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Pesticides : Effets sur la santé, une expertise collective de l’Inserm

 

 

 

 

 

 

 

Pesticides : Effets sur la santé, une expertise collective de l’Inserm

13 JUIN 2013 | PAR INSERM (SALLE DE PRESSE) | SANTÉ PUBLIQUE

Depuis les années 1980, les enquêtes épidémiologiques ont évoqué l’implication des pesticides dans plusieurs pathologies chez des personnes exposées professionnellement à ces substances, en particulier des pathologies cancéreuses, des maladies neurologiques et des troubles de la reproduction. Ces enquêtes ont également attiré l’attention sur les effets éventuels d’une exposition même à faible intensité lors de périodes sensibles du développement (in utero et pendant l’enfance).

Dans ce contexte, la DGS a sollicité l’Inserm pour effectuer un bilan de la littérature scientifique permettant de fournir des arguments sur les risques sanitaires associés à l’exposition professionnelle aux pesticides, en particulier en secteur agricole et sur les effets d’une exposition précoce chez le fœtus et les jeunes enfants.

Pour répondre à cette demande, l’Inserm s’est appuyé sur un groupe pluridisciplinaire d’experts constitué d’épidémiologistes spécialistes en santé-environnement ou en santé au travail et de biologistes spécialistes de la toxicologie cellulaire et moléculaire.

D’après les données de la littérature scientifique internationale publiées au cours des 30 dernières années et analysées par ces experts,

il semble exister une association positive entre exposition professionnelle à des pesticides et certaines pathologies chez l’adulte: la maladie de Parkinson, le cancer de la prostate et certains cancers hématopoïétiques (lymphome non Hodgkinien, myélomes multiples).

Par ailleurs, les expositions aux pesticides intervenant au cours de la période prénatale et périnatale ainsi que la petite enfance semblent être particulièrement à risque pour le développement de l’enfant.

© Fotolia

Pesticides : définitions, usages et voies d’exposition

Du latin, Pestis (fléau) et Caedere (tuer), le terme pesticide regroupe de nombreuses substances très variées agissant sur des organismes vivants (insectes, vertébrés, vers, plantes, champignons, bactéries) pour les détruire, les contrôler ou les repousser.

Il existe une très grande hétérogénéité de pesticides (environ 1 000 substances actives ont déjà été mises sur le marché, entre hier et aujourd’hui, actuellement 309 substances phytopharmaceutiques sont autorisées en France). Ils divergent selon leurs cibles, leurs modes d’actions, leurs classe chimiques ou encore leur persistance dans l’environnement.

–  Cibles : on distingue les herbicides, les fongicides, les insecticides…

– Il existe près de 100 familles chimiques de pesticides : organophosphorés, organochlorés, carbamates, pyréthrinoïdes, triazines…

– Il existe près de 10 000 formulations commerciales composées de la matière active et d’adjuvants et qui se présentent sous différentes formes (liquides, solides : granulés, poudres,…..).

– La rémanence des pesticides dans l’environnement peut varier de quelques heures ou jours à plusieurs années. Ils sont transformés ou dégradés en nombreux métabolites. Certains, comme les organochlorés persistent pendant des années dans l’environnement et se retrouvent dans la chaine alimentaire.

Dans l’expertise, le terme pesticide représente l’ensemble des substances actives, indépendamment des définitions réglementaires.

Des pesticides pour quels usages ?

En France, peu de données quantitatives par type d’usages sont accessibles. La majeure partie des tonnages (90%) est utilisée pour les besoins de l’agriculture, mais d’autres secteurs professionnels sont concernés : entretiens des voiries, jardins et parcs ; secteur industriel (fabrication, traitement du bois,…) ; usage en santé humaine et vétérinaire, lutte anti-vectorielle (moustique), dératisations…Il faut ajouter à cette liste les usages domestiques (plantes, animaux, désinsectisation, jardinage, bois).

En France, les fongicides représentent près de la moitié des tonnages. 80% des tonnages de pesticides sont utilisés pour un traitement des céréales à paille, maïs, colza, vigne. Les plus vendus ont comme principe actif le soufre ou le glyphosate.

Les sources d’exposition :

Les pesticides sont présents partout dans l’environnement. On peut les trouver dans l’air (air extérieur et intérieur, poussières), l’eau (souterraines, de surface, littoral, …), le sol, et les denrées alimentaires (y compris certaines eaux de consommation).

