner. L'édifice, qui ne fut jamais complètement achevé, comportait au centre un vaste bâtiment amphiprostyle soutenu à l'intérieur par une colonnade ionique entre deux portiques de six colonnes doriques. Sur le flanc nord, une aile en retour, la Pinacothèque, dominait le rocher. L'aile opposée, pour ne pas empiéter sur des emplacements consacrés à d'autres cultes, se réduisait à une façade. Métopes et frontons étaient sans ornements. Entre les Propylées et le Parthénon se dressait une grande statue de bronze d'Athéna combattante (Promachos).
Le temple d’Athéna Nikê
Le temple d'Athéna Nikê, dit de la Victoire aptère, est un petit édifice situé sur un saillant du rocher, à côté des Propylées, où, dès le vie s., un sanctuaire avait été dédié à Athéna Nikê (l'Athéna des Victoires), dont la statue, simple xoanon, fut appelée aptère par différence avec les Victoires ailées traditionnelles. Le temple construit par Callicratès, de pur style ionique, consiste en une cella unique de 4 m de côté, cantonnée sur ses deux façades d'un portique de quatre colonnes. Plus qu'à sa frise, consacrée aux guerres médiques, la célébrité de son décor sculpté tenait à la balustrade qui l'entourait du côté du rocher à pic. Longue de 32 m et haute de 1 m, elle représentait des Victoires se rendant au sacrifice : la procession se déroulait en relief vigoureux au-dessus de la Voie sacrée menant aux Propylées. Plusieurs de ces plaques de marbre ont été retrouvées ; bien que très mutilées, elles révèlent un art attique d'une élégance toute particulière : art à la fois hardi et chaste, qui sous des tissus presque transparents voile et montre la nudité.
L'Érechthéion
C'est plusieurs années après la mort de Périclès que Nicias fit relever les ruines de l'ancien sanctuaire d'Érechthée. On n'opérait pas en table rase : il fallait respecter la place rituelle de cultes hétéroclites et obscurs. C'est là que Poséidon et Athéna s'étaient affrontés, qu'avait surgi l'olivier sacré, que le trident du dieu avait fait jaillir une source. Des cellae à des niveaux différents devaient être englobées dans une unité architecturale réunissant l'idole antique d'Athéna, le Serpent sacré, le tombeau de Cécrops. L'architecte Philoclès réalisa pour l'Érechthéion un monument complexe dont la disposition n'a pu être déchiffrée avec certitude. Il comporte deux portiques ioniques, souvent copiés, et celui, plus célèbre encore, des Caryatides, porteuses de corbeilles dont la tête charmante et robuste soutient l'architrave.
Monuments divers

La liste serait longue des monuments notables de l'Athènes du ve s. avant J.-C. : les textes signalent des sanctuaires dédiés à presque tous les dieux, mais ils ont laissé peu de vestiges. Les collines célèbres qui font face à l'Acropole, la Pnyx, le Mouseion, l'Aréopage, n'ont pas été couronnées de monuments civils ou religieux de quelque importance. Quant à l'habitat privé, il était sans luxe.
C'est à la sortie de la ville qu'étaient les cimetières, dont le plus célèbre sur la voie d'Éleusis, qui traversait le faubourg du Céramique. La plupart des Athéniens importants eurent là leur tombeau. Les fouilles qui s'y poursuivent depuis un siècle ont mis au jour d'infinies richesses (vases de l'époque géométrique, stèles funéraires, etc.). Quelques monuments ont été remontés in situ, tels les spectaculaires Géants d'époque romaine.
De Périclès à Byzance
Après Périclès, la cité, appauvrie par les guerres, n'eut pas les moyens d'achever son œuvre. De riches protecteurs des arts (chorèges) se firent élever des monuments votifs, tels celui de Thrasyllos contre le mur de l'Acropole et celui de Lysicrate (dit « Lanterne de Démosthène ») dans l'antique rue des Trépieds. Athènes, dont le rayonnement persista pendant plusieurs siècles, ne cessa de « s'embellir », mais aucun de ses monuments postérieurs au ive s. avant J.-C. n'a d'importance majeure pour l'histoire de l'art. La domination macédonienne fut pour Athènes la grande époque des « évergètes » (bienfaiteurs), au premier rang desquels il faut citer deux rois de Pergame, Eumenês et Attalos. On doit au premier le portique qui porte son nom, vaste déambulatoire qui conduit au théâtre de Dionysos. Attalos, un peu plus tard, rénova l'Agora et l'entoura d'autres portiques somptueux.
Le respect que lui vouèrent les Romains n'alla pas pour Athènes sans inconvénient. Elle fut l'objet d'un vaste pillage, tandis que s'y élevaient des bâtisses bien peu conformes au programme de Périclès, tels la statue équestre géante d'Agrippa devant les Propylées, la « tour des vents », l'escalier colossal de l'Acropole, le Temple de Rome à côté du Parthénon, les ornements du théâtre de Dionysos, etc. Hadrien, qu'on nommait plaisamment « Graeculus », créa toute une ville nouvelle, la « Ville d'Hadrien » à côté de la « Ville de Thésée », construisit un forum à la romaine et acheva en marbre et en style corinthien le temple colossal de Zeus (Olympieion) commencé sous Pisistrate. Un évergète, Hérode Atticus, construisit l'Odéon qui porte encore son nom. Un autre, C. Julius Antiochos Philopappos, se fit élever un gigantesque mausolée sur le Mouseion. Le voyageur Pausanias a laissé une description de la ville telle qu'elle était sous les Antonins. C'était un dédale où, à chaque pas, autels, ex-voto, effigies, tombeaux, stèles, inscriptions célébraient les dieux, les héros, les hommes de la légende, de la grande et de la petite histoire, depuis Cécrops jusqu'à l'empereur régnant.
Athènes byzantine, franque et turque
Avec le transfert de la capitale de l'Empire à Constantinople commença le déclin d'Athènes, qui perdit son rang de métropole de l'hellénisme. Dans l'Empire byzantin, elle ne fut plus qu'une bourgade. Les invasions barbares des iiie et ive s. ruinèrent entièrement la ville basse. Le christianisme ferma les écoles philosophiques et interdit les cultes. Dans les temples brutalement modifiés, Athéna et Thésée furent remplacés par la Panagia Theotokos et par saint Georges. Aucune grande basilique ne fut construite ; on n'édifia que des chapelles et de modestes monastères, parmi lesquels il faut citer les églises des Saints-Théodores, de la Kapnikaréa, de la Petite-Métropole, qui sont aujourd'hui la parure charmante du centre de la ville. Au pied de l'Hymette, le monastère de Kaisariani est un bon exemplaire du style byzantin du xe s. Quant à l’église de Dháfni, sur le chemin d'Éleusis, elle montre des mosaïques qui sont parmi les plus belles de l'art byzantin.
Quand les ducs francs s'installèrent sur l'Acropole, ils la défigurèrent sans pitié et mirent ses monuments à tous les usages. Les Turcs à leur tour la couvrirent de minarets, de fortifications, de baraquements. Lorsque Chateaubriand la visita en 1806, Athènes était un pauvre village peuplé surtout d'Albanais. Dans le Parthénon éventré était installée une petite mosquée ; le temple de la Victoire aptère avait été démoli par les Turcs, et ses éléments incorporés dans un bastion ; une tour de guet construite par les Francs dominait la Voie sacrée. Parmi les marbres épars, des bâtisses de toute nature couvraient l'Acropole, dont l'accès était barré par des ouvrages militaires.
Depuis l'indépendance
Lorsque la capitale du petit État qu'était le nouveau royaume fut transférée de Nauplie à Athènes, celle-ci, ravagée par la guerre d'Indépendance, ne comptait qu'une centaine d'habitants. Le tracé en damier de la nouvelle ville suivit un plan axé sur une voie centrale nord-sud partant du Céramique. Il ne s'y construisit rien de très notable (monuments de style néo-grec ou « munichois ») : son histoire artistique est celle de la découverte, de la préservation, de la restauration et de la mise en valeur de ses gloires. Dès 1837 fut fondée la Société grecque d'archéologie, bientôt suivie des écoles archéologiques étrangères et de l'Éphorie des antiquités. Dans le champ de décombres et l'amas confus de bâtisses qu'était devenue l'Athènes antique, les travaux archéologiques étaient difficiles. Que faire disparaître ? Jusqu'où restituer ? Les travaux ont été effectués avec un goût, une modération, une honnêteté dont on connaît peu d'exemples.
Depuis une quinzaine d'années, de nouveaux aménagements ont facilité la compréhension et la vision des monuments. Le Mouseion, naguère encore inaccessible et désolé, a été reboisé et aménagé en belvédère, d'où la vue embrasse tout le groupe de l'Acropole. Le Théséion a été dégagé et entouré de jardins ; l'Agora a été déblayée, et l'un des vastes portiques (ou « stoa ») d'Attalos reconstruit dans son état primitif. Le tracé de la Voie sacrée a été rétabli. Le Lycabette, qui domine toute la ville et dont le panorama s'étend jusqu'à Salamine, est sillonné de sentiers faciles. Quant aux sites byzantins, ils ont été restaurés avec une grande piété. Un spectacle « son et lumière » raconte l'histoire d'Athènes aux spectateurs réunis sur la Pnyx.
LES MUSÉES D'ATHÈNES
Le musée national archéologique, le plus riche du monde en antiquités grecques, présente les plus belles pièces de ses collections dans des salles où sont groupées chronologiquement des œuvres montrant les étapes de l'art grec, du néolithique à l'époque romaine. La salle « mycénienne » contient de fabuleuses richesses. Les salles de sculpture ne présentent que les originaux les plus intéressants, et les collections céramiques tracent l'histoire d'un art d'une infinie variété.
Le musée de l'Acropole, dissimulé dans un angle du mur antique, près du Parthénon, contient les pièces provenant des monuments et des fouilles de l'Acropole. Elles sont toutes célèbres : sculpt

 
 
 
 

TÉLÉVISION

 


 

 

 

 

télévision
(anglais television)

Application de ce procédé pour la transmission au grand public de programmes visuels, avec les sons associés, ou dans le domaine industriel, scientifique, médical.
TECHNIQUE
La transmission des images et des sons
Le mot « télévision » évoque d'abord la diffusion d'émissions par ondes hertziennes ou leur distribution par câble. Or, cette technique permet aussi soit de visualiser instantanément une image sur un écran, soit de la transmettre à distance, soit encore de l'enregistrer sur une bande magnétique. La télévision trouve ainsi de nombreuses applications telles que la télésurveillance : surveillance à distance de travaux ou de manœuvres (plates-formes pétrolières en mer), de locaux (banques), d'espaces extérieurs (pistes d'aéroport), et la télécommunication : transmission d'images issues de milieux inaccessibles (certaines interventions chirurgicales, travaux effectués à des températures élevées ou sous atmosphère hostile), etc.
La chaîne d'opérations nécessaires à la radiodiffusion de la télévision doit assumer trois fonctions : la production (c'est-à-dire la fabrication) du programme, rôle dévolu au centre de production ; la diffusion vers les téléspectateurs, assurée soit par réseau terrestre, soit par satellite ; la réception, qui consiste à transformer l'onde hertzienne reçue en images et en sons.
Dates clés de la télévision
DATES CLÉS DE LA TÉLÉVISION
1926    Première démonstration de télévision en couleurs par le Britannique John Logie Baird.
1931    Le Français René Barthélemy fait la première démonstration publique de son système de télévision à 180 lignes.
1934    L'Américain Vladimir Zworykin présente son iconoscope, qui permet d'analyser une image selon un balayage de 450 lignes.
1937    Premier reportage télévisé en direct, lors de l'Exposition internationale, à Paris.
1938    Diffusion depuis la tour Eiffel d'émissions régulières de télévision (455 lignes).
1951    La Columbia Broadcasting System (CBS) fait à Paris une démonstration de télévision en couleurs.
1952    Retransmission dans cinq pays du couronnement de la reine d'Angleterre Élisabeth II.
1956    Présentation du magnétoscope par la société américaine Ampex.
Brevet du procédé de télévision en couleurs SECAM, mis au point par les Français Henri de France et Henri Peyrolles.
1962    Échange d'images entre les États-Unis et l'Europe par le satellite américain Telstar (première liaison transatlantique de télévision par satellite).
1969    Premiers pas de l'homme sur la Lune retransmis en direct en Mondovision.
1981    Première présentation d'un concept de télévision haute définition par les Japonais à San Francisco.
1991    Mise en service, au Japon, de la 1re chaîne de télévision à haute définition (Hi-Vision).
1994    Élaboration d'une norme internationale de compression des images animées (MPEG 2).
1997    Premiers bouquets diffusés par satellite.
 
Comment fonctionne la télévision hertzienne

Ce sont les limitations de la vision humaine qui ont conduit au système d'analyse et de synthèse d'une image. L'œil perçoit simultanément tous les points constituant une image. Or, il n'est pas possible de transmettre instantanément tous ces points ; la transmission ne peut être que séquentielle. Mais, à cause de la persistance rétinienne, l'œil ne peut distinguer deux illuminations successives espacées de moins de 1/20 de seconde. On fait donc se succéder pendant une seconde un nombre suffisant d'images (25 en Europe, 30 aux États-Unis et au Japon). Par ailleurs, l'œil ne peut pas séparer deux points dont la distance angulaire est inférieure à une minute, ce qui permet de limiter le nombre d'informations à transmettre. L'analyse de l'image s'effectue en lignes horizontales, au nombre de 625 en Europe et de 525 aux États-Unis et au Japon. Les signaux de synchronisation, ajoutés au signal d'image, sont de deux natures : les « tops lignes », pour le retour horizontal, et les « tops trames », pour le retour vertical.
Une image couleur est décomposée en trois images, respectivement rouge, verte et bleue. Les signaux correspondants R, V et B sont transformés en trois composantes, la luminance Y (dégradé du noir au blanc), pour être compatibles avec les récepteurs noir et blanc, et deux composantes de couleur R-Y et B-Y constituant la chrominance.
Ces composantes ont des caractéristiques différentes. En effet, l'œil est beaucoup plus sensible aux variations de luminance qu'aux variations de couleurs. Les bandes de fréquence nécessaires s'étendent de 0 à 6 MHz pour la luminance et de 0 à 1,5 MHz pour la chrominance. En production, deux solutions sont possibles : soit constituer un signal unique, dit « composite » (PAL [Phase Alternative Line], SECAM [système séquentiel à mémoire] ou NTSC [National Television System Committee]), soit conserver ces composantes séparées pour obtenir, après divers traitements, la meilleure qualité possible.
Le centre de production

Le studio de production est constitué de deux parties. D'une part, le plateau, où se produisent les présentateurs, comédiens, chanteurs, dans des décors appropriés ; il est équipé des microphones et des caméras nécessaires à la prise de son et à la prise de vues. D'autre part, la régie, dans laquelle mélangeurs images et mélangeurs son servent à réaliser les mixages et les enchaînements des sources. Le mélangeur images traite soit des signaux composites (dans le système PAL), soit des signaux composantes (Y, R-Y, B-Y). Associé au mélangeur images, le truqueur numérique permet, après avoir mémorisé une image, de lui faire subir différents traitements : rotation, zoom avant ou arrière, renversement d'image, etc.
Les autres matériels sont regroupés dans une salle des équipements, climatisée en général. Les magnétoscopes reçoivent un signal vidéo soit en composite (PAL, SECAM) et enregistré sur une piste, soit en composantes enregistrées sur deux pistes, l'une pour la luminance Y, l'autre pour la chrominance (successivement R-Y et B-Y). Le second procédé, plus récent, évite les interférences entre luminance et chrominance. Le télécinéma sert à transformer l'image présente sur un film en un signal vidéo. La régie de postproduction comprend un pupitre de montage qui pilote deux (ou plusieurs) magnétoscopes en lecture et un en enregistrement afin de réaliser les enchaînements souhaités. On leur associe un truqueur numérique, un générateur de caractères (titres sur image) et une palette graphique, véritable outil électronique de dessins (certaines palettes peuvent réaliser des animations).
Tous les signaux transitent par le « nodal » : liaisons internes au centre de production, arrivées de l'extérieur (reportage), départ vers les émetteurs.
Les réseaux de diffusion et de transmission



