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APARTHEID

 

apartheid
(mot afrikaans signifiant séparation)


Guerre des Boers
Consulter aussi dans le dictionnaire : apartheid
Cet article fait partie du dossier consacré à la décolonisation.
Régime de ségrégation systématique des populations de couleur, en Afrique du Sud. La complexité du peuplement de l’Afrique du Sud explique l’établissement de l’apartheid en système de gouvernement à partir de 1913. Malgré une forte pression intérieure et extérieure, il se maintient jusqu’en 1991.
1. Le peuplement de l’Afrique du Sud

1.1. Des Bochimans aux Boers

Les premiers habitants attestés du territoire actuel de l'Afrique du Sud sont les chasseurs-cueilleurs khoisans (Bochimans et Hottentots). Au xvie siècle apparaissent les Bantous, qui se fixent plus au sud.
Dès 1652, le Hollandais Jan Van Riebeeck établit le premier comptoir européen en Afrique australe, à Table Bay (aujourd'hui un quartier du Cap), destiné servir d'escale aux navires de la Compagnie hollandaise des Indes orientales. Peu après, la révocation de l'édit de Nantes par Louis XIV (1685) provoque une émigration importante de huguenots français vers l'Afrique australe. Leur arrivée coïncide avec le début de l'esclavage des Noirs ; les Européens gagnent ensuite l'intérieur du pays.
Les pionniers hollandais (les Boers, « paysans » en néerlandais) s'implantent ainsi dans l'Est, où ils affrontent les Bantous.
1.2. Le Grand Trek

Au cours du xixe siècle, les Boers se heurtent aux Britanniques, à qui le congrès de Vienne (1814) a attribué Le Cap. Les Boers leur reprochent une politique jugée trop favorable aux Noirs, notamment à la suite de l'abolition de l'esclavage par la Grande-Bretagne en 1833.
Afin de préserver leur mode de vie, les Boers amorcent à partir de 1834 un mouvement migratoire vers l'intérieur du pays, le Grand Trek. Ils chargent cet exode d'une forte signification biblique, affirmant être les nouveaux Hébreux, le peuple élu en route pour la Terre promise. Ce sentiment d'élection divine marquera durablement la population huguenote franco-hollandaise et déterminera pour une bonne part l'évolution historique ultérieure de cette partie du monde.
À la suite du Grand Trek, les Boers fondent le Transvaal (1852) et l'État libre d'Orange (1854).
1.3. De la guerre des Boers à l’Union sud-africaine (1899-1910)

Guerre des Boers
La fin du xixe siècle est marquée par la découverte dans les Républiques boers de gisements d'or et de diamants qui attirent des immigrants britanniques (uitlanders) vers l'intérieur du pays. De nombreux conflits éclatent au sujet de la propriété du sol. La guerre des Boers qui s'ensuit éclate en 1899 et, suite à la victoire britannique, s'achève avec la confirmation officielle en 1902 de la souveraineté britannique sur l'Union sud-africaine.
L'ensemble du territoire devient en 1910 un dominion de l'Empire colonial britannique, l'Union sud-africaine, où se juxtaposent le système libéral anglais dans les anciennes colonies britanniques et les fortes traditions religieuses des premiers immigrants calvinistes, hollandais et français, qui se nomment eux-mêmes les Afrikaners, dans les deux républiques afrikaners vaincues en 1902.
1.4. La montée du nationalisme afrikaner (1910-1931)

Sous l'impulsion du National Party – et alors que se développent l'exploitation minière et l'industrie manufacturière grâce aux capitaux britanniques –, le fort sentiment antibritannique des Afrikaners se maintient durant l'entre-deux-guerres. Ceux-ci cherchent à compenser leur faiblesse économique en adoptant une stratégie d'accession aux divers échelons du pouvoir politique. Leurs efforts sont couronnés de succès lorsqu'un gouvernement boer nationaliste, présidé par James Hertzog (1924-1939), parvient à faire reconnaître par le Royaume-Uni l'autonomie du pays (1926), le statut de Westminster (11 décembre 1931) supprimant toutes les réserves qui restreignaient encore son pouvoir législatif, mais conservant le statut de dominion.
2. L'apartheid, système de gouvernement