En milieu professionnel, la voie cutanée représente la principale voie d’exposition (environ 80%). L’exposition par voie respiratoire existe lors de circonstances particulières d’application (fumigation, utilisation en milieu fermé). L’exposition peut se produire à différents moments : manutention, préparation, application, nettoyage, ré-entrées (tâches effectuées dans des zones traitées), mais les plus exposantes sont la préparation des bouillies ou mélanges et les tâches de ré-entrées. En population générale, la voie orale est souvent considérée comme la principale voie d’exposition à travers l’alimentation.

Pesticides et cancers

L’expertise collective a ciblé 8 localisations de cancer : 4 cancers hématopoïétiques, ainsi que les cancers de la prostate, du testicule, les tumeurs cérébrales et les mélanomes. La plupart de ces localisations avaient été identifiées dans des méta-analyses antérieures comme potentiellement associées à une exposition aux pesticides, généralement sans distinction sur les matières actives incriminées.

Cancer de la prostate
D’après les données de la littérature, une augmentation du risque existe chez les agriculteurs, les ouvriers d’usines de production de pesticides et les populations rurales (entre 12 et 28% selon les populations). Quelques matières actives ont été spécifiquement documentées, en population générale : chlordécone ; en population professionnelle : carbofuran, coumaphos, fonofos, perméthrine. Toutes sont actuellement interdites d’usage. Pour certaines d’entre elles, un excès de risque est observé uniquement chez les agriculteurs ayant des antécédents familiaux de cancer de la prostate.

Cancers hématopoïétiques
D’après les données de la littérature, une augmentation de risque de lymphomes non hodgkinien et de myélomes multiples existe chez les professionnels exposés aux pesticides du secteur agricole et non agricole. Les pesticides organophosphorés et certains organochlorés (lindane, DDT) sont suspectés. Bien que les résultats soient moins convergents, un excès de risque de leucémies ne peut être écarté.

Concernant les autres localisations cancéreuses étudiées, l’analyse de l’ensemble des études reste difficile. Plusieurs raisons peuvent être évoquées : une incidence faible (cancer du testicule, tumeurs du cerveau et maladie de Hodgkin) ou l’existence d’un facteur de confusion important (comme par exemple, l’exposition aux ultras violets de la population agricole, facteur de risque reconnu pour le mélanome).

Pesticides et maladies neurodégénératives

L’expertise collective s’est intéressée a 3 maladies neurodégénératives, la maladie de Parkinson, la maladie d’Alzheimer et la sclérose latérale amyotrophique, ainsi qu’aux troubles cognitifs, qui pourraient prédire ou accompagner certaines pathologies neuro-dégénératives.

 Maladie de Parkinson
Une augmentation du risque de développer une maladie de Parkinson a été observée chez les personnes exposées professionnellement aux pesticides. Un lien a pu être mis en évidence notamment lors d’une exposition aux insecticides et herbicides. L’association avec les fongicides n’a, à ce jour, pas été mise en évidence mais le nombre d’études est nettement moins important.

Pour les autres maladies neurodégénératives, les résultats sont plus contrastés. Par exemple, dans le cas de la maladie d’Alzheimer, les résultats des études de cohortes sont convergents pour révéler un excès de risque quand les études cas-témoins sont peu robustes. Quant à la sclérose latérale amyotrophique, trop peu d’études sont disponibles pour conclure.

Par ailleurs, plusieurs revues et une méta-analyse récente concluent à un effet délétère des expositions professionnelles aux pesticides notamment aux organophosphorés sur le fonctionnement cognitif. Cet effet serait plus clair en cas d’antécédents d’intoxication aigue.

 

Effets sur la grossesse et le développement de l’enfant

Il existe maintenant de nombreuses études épidémiologiques suggérant un lien entre l’exposition prénatale aux pesticides et le développement de l’enfant, à court et moyen terme.

Conséquences des expositions professionnelles en période prénatale
La littérature suggère une augmentation significative du risque de morts fœtales (fausses-couches) ainsi qu’une augmentation du risque de malformations congénitales lors d’une exposition professionnelle maternelle aux pesticides. D’autres études pointent une atteinte de la motricité fine et de l’acuité visuelle ou encore de la mémoire récente lors du développement de l’enfant. Enfin, une augmentation significative du risque de leucémie et de tumeurs cérébrales a été mise en évidence dans les méta- analyses récentes.