Les signaux image et son sont « transportés » par des ondes électromagnétiques qui se propagent en espace libre jusqu'aux récepteurs. La fréquence de ces ondes doit être incluse dans les bandes de fréquences réservées à la diffusion terrestre : ondes métriques (O. m) de 174 à 230 MHz, ondes décimétriques (O. dm) de 470 à 860 MHz.
Les émetteurs de diffusion de forte puissance (50 kW) ont une portée maximale de l'ordre de 100 km. Pour assurer une couverture nationale, il est nécessaire d'utiliser un réseau d'émetteurs (une centaine pour un pays comme la France). Des obstacles naturels (montagnes) ou artificiels (immeubles), ainsi que des interférences entre des signaux émis (échos), limitent la couverture d'un pays. Des réémetteurs, équipements de faible puissance (1 W à 250 W), alimentent les zones d'ombre et de brouillage. Très nombreux en montagne, ils complètent la couverture recherchée (il y en a 3 000 dans un pays comme la France).
Le réseau de transmission terrestre (faisceaux hertziens) assure le transport des signaux image et son du centre de production aux émetteurs (liaisons directives de point à point : 52 000 km pour le réseau français). Ce transport peut aussi être réalisé par une liaison satellite de télécommunication, d'un point (centre de production) à de nombreux points (centres de diffusion). Le réseau de transmission terrestre est utilisé pour acheminer des reportages, retransmissions en direct des régions vers le centre de production national ou entre plusieurs centres régionaux. Un réseau de transmission international mixte (faisceaux hertziens et satellites) permet des échanges dans le cadre de l'U.E.R. (Union européenne de radiodiffusion). Les réseaux câblés distribuent les programmes de télévision nationaux et internationaux en zones urbaines et, à terme, en zones rurales. Les émissions des satellites de diffusion directe peuvent être captées avec des antennes de faible dimension.
Antennes, propagation et réception

Une antenne élémentaire (doublet), permettant d'émettre des ondes, est constituée de deux tiges de gros diamètres placées bout à bout et dont la longueur totale est une demi-longueur d'onde. Le diagramme de rayonnement (répartition dans l'espace de la puissance émise) est un tore dont l'axe est parallèle à celui du doublet. Plusieurs doublets placés devant un plan réflecteur constituent un panneau directif. Plusieurs panneaux, placés sur chaque face d'un pylône, constituent l'antenne d'émission. Le retard entre les signaux appliqués à chaque panneau ainsi que leur puissance permettent de façonner le diagramme de rayonnement en fonction de la zone à couvrir. Les ondes métriques et décimétriques se propagent en ligne droite ; elles ne franchissent pas les obstacles. Les antennes d'émission sont donc placées au sommet des montagnes ou des pylônes. Ces ondes se réfléchissent sur les obstacles (montagnes, immeubles) et créent des échos sur l'image. Le récepteur sélectionne le signal radiofréquence correspondant au programme choisi. Après transposition dans une bande de fréquence plus faible (F.I., fréquence intermédiaire), les signaux image et son sont démodulés. Les signaux composites (PAL ou SECAM) sont décodés puis appliqués, avec les tops de synchronisation, au tube cathodique.
Les antennes paraboliques servent à recevoir les programmes de télévision directe.
Les nouveaux systèmes de télévision
La télévision à haute définition (T.V.H.D.)

Les recherches en vue d'améliorer la qualité des images, notamment sur les écrans de grandes dimensions, ont conduit à la télévision à haute définition (T.V.H.D.), dont les images ont un nombre de lignes et un nombre de points par ligne bien plus importants ainsi qu'un format parfaitement adapté à la diffusion de films cinématographiques (rapport largeur/hauteur de 16/9), contrairement à celles des systèmes classiques (rapport largeur/hauteur de 4/3). Alors que la définition d'une image de télévision standard est aujourd'hui de 720 x 576 (576 lignes et 720 pixels par ligne), celle d'une image de télévision haute définition est de 1 280 x 720 (720 lignes, 1 280 pixels par ligne) au format 720p (à balayage progressif) et de 1 920 x 1 080 (1 080 lignes, 1 920 pixels par ligne) au format 1 080i (à signaux entrelacés, chaque trame ne comportant que la moitié des lignes).
De plus en plus de téléviseurs haut de gamme bénéficient d'un écran panoramique (à plasma ou LCD), au format 16/9. Associés à une chaîne haute-fidélité assurant une excellente restitution de tous les effets sonores, ils permettent de recréer à domicile l'ambiance d'une salle de cinéma (home cinéma ou cinéma à domicile).
La télévision numérique

Les systèmes de télévision classiques sont des systèmes analogiques, où la modulation du signal vidéo est proportionnelle à celle des intensités lumineuses balayées par le faisceau d'électrons. L'évolution technologique en cours conduit au développement de la télévision numérique, fondée sur le principe non pas de la variation continue de l'intensité lumineuse des lignes mais de la mesure de l'intensité de chaque point. La valeur du signal est découpée, échantillonnée en une succession d'impulsions, exprimées en nombres binaires et qui restent identiques quelles que soient les variations intervenues dans le signal premier. Le système numérique permet l'obtention d'un signal très stable, facilite le transcodage, offre de multiples possibilités de composition, dont les images de synthèse.
L'avènement de la télévision numérique provoque un bouleversement du paysage audiovisuel mondial. En effet, grâce aux techniques de compression numérique des images, il devient possible de diffuser plusieurs programmes (de 4 à 12 suivant la qualité de l'image et le type de programme) sur un même répéteur de satellite ou sur un même canal hertzien ou câblé. Il en résulte une multiplication des chaînes et des services : chaînes thématiques, programmes interactifs, téléachat, jeux vidéo ou éducatifs, formation professionnelle, systèmes de réservation, etc. La diffusion numérique engendre alors de nouveaux modes de consommation de la télévision, fondés sur l'interactivité ; la télévision de flux cède peu à peu la place à une télévision de stock, constituée de banques de programmes audiovisuels dans lesquelles le téléspectateur vient puiser selon ses centres d'intérêt.
Équipé d'un décodeur, intégrant un disque dur destiné à la sauvegarde de programmes (ce qui remplace le magnétoscope) et d'un modem relié à une ligne téléphonique, le téléviseur de la nouvelle génération se transforme en terminal intelligent. Cette intelligence repose pour l'essentiel sur un guide électronique de programmation qui tient compte du profil de chaque utilisateur (âge, sexe, passions, disponibilités horaires…), donnant ainsi accès à une véritable télévision à la carte.
La télévision numérique diffusée par voie hertzienne, ou télévision numérique terrestre (T.N.T.) s'inscrit dans le mouvement général de numérisation des technologies de l'information et de la communication. Elle vient compléter l'offre numérique offerte par le satellite, le câble et maintenant l'ADSL. À terme, la T.N.T. a vocation à se substituer à la diffusion analogique. Cette dernière pourra alors être arrêtée, ce qui libérera d'importantes ressources en fréquences pour de nouveaux services ou de nouveaux usages. En France, l'extinction de la télévision analogique a commencé à Coulommiers, le 4 février 2009, et doit progressivement s'étendre à tout le territoire métropolitain d'ici le 30 novembre 2011. Pour recevoir les 18 chaînes numériques gratuites, les foyers devront alors être équipés soit d'un adapteur T.N.T. branché sur le téléviseur, soit d'un nouveau téléviseur intégrant la T.N.T.
En France, deux normes de compression numérique ont été retenues pour la T.N.T. : pour la diffusion de chaînes gratuites (inaugurée le 31 mars 2005), la norme MPEG 2, déjà utilisée notamment pour les DVD ; pour la diffusion de chaînes payantes (depuis le 1er septembre 2005) et pour certains programmes en haute définition (depuis le 30 octobre 2008), la norme MPEG 4, qui permet globalement de diviser par deux le débit de données nécessaire pour la numérisation des images animées sans perte notable de qualité, et qui autorisera, à terme, le passage à la télévision à haute définition.
La télévision sur Internet
Un nombre croissant de sites Web produisent et diffusent des émissions de télévision interactive sur Internet. Ces « Web-TV » viennent concurrencer l'offre des bouquets de chaînes de télévision traditionnelles. Les données associées (textes, photos, etc.) complètent l'émission, elle-même diffusée en direct ou consultable à la demande, sans contrainte horaire. Les réseaux à haut débit devraient accélérer la croissance de ces nouveaux opérateurs de télévision dont les grilles de programmes thématiques s'adressent pour l'essentiel à des communautés de « télénautes » animés par une même passion. À terme, la convergence des techniques de diffusion devrait donner naissance à une génération de terminaux communs aux deux mondes de l'Internet (donc, de l'ordinateur personnel) et de la télévision.
La télévision sur téléphone mobile
En expérimentation depuis 2005, la télévision sur téléphone mobile (ou télévision mobile personnelle [TMP] ) suscite un indéniable engouement à travers le monde. L’arrivée de technologies de diffusion de masse, tel que le standard DVB-H (Digital Video Broadcasting-Handheld), contribue à accélérer le développement de ce mode de télévision nomade. Mais, en France, où des fréquences ont été attribuées à 16 chaînes, le lancement effectif de ce mode de télévision nomade a dû être différé, faute d'un accord entre les différents acteurs sur le modèle économique à appliquer, et il n'est attendu qu'en 2010.
MÉDIAS
Le système télévisuel : de l’analogique au numérique
La télévision est la transmission et la réception par voie électrique d’images et de sons de sujets fixes ou mobiles. Le récepteur de télévision, ou téléviseur, dont l’origine remonte aux recherches du physicien Michael Faraday dans les années 1830, a été mis au point au début du xxe siècle, essentiellement à partir de l’utilisation du tube cathodique. Les antennes hertziennes, le câble et les transmissions satellitaires ont successivement été employés pour la distribution des images. Les premières émissions datent des années 1930, mais la Seconde Guerre mondiale a enrayé le développement des programmes si bien que l’explosion de la production ne se produit qu’au cours des années 1950 dans les pays occidentaux, au cours des années 1980 dans le reste du monde. La libéralisation et la multiplication des chaînes sont allées de pair, comme dans le cas français.
De multiples innovations techniques ont bouleversé le système classique télévisuel (analogique) en rendant les attentes plus fortes et plus sélectives : apparition de la télécommande, de la vidéo puis du DVD, élargissement des écrans au profit du format 16/9, apparition de la télévision haute définition, combinaison de la télévision et de la hi-fi afin de rendre l'ambiance d'une salle de cinéma (home cinéma ou cinéma à domicile), etc. Mais c’est le big bang récent des technologies numériques qui modifie le plus en profondeur les conditions de production, de distribution et de réception des programmes (télévision numérique hertzienne ou terrestre [T.N.T.]).
La télévision française
Le monopole de l'État sur les ondes a été institué dès 1927 pour la radiodiffusion, au nom de l'objectivité et de l'intérêt général.
Les mutations du statut
Les réformes du statut de la radiotélévision française se sont succédé, au rythme des changements politiques les plus importants :
– en 1964, création de l'Office de la radiodiffusion-télévision française (O.R.T.F.) ;
– en 1968, assouplissement de la tutelle du ministère de l'Information ;
– en 1969, création de rédactions autonomes pour chacune des deux chaînes ;
– en 1974, fin de l'O.R.T.F. et institution de sept sociétés distinctes ;
– en 1982, suppression formelle du monopole de programmation et création d'une Haute Autorité ;
– en 1986, remplacement de la Haute Autorité par la Commission nationale de la communication et des libertés (C.N.C.L.) ;
– en 1989, remplacement de la C.N.C.L. par le Conseil supérieur de l'audiovisuel (C.S.A.).
Le P.A.F.
Le paysage audiovisuel français (P.A.F.) se compose de chaînes publiques et de chaînes privées. Depuis 2009, France Télévisions est une entreprise unique chargée de concevoir et de programmer les services qui étaient jusqu'à présent édités par les sociétés France 2, France 3, France 4, France 5 et Réseau France Outre-mer (R.F.O.). L'ancienne première chaîne de télévision, TF 1, a été privatisée dès 1987. Également privé, Canal Plus fut en 1984 la première chaîne à fonctionner par abonnement et avec décodeur. Une autre chaîne privée non cryptée, M6, diffuse sur le territoire national. Arte est une chaîne européenne.
Les chaînes thématiques (cinéma, sport, musique, voyages, séries…) sont des chaînes payantes, généralement transmises par le câble ou par satellite (bouquets de programmes).
En 2005, la télévision numérique terrestre (T.N.T.) a fait son apparition dans les foyers. Moyennant l'usage d'un décodeur, elle donne accès à de nombreuses chaînes gratuites. Depuis 2006, France 24 – une chaîne d'information internationale en continu – est transmise par le câble et par satellite.
Entre monopole et système commercial
Dans la plupart des pays européens, le développement de la télévision s’est fait selon le principe du service public. La France illustre bien ce principe puisqu’elle institue dès 1927 le monopole de l'État sur les ondes pour la radiodiffusion. L’organisme chargé de gérer les chaînes de télévision est la RTF (Radio-Télévision française) devenue l’O.R.T.F. (Office de la radiodiffusion-télévision française) en 1964, organisme « tenu » par le ministère de l’information. L’O.R.T.F est dissocié en sept sociétés distinctes en 1974, alors que le monopole public de programmation n’est aboli qu’en 1982. La première chaîne est créée en 1947, la seconde en 1964, avant l’apparition de la chaîne régionale FR3 en 1973.
En Italie, la RAI est fondée au sortir de la guerre sur un modèle de proximité avec le pouvoir politique. La première chaîne émet en 1954, la seconde en 1961, la troisième, enfin, en 1979. En RFA, la télévision publique est fondée, au sortir de la guerre là encore, sur le principe du fédéralisme. La première chaîne, l’ARD, est une fédération d’une dizaine de stations régionales. La seconde chaîne publique, la ZDF, est fondée en 1963 sur une base centralisée. La Belgique lance sa première chaîne publique en 1953 en la faisant reposer sur deux organismes, l’un wallon (la RTBF), l’autre flamand (la BRT).
Le Royaume-Uni se distingue par l’antériorité et la cohérence de sa démarche. La BBC, service public de radiodiffusion naît dès 1922. Ce service propose rapidement une télévision et est confronté à la concurrence du privé dès 1955 (apparition de ITV, par ailleurs BBC 2 est créée en 1964). Les pouvoirs publics ne mettent pas la BBC sous tutelle, ce qui contribue à son essor et à la qualité de ses programmes.
Alors que la démarche européenne a consisté généralement à instaurer des monopoles publics et à multiplier par la suite des autorisations d’émettre pour le privé, celle des États-Unis a reposé entièrement sur la création d’un secteur privé, complété par un réseau public en 1966 (PBS). Les modèles se rejoignent aujourd’hui : domination du secteur privé, importance néanmoins des services publics. Il est à noter que des différences existent dans les modes de financement des télévisions publiques : pas de publicité au Royaume-Uni pour la BBC, importance de la publicité historiquement pour les chaînes publiques françaises et italiennes. Mais le passage d’un modèle de financement à un autre, comme envisagé en France (suppression de la publicité sur France Télévisions), n’a jamais été expérimenté.
« Le » média de masse
Du point de vue social, la télévision est le média de masse par excellence. Dans les pays occidentaux, plus de trois individus sur quatre la regarde tous les jours. La consommation quotidienne de télévision avoisine à elle seule 3 h 30 par personne en 2008 en France, 4 h 00 aux États-Unis et en Grande-Bretagne.
La pratique télévisuelle est si présente et si visible qu’elle suscite des interrogations sur ses fonctions, ses effets, son utilité sociale. Mais il faut penser la télévision comme une pratique culturelle, qui a du sens y compris dans ses activités de zapping ou de « tapisserie ». Elle soude une communauté nationale et internationale partageant les mêmes rites puisqu’il n’existe pas dans nos sociétés de pratique où les différences de comportements soient aussi faibles : 96 % des foyers possèdent un téléviseur et les contenus de ce média sont le second objet de discussion dans l’entreprise (après le travail) et à l’école. Elle demeure toutefois inégalitaire car surconsommée par une forte minorité de la population, plus âgée, plus populaire et plus féminine que la moyenne. 10 % des publics représentent près de 30 % de l’écoute, 30 % des publics 60 % de l’écoute alors que les plus réfractaires représentent moins de 1 % de l’écoute pour 10 % de la population.
Le public de gros consommateurs de télévision, ou « grand public », ne peut être vu cependant comme aliéné par opposition aux autres. Quelques éléments statistiques suffisent à contredire cette thèse : le grand public est plus sélectif que les « élites » (les Parisiens diplômés sont ceux qui savent le moins ce qu’ils vont regarder), il attend de la diversité des programmes (il consomme tous les types d’émissions). S’il y a des téléspectateurs pour les journaux télévisés, les magazines, les documentaires, les émissions culturelles, c’est parce qu’ils sont regardés par ceux qui utilisent beaucoup la télévision. Ceux qui la regardent moins n’ont pas une pratique centrée sur les émissions prestigieuses. Les diplômés regardent proportionnellement plus que les gros consommateurs les programmes de cinéma et de sport…
La télévision est-elle en déclin ?
Deux grandes mutations menaceraient la télévision. L’avènement du web fait imaginer un déclin du média de masse au profit d’Internet (la fin de l’écoute massive de télévision, la montée de l’interactivité). La diffusion numérique et la multiplication des supports, rendant possibles de nouveaux modes de consommation de la télévision fondés sur l'interactivité, fait évoquer un éclatement des pratiques télévisuelles.
La concurrence d’Internet
Les enquêtes sur les pratiques démontrent cependant qu’il n’existe pas de concurrence nette entre la télévision et les autres médias, sauf pour des populations très précises. Internet prend place dans le paysage préexistant des médias sans expulser ses devanciers, contrairement à la thèse de substitution des médias. La concurrence exercée à l’égard de la télévision était au départ réelle au niveau de la perception : le rejet de la télévision est en effet plus élevé dans les catégories sociales qui se sont appropriées les premières Internet. Mais la hausse continue et significative de la consommation horaire de télévision depuis le lancement d’Internet vient démentir la thèse du déclin du grand média d’images. Celui-ci est ancré dans des routines familiales et répond à des attentes de sociabilité et de culture non satisfaites par le Net. L’écoute télévisuelle est d’autre part profondément polymorphe : près de 50 % des gens déclarent faire autre chose en regardant la télévision, manger, parler, dormir, repasser, lire, etc. Elle absorbe des usages nouveaux comme ceux liés à Internet : 40 % des jeunes internautes écoutent la télévision tout en jouant, surfant sur le web ou en consultant leurs courriers.
La convergence technologique des supports
La convergence programmée de la télévision et de l’Internet était au départ envisagée avec une fusion des écrans et la possibilité de gestion interactive des programmes télévisuels (du choix des contenus jusqu’au choix des caméras). Cette convergence se heurte cependant à des obstacles : les publics, qui estiment dans leur majorité que l’offre de contenus est déjà suffisante et assez coûteuse, ne s’intéressent pas aux outils de filmage (pourquoi sélectionner avec difficulté les caméras pour une course de F1 quand un réalisateur fait cela très bien ?) et ne sont pas profondément séduits par l’interactivité (la formule du télé-achat est la seule à s’être imposée depuis les années 1950 à la télévision). Les essais de fusion ordinateur/téléviseur n’ont guère satisfait les utilisateurs qui n’avaient pas envie de regarder la télévision sur ce qu’ils percevaient avant tout comme un poste de travail et de jeu. Au total, l’empilement des technologies à la maison, et non leur réduction, montre que la divergence technologique reste paradoxalement plus forte que la convergence.
L’identité télévisuelle face à la dissémination des images
La thèse de la diversification des supports de réception voit dans la dissémination avancée des images la vraie raison de la disparition de la télévision. Noyée dans un océan d’écrans, désarticulée par la vidéo et le DVD, le téléchargement sur Internet, le mobile, le podcasting, la télévision perdrait de sa centralité dans la production du sens commun : pour le spécialiste des médias Jean-Louis Missika, « il y a toujours plus d’images et moins de télévision ». La baisse des audiences des grandes chaînes au profit des chaînes thématiques ajouterait à la « démédiatisation ». À cette thèse s’opposent de nombreux faits et arguments. L’audience télévisuelle stricto sensu ne baisse pas, celle des grands networks s’est stabilisée et demeure élevée à 40 % environ. L’écoute en famille ne diminue pas, seule progresse l’écoute individualisée. Si la télévision a eu pour effet de consolider la famille nucléaire dans les années 1950-1960, en fournissant un support pour des pratiques partagées, si elle fournit un vocabulaire commun et sert de lieu d’échange, elle n’a jamais coïncidé avec l’idéal d’une société célébrant son unité par une culture commune. Les mutations qui l’affectent sont celles de l’individualisme, compatible avec la recherche de sens en commun. La dissémination des images, indéniable, ne signifie pas la disparition de l’identité télévisuelle : les médias ne sont jamais des entités isolées, pures, ils se définissent les uns par rapport aux autres et enregistrent des cycles complexes d’échange de propriétés. L’impact de la technologie est une redéfinition des frontières entre médias et non une disparation des frontières. Il est même possible de soutenir que se produit l’invention véritable de la télévision. Parvenue à la maturité du point de vue créatif, comme en attestent le genre le plus décrié, la télé-réalité, et le plus loué, les séries, elle propose des œuvres qui par leur format et le rythme de réception qu’elles supposent, inscrit dans la quotidienneté, ne peuvent plus être assimilées par les autres médias (notamment le cinéma). Les programmes les plus regardés sont désormais produits pour le « petit écran », ce qui signifie que la télévision s’est autonomisée comme média.