2.1. Les premières mesures de ségrégation raciale (1913-1948)

Le gouvernement met en place une politique de ségrégation raciale inspirée des premières lois ségrégatives édictées dès 1913 et nourrie, d'un côté, par le désir de revanche et de reconnaissance sociales éprouvé par les Afrikaners, et, de l'autre, par les traditions religieuses des premiers Boers.
À partir de 1921, les mesures ségrégationnistes se multiplient et sont étendues à l’ancien Sud-Ouest africain allemand (actuelle Namibie), sur lequel l’Union sud-africaine a reçu en 1920 un mandat de la Société des Nations (SDN).
En 1927, la loi Hertzog prohibe tout rapport sexuel hors mariage entre Blancs et Noirs. Dans les années 1930, la récession attise les conflits entre Noirs et fermiers blancs, qui aspirent à trouver du travail dans les villes. Afin de faire de l'Afrique du Sud une nation de Blancs, le gouvernement Hertzog (1924-1939) cherche à concentrer les Noirs dans des réserves. Ni les Noirs ni les métis n'ont le droit de vote.
2.2. La relance de la politique ségrégationniste (1948-1956)

En 1948, le National Party, grand vainqueur des élections législatives, instaure la politique du « développement séparé des races ». Cette doctrine entérine un état de fait en le dotant d'une légitimité juridique. L'année suivante, le gouvernement nationaliste du pasteur Malan étend en 1949 l'apartheid à la population d'origine indienne (qui s’est installée, à la fin du xixe siècle, dans la région de Durban et de Port-Élisabeth).
Au cours des années 1950, le gouvernement fait adopter une nouvelle série de mesures discriminatoires. Ainsi, en 1952, le Native Act n°67 impose à tous les Noirs âgés de 16 ans et plus de porter sur eux en permanence un pass book (laissez-passer) contenant leurs pièces d'identité et un certificat d'origine tribale. En 1953, le Bantu Labour Act interdit aux Africains de faire grève et de se syndiquer. C'est ensuite, en 1956, l'Industrial Conciliation Act qui interdit les syndicats ouvriers mixtes.
2.3. Les bantoustans, instruments de la ségrégation

Affiche anti-aparheidAffiche anti-aparheid
Répondant au souci de pousser encore plus loin la ségrégation raciale, le Promotion of Bantu Self-Government Act permet en 1954 de créer dix « nations noires » artificielles, dites bantoustans. Sous le mandat de Verwoerd (1958-1966), le Parlement adopte une loi favorisant l'autodétermination bantoue et projetant l'indépendance des dix bantoustans africains. Elle est réalisée en 1976 pour le Transkei, suivi du Bophutatswana (1977), du Venda (1980) et du Ciskei (1981).
Ces « États », qui ne seront jamais reconnus par la communauté internationale, sont alors surpeuplés (74 % de la population noire), fragmentés et dotés de ressources limitées. Neuf millions de Noirs, appartenant aux groupes ethniques associés aux bantoustans, ont perdu de facto la citoyenneté sud-africaine. En 1964, le Bantu Law Amendment Act prive les Africains de leurs droits en dehors des bantoustans et, en 1968, l'interdiction des mariages mixtes s'étend jusqu'à l'invalidation de ceux qui sont contractés à l'étranger.
2.4. La montée des tensions interraciales (1960-1979)