 Conséquences des expositions résidentielles en période prénatale (voisinage ou usage domestique)
Plusieurs études cas-témoins et de cohortes montrent une augmentation du risque de malformations congénitales chez les enfants des femmes vivant au voisinage d’une zone agricole ou liée aux usages domestiques de pesticides (malformations cardiaques, du tube neural, hypospadias).

Une diminution du poids de naissance, des atteintes neurodéveloppementales et une augmentation significative du risque de leucémie sont également rapportées.

Pesticides et fertilité

Le lien entre certains pesticides (notamment le dibromochloropropane), qui ne sont plus utilisés, et des atteintes de la fertilité masculine a été clairement établi mais de nombreuses incertitudes subsistent en ce qui concerne les pesticides actuellement employés.

Le lien entre pesticides et infertilité chez la femme est mal connu et mériterait d’être mieux étudié.

Mécanismes biologiques

La littérature ne permet pas actuellement d’identifier avec précision les mécanismes cellulaires et moléculaires mis en jeu dans les pathologies potentiellement associées à une exposition à certains pesticides. Toutefois, certains modes d’action des substances soutiennent les données épidémiologiques. Le stress oxydant semble par exemple jouer un rôle majeur, comme  dans la maladie de Parkinson. Des dommages à l’ADN ou des perturbations de certaines voies de signalisation pouvant conduire à une dérégulation de la prolifération ou de la mort cellulaire, ou des altérations du système immunitaire sont autant de mécanismes susceptibles de sous tendre les effets des pesticides sur la santé.

 La question des mélanges de pesticides

Les populations sont exposées de façon permanente et à faible dose aux pesticides et à de nombreuses autres substances contaminant l’environnement. Ces mélanges de pesticides et autres substances pourraient donner lieu à des impacts sanitaires difficilement prévisibles actuellement, ce qui fait de la question des mélanges et des faibles doses un des enjeux importants de la recherche et de l’évaluation des dangers.

Les experts rappellent que «ne pas être en mesure de conclure ne veut pas dire obligatoirement qu’il n’y a pas de risque».

Si certaines substances sont mises en cause, c’est qu’elles ont été plus souvent  étudiées que d’autres (en particulier dans le contexte des États-Unis) ; de nombreuses substances actives n’ont pas fait l’objet d’études épidémiologiques.

Recommandations

Les recommandations soulignent la nécessité d’une meilleure connaissance des données d’exposition anciennes et actuelles de la population professionnelle exposée aux pesticides directement ou indirectement.

Les recommandations attirent également l’attention sur des périodes critiques d’exposition (périodes de développement) aussi bien en milieu professionnel qu’en population générale.

Des recherches pluri- et trans-disciplinaire doivent être soutenues pour permettre une caractérisation plus rapide des dangers potentiels des substances actives de pesticides.

Lire l’intégralité du dossier de presse

 

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De nouvelles perspectives thérapeutiques pour les patients porteurs d’anomalies lymphatiques liées à une mutation du gène PIK3CA

 

 

 

 

 

 

 

De nouvelles perspectives thérapeutiques pour les patients porteurs d’anomalies lymphatiques liées à une mutation du gène PIK3CA

06 OCT 2021 | PAR INSERM (SALLE DE PRESSE) | BIOLOGIE CELLULAIRE, DÉVELOPPEMENT ET ÉVOLUTION


Anatomie 3d du système lymphatique © Fotalia

L’équipe du service de néphrologie-transplantation rénale adultes de l’hôpital Necker-Enfants malades AP-HP, de l’Inserm et d’Université de Paris a mené des travaux, coordonnés par le Pr Guillaume Canaud, qui ouvrent de nouvelles perspectives thérapeutiques pour les patients porteurs d’anomalies lymphatiques liées à une mutation du gène PIK3CA.

Les résultats de cette étude ont fait l’objet d’une publication le 6 octobre 2021 au sein de la revue Science Translational Medicine.

Les malformations lymphatiques, anciennement appelées lymphangiomes, sont des malformations du système lymphatique qui peuvent être localisées (cutanées, sous cutanées ou muqueuses) ou plus rarement étendues à l’ensemble du corps. Elles sont le plus souvent congénitales et visibles avant l’âge de 2 ans. Elles sont fréquemment localisées dans les régions axillaire et cervicale. Ces malformations peuvent s’accompagner de « poussées inflammatoires » douloureuses, de compression d’organes, notamment de la trachée nécessitant alors la mise en place d’une trachéotomie, d’épanchements diffus dans la plèvre ou d’infection grave. Elles peuvent parfois menacer le pronostic vital. Ces malformations ont très souvent un important retentissement esthétique et un fort impact sur l’insertion des patients dans la société.