 

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VENEZUELA

 



 

 

 

Venezuela
GÉOGRAPHIE
1. Le milieu naturel
1.1. Le relief
La chaîne des Andes
La grande plaine de l'Orénoque
Le massif ancien des Guyanes
1.2. Le climat et la végétation
1.3. La faune et la flore
2. La population : croissance, immigration, urbanisation
3. L'économie vénézuélienne, une épopée pétrolière
3.1. La décentralisation économique
3.2. L'agriculture
3.3. Mines et industrie
3.4. Commerces et échanges
3.5. Les sites du Venezuela classés à l'Unesco
HISTOIRE
1. La conquête
1.1. « Petite Venise »
1.2. Débuts de la colonisation
1.3. Capitainerie générale
2. Les guerres de l'indépendance
2.1. Francisco de Miranda
2.2. Simón Bolívar
Loyalistes contre patriotes
La République de Grande-Colombie (1819-1830)
3. Régionalismes et fédération
3.1. Régime militaire et dictatorial
4. L'instauration mouvementée de la démocratie
4.1. Stabilisation politique et nationalisation des compagnies pétrolières
4.2. Évolution néolibérale
5. La « révolution chaviste » et la « République bolivarienne du Venezuela »
5.1. De la montée des mécontentements à la tentative de coup d'État
5.2. Vers une république bolivarienne socialiste ?
5.3. Le Venezuela de Chávez dans le monde
Un axe anti-États-Unis
6. Le Venezuela après Chávez
6.1. Une situation économique préoccupante
6.2. La contestation et la mobilisation de l’opposition
6.3. La victoire de l’opposition aux élections parlementaires
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Venezuela
Nom officiel : République bolivarienne du Venezuela



image: http://www.larousse.fr/encyclopedie/data/vignettes/1306157.jpg
Venezuela

État d'Amérique du Sud, le Venezuela possède au nord et au nord-ouest une longue façade maritime sur l'océan Atlantique (mer des Antilles) ; il est limité à l'est par le Guyana, au sud par le Brésil, à l'ouest par la Colombie.
Le Venezuela est membre de l'Organisation des pays exportateurs de pétrole (O.P.E.P.).
C'est un État fédéral, qui se compose d'un District fédéral et de 22 États : Amazonas, Anzoátegui, Apure, Aragua, Barinas, Bolívar, Carabobo, Cojedes, Delta Amacuro, Falcón, Guárico, Lara, Mérida, Miranda, Monagas, Nueva Esparta, Portuguesa, Sucre, Táchira, Trujillo, Yaracuy et Zulia.
Superficie : 912 050 km2
Nombre d'habitants : 30 405 000 (estimation pour 2013)
Nom des habitants : Vénézuéliens
Capitale : Caracas
Langue : espagnol
Monnaie : bolívar
Chef de l'État : Nicolás Maduro
Chef du gouvernement : Nicolás Maduro
Nature de l'État : république à régime présidentiel
Constitution :
Adoption : 15 décembre 1999
Entrée en vigueur : 20 décembre 1999
Pour en savoir plus : institutions du Venezuela
GÉOGRAPHIE

Les Llanos, plaines du bassin de l'Orénoque, séparent l'extrémité septentrionale des Andes (cordillère de Mérida) des lourds massifs de la Guyane vénézuélienne. La population, qui s'accroît rapidement, se concentre près du littoral, dans la région de Caracas (20 % du total) et autour du lac de Maracaibo, centre de l'exploitation du pétrole. Celle-ci demeure le fondement de l'économie, malgré l'extraction du fer et de la bauxite (à la base d'une notable production d'aluminium). Les productions agricoles (céréales, canne à sucre, café, cacao, élevage bovin) sont en expansion mais ne couvrent pas les besoins alimentaires. La grande dépendance par rapport au pétrole et une gestion économique très peu structurée pèsent sur la lutte engagée contre les inégalités, et le sous-emploi et l’inflation sont importants. Les États-Unis restent le premier partenaire commercial.
1. Le milieu naturel

1.1. Le relief

tropical et équatorial, ce qui lui vaut, d'une façon générale, un climat chaud dont les aspects se trouvent cependant assez nuancés en fonction du relief. En effet, le territoire se caractérise par une topographie contrastée où alternent les grandes plaines, les plateaux et les hautes montagnes.
La chaîne des Andes
Les Andes forment deux cordillères encadrant le golfe de Maracaibo, dites de Perijá à l'ouest, de Mérida à l'est (5 007 m au pic Bolívar). C'est une chaîne complexe surgie au tertiaire et au début du quaternaire. Les formes lourdes des sommets s'opposent à l'entaille vigoureuse des vallées qui abritent des villes anciennes et s'ouvrent vers le lac de Maracaibo ou les Llanos : dépression du Táchira avec San Cristóbal, vallée du Chama avec Mérida, du Santo Domingo vers Barinas, du Motatán avec Valera. Le fossé tertiaire de Maracaibo a des gîtes pétrolifères dans des sédiments continentaux ou marins. La cordillère Caraïbe, de direction ouest-est, a été soulevée au crétacé et au tertiaire, combinant plis amples, failles et effondrements. La chaîne côtière y est la plus élevée au centre (2 765 m), donnant un littoral rectiligne, abrupt. Celle de l'intérieur est plus récente, moins haute, plus franchissable. Entre les deux sont les dépressions du lac de Valencia – vallée du Tuy au centre, des golfes de Cariaco et Paria à l'est.
La grande plaine de l'Orénoque
image: http://www.larousse.fr/encyclopedie/data/images/1315301-Llanos.jpg
LlanosLlanos
Au centre du pays, le bassin sédimentaire des Llanos se dessine dès le secondaire. La sédimentation tertiaire et quaternaire, marine ou continentale a repoussé l'Orénoque contre le socle. Des terrasses fixent l'habitat dans une plaine inondée annuellement par les crues des rivières (Apure surtout) descendant des Andes et chargées des matériaux alluviaux qui se répandent sur une partie de la plaine au moment des grandes crues. L'Orénoque draine 70 % du pays et se termine par le vaste delta Amacuro.
Les principaux cours d'eau du Venezuela
Le massif ancien des Guyanes
Le bouclier guyanais, au sud, est une partie du socle précambrien, aplani. Ces moyennes montagnes forment l'ensemble de la partie sud-est du Venezuela et se rattachent au massif ancien des Guyanes. Il est formé de roches métamorphiques et ignées avec des lambeaux de sédimentation précambrienne, contenant des minerais de fer et d'or, parfois recouvertes de tables de grès rouges escarpés.


Le paysage le plus fréquent est celui de moyennes montagnes anciennes plus ou moins transformées en collines, avec cependant quelques monts plus élevés, dont le Roraima, qui atteint 2 800 m.
1.2. Le climat et la végétation

Cette diversité du relief apporte un certain nombre de nuances au caractère généralement élevé des températures annuelles et la végétation s'étage avec l'altitude :
– terres chaudes (forêt décidue, canne à sucre, cacao) situées entre 27 et 28 °C près du lac de Maracaibo ;
– tempérées (café et, plus haut, maïs, blé, pommes de terre), à 20 °C à 1 000 m d'altitude, au niveau de Caracas ;
– terres froides dans les Andes avec des prairies humides ou « paramos », qui descendent jusqu'à 15 °C, aux alentours de 2 000 m d'altitude.
À cette zonation climatique en altitude, correspondant à la variation des températures, s'ajoute une zonation en latitude caractérisée par une diminution générale des précipitations, en allant du sud vers le nord. Certes, le climat comporte partout une saison sèche de janvier à mai et une saison humide de mai à décembre (invierno) , mais cette dernière fournit des précipitations supérieures à 1 m, voire 1,50 m dans la région du massif des Guyanes, tandis que les pluies annuelles ne dépassent plus 1 m dans les Llanos et tombent à moins de 500 mm sur la côte nord ; dans cette zone, le climat très sec réduit la végétation à une brousse à cactus et des acacias, alors que la plaine de l'Orénoque est couverte d'une savane arborée, en partie anthropique, les Llanos, et que la Guyane vénézuélienne est le domaine de la grande forêt tropicale.
Le climat du Venezuela
1.3. La faune et la flore

Autant que le milieu naturel, la faune vénézuélienne est très variée ; elle compte notamment singes, jaguars, pumas, lamantins, paresseux, fourmiliers ou encore tatous. Les oiseaux tropicaux abondent (perroquets, aras, cacatoès...).
2. La population : croissance, immigration, urbanisation