Nelson MandelaNelson Mandela
En 1960, une révolte des Noirs contre le système des passeports intérieurs est réprimée dans le sang et débouche sur le massacre de Sharpeville. Renforçant alors sa politique répressive, le gouvernement interdit, le 8 juin 1960, les mouvements d'opposition à l'apartheid nés dans les années 1950 sous l'influence de l'Congrès national africain (African National Congress , né en 1912) dont le président Albert Luthuli reçoit le prix Nobel de la paix, ou d'autres mouvements comme le Pan African Congress (PAC).
« Soweto vit, l'apart-haine tue »« Soweto vit, l'apart-haine tue »
Face à l'inflexibilité du pouvoir blanc, la lutte s'intensifie : une branche armée clandestine de l'ANC est créée en décembre 1961. Nelson Mandela, l'un de ses dirigeants les plus influents, est arrêté en 1962 et condamné à la prison à perpétuité en 1964.
Entre-temps, l'Union sud-africaine s'est retirée du Commonwealth, qui avait condamné l'apartheid, et la République d'Afrique du Sud a été proclamée le 31 mai 1961. À partir de 1975, le mouvement SWAPO développe son action pour obtenir l’indépendance de la Namibie. Enfin, en 1976, de violentes émeutes éclatent à Soweto et dans d'autres townships, qui provoquent la mort de 400 personnes.
3. Vers la fin de l'apartheid (1991)

3.1. Des signes d’apaisement (1979-1985)

Sous l'effet d'une très active opposition intérieure et des pressions de la communauté internationale, les gouvernements qui se succèdent sous la présidence de Pieter Willem Botha (1978-1989) légalisent les syndicats noirs en 1979, autorisent les partis politiques multiraciaux en 1985, suppriment les quotas appliqués par les industries afin de limiter le nombre de travailleurs noirs, ainsi que la loi interdisant les mariages mixtes.
3.2. Les insuffisances de la détente (1985-1989)

Ces mesures, cependant, ne parviennent pas à contenir les mouvements de protestation des Noirs contre le régime. Pour mettre fin aux violences envers les policiers et les Noirs qui coopèrent avec les Blancs, ainsi qu'entre membres de groupes politiques ou ethnolinguistiques rivaux – essentiellement zoulous –, le gouvernement impose l'état d'urgence sur l'ensemble du territoire entre septembre 1984 et juin 1986. Le président Botha reconnaît néanmoins que le concept d’apartheid est dépassé.
L'année 1985 est marquée par de graves émeutes dans les townships (notamment à Crossroads, en mars 1985). Peu après (janvier 1986), Botha est amené à annoncer la fin de l'apartheid pour apaiser les esprits. La même année disparaissent les laissez-passer réglementant les mouvements d'immigration vers les villes.

Frederik De KlerkFrederik De Klerk
En 1987, le gouvernement propose un remaniement du Group Areas Act, loi qui était à l'origine de la ségrégation raciale dans les zones urbaines. Mais la nouvelle Constitution refuse toujours le droit de vote à la majorité noire lors des élections nationales, et n'accorde que des droits limités aux métis et aux Indiens.
3.3. La fin de l’apartheid (1991)

En 1989, Botha démissionne de la présidence et cède la place à Frederik Willem De Klerk qui fait libérer Mandela (février 1990), légalise l'ANC et fait abolir l'apartheid par le Parlement (juin 1991). Dans l’intervalle, le 21 mars 1990, a été proclamée l’indépendance de la Namibie, dirigée par la SWAPO. Malgré les affrontements violents entre l'ANC et les Zoulous de l'Inkatha, animés par Mangosuthu Buthelezi, et la résistance des milieux blancs extrémistes, une nouvelle Constitution est adoptée en décembre 1993. Pour assurer la transition, on y propose la formation d'un gouvernement d'union nationale regroupant les représentants des principaux partis.
3.4. Mandela président (1994)

Les premières élections multiraciales et démocratiques d'avril 1994, auxquelles l'Inkatha, après avoir longtemps hésité, accepte finalement de participer, assurent la victoire de l'ANC, avec 60 % des suffrages, sur 27 partis en lice. Le NAtional Party de Frederik De Klerk est la deuxième force du pays (20 %), ralliant non seulement la majorité des Blancs, mais aussi celle des lndiens et des métis. Buthelezi garde le contrôle du Natal, fief des Zoulous.
Le 9 mai, les 400 députés du nouveau Parlement portent Mandela à la présidence de la République, Thabo Mbeki et F. De Klerk devenant vice-présidents. L'apartheid est alors définitivement enterré. Mais la stabilité du pays reste menacée par l’épidémie de sida, de très grands écarts de fortune et de fortes tensions sociales et inter-ethniques.