Dans l’immense majorité des cas, les malformations lymphatiques sont dues à une mutation du gène PIK3CA acquise au cours du développement embryonnaire (in utero). Les traitements actuels reposent sur des scléroses percutanées guidées par la radiologie et/ou des chirurgies souvent délabrantes. Elles peuvent être associées à des soins de support tels que des corticoïdes pour traiter les poussées inflammatoires, des antalgiques, des antibiotiques, une assistance respiratoire nocturne et un soutien nutritionnel et psychologique. Dans certains cas, un traitement immunosuppresseur, la rapamycine sirolimus, est utilisé avec une efficacité variable. Il n’y a aucun traitement approuvé dans cette indication pour le moment.

Le travail de recherche qui vient d’être publié dans la revue Science Translational Medicine ouvre de nouvelles perspectives thérapeutiques pour ces patients porteurs d’anomalies lymphatiques liées à une mutation du gène PIK3CA.

De nouvelles perspectives thérapeutiques pour les patients porteurs d’anomalies lymphatiques liées à une mutation du gène PIK3CA  >> voir la vidéo

L’équipe a créé le premier modèle murin porteur d’une mutation du gène PIK3CA spécifiquement dans les vaisseaux lymphatiques qui récapitule les différents types de malformations lymphatiques présentées par les patients. Ce modèle expérimental peut développer selon les besoins des malformations très localisées ou au contraire très diffuses.

L’équipe a ensuite identifié l’alpelisib (BYL719), inhibiteur spécifique de PIK3CA, et démontré son rôle comme molécule thérapeutique d’intérêt dans ce modèle préclinique. Fort de résultats très prometteurs chez l’animal, les chercheurs ont ensuite traité six patients, trois enfants et trois adultes, présentant des malformations lymphatiques sévères secondaires à une mutation PIK3CA, ayant résisté aux traitements conventionnels.

En six mois, le traitement par alplesib s’est accompagné d’une amélioration des symptômes des patients (douleurs, poussées inflammatoires, suintements, gêne à la déglutition…) et d’une réduction de 48% du volume des malformations mesurées en IRM. Comme précédemment rapporté dans une autre indication, le traitement a été bien toléré.

Ce travail, grâce au nouveau modèle expérimental créé, permet de mieux comprendre la physiopathologie des malformations lymphatiques mais ouvre surtout de nouvelles perspectives thérapeutiques très prometteuses.

Ce travail de recherche a été soutenu par :

-European Research Council (CoG 2020 grant number 101000948 and PoC-2016 grant number 737546)

-Agence Nationale de la Recherche – Programme d’Investissements d’Avenir (ANR-18-RHUS-005)

-Agence Nationale de la Recherche – Programme de Recherche Collaborative (19-CE14-0030-01).

-CLOVES SYNDROME COMMUNITY (West Kennebunk,USA)

-Emmanuel BOUSSARD Foundation (London, UK)

-Fondation DAY SOLVAY (Paris, France) Fondation TOURRE (Paris, France)

-Fondation BETTENCOURT SCHUELLER (Paris, France)

-Fondation Simone et Cino DEL DUCA (Paris, France)

-Fondation Line RENAUD-Loulou GASTE (Paris, France)

-Fondation Schlumberger pour l’Éducation et la Recherche (Paris, France)

-Inserm

-Assistance Publique – Hôpitaux de Paris

-Université de Paris

-Et de nombreux autres généreux donateurs

 

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Des cellules B mémoires très efficaces localisées dans les poumons

 

 

 

 

 

 

 

Des cellules B mémoires très efficaces localisées dans les poumons

28 JUIN 2022 | PAR INSERM (SALLE DE PRESSE) | COVID-19 | IMMUNOLOGIE, INFLAMMATION, INFECTIOLOGIE ET MICROBIOLOGIE

Les chercheurs ont montré que les cellules B mémoires pouvaient être localisées dans les poumons. © Adobe Stock

Comment augmenter l’efficacité des vaccins destinés à protéger contre les maladies virales respiratoires comme la grippe et la covid-19 ? Des scientifiques de l’Inserm, du CNRS et d’Aix-Marseille Université au Centre d’immunologie de Marseille-Luminy ouvrent de nouvelles perspectives sur le sujet, en montrant que déclencher l’apparition de cellules B mémoires directement dans les poumons constituerait une piste prometteuse. A l’heure actuelle, les vaccins sont administrés par voie intramusculaire et ne déclenchent pas l’apparition de ces populations cellulaires. Ces travaux, qui améliorent les connaissances fondamentales dans le domaine de l’immunologie, sont publiés dans le journal Immunity.