La croissance de la population est de l'ordre de 1,5 % par an. Cette croissance est resté longtemps plus élevée, ce qui explique, notamment, sa jeunesse (le pays n'était peuplé que de 5 millions d'habitants en 1958). L'indice de fécondité est encore élevé (2,5 enfants par femme) et 29% des habitants ont moins de quinze ans. Cette croissance démographique résulte de la baisse de la mortalité, due à l'éradication du paludisme et aux investissements effectués dans le domaine de la santé, d'abord par les grandes compagnies pétrolières, puis par l'État. Le taux de mortalité infantile est ainsi passé de 106 ‰ entre 1950 et 1955 à 17 ‰ en 2007. Le taux d'accroissement naturel est renforcé, depuis le début du xxe s., par l'immigration. Un important flux migratoire s'est en effet instauré dans les années 1920 avec l'arrivée d'immigrants européens, notamment portugais, espagnols et italiens. Il s'intensifie et devient essentiellement latino-américain – colombien surtout – après le boom pétrolier de 1974.
La faible densité moyenne ne rend pas compte de l'inégale répartition d'un peuplement qui se concentre dans les cordillères et sur la côte septentrionale, dans la région de Caracas et autour du lac de Maracaibo, tandis que l'intérieur – les zones guyanaises et les Llanos – demeure quasiment vide d'hommes.
Plus de 90 % des habitants vivent dans des villes. Hormis Caracas, trois autres villes dépassent le million d'habitants : Maracaibo, dans l'extrême-ouest, Barquisimeto, dans l'ouest, et Maracay, à l'ouest de Caracas.
Parmi les peuples amérindiens qui vivent en partie ou en totalité au Venezuela figurent les Goajiros, les Arawaks, les Pémóns, les Yanomamis, les Galibis.
3. L'économie vénézuélienne, une épopée pétrolière

Grâce à ses gisements d'hydrocarbures, le Venezuela rural des années 1930-1940 devient, en l'espace de deux générations, le pays le plus industrialisé du monde andin. Pays fondateur de l'O.P.E.P. (Organisation des pays exportateurs de pétrole), il encourage la hausse des prix du pétrole et des taxes puis, en 1975, nationalise l'exploitation de ses ressources pétrolières, longtemps aux mains des compagnies étrangères. La mise en place de divers fonds de crédits, notamment le Fonds d'investissements du Venezuela (F.I.V.), lui permet de mieux gérer les bénéfices générés par l'« or noir » et de développer une politique sociale : hausse des salaires, surtout pour les plus défavorisés, protection de l'emploi, subventions aux denrées de base.
3.1. La décentralisation économique


Le Venezuela doit à l'hégémonie de sa capitale, depuis l'époque coloniale, d'être un pays plus caraïbe qu'andin. L'essor pétrolier ne fait que confirmer Caracas et ses annexes du littoral et du Centre-Nord (Maracay, Valencia, Barquisimeto) dans leur rôle de centre économique national. Néanmoins, les ressources pétrolières ont permis à l'État de mener, durant les années 1960-1970, un plan de développement régional destiné à contrebalancer la suprématie de la région de Caracas. Hors de ce Centre-Nord caraïbe, les villes ont bénéficié de l'implantation de services et d'activités économiques, tandis que les campagnes ont connu une réforme agraire associée à des travaux d'infrastructures : centres de stockage, industries agroalimentaires, routes, équipements ruraux, villages agricoles, travaux hydrauliques dans les Andes et dans les plaines intérieures (les Llanos).
Le Venezuela occidental et le littoral nord-oriental se sont ainsi vu attribuer des activités liées au pétrole et au gaz naturel. Dans l'Ouest, Maracaibo, deuxième ville du pays avant l'essor pétrolier, s'affirme comme une métropole régionale et accueille des services supérieurs (université, instituts technologiques). Le poids économique de cette région est renforcé, en outre, par la présence d'autres villes importantes comme Cabimas, Mérida ou San Cristóbal). Sur le littoral nord-oriental, Barcelona et Cumaná constituent de petits centres régionaux, tandis que l'archipel de Margarita développe, à côté de ses traditionnelles activités touristiques, une industrie de la pêche. À l'intérieur, les Llanos sont voués à l'élevage bovin extensif, bien que des élevages laitier, porcin et avicole aient été introduits dans leur partie septentrionale. En bordure du fleuve Orénoque, la ville de Ciudad Guayana (fondée en 1961) et sa région sont spécialisées dans l'industrie lourde. Mais, au-delà du fleuve, le vaste Sud forestier et humide est un espace encore peu occupé.
3.2. L'agriculture

L'agriculture n'occupe toutefois qu'un cinquième des terres disponibles. L'élevage fournit la moitié des revenus agricoles, les céréales, les fruits et les légumes, 40 %, les 10 % restants provenant de la pêche et de l'exploitation forestière. Les principales cultures commerciales sont la canne à sucre, la banane, le café et le maïs. En dépit de la réforme agraire, la structure foncière demeure très déséquilibrée. À côté de moyennes et de grandes propriétés capitalistes subsiste, avec peine, une masse de petits paysans (84 % des agriculteurs cultivent au total 8 % des terres). Les principales productions sont les céréales (blé, maïs, riz), la canne à sucre, le café, le cacao, auxquels s'ajoute l'élevage extensif des bovins.
3.3. Mines et industrie

L'industrie s'est développée dans le cadre d'une politique protectionniste jusqu'à la fin des années 1970. Les activités non pétrolières concernent, pour l'essentiel, la production de biens de consommation et la construction navale. Principale ressource du pays, le pétrole, dont le Venezuela est le sixième producteur mondial fut le seul secteur épargné par la crise. Le pays dispose des deuxièmes plus grandes réserves de pétrole du monde. Ces réserves sont situées dans la « ceinture de l'Orénoque », où il est difficile d'exploiter ce pétrole bitumineux lourd, et au large de la péninsule de Paria. La rive occidentale du lac de Maracaibo fournit 80 % de la production pétrolière. Avec la nationalisation de 1975, l'extraction et la transformation sont devenues le monopole de l'État via la compagnie Petroleos de Venezuela S.A. (P.D.V.S.A.), la deuxième compagnie pétrolière du monde après Saudi Aramco. Depuis 1990, cependant, l'industrie pétrolière s'ouvre à nouveau aux investissements étrangers. Le Venezuela dispose également d'une puissante industrie pétrochimique. Celle-ci démarre en 1953, avec le développement de trois grands complexes (El Tablazo, Morón et José), placés sous le contrôle de la PEQUIVEN, filiale de la P.D.V.S.A. Après la restructuration de 1983, le secteur double entre 1987 et 1994 sa production, qui représente environ 3 % de la production mondiale.
Le fer, deuxième ressource après le pétrole, a été également nationalisé en 1975. Le Venezuela en est le dixième producteur mondial et ses réserves, estimées à 1,8 milliard de tonnes, se concentrent dans la région de Guayana.
L'industrie est fondée sur la transformation de ces deux produits du sous-sol (raffinage et pétrochimie sont actifs) et sur les textiles, le fer, l'acier et l'aluminium.
3.4. Commerces et échanges

Le pétrole assure la quasi-totalité des recettes en devises du Venezuela. La fluctuation des cours mondiaux influe sur le montant de l'excédent de la balance commerciale. Depuis les années 1990, la part des exportations de produits non pétroliers tend à croître (fruits, produits chimiques, automobiles). Ce phénomène est dû à la libéralisation des échanges mise en place dans le cadre du Pacte andin, qui associe la Bolivie, le Venezuela, la Colombie, le Pérou et l'Équateur. Les États-Unis demeurent néanmoins le principal partenaire commercial, devant la Chine, la Colombie, le Brésil, le Mexique et l'Union européenne.
3.5. Les sites du Venezuela classés à l'Unesco


Trois sites du Venezuela sont inscrits sur la liste du patrimoine mondial de l'Unesco :
– la Cité universitaire de Caracas ;
– Coro et son port ;
– le parc national de Canaima.
HISTOIRE

1. La conquête

1.1. « Petite Venise »

Le pays est d'abord peuplé par des Indiens, surtout des Caraïbes, qui résisteront aux conquistadores jusqu'à la fin du xvie siècle. Découverte par Colomb (1498), la côte est appelée « Petite Venise » (Venezuela) par Ojeda, J. de la Cosa et Amerigo Vespucci, qui y voient des cases sur pilotis (1499).
1.2. Débuts de la colonisation

Les premiers explorateurs y recueillent des perles, dont l'exploitation suscite les premières agglomérations dans l'îlot de Cubagua (vers 1515), puis sur le continent à Cumaná (vers 1521). En 1528, Charles Quint concède l'arrière-pays à la compagnie allemande des Welser, qui lance des expéditions à la recherche de l'Eldorado, mais la colonisation ne commence vraiment qu'après la résiliation de leur contrat (1556). Divisé entre les gouvernements de Caracas et de Cumaná, le Venezuela dépend de Saint-Domingue, puis de Santa Fe.
1.3. Capitainerie générale

Il est sans cesse attaqué par les corsaires anglais et français, ainsi que par les Néerlandais, qui exploitent les salines de l'Araya jusqu'en 1625 et annexent les îles de Curaçao, Bonaire et Aruba. Le commerce interlope assure les exportations de la région (tabac, cacao) jusqu'à la constitution de la Compagnie du Guipúzcoa (1728). Enrichi par ce commerce et par de nouvelles cultures (caféiers, coton), le Venezuela, unifié en une capitainerie générale (1777) et pourvu d'une audiencia (1786), possède à la fin du xviiie siècle, une aristocratie de créoles éclairés, les « Mantouans ».
2. Les guerres de l'indépendance

2.1. Francisco de Miranda


En 1806, un de leurs représentants, Francisco de Miranda, tente vainement une insurrection indépendantiste. En effet, la majorité des créoles, bien qu'aspirant à plus d'autonomie, ne désire pas se séparer de l'Empire espagnol. Toutefois, la domination napoléonienne sur la métropole (1808) laisse la colonie livrée à elle-même. Le Venezuela, comme l'ensemble de l'Amérique espagnole, reste fidèle à la junte légitimiste qui anime à Cadix la résistance contre l'envahisseur.
2.2. Simón Bolívar

Loyalistes contre patriotes
À la nouvelle de la prise imminente de Cadix par l'armée française, une junte « conservatrice des droits de Ferdinand VII » se forme à Caracas en 1810. Celle-ci dépose le capitaine général et prend en charge le gouvernement du Venezuela. La Société patriotique, à laquelle appartiennent F. de Miranda et Simón Bolívar, décide le Congrès à proclamer, le 5 juillet 1811, l'indépendance des Provinces-Unies du Venezuela. Une guerre civile éclate entre loyalistes et patriotes. Mal préparés, les patriotes essuient les premières défaites et se réfugient à la Nouvelle-Grenade (actuelle Colombie). S. Bolívar organise ses troupes et mène une offensive qui lui permet de prendre Caracas (1813). Les loyalistes réussissent alors à soulever les éleveurs des plaines intérieures, les Llaneros. Ils mènent, à la tête de ces bandes de cavaliers, une guerre féroce. Les patriotes y répondent avec une égale violence, mais, en 1814, sont contraints à l'exil.
La République de Grande-Colombie (1819-1830)
En 1816, les armées de Bolívar débarquent à nouveau au Venezuela. L'un de ses lieutenants, José Antonio Páez, parvient à rallier les Llaneros à leur cause. Si S. Bolívar contrôle une grande partie du pays, Caracas lui échappe. En 1817, il fixe sa capitale à Angostura, et lors d'un congrès auquel participent les députés colombiens, il crée la République de Grande-Colombie (Venezuela et Colombie, 17 décembre 1819), dont il devient le premier président. En 1821, Caracas tombe après la victoire décisive de Carabobo (24 juin). La Grande-Colombie, à laquelle vient s'ajouter la Nouvelle-Grenade, se désintègre pourtant en 1830 après la démission de S. Bolívar sous la pression de ses lieutenants. Le Venezuela redevient un État souverain, prenant pour président J. A. Páez, artisan de son indépendance complète.
3. Régionalismes et fédération

3.1. Régime militaire et dictatorial

J. A. Páez conserve, soit directement en tant que président (1831-1835, 1839-1843), soit indirectement en tant que chef de l'armée, la réalité du pouvoir (dictature militaire). C'est pourtant l'un de ses candidats, le général José Tadeo Monagas, à qui il s'oppose en 1848 et 1849, qui le contraint finalement à l'exil (1850). J. T. Monagas et son frère José Gregorio gouvernent le pays à tour de rôle durant plus de quinze ans, et abolissent l'esclavage en 1854. Après le renversement de la famille Monagas par un soulèvement militaire, le pays sombre dans une âpre guerre civile opposant centralistes et fédéralistes.
Ces derniers, avec à leur tête Antonio Guzmán Blanco, remportent la victoire et promulguent en 1864 la Constitution des États-Unis du Venezuela. Cette structure fédérale accentue les rivalités régionales qui sous-tendent les luttes entre libéraux et conservateurs jusqu'au début du xxe siècle. Elles se traduisent par une suite de coups d'État et l'instauration de régimes autoritaires.
La dictature de A. G. Blanco (1870-1887) est imprégnée des idées positivistes d'Auguste Comte, en vogue dans le continent latino-américain : Blanco laïcise l'État, crée l'enseignement primaire gratuit et obligatoire, construit des voies ferrées, développe l'économie et draine les investissements étrangers.
Celle du général Juan Vicente Gómez, qui conserve le pouvoir de 1908 à sa mort en 1935, est marquée par l'essor pétrolier à partir de 1920. De grandes facilités (concessions, fiscalité, bénéfices) sont accordées aux compagnies étrangères, majoritairement américaines après la Première Guerre mondiale. À la fin de sa dictature, le Venezuela demeure une société rurale, affaiblie par la sous-alimentation et le paludisme.
4. L'instauration mouvementée de la démocratie

À la disparition du général Gómez, le pays connaît une ouverture du régime. Les exilés rentrent, les prisonniers politiques sont relâchés, la liberté de la presse s'affirme. En 1936, le Congrès approuve une nouvelle Constitution, et élit le général Ealezar López Contreras président pour cinq ans. Son successeur, le général Medina Angarita, également élu par le Congrès, est néanmoins renversé par un mouvement civil et militaire en 1945. Une junte révolutionnaire, présidée par Rómulo Betancourt, leader d'un parti populaire récemment créé, l'Action démocratique (AD), prend alors le pouvoir et institue le suffrage direct pour les élections présidentielles. Celles-ci, qui ont lieu en décembre 1947, donnent la victoire au candidat de l'AD, l'écrivain Rómulo Gallegos. Mais il est renversé quelques mois plus tard par les militaires (1948), et les partis de gauche sont dissous. Le colonel Pérez Jiménez s'empare du pouvoir en 1952. Il le conserve jusqu'à ce qu'un nouveau soulèvement militaire le renverse en janvier 1958, et instaure un régime civil.
Le candidat de l'AD, R. Betancourt, est élu président en décembre de la même année. Son gouvernement est soutenu par la deuxième force politique du pays, le parti démocrate-chrétien COPEI (Comité d'organisation politique électoral indépendant). Il se heurte néanmoins tant à l'opposition des militaires conservateurs qu'à celle d'une guérilla castriste. Malgré ces écueils, il poursuit sa politique réformiste, procédant par étapes à la récupération par le pays de ses sources de richesse (dont le pétrole), et à la réforme agraire. À l'élection présidentielle de 1964, Raúl Leoni, candidat de l'AD, l'emporte et reste au pouvoir jusqu'en 1969.
4.1. Stabilisation politique et nationalisation des compagnies pétrolières