 

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AFRIQUE DU SUD - HISTOIRE

 

Afrique du Sud : histoire
La formation de l'Afrique du Sud
1. L'époque précoloniale

1.1. San et Khoi-khoi

Mis à part les hommes de la préhistoire, ce sont les populations de langue khoisan qui constituent le peuplement le plus ancien de l'Afrique australe. Confinées aujourd'hui dans les régions désertiques, ces populations occupaient jadis un territoire bien plus vaste. Les San (ou Bochimans), chasseurs et collecteurs, habitaient le pays avant les pasteurs Khoi-khoi, dont les descendants seront nommés Hottentots par les premiers colons.
1.2. Migration des Bantous

Entre le viiie et le xvie siècle, des populations de langue bantoue migrent d’Afrique centrale et orientale pour se sédentariser sur les terres vierges de l'Afrique australe. Parmi elles, les Ngunis se diviseront en quatre groupes : les Zoulous (dans le Nord et le Centre), les Xhosas (dans le Sud), les Swazis et les Ndébélés. Ils sont suivis des Sothos, des Tswanas et Vendas.
Refoulés, en partie éliminés ou intégrés par les Xhosas au cours de leurs déplacements vers l’ouest, les Khoi-khoi sont les premiers peuples originaires du pays avec lesquels les Hollandais entrent en contact.
2. Période coloniale

2.1. L'établissement des Hollandais (xvie-xviiie siècles)

Fondation du Cap, aux dépens des aborigènes
Durant tout le xvie siècle, les Portugais, qui pourtant ont découvert le pays (→ Diogo Cão, Bartolomeu Dias, Vasco de Gama) n'y installent aucun poste, la région leur paraissant hostile et peu riche. Tandis que des Anglais plantent l'Union Jack en Afrique du Sud (mais sans reconnaissance officielle), ce sont des Hollandais qui, à la suite d'une expédition de trois navires commandés par Jan Van Riebeeck (1616-1677) en 1652, fondent Le Cap, simple escale de la Compagnie hollandaise des Indes orientales. N'ayant pas l'intention de s'y installer durablement, ils envisagent d'y développer quelques plantations (vignes, vergers et potagers), dont les produits sont destinés au ravitaillement des navires faisant route vers Batavia.
À l'origine, tous les habitants, hormis quelques Allemands et Scandinaves, sont des salariés de la Compagnie des Indes et ne sont là que pour une période déterminée. Pour les inciter à améliorer les rendements de leur production, Amsterdam leur confère peu à peu le titre de burger « citoyen » et, dès 1657, Jan Van Riebeeck leur alloue quelques terrains : ainsi, les premiers citoyens libres (vrijburgers) s'intallent comme agriculteurs à leur propre compte.
Ni les Khoi-khoi ni les Bochimans ne sont assez bien armés pour résister à l'occupation progressive de leur territoire par les colons, et, vulnérables aux maladies importées par ceux-ci, ils sont peu à peu refoulés.
Tandis que l'expansion territoriale se poursuit, l'esclavage se développe : outre, en partie seulement, des Khoi-khoi détribalisés, les esclaves sont surtout des Noirs achetés à Madagascar et au Mozambique, mais aussi des Malais.