Les cellules B mémoires sont des cellules immunitaires produites essentiellement au niveau des ganglions lymphatiques et de la rate à la suite d’une infection. Elles persistent durablement dans ces régions et conservent le souvenir de l’agent infectieux. Si l’organisme y est à nouveau confronté, ces cellules sont immédiatement mobilisées et réactivent rapidement le système immunitaire pour une protection efficace de l’individu.

Suite à des travaux poussés sur ces cellules B mémoires, des chercheurs ont découvert il y a trois ans que ces cellules pouvaient également être localisées dans les poumons. L’équipe dirigée par le chercheur Inserm Mauro Gaya et ses collaborateurs du Centre d’immunologie de Marseille-Luminy (AMU/CNRS/Inserm) et du Centre d’immunophénomique (AMU/CNRS/Inserm) sont allés plus loin afin de décrire la nature et le fonctionnement de cette population de cellules immunitaires particulières.

L’objectif était de mieux connaitre ces cellules et leur implication dans la réponse immunitaire à long terme contre les infections respiratoires. Les scientifiques ont travaillé pour cela avec deux modèles d’infection chez des souris : le virus de la grippe ou le virus Sars-CoV2.

« Authentiques » et « spectateurs »

Ils ont utilisé des marqueurs fluorescents pour suivre l’apparition des cellules B mémoires après l’infection puis ont effectué une analyse transcriptomique sur cellule unique[1]. « Ces techniques nous ont permis de localiser précisément ces cellules dans les poumons de nos modèles animaux et de décrire leur profil d’expression génique cellule par cellule pour étudier leur fonction », explique Mauro Gaya.

Environ dix semaines après l’inoculation du virus et après son élimination de l’organisme, l’équipe a observé la formation des groupes de cellules B mémoires au niveau de la muqueuse respiratoire bronchique à une position stratégique, qui leur permet d’être directement en contact avec tout nouveau virus parvenant dans les poumons.

Par ailleurs, ces travaux suggèrent qu’il existe deux sous-populations de cellules B mémoires exprimant des gènes différents, baptisées « bona fide » et « bystanders » que l’on pourrait traduire par « authentiques » et « spectateurs ». Les cellules « bona fide » présentent une affinité particulière pour le virus qui a déclenché leur apparition. En cas de nouvelle rencontre avec ce pathogène, elles se différencient immédiatement en plasmocytes[2] et secrètent des anticorps hautement spécifiques contre le virus.

A l’inverse, les « bystanders » ne reconnaissent pas directement le virus mais se lient grâce à un récepteur particulier aux complexes immuns formés par les anticorps qui sont produits par les « bona fide ».

« Les bystanders » peuvent ainsi permettre des réactions croisées en augmentant la réponse de différentes populations de « bona fide » contre plusieurs types de virus. « Nous avons là un système à deux vitesses qui permet un effet synergique et décuple l’efficacité de la réponse anti-virale mémoire au niveau des poumons », explique Mauro Gaya.

Outre une avancée des connaissances fondamentales en immunologie, l’équipe de recherche voit dans ces résultats un moyen à plus long terme d’améliorer l’efficacité des vaccins contre la grippe ou la covid-19.

Ces résultats pourraient en effet être à la base de nouvelles recherches sur le mode d’administration des vaccins. « L’hypothèse est qu’en vaccinant par voie intranasale, on pourrait mimer la voie d’entrée naturelle du virus, mobiliser ces cellules B mémoires pulmonaires pour bloquer le virus dès son arrivée dans les voies respiratoires en cas d’infection. De cette façon, on pourrait combattre les formes sévères mais aussi mieux protéger contre l’infection », conclut Mauro Gaya.