Au cours des années 1970, le Venezuela apparaît comme un modèle de stabilité politique et de pratique démocratique dans une Amérique latine où progressent les dictatures militaires. Les deux forces politiques majeures, l'AD et le COPEI, alternent alors au pouvoir jusqu'en 1984. Le pouvoir revient d'abord au COPEI avec Rafael Caldera Rodríguez (1969-1974). Il accorde l'amnistie aux divers groupes d'extrême gauche, dont les communistes, qui, dès 1967, avaient renoncé à la lutte armée. Sous son gouvernement, signataire de l'acte fondateur de l'Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP), la Chambre vote la nationalisation des compagnies pétrolières dans un délai de trois ans.
Les impôts pétroliers et les prix du pétrole sont fortement relevés (1973) par le gouvernement Caldera Rodríguez, politique qui sera suivie par l'ensemble des membres de l'OPEP. Les revenus pétroliers sont réinvestis dans le développement économique du pays. Le président Carlos Andrés Pérez Rodríguez (1974-1979), membre de l'AD, poursuit la politique de ses prédécesseurs. La nationalisation du pétrole prend effet en 1975. Grâce aux progrès économiques et sociaux, le Venezuela détient les niveaux de revenu, de santé et de l'éducation les plus élevés des pays en voie de développement.
Le COPEI assume à nouveau le pouvoir avec Luis Herrera Campíns (1979-1984), dont le mandat coïncide avec le second choc pétrolier. Le Venezuela, malgré ses efforts, ne parvient pas à éviter au sein de l'OPEP la hausse incontrôlée des prix du pétrole (1979), qui se traduit, les années suivantes, par une diminution de la demande et donc par la baisse des revenus pétroliers.
4.2. Évolution néolibérale

Le gouvernement de l'AD de Jaime Lusinchi (1984-1989) est alors confronté à une crise économique et financière qui entraîne une dégradation du niveau de vie. Le pouvoir reste aux mains de ce parti avec le retour à la tête de l'État de C. A. Pérez Rodríguez (1989-1993). Celui-ci met en place une politique de privatisation et d'ouverture des exploitations pétrolières aux compagnies étrangères. Les mesures d'ajustement draconiennes, portant sur des produits de base, déclenchent de violentes émeutes qui font 300 morts (février 1989). Accusé de malversations, et après plusieurs tentatives de coup d'État, le président est suspendu de ses fonctions en mai 1993, puis destitué en août par le Congrès.
Lors de l'élection de décembre, l'ancien président R. Caldera Rodríguez, candidat d'une coalition hétérogène opposée aux excès du néolibéralisme, revient à la tête de l'État. Entré en fonction en 1994, son gouvernement est confronté à une sérieuse crise bancaire et ne peut tenir ses promesses électorales d'une politique économique protectionniste. Contraint de négocier avec le Fonds monétaire international (FMI), il met en place à partir de 1997 des mesures d'ajustement et de privatisation, mais qui ne progressent guère. De plus, la situation économique est fragilisée par la chute des cours du pétrole en 1998.
5. La « révolution chaviste » et la « République bolivarienne du Venezuela »


En décembre 1998, Hugo Chávez, ancien colonel auteur d'une tentative de coup d'État en 1992, remporte l'élection présidentielle avec 56,5 % des voix. Sa formation politique, le « Pôle patriotique », coalition formée par une dizaine de partis de gauche et nationalistes, a gagné les élections législatives et régionales le mois précédent, alors que les deux partis traditionnels, l'AD et le COPEI, ont subi un cuisant échec. Cette double victoire témoigne de la volonté des Vénézuéliens d'un renouvellement d'une classe dirigeante usée par le pouvoir et corrompue.
Après une campagne électorale que certains ont qualifiée de démagogique, le nouveau président cherche à rassurer la communauté internationale en maintenant le ministre de l'Économie et des Finances du précédent gouvernement et en annonçant la poursuite des privatisations. Mais, désireux de « refonder » la République et d'en faire une démocratie « populaire et participative » inspirée du projet bolivarien, il convoque, dès son entrée en fonctions (2 février 1999), une Assemblée constituante. En juillet, ses partisans obtiennent une majorité écrasante : plus de 90 % des 131 sièges de la nouvelle Assemblée.
Les constituants adoptent le 14 novembre la nouvelle Loi fondamentale de la République bolivarienne du Venezuela (nouveau nom du pays), qui renforce considérablement les pouvoirs de l'exécutif. Ainsi, la durée du mandat présidentiel est portée à six ans au lieu de quatre et renouvelable une fois, et le président peut dissoudre le Parlement, qui n'est plus constitué que d'une seule chambre. Les droits de l'homme et des indigènes sont par ailleurs étendus. Lors du référendum organisé un mois plus tard (15 décembre), cette réforme constitutionnelle est approuvée par plus de 70 % de la population. Malgré l'envolée du prix du pétrole, l'année 1999 est marquée par une forte récession économique (7 %), une hausse du chômage et les dramatiques inondations de décembre qui ont fait entre 30 000 et 50 000 morts.
En juillet 2000 se tiennent des élections générales, régies par la nouvelle Loi fondamentale. Hugo Chávez l'emporte sur son principal adversaire (59 % contre 38 % des suffrages exprimés), le général Francisco Arias – ex-partisan de Chávez avec lequel il a mené une tentative de coup d'État en 1992 –, alors que ses partisans, rassemblés au sein du Pôle patriotique, dominent l'Assemblée nationale et obtiennent plus de la moitié des gouvernorats. Au lendemain de sa victoire, H. Chávez annonce la nouvelle étape de sa révolution, une « constituante économique ».
5.1. De la montée des mécontentements à la tentative de coup d'État

Dans les faits, la situation économique et sociale ne cesse de se dégrader. Aucun progrès n'est enregistré dans des domaines sensibles comme la lutte contre la corruption, la sécurité, l'emploi, la mise en place d'une administration efficace… Dès lors, les désillusions sont à la mesure des espoirs soulevés et, peu à peu, le mécontentement gagne toutes les couches de la société. Les plus démunis – environ la moitié des Vénézuéliens vivraient en dessous du seuil de pauvreté – ne retirent que des bénéfices limités de l'ambitieux « plan Bolivar 2000 », élaboré en 1999 pour venir en aide aux déshérités (et dont une partie des subsides est détournée par l'armée vénézuélienne). Témoignant du manque de confiance des entrepreneurs, l'investissement privé stagne et la fuite des capitaux est importante.
Cette défiance des classes aisées et des milieux d'affaires se mue en hostilité déclarée lorsque, en novembre 2001, le président Chávez, usant de pouvoirs spéciaux accordés par le Congrès en 2000, promulgue une série de 49 décrets-lois prévoyant notamment une réforme agraire qui menace les propriétaires terriens et les grands éleveurs et un renforcement du contrôle de l'État sur l'industrie pétrolière (avec une législation restrictive pour les compagnies étrangères). Le 10 décembre, la puissante organisation patronale Fedecámaras et la Confédération des travailleurs du Venezuela (CTV) organisent une grève générale qui paralyse le pays, inaugurant une vague de protestation (grèves et manifestations à répétition) qui ne cesse de s'amplifier. Le mécontentement grandit encore et gagne les classes moyennes quand le président, confronté à une situation économique affectée par une nouvelle baisse des cours du pétrole (dans un contexte international déprimé après les attentats du 11 septembre 2001), annonce en février 2002 un plan d'austérité sans précédent et le flottement de la monnaie nationale.
Dans ce climat d'insatisfaction et d'agitation sociale généralisées, le renvoi de l'équipe dirigeante de la société pétrolière publique PDVSA et son remplacement par des fidèles de H. Chávez sert de détonateur à une crise ouverte. Le 11 avril 2002, au soir d'une manifestation de l'opposition au cours de laquelle des affrontements avec les forces gouvernementales font, à Caracas, une quinzaine de morts et plus de 300 blessés, une dizaine d'officiers supérieurs des armées et de la garde nationale, conduits par le général Efraín Vásquez, entrent en rébellion contre le président, qui est arrêté et mis au secret.
Le lendemain, le patron des patrons (président de la Fedecámaras), Pedro Carmona, est porté à la tête de l'État comme « président intérimaire » ; il proclame immédiatement l'abrogation de toutes les décisions politiques et économiques liées à la « révolution bolivarienne » et annonce de nouvelles élections. Mais, très rapidement, cette tentative de renversement du régime échoue. Le nouveau pouvoir, bousculé par la mobilisation massive des partisans de Chávez et par les réticences d'une fraction de l'armée, renonce dès le 13 avril. Le 14, ce dernier fait un retour triomphal au palais de Miraflores et est officiellement rétabli dans ses fonctions. Il lance un appel à la réconciliation nationale, sans pour autant œuvrer à la résolution des problèmes ayant conduit à la crise.
5.2. Vers une république bolivarienne socialiste ?

S'appuyant sur la manne pétrolière et un État aux pouvoirs renforcés, H. Chávez poursuit les réformes à l'attention des plus démunis (infrastructures, soutien aux coopératives de petits producteurs agricoles…), pourtant la pauvreté, l'insécurité, les trafics de drogue et la corruption restent endémiques, cependant que les difficultés des classes moyennes s'accentuent. L'opposition utilise l'arme du référendum prévu par la Constitution pour demander la révocation du président, mais le « non », qui l'emporte à 59 % le 15 août 2004, conforte ce dernier. Elle boycotte ensuite les élections législatives du 5 décembre 2005, qui donnent de fait une majorité écrasante aux partisans de Chávez.
Le régime se radicalise un peu plus en restreignant la liberté d'expression et en muselant l'opposition. Aussi, un an plus tard, le 3 décembre 2006, le président est facilement reconduit avec 63 % des voix. Dès lors, prônant le passage au socialisme, il impose, non sans remous dans son entourage comme dans la rue, l'arrêt d'une chaîne de radio-télévision, jugée hostile puis, en août 2007, il annonce l'élaboration d'une série de réformes autorisant le gouvernement, entre autres, à prendre le contrôle de la Banque centrale, à exproprier sans procédures judiciaires et à créer une milice populaire placée sous l'autorité du chef de l'État.
Toutefois son projet de révision constitutionnelle visant à abolir la limitation des mandats présidentiels à 2 et à étendre leur durée de 6 à 7 ans, adopté par le Parlement, est rejeté lors du référendum du 2 décembre par 51,01 % des électeurs. Mais cette limitation est finalement levée à l’issue d’un nouveau référendum organisé en février 2009, ce qui permet à Hugo Chávez d’être réélu pour la quatrième fois depuis son accession au pouvoir en 1998, face au candidat de l’opposition Henrique Capriles en octobre 2012. Soigné pour un cancer depuis juin 2011, le président doit cependant être de nouveau hospitalisé à Cuba. Son état s’étant aggravé, il ne peut prêter serment et meurt le 5 mars 2013 à Caracas après avoir choisi comme dauphin son vice-président Nicolás Maduro.
5.3. Le Venezuela de Chávez dans le monde

Un axe anti-États-Unis
Au niveau international, le président vénézuélien ambitionne de devenir le nouveau leader des pays du tiers-monde et multiplie les voyages, s'affichant notamment avec les chefs d'État libyen et irakien. À l'occasion du deuxième sommet des chefs d'État de l'OPEP (Caracas, septembre 2000), il demande l'instauration d'un nouvel ordre mondial plus juste et multipolaire en brandissant l'arme du pétrole. Depuis, il ne cesse de défier les États-Unis qu'il fournit en or noir, mais menace régulièrement de rupture.
Convaincu que l'administration Bush soutient l'opposition à son régime et tente de le renverser, il s'emploie à contrer son influence dans l'hémisphère Sud en prenant des mesures symboliques (interdiction des OGM en 2004) ou en dénonçant les accords de libre-échange et le néolibéralisme qu'elle incarne et promeut (départ du Venezuela de la Communauté andine et adhésion au Mercosur, en cours de validation ; lancement en décembre 2004 avec Cuba de l'Alternative bolivarienne pour les Amériques (ALBA) ; retrait du FMI et de la Banque mondiale en 2007).
Par là, tout en restaurant les liens avec le Brésil de Lula (2007), il cherche à adosser sa révolution sur un partenariat idéologique et sur des accords économiques avec des pays comme Cuba ou les États latino-américains gagnés par la nouvelle gauche altermondialiste (Bolivie, Nicaragua, Équateur), et à étendre la coopération à l'échelle continentale (livraison de pétrole à bas prix à partir de juin 2006 à 13 pays des Caraïbes, à Cuba et aux membres du Mercosur ; rachat de la dette argentine…).
Dans le même temps, il se rapproche de la Chine, signe avec la Russie de Poutine d'importants contrats d'armement, et se montre aux côtés du président de l'Iran, Mahmud Ahmadinejad, formant avec ces différents pays un autre axe anti-États-Unis.
6. Le Venezuela après Chávez

6.1. Une situation économique préoccupante

En avril 2013, après les funérailles de Hugo Chávez, le dauphin désigné de celui-ci, N. Maduro, remporte l’élection présidentielle de justesse avec 50,66 % des suffrages, soit quelque 235 000 voix de plus que son adversaire, H. Capriles. Ce résultat est vivement contesté par l’opposition qui crie à la fraude ; de violents affrontements faisant plusieurs morts éclatent dans le pays. Dans un contexte politique tendu et fortement polarisé, N. Maduro est investi le 19 avril tandis qu’une procédure de vérification du vote électronique (jugé fiable) a été finalement acceptée par la Commission électorale.
Moins charismatique que le Comandante, le nouveau président en revendique l’héritage et rejette officiellement tout « recentrage » en se donnant trois priorités : la stabilisation de la situation politique et sociale, la lutte contre l’insécurité et le renforcement du « plan stratégique économique national ». Une nouvelle équipe gouvernementale dans laquelle de nombreux ministres en exercice sont maintenus à des postes clés – avec pour principale nouveauté une vice-présidence économique – est mise en place le 22 avril. Le gouvernement doit affronter une dégradation très préoccupante de la situation économique.
À l’exception de la récession de 2009-2010, le Venezuela a connu une forte croissance économique au cours des dix dernières années accompagnée d’une importante redistribution des recettes engendrées par l’exportation de pétrole. Le taux de croissance fléchit cependant à partir de 2013 (1,3 %) tandis que l’économie nationale souffre de sa faible diversification et donc d’une forte dépendance à l’égard des importations de biens manufacturiers et agroalimentaires.
La politique monétaire expansionniste, le contrôle des changes – instauré depuis 2003 pour freiner la fuite des capitaux mais qui coexiste avec un marché parallèle du dollar que le gouvernement ne parvient pas à assécher – et les déséquilibres structurels entre la demande et l’offre des produits de consommation courante se conjuguent pour créer des tensions inflationnistes constantes accompagnées de pénuries récurrentes. Parallèlement, le déficit budgétaire se creuse atteignant plus de 16 % du PIB en 2012. La dévaluation du bolivar de 32 % en février 2013 – la cinquième en dix ans – a renchéri les produits d’importation, et la réduction décrétée des prix de certains biens ne permet pas d’enrayer l’inflation qui atteint plus de 56 % à la fin de l’année contre 20 % en 2012.
Toutefois, les élections municipales du mois de décembre 2013 restent malgré tout favorables au pouvoir, l’opposition réunie dans la Mesa de Unitad democratica (MUD) ne remportant qu’environ 43 % des voix.
6.2. La contestation et la mobilisation de l’opposition