Les huguenots français
En 1685, la révocation de l'édit de Nantes produit une importante immigration de protestants français ; les huguenots constituent le 1/6e de la population européenne de la colonie en 1699.
La rencontre avec les Bantous
La progression des Boers (les descendants des premiers colons) provoque, vers 1775, leur rencontre avec les Bantous. Une série de conflits se déroule durant les années 1779-1780 : c'est la première « guerre cafre » (les Cafres étant les Xhosas). Inférieurs en nombre, les Boers mettent au point la méthode du laager, camp retranché constitué par les chariots à bœufs sur lequel se brisent les assauts des Bantous. Les Boers prennent peu à peu le dessus, mais le gouverneur de l'époque préfère conclure un accord avec les Bantous, car la situation financière de la Compagnie des Indes est alarmante : la frontière est fixée à la Great Fish River.
2.2. La colonisation britannique

Mainmise britannique sur la colonie du Cap
Plusieurs événements viennent aggraver le mécontentement des Boers : la Compagnie des Indes cesse ses paiements en 1791 avant de disparaître en 1799. Après les conflits anglo-néerlandais de 1781-1784, les guerres européennes, consécutives à la Révolution française, sont marquées par des incursions anglaises au Cap (1795 et 1806). Après la capitulation des garnisons locales en 1806 et en vertu du traité de Paris de 1814, la colonie du Cap passe sous administration britannique.


La politique libérale britannique
Relativement bien accueillis au début, les Britanniques prennent, entre 1806 et 1834, un ensemble de mesures qui provoquent le soulèvement des Boers, ceux-ci leur reprochant de prendre la défense des Noirs. Par ailleurs, la fixation de la frontière au fleuve Orange, la modification du système d'acquisition des terres et le développement de la colonisation anglaise, dès 1819, deviennent d'autres motifs de conflits. Enfin, l'abolition de l'esclavage, en 1833, porte au paroxysme le ressentiment des Boers.


L'expansion zouloue
À la même époque, vers 1818, dans le nord-est du pays, le royaume zoulou se constitue sous le règne du chef Chaka puis de ses successeurs Dingane et Mpande. Son extension et les conflits entre tribus qui l’accompagnent, intensifient la dispersion déjà en cours des populations africaines et la dislocation des structures sociales. Ce Mfecane (« migration forcée ») des peuples en quête de terres, facilite la conquête européenne.


Le Grand Trek
La formation de l'Afrique du SudLa formation de l'Afrique du Sud
En 1834-1835, des milliers de Boers, mécontents des décisions prises par le gouvernement britannique, quittent en chariots à bœufs la colonie du Cap et se dirigent vers le nord et l'est. Cette migration, dénommée le Grand Trek, entraînant le déplacement de 15 000 Boers sur une distance de 2 000 km, va durer jusqu'en 1852.
Ayant franchi le fleuve Orange, des Boers poussent vers le nord en direction du Transvaal ; d'autres se tournent vers l'est en direction du Natal.
De durs combats les opposent aux Xhosas, aux Tswanas et aux Swazis. La lutte contre les Zoulous, qui s'achève par la bataille de Blood River, au cours de laquelle 3 000 d'entre eux sont tués, ouvre aux Boers la route du Natal (1838), où ils établissent un État. Néanmoins, l'État boer du Natal aura une existence très brève, puisque les Britanniques l'attaquent en 1842, le déclarent possession britannique en 1843 et en font une colonie de la Couronne en 1856.


L'expansion britannique
Après avoir créé une zone tampon entre la colonie du Cap et les territoires xhosas de l’Est (1819), les Britanniques, poursuivant leur expansion, prennent possession de ces derniers sous le nom de « cafrerie britannique » (1847). Une neuvième et dernière « guerre cafre » conduit au rattachement des derniers territoires xhosas à la colonie du Cap en 1877-1879.
Parallèlement, entre 1879 et 1897, les guerres anglo-zouloues conduisent à la destruction du royaume zoulou et au rattachement de son territoire à la Couronne puis au Natal. Avec l’annexion du Basutoland (→ actuel Lesotho [1868 et 1884]), les populations africaines sont désormais largement soumises.
Mais l’affrontement entre les deux communautés blanches ne tarde pas à renaître : si l'indépendance du Transvaal est reconnue en 1852 (convention de Sand River) et celle de l'Orange en 1854 par la convention de Bloemfontein (→ État libre d'Orange), le conflit avec les États boers se rouvre bientôt.
2.3. La guerre des Boers (1880-1902)

La première guerre des Boers (1880-1881)
Libres et apparemment maîtres de leur destin, mais pauvres, démunis et sans expérience politique, les Boers demeurent dans une situation fragile. En 1880, à la suite de l'annexion du Transvaal (1877) par les Britanniques, ils se révoltent à l'appel d'Andries Pretorius, Petrus Joubert et Paul Kruger et battent les Anglais à Majuba Hill (1881). La paix de Pretoria (août 1881) reconnaît l'indépendance des républiques boers.