 



 

[1] Analyse transcriptomique sur cellule unique : technique consistant à étudier les gènes exprimés dans chaque cellule de l’échantillon

[2] Plasmocytes: lymphocytes B arrivés à un stade de différenciation terminale au cours duquel ils produisent des anticorps

 

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Un récepteur synaptique impliqué dans l’émergence de croyances aberrantes

 

 

 

 

 

 

 

Un récepteur synaptique impliqué dans l’émergence de croyances aberrantes

17 JAN 2022 | PAR INSERM (SALLE DE PRESSE) | NEUROSCIENCES, SCIENCES COGNITIVES, NEUROLOGIE, PSYCHIATRIE

Dans le système nerveux, une synapse est une structure qui permet à un neurone (ou cellule nerveuse) de transmettre un signal électrique ou chimique à un autre neurone. © National Institute on Aging, NIH. flickr.com

Pourquoi sommes-nous parfois enclins à croire à l’improbable envers et contre tout ? Une étude menée par une équipe de neuroscientifiques et de médecins psychiatres de l’Hôpital Sainte-Anne et d’Université de Paris, ainsi que de l’École Normale Supérieure – PSL et de l’Inserm pointe vers un récepteur synaptique spécifique. Son blocage induit des décisions prématurées et aberrantes, ainsi que des symptômes ressemblant à ceux rapportés dans les stades précoces de psychose. Les résultats viennent d’être publiés dans Nature Communications.

Lorsque le monde qui nous entoure devient imprévisible et incertain, nous devenons plus prompt à croire à l’improbable  – comme des théories complotistes  pendant une pandémie.  Ce type de réaction à l’incertitude s’observe de façon exacerbée pendant les stades précoces de psychose : un  sentiment  d’étrangeté général  précède  l’émergence  de  croyances  délirantes.  Ces  stades précoces de psychose sont difficiles à étudier, car les patients n’accèdent aux soins que lorsque les croyances délirantes sont déjà installées.

L’équipe, dirigée par Valentin Wyart, directeur de recherche Inserm au sein du Laboratoire de Neurosciences Cognitives et Computationnelles (Inserm/ENS-PSL) et par le professeur Raphaël Gaillard d’Université de Paris à l’Hôpital Sainte-Anne-GHU Paris, a étudié le rôle d’un récepteur synaptique spécifique appelé NMDA (N-méthyl-D-aspartate) dans l’émergence de ces croyances aberrantes. Dans le cerveau, les récepteurs synaptiques régulent la communication au niveau des synapses, les zones de contact entre neurones. Les chercheurs ne se sont pas intéressés à ce récepteur par hasard. En effet, les encéphalites provoquées par une réaction auto-immune contre le récepteur NMDA sont connues pour donner lieu à des symptômes psychotiques.

Pour comprendre si une anomalie de ce récepteur favorise l’émergence de croyances aberrantes, l’équipe a demandé à un groupe de volontaires sains de prendre des décisions sur la base d’informations visuelles incertaines tout en se voyant administré par intraveineuse une très faible dose de kétamine, une molécule qui vient bloquer de façon temporaire le récepteur NMDA.

En comparant les effets de la kétamine à ceux d’un placebo sur le comportement et l’activité cérébrale des volontaires testés, les chercheurs ont observé que l’administration de kétamine produit non seulement un sentiment d’incertitude élevé, mais aussi des décisions prématurées.

« Un blocage du récepteur NMDA déstabilise la prise de décision, en favorisant les informations qui confirment nos opinions au détriment des informations qui les invalident », explique Valentin Wyart. « C’est  ce  biais  de raisonnement  qui  produit  des décisions prématurées et souvent erronées ». C’est ce type de biais qui est notamment reproché aux réseaux sociaux qui proposent aux utilisateurs une sélection d’informations en fonction de leurs opinions.

L’équipe est allée plus loin en montrant  que ce biais de raisonnement vient compenser le sentiment d’incertitude élevé ressenti sous kétamine. « Ce résultat suggère que les décisions prématurées que nous observons ne sont pas la conséquence d’une confiance exagérée », poursuit Valentin Wyart. « Au contraire, ces décisions semblent résulter d’une incertitude élevée, et provoquer l’émergence d’idées pourtant très improbables, qui se renforcent d’elles-mêmes sans pouvoir être invalidées par des informations extérieures. »

Ces résultats ouvrent de nouvelles pistes de réflexion pour la prise en charge de patients atteints de psychose. « Nos traitements agissent sur les idées délirantes, mais agissent peu sur ce qui les induit », précise Raphaël Gaillard. « Des  essais  cliniques  devraient  donc  être  menés  pour déterminer comment augmenter la tolérance des patients à l’incertitude dans les stades précoces de psychose. »

 

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