Aux difficultés économiques s’ajoute une criminalité en augmentation constante. C’est pour réagir contre cette dernière que des premières manifestations ont lieu dans la ville andine de Mérida au début du mois de janvier 2014. Cette protestation limitée, initiée par des étudiants pour exiger une enquête sur l’assassinat de l’un des leurs, s’étend à d’autres villes et universités tandis que des représentants de l’opposition au premier rang desquels la députée María Corina Machado et Leopoldo López, leader du parti Volonté populaire, s’y rallient. Elle se mue très vite en un vaste mouvement de contestation national. Au mécontentement face aux pénuries se mêlent les revendications politiques contre la corruption, contre les atteintes à la liberté d’expression, la répression et, de façon plus générale, contre le régime. Le 12 février, les manifestations dégénèrent et tournent à l’émeute avec de violents affrontements à Caracas.
Brandissant la menace de coup d’État et dénonçant des manœuvres « fascistes » visant à déstabiliser le pays, accusant les médias occidentaux de déformer les faits (concernant notamment l’emploi de la force), le gouvernement mobilise de son côté ses partisans. La tension ne fait que s’amplifier ; d'autant que du côté de l’opposition, certains éléments plus radicaux et violents s’immiscent parmi les manifestants, tandis que des groupes chavistes irréguliers participent à la répression confiée aux forces de l’ordre. La contestation se prolonge ainsi pendant plus de trois mois faisant une quarantaine de morts (dans des conditions mal élucidées) et des centaines de blessés, et entraînant plus de 2 000 arrestations.
Outre un assouplissement sur le terrain économique avec l’introduction en mars d’un nouveau système de change destiné à relancer l'économie et à surmonter les pénuries, le gouvernement montre quelques signes d’ouverture et amorce un dialogue avec l’opposition – par ailleurs divisée – au mois d’avril. Mais les discussions tournent court et la crise de confiance perdure. L’incarcération de L. López depuis le 18 février, le maintien en détention d’une centaine d’opposants et l’inculpation de M. C. Machado, ne facilitent pas l’apaisement.
La baisse du cours du baril de pétrole depuis l’été handicape fortement le pays et ne fait qu’approfondir la crise. Des coupes budgétaires sont ainsi décidées en décembre, le gouvernement assurant que les mesures sociales ne seraient pas affectées.
6.3. La victoire de l’opposition aux élections parlementaires

Se renforçant au cours de l’année 2015, l’opposition (MUD) remporte une victoire écrasante aux élections législatives du 6 décembre en obtenant 109 sièges sur 167 (contre 62 sur 162 en 2010) à l’Assemblée nationale. Avec l’apport des trois représentants indigènes, elle atteint ainsi le seuil de la majorité des deux tiers, nécessaire notamment pour convoquer un référendum révocatoire et une assemblée constituante ainsi que pour le vote d’une loi organique ou d’un projet de réforme constitutionnelle. Disposant d’une majorité des 3/5, elle peut également désormais censurer un ministre ou le vice-président. Composée de plus de dix organisations (dont quatre principales) aux sensibilités politiques variées (social-démocrate, libérale, conservatrice…) elle doit cependant surmonter ses divisions afin d’adopter une stratégie politique commune.
Malgré ce désaveu cinglant, N. Maduro affiche pourtant sa détermination à poursuivre dans la voie de la révolution bolivarienne avec le mot d’ordre des « trois R » : Rectification « révolutionnaire et constructive » ; Rébellion « face aux menaces de l’oligarchie » ; Renaissance du « bolivarianisme et du chavisme ». Un « grand congrès de la Patrie » est annoncé tandis que les relations entre le pouvoir et l’opposition se détériorent fortement.

 

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COLOMBIE

 


 

 

 

 

COLOMBIE
GÉOGRAPHIE
1. Les milieux naturels
2. Une population métissée
3. L'essor économique
3.1. Mines et pétrole
3.2. L'agriculture et l'élevage
3.3. Les industries
3.4. Commerce extérieur
HISTOIRE
1. La période coloniale
1.1. La vice-royauté de Nouvelle-Grenade
2. L'indépendance (1810-1815)
2.1. L'insurrection pour l'indépendance : Simón Bolívar
2.2. Libéraux et conservateurs au pouvoir : un siècle d'instabilité
3. Une démocratie en proie à la violence
3.1. Stabilité politique et expansion économique (1903-1930)
3.2. De la crise à la guerre civile
3.3. Le Front national
3.4. Les guérillas
3.5. La lutte contre le trafic de drogue
3.6. L'échec des efforts de paix
3.7. Álvaro Uribe Vélez : entre austérité et fermeté
3.8. Juan Manuel Santos : continuité et rupture
Voir plus
Colombie
en espagnol Colombia
Nom officiel : République de Colombie
Carton de situation - ColombieDrapeau de la Colombie

État d'Amérique du Sud baigné au nord par l'océan Atlantique (mer des Antilles), à l'ouest par l'océan Pacifique, la Colombie est limitée au sud par le Brésil, le Pérou et l'Équateur, au nord-ouest par le Panamá, au nord et à l'est par le Venezuela.
Superficie : 1 140 000 km2
Nombre d'habitants : 48 321 000 (estimation pour 2013)
Nom des habitants : Colombiens
Capitale : Bogotá
Langue : espagnol
Monnaie : peso colombien
Chef de l'État : Juan Manuel Santos Calderón
Chef du gouvernement : Juan Manuel Santos Calderón
Nature de l'État : république à régime présidentiel
Constitution :
Entrée en vigueur : 6 juillet 1991
Révision : 2005
Pour en savoir plus : institutions de la Colombie
GÉOGRAPHIE

Le nord des Andes, entaillé par le Cauca et le Magdalena, qui délimitent de hauts plateaux, sépare le littoral, marécageux et insalubre, de l'Est amazonien, couvert de forêts et de savanes. La population en accroissement rapide, où les métis dominent, se concentre dans la région andine, partie vitale du pays. L'agriculture s'étage ici en fonction de l'altitude : coton, canne à sucre, riz et surtout café, principal produit d'exportation, au-dessous de 2 000 m ; céréales et élevage bovin jusqu'à plus de 3 000 m. Le sous-sol fournit surtout du pétrole et du charbon. Lourdement endetté, le pays peine aussi pour résoudre le problème de la production et du commerce de la drogue. La Colombie réalise une part notable de son commerce extérieur avec les États-Unis, par les ports de Buenaventura, Cartagena et Barranquilla (quatrième ville du pays, après Bogotá, Medellín et Cali).
1. Les milieux naturels

Le territoire s'étend sur 2 500 km du nord au sud, depuis l'Amazonie jusqu'aux îles Caraïbes de San Andrés et Providencia, et sur 1 100 km de l'est à l'ouest, depuis l'Orénoque jusqu'au Pacifique. Il est partagé entre 5 grandes régions naturelles : la région andine (25 % de la superficie totale), la région côtière caraïbe (12 %), la bordure pacifique (6,5 %), les plaines orientales (Llanos) et l'Amazonie (56,5 %).
Dans la Colombie andine, le système montagneux atteint sa plus grande largeur (450 km) avec ses trois grandes chaînes plissées ou cordillères disposées du nord au sud en éventail à partir des confins de l'Équateur. Leur brusque élévation au-dessus des plaines qui les entourent et leur séparation par deux fossés d'effondrement méridiens très profonds, occupés par le río Magdalena, le cours supérieur du Patía et le Cauca, donnent une grande vigueur au relief et sont à l'origine du compartimentage du pays. La Cordillère orientale, la plus massive, s'élargit au centre (230 km au niveau de Tunja), puis se divise en deux branches, l'une s'abaissant vers la péninsule de la Guajira, l'autre se raccordant aux Andes vénézuéliennes. La vallée du Magdalena, qui la sépare de la Cordillère centrale, est un fossé très profond (500 m d'altitude à 150 km des sources) qui s'étire sur plus de 1 000 km. La Cordillère centrale est la plus élevée et la plus étroite (80 km de largeur, aucun col à moins de 3 000 m d'altitude). Une suite de grands volcans portant des neiges éternelles et des glaciers dominent la chaîne. La cordillère s'achève au-dessus des plaines caraïbes par le vaste plateau d'Antioquia, disséqué par l'érosion. Le fossé d'effondrement Patía-Cauca sépare les Cordillères centrale et occidentale. Long de 500 km, bien calibré (largeur moyenne 70 km), remblayé d'alluvions fines, il est partagé en deux segments qui s'inclinent vers le nord et vers le sud de 1 200 m à 800 m d'altitude. La Cordillère occidentale est moins puissante, formée de chaînons discontinus s'élevant, pour la plupart, entre 2 000 et 3 000 m, avec des cols moins élevés.
L'étagement biogéographique caractéristique des montagnes tropicales s'observe sur les versants : on distingue, depuis la base, les terres chaudes (tierras calientes, 800-1 100 m d'altitude), les terres tempérées (tierras templadas, 1 100-2 500 m), les terres froides (tierras frias, 2 500-3 300 m) et les hauts sommets (páramos au-dessus de 3 300 m). À cet étagement thermique se superpose une pluviométrie contrastée qui oppose les Andes sèches aux Andes humides. Celles-ci dessinent une bande orientée du S.-O. au N.-E., depuis le versant pacifique de la Cordillère occidentale jusqu'au nord de la Cordillère orientale, et reçoivent plus de 1 200 mm d'eau par an, répartis entre deux saisons de pluies (inviernos), d'avril à juin puis d'octobre à décembre, entrecoupées de saisons sèches (veranos). Les Andes sèches s'étendent dans la partie méridionale du système montagneux et dans les vallées à l'abri des vents humides qui soufflent du Pacifique ou de secteur est (alizés et trains de dépressions originaires d'Amazonie) ; dans les zones les plus sèches, la pluviométrie s'affaisse à 800 mm d'eau par an, et l'agriculture devient aléatoire sans irrigation. À l'état naturel, divers types de forêts s'étagent sur les flancs des Andes humides, depuis la forêt équatoriale jusqu'à celle des conifères tempérés, qui précèdent les prairies alpines ; il n'en reste plus que les vastes forêts denses du versant pacifique de la Cordillère occidentale, les autres parties des Andes humides étant densément occupées. Dans les Andes sèches, la végétation naturelle consiste en des steppes buissonnantes et en des savanes plus ou moins arborées ; elles ont été fréquemment modifiées par l'homme. Cette variété des milieux biogéographiques permet une grande diversité des cultures.
Les terres basses chaudes situées en dehors du système andin occupent les trois quarts du territoire. Les plaines côtières caraïbes, qui s'allongent sur 900 km, sont formées d'une juxtaposition de plaines alluviales construites par les fleuves andins. Elles sont accidentées par des collines de roches tertiaires ou de petits reliefs de socle cristallin (péninsule de la Guajira). La côte est basse ou à lagunes, sauf au pied du massif de Santa Marta. Celle-ci porte le point culminant de Colombie (5 775 m). Dans cette région caraïbe, la pluviométrie diminue du sud-ouest, qui reçoit d'abondantes précipitations, vers le nord-est, où le climat devient semi-aride (500 mm d'eau par an dans la Guajira), la sierra Nevada perturbant cette répartition par le déclenchement d'abondantes précipitations orographiques. La végétation naturelle passe donc de la forêt dense au sud-ouest, aux savanes plus ou moins amphibies et arborées sur le bas Magdalena et à la steppe à épineux au nord-est, le massif de Santa Marta présentant un étagement biogéographique andin.
La région côtière du Pacifique est accidentée dans le secteur où la serranía del Baudó atteint le rivage. Partout ailleurs, elle est formée de deltas et de plaines alluviales très marécageux, bordés de mangroves. Le climat étant pluvieux, la forêt dense prospère.
Les plaines orientales (environ 650 000 km2) correspondent, au nord, à une partie de la région occidentale des Llanos, ces savanes plus ou moins arborées et à forêts-galeries du bassin de l'Orénoque, au sud, à un morceau de l'Amazonie forestière. Le milieu naturel a été peu modifié, la colonisation agricole et la prospection pétrolière n'ayant entamé que le piémont andin et les hautes terrasses. Plus ouverts, les Llanos sont moins inhospitaliers que l'Amazonie.
2. Une population métissée

À l'arrivée des conquérants espagnols, au xvie s., les hautes terres salubres de la région andine étaient occupées par une importante population amérindienne, estimée à près d'un million d'individus. Ces communautés indiennes ne représentent plus, aujourd'hui, que 2 % de la population. En effet, 60 % des Colombiens sont considérés comme métis, 20 % comme Blancs, alors que la population noire, concentrée sur les côtes caraïbes, en représente 18 %. La ségrégation raciale, si elle n'est pas officielle, est une réalité, les minorités noire et indienne occupant, dans leur grande majorité, le bas de l'échelle sociale. La Constitution de 1991 a pourtant reconnu leur identité ethnique et leur a accordé des droits civiques, leur allouant un nombre réduit de sièges au Congrès.


La Colombie a connu une véritable explosion démographique au cours des cinq dernières décennies. Sa population est passée de 8,7 millions d'habitants en 1938 à plus de 45 millions en 2009, soit une densité moyenne de 40 habitants par km2. Celle-ci ne rend pas compte, toutefois, des profondes disparités régionales. Les déséquilibres du peuplement et l'aspect fortement compartimenté de l'espace colombien doivent autant aux contraintes du milieu naturel qu'aux héritages d'une histoire fortement régionalisée. L'essentiel de la croissance démographique s'est en effet opéré dans les axes de colonisation espagnole (région andine et côtes caraïbes). À cette Colombie « pleine » s'oppose la Colombie « vide » des régions orientales (Llanos, Amazonie) et du littoral pacifique. L'urbanisation progresse rapidement, 72 % de la population vivant désormais dans les villes, notamment dans les quatre plus grandes métropoles du pays : Bogotá, Medellín, Cali et Barranquilla.
La croissance de la population colombienne a aujourd'hui considérablement ralenti, en raison d'une baisse de la natalité. L'indice de fécondité est passé de 5,3 enfants par femme en 1970 à 2,4 et le taux d'accroissement naturel est estimé à 1,4 % par an, contre 3 % entre 1960 et 1965. La population est encore très jeune : 29 % des Colombiens ont moins de 18 ans et 5 % seulement sont âgés de plus de 65 ans. L'espérance de vie atteint 72 ans, mais la proportion élevée de morts violentes (de l'ordre de 80 pour 100 000 habitants), frappant surtout les hommes jeunes, a un impact significatif sur l'espérance de vie de la population masculine.
3. L'essor économique

Le « triangle d'or » andin (Bogotá-Medellín-Cali) constitue le cœur économique d'un pays industrialisé et urbanisé, mais au sein duquel l'agriculture occupe toujours une place de choix. La Colombie est considérée comme l'une des puissances de l'Amérique latine. Mais cette Colombie moderne et dynamique couvre à peine la moitié du territoire national. Sur les côtes de l'Atlantique, le développement se polarise autour de la ville de Barranquilla, qui s'affirme comme un centre secondaire. La côte pacifique, extrêmement pauvre, comporte de vastes espaces vides. Dans la partie orientale, la forêt amazonienne est pratiquement inoccupée, tandis que les Llanos constituent le domaine des grandes propriétés d'élevage extensif. Sur ces territoires en marge, l'État est pratiquement absent. Région de colonisation et de production de drogue, les plaines ont été, pendant des décennies, le théâtre de la violence des guérillas, désormais présentes dans le centre économique du pays.
3.1. Mines et pétrole

Le secteur minier ne représente que 5 % du produit intérieur brut (P.I.B.), mais ce pourcentage ne rend pas compte de l'importance du charbon et, surtout, du pétrole dans l'économie colombienne. La Colombie, qui exporte des hydrocarbures depuis 1980, est devenue le troisième pays producteur d'Amérique latine. La production se concentre dans les vallées du Magdalena, dans les plaines orientales (Llanos) et au nord-est, à la frontière avec le Venezuela. L'exploitation du gigantesque gisement de Cusiana, découvert en 1988, et de celui de Cupiagua, découvert en 1991, ont entraîné un accroissement de la production. La prospection, l'extraction, le transport et le raffinage sont aux mains de l'entreprise d'État « Empresa colombiana de petroleo » (ECOPETROL). Au cours des années 1980, la Colombie est également devenue le premier pays charbonnier d'Amérique latine grâce à la mine « à ciel ouvert » située à El Cerrejón, dans la presqu'île de la Guajira, dont la production a fortement augmenté ces dernières années. Cette production est exportée depuis le port minéralier de la baie de Portete. Ce gisement est complété par celui d'El Descanso. L'ensemble fait du pays le deuxième d'Amérique latine en ce qui concerne les réserves de charbon. La Colombie extrait aussi de l'or, du fer, du nickel (gisement de Cerro Matoso) et des émeraudes (un tiers de la production mondiale). La Colombie développe aussi son potentiel hydroélectrique.
3.2. L'agriculture et l'élevage

Le secteur agricole, principale source de devises et d'emplois (23 % de la population active), procure 12 % du P.I.B. Les productions sont très variées en raison de la diversité des milieux biogéographiques et des structures agraires. L'agriculture colombienne présente une double dualité avec, d'une part, l'existence d'une agriculture parallèle, illégale, fondée sur la production de cannabis et de coca (la Colombie étant probablement, après le Pérou, le deuxième producteur mondial de coca), et, d'autre part, la persistance de structures foncières fortement inégalitaires, caractérisées par la coexistence de petites exploitations agricoles (microfundia) pratiquant une polyculture vivrière, et de grands domaines (latifundia) voués à l'élevage bovin extensif ou aux cultures commerciales.