La résistance de Paul Kruger contre Cecil Rhodes
Celles-ci sont encerclées progressivement, à la suite de l'annexion du Bechuanaland par les Britanniques et de la concession des territoires au nord du Zambèze à la British South Africa Company, plus connue sous le nom de Chartered, société dirigée par Cecil Rhodes, qui anime toute la transformation économique de l'Afrique australe.
Les mines d'or (découvertes en 1885) et de diamants, la voie ferrée de l'Orange attirent une population d'aventuriers étrangers, pour la plupart britanniques, les Uitlanders, groupés dans les villes nouvellement fondées, et dont les intérêts, défendus par les grandes compagnies et le gouvernement britannique, sont fondamentalement opposés à ceux des Boers.
Cecil Rhodes, devenu Premier ministre de la colonie du Cap (1890), échoue dans ses tentatives d'attirer dans une union douanière le Transvaal, en passe de devenir, grâce aux mines d'or, l'État le plus riche de l'Afrique australe et d'échapper ainsi à tout contrôle britannique. Ne pouvant rien obtenir de Kruger, il fomente un mouvement révolutionnaire à Johannesburg qui doit être, le moment venu, appuyé par les troupes de la Chartered. Le docteur Jameson, malgré l'avis de Rhodes qui se ravise à la dernière minute sous l'influence de Chamberlain, tente cependant le raid au Transvaal (« raid Jameson », 1895) et échoue.


La guerre du Transvaal ou seconde guerre des Boers (1899-1902)
Meeting en faveur des BoersMeeting en faveur des Boers
Il s'ensuit une vive réaction de l'opinion publique européenne, très favorable aux Boers. Cependant Chamberlain et le haut-commissaire sir Alfred Milner s'acheminent peu à peu vers l'idée que seule la guerre permettra d'établir définitivement la puissance britannique en Afrique australe. Les prétextes en seront le refus de Kruger d'accorder le droit de vote aux Uitlanders et un ultimatum de celui-ci pour réclamer l'arrêt des envois de troupes britanniques, précédant celui que Chamberlain avait lui-même rédigé. La guerre du Transvaal éclate donc le 11 octobre 1899.
Elle se termine en 1902 par le traité, dit de Vereeniging, qui avalise la perte d'indépendance des deux Républiques boers – l'État libre d'Orange et la République sud-africaine du Transvaal – désormais intégrées dans l'Empire britannique. Toutefois, reconnaissant que la population de langue anglaise ne pourra jamais devenir majoritaire, le nouveau gouvernement libéral britannique (élu en 1905) accorde aux colonies sud-africaines une assez large autonomie.
Les Boers font de la résistance passive devant l'occupant, mais, dans un cadre fédéral qui s'avère viable, ils renaissent rapidement à la vie politique et culturelle. Ils créent un enseignement privé, des sociétés culturelles, qui permettent l'avènement d'une nouvelle langue, l'afrikaans. En 1906, les partis boers, Het Volk et Oranje Unie, remportent des succès importants aux élections au Transvaal et en Orange.