Plantation de caféiersPlantation de caféiers
Le café constitue la première culture d'exportation, avec une production de 700 000 tonnes en 2006 (3e rang mondial), répartie sur 1 million d'hectares plantés (17 % des surfaces cultivées) situés, pour l'essentiel, au centre du pays, sur les versants humides des cordillères andines (provinces d'Antioquia, du Caldas, du Tolima et du Valle del Cauca). Viennent ensuite la banane et l'horticulture, la Colombie étant le deuxième exportateur mondial de fleurs coupées après les Pays-Bas. La production agricole destinée au marché intérieur est dominée par le riz, le maïs, le manioc, la canne à sucre, le cacao, la pomme de terre et le coton. Les cultures s'étagent en fonction de l'altitude : canne à sucre, coton, cacao, banane dans les fonds plats des vallées, café et cultures vivrières au-dessous de 2 000 m, céréales et élevage jusqu'à plus de 3 000 m.
3.3. Les industries

Les industries (employant 19 % de la population active) se concentrent autour des quatre métropoles millionnaires (Bogotá, Medellín, Cali, Barranquilla) et fournissent environ 35 % du P.I.B. La principale branche d'activité est l'agroalimentaire ; la fabrication du café moulu représente, à elle seule, 25 % de la production industrielle. Deuxième grand secteur, l'industrie chimique (14 % de la production industrielle) est contrôlée par les grandes compagnies internationales ; fabriquant une gamme diversifiée de produits (cosmétiques, fertilisants, insecticides, produits pharmaceutiques…), c'est la branche industrielle qui a le plus bénéficié de la libéralisation de l'économie. Les autres secteurs importants sont l'industrie textile et la confection (3e rang national, 10 % de la production), concentrées principalement autour de Medellín, la métallurgie, la construction mécanique, la construction automobile et la filière bois. Plusieurs secteurs nouveaux sont en phase de croissance : les hautes technologies, le tourisme médical, les centres d'appels, les produits cosmétiques.
3.4. Commerce extérieur

Principal partenaire économique, les États-Unis absorbent, en valeur, 30 % des exportations colombiennes. L'Union européenne occupe la deuxième place. La Colombie se place au quatrième rang pour les investissements directs étrangers en Amérique latine, après le Brésil, le Mexique et le Chili, devant l'Argentine. Les investissements directs étrangers sont passés de 2 milliards de dollars par an en 2002, année de l'élection d'Uribe, à 10 milliards de dollars par an en 2008.
En 2012, un accord de libre-échange, l'Alliance du Pacifique, est ratifié entre la Colombie, le Chili, le Pérou et le Mexique, le Costa Rica et le Panamá ayant un statut d'observateur.
HISTOIRE

1. La période coloniale

À leur arrivée en Colombie, les Espagnols ne trouvent pas de grands foyers culturels encore actifs, hormis celui des Muiscas (ou Chibchas) des hauts plateaux orientaux.
Darién, fondé en 1510 dans l'isthme, est le premier établissement espagnol permanent du continent. On doit à Rodrigo de Bastidas la fondation de Santa Marta, bientôt suivie de celle de Cartagena par Pedro de Heredia. L'Eldorado attire ensuite des colons vers l'intérieur : tandis que Nikolaus Federmann pénètre en 1536 dans les plaines orientales, venant du Venezuela, et que Sebastián de Belalcázar, venant de Quito, conquiert Popayán et arrive par le Cauca jusqu'à Antioquia, Gonzalo Jiménez de Quesada remonte le cours de la Magdalena et fonde, le 6 août 1538, Santa Fe (→ Bogotá).
Jusqu'en 1541, l'occupation se développe ; les villes se multiplient, mais, en raison de la difficulté des communications jusqu'au début du xixe siècle, les centres de peuplement demeurent isolés les uns des autres, favorisant ainsi l'autonomie municipale.
1.1. La vice-royauté de Nouvelle-Grenade

Jusqu'en 1717, la Nouvelle-Grenade est rattachée à la vice-royauté de Lima. Après 1739, elle forme avec le Venezuela la vice-royauté de Nouvelle-Grenade, dont Bogotá, déjà siège d'une audiencia depuis 1549, devient la capitale.
Les Espagnols ne trouvent pas en Nouvelle-Grenade les métaux précieux qu'ils espéraient : ils y exploitent cependant le sel gemme et les émeraudes. Deux ressources assurent la prospérité de la colonie. D'une part, les grands domaines sont mis en valeur grâce au travail forcé des Indiens, bientôt relayés sur la côte nord par les esclaves noirs. D'autre part, la présence de l'isthme assure aux ports de Nouvelle-Grenade une richesse qui attire souvent les corsaires.
À Cartagena, à Nombre de Dios transitent les produits du Pérou, du Mexique et même des Philippines, et les galions espagnols alimentent chaque année la foire de Nombre de Dios. L'Église catholique s'implante très tôt en Nouvelle-Grenade : Santa Marta a eu un évêque dès 1534, Bogotá un archevêque en 1573, et l'évangélisation a été très active. Dotée de domaines importants, l'Église assure d'autre part, pour des siècles, l'enseignement (une université fonctionne dès le xvie siècle à Bogotá). Les langues indigènes reculent alors rapidement devant l'espagnol. La vie intellectuelle est florissante, et la société créole produit, au xviiie siècle, de grands savants, tels les naturalistes José Celestino Mutis (1732-1808) et Francisco José de Caldas (1768-1816).
2. L'indépendance (1810-1815)

2.1. L'insurrection pour l'indépendance : Simón Bolívar

Simón BolívarSimón Bolívar
Dès la fin du xviiie siècle, une conscience créole se fait jour, qui aboutit, en 1781, à la révolte des « comuneros de Socorro », qui demandent une diminution de la pression fiscale et que les charges publiques soient données en priorité aux créoles. À partir de 1778, la vice-royauté de Bogotá commerce librement avec celle de Lima.
L'occupation napoléonienne en Espagne stimule le désir d'indépendance. Une junte est constituée à Bogotá le 20 juillet 1810 : elle aboutit, un an plus tard, à la proclamation d'une fédération des provinces de la Nouvelle-Grenade, qui rompent avec la métropole. La répression espagnole, conduite par le général Morillo, est particulièrement sanglante : Cartagena est reprise en 1815, et toute résistance disparaît en 1817.
Cette violence même, l'action de Bolívar et de ses lieutenants José Antonio Páez et Francisco de Paula Santander relancent l'insurrection, qui triomphe grâce aux victoires de Boyacá (1819), Carabobo (1821) et Pichincha (1822).
Le 10 août 1819, Bolívar proclame l'union du Venezuela et de la Nouvelle-Grenade. Le congrès d'Angostura (17 décembre 1819) aboutit ainsi à la constitution d'une république de Grande-Colombie, à laquelle s'intègrent Panama en 1821 et l'Équateur en 1822. Cette union ne survit pas à Bolívar : en 1830, le Venezuela, puis l'Équateur font sécession.
2.2. Libéraux et conservateurs au pouvoir : un siècle d'instabilité

Dès cette époque apparaissent les deux grands partis qui vont désormais dominer la politique du pays : celui des conservateurs centralistes, qui s'appuient sur l'Église catholique, le catholicisme étant religion d'État, et celui des libéraux fédéralistes, qui veulent réduire l'influence aussi bien économique que spirituelle de celle-ci.
Les conservateurs dotent d'abord la République de Nouvelle-Grenade d'une Constitution unitaire. Mais, à partir de 1845, les libéraux – avec les présidents Mosquera, López (1849) et surtout Obando (1853) – tentent de faire triompher leurs conceptions fédéralistes : ils provoquent la guerre civile et, en 1854, s'installe la dictature de Melo. Mais des conservateurs modérés reviennent au pouvoir, et l'un d'eux, le président Ospina Rodriguez (1857), fait adopter, en mai 1858, une Constitution semi-fédérale pour la « Confédération grenadine ».
En 1861, le libéral Tomás Cipriano Mosquera revient au pouvoir en renversant le gouvernement et s'en prend à l'Église (expulsion des jésuites, saisie des biens). Une nouvelle Constitution, nettement fédéraliste, réalise les « États-Unis de Colombie » (1863). Réélu en 1866, Mosquera est renversé en 1867 par des libéraux radicaux.
Après une nouvelle guerre civile en 1876, les conservateurs reviennent au pouvoir en 1880 avec le libéral dissident Rafael Núñez, qui s'appuie sur le clergé et les grands propriétaires : l'État prend alors le nom de République de Colombie, avec une Constitution centraliste (1886). Les libéraux, fédéralistes, se soulèveront à plusieurs reprises (insurrections de 1885 et de 1895, et surtout « guerre des Mille Jours » [1889-1903]).
Cette instabilité, durant tout le xixe siècle, est due en grande partie à l'insuffisance des voies de communication, qui favorise le maintien des particularismes locaux et freine l'évolution de l'économie.
3. Une démocratie en proie à la violence

3.1. Stabilité politique et expansion économique (1903-1930)

En 1903, avec l'accession de Panama à l'indépendance, favorisée par Washington, le pays doit abandonner tout espoir de contrôle du commerce interocéanique. Mais l'indemnisation versée par les États-Unis sera un facteur d'expansion. À partir du gouvernement du général Rafael Rayes (1904-1909), le pays rentre dans une ère de stabilité politique qui fait passer au premier plan les problèmes économiques. Sous les présidences des conservateurs Nel Ospina (1922) et Abadía Méndez (1926), des emprunts américains permettent la construction de routes, tandis que, dès 1919, apparaît l'aviation commerciale.
En contrepartie, cependant, l'influence économique des États-Unis ne cesse de grandir. Les Américains contrôlent le marché du café, l'exploitation (depuis 1925) du pétrole et les plantations de bananiers.
3.2. De la crise à la guerre civile

Dans les années 1929-1930, la Colombie est confrontée à une double crise : la dépression mondiale d'un côté, la superproduction de café brésilien de l'autre, avec la baisse des cours qu'elle entraîne. Les conflits agraires revêtent sans cesse plus d'ampleur et menacent la production dans certaines régions. Syndicats et ligues paysannes se multiplient.
Élu en 1934, le libéral Alfonso López Pumarejo procède à des réformes sociales (loi sur la journée de travail de 8 heures, projet de réforme agraire). Il inquiète l'aile droite libérale, qui fait élire Eduardo Santos en 1938. Revenu au pouvoir en 1942, A. López est contraint de démissionner trois ans plus tard. Alberto Lleras Camargo, qui le remplace à la tête de l'État, entreprend alors une politique d'union nationale groupant libéraux et conservateurs ; il provoque l'opposition de l'aile gauche libérale, qui se radicalise sous l'influence de l'avocat marxiste Jorge Eliecer Gaitán.
En 1946, c'est un conservateur, Mariano Ospina Pérez, qui revient au pouvoir. L'assassinat, le 9 avril 1948, de Gaitán, dont la popularité n'a cessé de grandir auprès des masses, déclenche des émeutes sanglantes dans la capitale (le bogotazo) et dans les grandes villes. Ces révoltes, suivies d'une violente répression, ouvrent une période de guerre civile larvée d'une cruauté extrême (la violencia) et dont le nombre de victimes est estimé entre 200 000 et 300 000 morts.
3.3. Le Front national

L'expérience de la violencia et le développement d'une guérilla autonome amènent au pouvoir un militaire, le général Rojas Pinilla. Hormis cette courte dictature militaire (1953-1957), la Colombie est l'un des rares pays de l'Amérique latine à avoir conservé, tout au long de ce siècle, un régime politique de démocratie civile. Elle est toutefois l'un des seuls pays de cette zone où la violence et les conflits armés soient aussi constants. La démocratie civile a pu être assurée par un pacte entre libéraux et conservateurs (le Front national), qui a permis une accalmie sur le plan politique.
En 1957, une réforme constitutionnelle instaure pour une durée de seize ans une alternance des deux partis à la présidence, une répartition équitable des postes gouvernementaux et une représentation égale au Congrès. Le retour à des élections présidentielles libres en 1974 n'a pas empêché que la formule du partage soit strictement appliquée pour toutes les charges politiques et administratives. Depuis lors, le parti libéral tend à être le parti du gouvernement.
En 1982, à la suite de dissensions internes au sein du parti libéral, c'est un conservateur, Belisario Betancur, qui est élu de peu à la présidence, mais ses trois successeurs, Virgilio Barco Vargas, César Gaviria Trujillo et Ernesto Samper, sont des libéraux.
3.4. Les guérillas

Si la démocratie civile a pu être assurée par le Front national, la violence, quant à elle, n'a pas cessé depuis la guerre civile de 1948-1953. En effet, au moins la moitié des combattants n'a pas déposé les armes.
 Dans les années 1960, des groupes d'autodéfense paysanne contrôlés par le parti communiste, fondé en 1930, donnent naissance aux Forces armées révolutionnaires de Colombie (FARC), d'influence castriste.
À la même époque apparaît l'Armée de libération nationale (ELN). Durant les années 1970 naît une guérilla urbaine, le Mouvement du 19 avril (M-19) ; celui-ci, qui réussit des actions spectaculaires (vol de plusieurs milliers d'armes dans une caserne en 1979, prise d'otages à l'ambassade de la République dominicaine en 1980, prise d'otages sanglante dans le palais de justice de Bogotá en 1985), est l'un des groupes de guérilla les plus populaires d'Amérique latine.
Entre 1987 et 1997, l'ELN et les FARC multiplient les enlèvements. Elles font de cette pratique leur deuxième source de financement et un moyen de pression sur les autorités locales. Soupçonnées d'être impliquées dans le trafic de drogue au milieu des années 1980, ces guérillas abandonnent les zones rurales et se concentrent dans les régions économiquement riches (celles de production de biens d'exportation et d'exploitation minière).
Parallèlement, à partir des années 1980, des groupes paramilitaires se constituent et prolifèrent ; ils comptent sur le soutien de l'armée et des grands propriétaires, mais disposent d'un haut degré d'autonomie. Les paramilitaires sont également suspectés d'être le bras armé des narcotrafiquants. La Colombie devient à nouveau le théâtre d'une violence exceptionnelle. Massacres, exactions, enlèvements, rackets – de la part des paramilitaires comme des guérilleros – affectent une population civile soumise à la loi du silence. Plus de 500 000 personnes ont dû abandonner leur région d'origine. Dans ce contexte, des arrangements politiques ne semblent pas constituer une véritable solution au problème.
3.5. La lutte contre le trafic de drogue

Des négociations sérieuses ont pourtant été entamées sous la présidence de B. Betancur (1982-1986), puis sous celle de Virgilio Barco Vargas (1986-1990), mais les cessez-le-feu n'ont été que rarement respectés. Sous la présidence de C. Gaviria Trujillo (1990-1994), des perspectives de paix avec la guérilla se font jour : le M-19, ayant accepté de déposer les armes et de participer au jeu démocratique, siège à l'Assemblée constituante de 1991 puis au Congrès. Certaines guérillas sont également démobilisées, et deux grands narcotrafiquants, Fabio Vásquez et Pablo Escobar, se rendent à la justice.
En 1992, l'Action démocratique, émanation politique du M-19, quitte la coalition gouvernementale tandis que des guérillas, même affaiblies, poursuivent leurs actions terroristes. La priorité est pourtant donnée à la lutte contre le trafic de drogue. En 1993, à la suite d'une évasion, Pablo Escobar est tué par les forces de sécurité. Après l'accession à la présidence d'Ernesto Samper, en 1994, l'arrestation de plusieurs lieutenants d'Escobar semble représenter une victoire du pouvoir central sur le narcotrafic. Peu après cependant, les membres du parti libéral sont accusés d'avoir reçu, lors de la campagne électorale, le soutien financier des trafiquants de drogue de Cali.
Afin de restaurer sa crédibilité, E. Samper nomme le général Rosso Cadena à la tête d'une opération antidrogue, qui élimine huit des principales têtes du cartel de Cali. Mais le succès de ces opérations est éclipsé par les résultats des enquêtes réalisées sur l'infiltration de l'argent de la drogue dans la vie politique colombienne, donnant lieu à plusieurs scandales politiques et compromettant gravement E. Samper. Si celui-ci a pu mener à terme son mandat présidentiel, les sanctions économiques imposées par les États-Unis l'ont obligé à renforcer son action contre le narcotrafic. En 1996, le gouvernement fait voter par le Congrès une loi sur la confiscation des biens des barons de la drogue. En 1997, un projet sur la réintroduction d'un traité prévoyant l'extradition vers les États-Unis des grands chefs du narcotrafic est également approuvé.
La politique de E. Samper est toutefois largement désavouée par l'élection d'Andrés Pastrana Arango à la présidence de la République, en juin 1998, élection qui marque le retour au pouvoir du parti conservateur.
3.6. L'échec des efforts de paix

Fidèle à ses promesses de campagne, le nouveau dirigeant colombien engage des pourparlers de paix difficiles en particulier avec les FARC. Dès novembre 1998, ce mouvement de guérilla obtient du gouvernement le contrôle administratif d'une zone démilitarisée de 42 000 km2 dans le sud-ouest du pays. L'attribution d'une deuxième zone démilitarisée (5 000 km2 environ) dans le nord à l'ELN – aux pouvoirs cependant moins étendus que ceux des FARC –, en échange de l'ouverture des négociations, est annoncée en avril 2000, mais finalement repoussée sine die devant le tollé suscité au sein des populations concernées.
Ces concessions accordées aux guérillas provoquent la colère des mouvements paramilitaires, qui se sentent marginalisés. Pourtant le plan de paix cher au président Pastrana – destiné à lutter contre le trafic de drogue et à mettre fin à la violence armée – progresse ; en juillet 2000, les États-Unis décident d'octroyer une aide exceptionnelle de 1,3 milliard de dollars pour son financement.
Après une interruption entre novembre 2000 et février 2001 – les FARC exigeant du gouvernement qu'une véritable lutte soit menée contre les paramilitaires –, les négociations de paix reprennent, même si le rang de leurs détracteurs est en constante augmentation. En effet, le processus a perdu au fil des mois de sa crédibilité ; les critiques portent surtout sur la zone octroyée à la guérilla, qui serait utilisée à des fins criminelles (développement de la culture de la coca ; séquestration de civils pris en otage contre rançon).
Fin 2001, le contexte international, avec le lancement par les Américains de la campagne antiterroriste au lendemain des attentats de septembre 2001 aux États-Unis, n'est guère favorable à une reprise sérieuse du dialogue avec des organisations, qualifiées de terroristes par Washington (ainsi sont classées les FARC, l'ELN, mais aussi le principal groupe de paramilitaires d'extrême droite, les AUC). En octobre, la zone octroyée aux FARC est cependant reconduite pour trois mois. Le processus moribond connaît encore quelques ultimes coups de théâtre avant d'être enterré par son initiateur le 20 février 2002.
Au cours d'une campagne électorale rythmée par son lot d'assassinats et d'enlèvements (celui, notamment, de la candidate des Verts à la présidentielle de mai 2002, la Franco-Colombienne Íngrid Betancourt, par les FARC le 23 février), un candidat indépendant, dissident du parti libéral, Álvaro Uribe Vélez, partisan d'une politique de fermeté, se détache face aux candidats des partis libéral et conservateur, victimes d'une défiance grandissante de leur électorat. Le 26 mai, Álvaro Uribe Vélez est élu, dès le premier tour, président de la République (53 %), devant son principal adversaire, Horacio Serpa, du parti libéral (31 %). Outre le rétablissement de l'autorité de l'État par la mise au pas des guérillas, le nouveau président promet une lutte sans merci contre la corruption et une ample réforme politique.
3.7. Álvaro Uribe Vélez : entre austérité et fermeté

Conformément à ses promesses de campagne, Álvaro Uribe Vélez fait montre d'autorité en déclarant d'emblée l'état d'exception, en mettant en place un réseau d'informateurs civils tout en cherchant à relancer les pourparlers de paix sous les auspices des Nations unies. En juin 2003, il engage le dialogue avec l'ELN en vue d'un éventuel processus de paix ; ce dernier, après avoir échoué malgré une tentative de médiation mexicaine, est relancé en 2005 à La Havane pour être interrompu en 2006 par la reprise des rivalités entre ELN et FARC. Les deux guérillas, affaiblies par l'offensive menée par l'armée colombienne depuis 2004 et opposées sur le principe même d'un dialogue avec le gouvernement, se livrent une guerre ouverte en Arauca, proche du Venezuela et riche en pétrole.
Le président engage également en juillet 2003 de difficiles négociations avec le mouvement paramilitaire d'extrême droite AUC en vue de sa totale démobilisation prévue pour 2005. À cet effet, la loi « Justice et Paix » adoptée par le Congrès en juillet 2005 – et applicable tant aux groupes paramillitaires qu'aux guérillas – définit les mesures de réinsertion prévues pour les repentis et le cadre légal dans lequel victimes et survivants peuvent espérer obtenir justice, vérité et réparation. Le désarmement de 31 000 combattants des AUC s'achève officiellement en avril 2005. Cependant, le processus de réconciliation suscite le scepticisme de l'Église catholique et d'une partie de l'élite politique économique du pays, qui estiment que la politique du gouvernement ne diminue pas le pouvoir des paramilitaires mais en change la nature. Les organisations internationales dénoncent l'ambiguïté de cette politique. Enfin, les révélations par les chefs paramilitaires concernant les complicités dont ils ont bénéficié au sein de la classe politique (scandale de la « para-politique »), de l'armée et de l'État, éclaboussent l'entourage du président.
Partisan de la plus grande fermeté vis-à-vis des FARC, le président Uribe lance début 2004 avec l'appui des États-Unis le plan « Patriote », la plus grande opération militaire contre la guérilla. Surmontant sa réticence à négocier avec une organisation terroriste, et à l'écoute d'une majorité de Colombiens désormais favorables à un accord humanitaire pour obtenir la libération des otages, le président consent à libérer, en décembre 2004, 23 guérilleros dans l'espoir que les FARC acceptent, en retour, de libérer leurs otages (59 « prisonniers politiques »). Mais, en février 2005, une vague d'attaques menées par la guérilla porte un sérieux démenti au discours politique du président, qui persiste à nier l'existence d'un conflit armé. En janvier 2006 enfin, les FARC opposent une fin de non-recevoir aux propositions du gouvernement de créer une zone démilitarisée sous contrôle international dans le sud-ouest du pays afin de négocier un échange humanitaire.
Fort du relatif succès de sa politique dite de « sécurité démocratique », à l'origine de la baisse des attentats et des enlèvements, et, par ailleurs, d'une reprise économique sensible, le président Uribe – autorisé à briguer un second mandat à la tête de l'État depuis la validation d'un amendement constitutionnel en octobre 2005 – est réélu au premier tour de l'élection présidentielle du 28 mai 2006 avec 62,2 % des suffrages. Il devance largement Carlos Gaviria Díaz, le candidat de la gauche réunie autour du Pôle démocratique alternatif (PDA), qui, en recueillant 22 % des suffrages, devient la première force d'opposition. La défaite cinglante du libéral Horacio Serpa (11,84 %), candidat pour la troisième fois consécutive, relègue le parti libéral, longtemps majoritaire et au pouvoir, au rang de force de soutien à l'opposition.
La victoire du président Uribe confirme – au sein d'une Amérique latine basculant à gauche – l'ancrage de la Colombie à droite et son alignement sur les États-Unis, dont elle est le principal allié dans la région et le troisième bénéficiaire de l'aide extérieure. En 2006, un accord de libre-échange est signé avec Washington, malgré l'opposition populaire colombienne. Participant au processus d'intégration régionale, Bogotá, déjà membre de la Communauté andine des nations (CAN) et de l'ALADI, devient, en 2004, membre associé du Mercosur.
En 2006 et 2007, les négociations informelles entre le pouvoir et les FARC piétinent, la guérilla exigeant la création d'une zone démilitarisée dans le sud-ouest du pays avant tout échange de prisonniers. Malgré la détérioration des relations entre le président Uribe et son homologue vénézuélien, Hugo Chávez, la médiation de ce dernier permet dans un premier temps la libération de plusieurs otages (janvier 2008) mais, alors que les FARC perdent successivement leur numéro 2, Raúl Reyes, dans une attaque de l'armée (mars) puis leur chef historique, Manuel Marulanda, des suites d'une maladie, la politique de fermeté du gouvernement est finalement couronnée de succès avec la libération en juillet, à l'issue d'une opération militaire menée sans effusion de sang, de quinze prisonniers, dont Í. Betancourt.
Par ailleurs, la coopération avec les États-Unis est renforcée avec la mise à disposition de sept bases militaires dans le cadre d'opérations contre le trafic de stupéfiants et la guérilla, projet d'accord qui provoque de vives tensions au sein de l'Union des nations sud américaines (UNASUR, fondée en mai 2008) avec le Venezuela (et ses alliés équatorien et bolivien), un différend que les participants au sommet latino-américain de Cancún en février 2010, tentent d’aplanir.
Bien que mis en cause dans un scandale d'écoutes illégales menées par les services de renseignement et accusé par l'opposition d'avoir marchandé le soutien de certains parlementaires en vue d'obtenir une majorité, Uribe reçoit en août et septembre 2009 l'aval du Sénat puis de la Chambre des représentants pour organiser un référendum en vue de briguer un troisième mandat en mai 2010 – une loi qui est toutefois censurée par la Cour constitutionnelle en février 2010. Le président s’incline alors devant cette décision. Mais, démentant les pronostics, son camp – le parti social de l’Unité nationale (ou « parti de la U ») et son allié, le parti conservateur– renforce sensiblement ses positions aux élections législatives de mars qui sont entachées de plusieurs irrégularités (achats de votes notamment). Plusieurs candidats, impliqués dans le scandale de la « para-politique » et sous le coup d’enquêtes préliminaires diligentées par la Cour suprême, sont réélus, certains d’entre eux sous la bannière d’un nouveau parti politique, le parti d’Intégration nationale (PIN). Le 20 juin, Juan Manuel Santos, ancien ministre de la Défense d'Uribe l’emporte au second tour de l’élection présidentielle avec plus de 69 % des voix face au candidat écologiste Antanas Mockus.
3.8. Juan Manuel Santos : continuité et rupture

S’il ne fait pas partie des dauphins d’Álvaro Uribe, le nouveau président porte l’héritage de la politique de son prédécesseur, notamment par sa participation en première ligne à la politique de sécurité mise en œuvre dans les années 2006-2009. Prônant ainsi la même fermeté, Juan Manuel Santos exige la libération de l’ensemble des otages avant toute négociation avec les FARC, qui, elles, ont proposé une reprise des discussions. La guérilla essuie d’importants revers : en septembre 2010, elle perd le chef de son aile militaire, Víctor Julio Suárez Rojas, alias le « Mono Jojoy », tué dans un bombardement. En novembre 2011, son chef politique et commandant suprême, Alfonso Cano, est également éliminé par l’armée à l’issue d’une vaste opération militaire, dans des circonstances controversées. Le mouvement est indéniablement affaibli : même si le nombre de ses attaques augmente (autour de 2 000 en 2010 et en 2011), ses actions sont plus dispersées et le fait de petits groupes réduits à quelques hommes.
Après le rétablissement de relations diplomatiques avec le Venezuela rompues en juillet 2010, l’adoption de la loi sur l’indemnisation des victimes et la restitution des terres aux personnes déplacées (juin 2011) marque une rupture importante avec la politique précédente ; elle implique en effet la reconnaissance de l’existence d’un conflit armé, ce que A. Uribe avait toujours refusé réduisant ce dernier à une « menace terroriste ».
Alors que les derniers otages « politiques » – dix membres des forces de l’ordre – sont libérés en avril 2012, le gouvernement relance des discussions avec la guérilla sur de nouvelles bases. Rendues publiques en août, ces négociations de paix globales s'ouvrent à Oslo en octobre et reprennent à La Havane à partir du mois suivant. Elles portent sur cinq principaux points : développement rural et accession à la terre ; fin des combats ; participation à la vie politique et réintégration des guérilleros ; lutte contre le narcotrafic ; droits des victimes. Les hostilités ne cessent pas pour autant, hormis une courte trêve unilatérale de la guérilla entre novembre 2012 et janvier 2013.
Si les délais annoncés pour la finalisation d’un accord avant la fin de 2013 ne sont pas tenus, les négociations de paix, confidentielles, se poursuivent au cours d’une série de cycles. En mai 2013, les parties parviennent à un accord sur la question de la réforme agraire avant d’aborder au cours de l’été celle de la participation politique. Après une nouvelle trêve unilatérale annoncée par les FARC en décembre, le problème du trafic et de la culture des produits stupéfiants (feuille de coca, pavot et marijuana) commence à être discuté.
La poursuite de ces pourparlers est l’un des principaux thèmes de la campagne électorale en vue des élections nationales de mars et juin 2014. Les enquêtes d’opinion tendent à montrer que dans leur majorité, les Colombiens y sont favorables tout en restant sceptiques quant à leur issue. Davantage inquiétés par l’insécurité urbaine, le chômage et la corruption, ils ne placent cependant plus le conflit armé au premier plan de leurs préoccupations.
Depuis janvier 2013, les partisans d’Álvaro Uribe, les plus critiques à l’égard du processus de paix et particulièrement hostiles à l’idée d’amnistie, sont représentés au sein du Centre démocratique. Rassemblant des dissidents issus pour la plupart du « parti de la U », ce courant « uribiste » enregistre de bons résultats aux élections législatives, parvenant à se hisser à la deuxième place au Sénat (où est élu l’ex-président) et à la quatrième à la Chambre des représentants.
Fort de ce premier succès, leur candidat Oscar Ivan Zuluaga arrive en tête du premier tour du scrutin présidentiel (29,2 %) devant le président sortant (25,6 %), la candidate du parti conservateur (15,5 %), celle de l’opposition de gauche menée par le « Pôle démocratique » (15,2 %) et le candidat écologiste (8,2 %).
À l’issue d’un âpre duel marqué par des accusations mutuelles de corruption, J. M. Santos l’emporte de justesse le 15 juin avec près de 51 % des suffrages contre 45 % à O. I. Zuluaga, le vote blanc atteignant 4 %. Appuyé par le « parti de la U » et les libéraux, le président bénéficie également du report précieux des voix de gauche, alors que son adversaire a reçu le soutien du parti conservateur. Présentée comme un plébiscite en faveur de la paix, cette réélection ne mobilise toutefois qu’environ 48 % des électeurs malgré une campagne en faveur de la participation.


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