3. L'Union sud-africaine (1910-1961)

Après la guerre, le problème essentiel est de reconstruire le pays, qui a été dévasté.
3.1. Création de l'Union sud-africaine

Dominion de l'Empire britannique, l'Union sud-africaine est créée le 31 mai 1910, avec l'entrée en vigueur du South Africa Act, Constitution commune aux quatre colonies – Le Cap, Transvaal, Orange, Natal –, qui deviennent alors des provinces.
Celles-ci, administrées par un gouverneur et représentées par une assemblée locale, disposent d'une assez large autonomie en particulier dans les domaines scolaires et sociaux. Le pouvoir législatif, pour l'Union tout entière, est confié à un Parlement bicaméral, dont l'Assemblée est élue par le seul suffrage des Européens, tandis que les membres du Sénat sont nommés. Le pouvoir exécutif est assumé par un gouverneur général nommé par Londres ; par ailleurs, un cabinet, dont le Premier ministre – siégeant à Pretoria (capitale administrative) – est le leader de la majorité, est responsable devant le Parlement. Le Premier ministre désigné est un Afrikaner, Louis Botha (1910-1919).
Dans l'Union demeurent deux enclaves noires : le Basutoland et le Swaziland ; il faut enfin noter la présence allemande dans le Sud-Ouest africain (future → Namibie) depuis 1884.
3.2. Un dominion blanc

La réconciliation entre Anglais et Boers et l’autonomie octroyée aux colonies permettent l’adoption des premières lois ségrégatives. Après des mesures de discrimination à l’égard des Indiens – qui provoquent la naissance du mouvement de résistance non violente du Mahatma Gandhi – le régime de l'apartheid commence à être légalement encadré avec l’adoption, en 1911, de plusieurs lois :
– le Native Labour Regulation Act, criminalise la rupture d’un contrat de travail sauf pour les Blancs ;
– le Dutch Reformed Church Act – interdit aux Noirs d’être membres à part entière de l’Église ;
– le Mines and Works Act réserve aux Blancs les emplois qualifiés.
En 1913, le Natives Land Act, la plus sévère des lois alors adoptées, interdit aux Noirs d’acheter, louer ou exploiter des terres en dehors des « réserves » – plus tard appelées bantoustans (ou homeland) –, plus de 90 % des terres étant ainsi réservées à la minorité blanche.
3.3. Évolution de l'Union sud-africaine de 1910 à 1948

La Première Guerre mondiale
En août 1914, l'Union déclare la guerre à l'Allemagne ; cela se traduit surtout par une expédition dans le Sud-Ouest, qui est occupé (reddition des Allemands en juillet 1915). En 1916, l'Afrique-Orientale allemande tombe à son tour sous les coups de Jan Christiaan Smuts. Après la guerre, l'Union sud-africaine recevra de la Société des Nations (SDN) le mandat d'administrer le Sud-Ouest africain (actuelle Namibie).
Nationalisme afrikaner et premières tentatives de résistance
Le National Party et la « ségrégation honorable »
En janvier 1913, le général James Hertzog fonde le National Party antibritannique, issu d'une scission du parti afrikaner dirigé par L. Botha (mort en 1919) puis par son successeur à la tête du gouvernement, le général Smuts. Ce dernier doit faire face à une coalition du parti travailliste et du National Party, dont le leader, James Hertzog, devient Premier ministre (1924) et participe à la Conférence impériale de 1926 à l’issue de laquelle la pleine autonomie est accordée aux dominions, membres librement associés au Commonwealth (déclaration Balfour du 19 novembre).
Le National Party se fait le champion de l'eerbaare apartheid, « ségrégation honorable », selon laquelle les indigènes doivent être séparés des Blancs. Le nationalisme afrikaner se traduit par l'annexion de fait du Sud-Ouest africain et par des visées sur d'autres territoires d'Afrique australe, principalement la Rhodésie. Racisme et nationalisme font leur apparition lors de la grève des ouvriers européens de 1922, qui a pour origine une décision de la Chambre des mines de 1921 modifiant le système de recrutement des Noirs. Des mesures sont prises, permettant d'embaucher des Africains pour un salaire qui peut être le dixième de celui des Blancs.
D’autres mesures de discrimination sont adoptées : outre la restriction du droit de vote, l’application stricte des pass laws – lois imposant des permis de circulation aux Noirs à la recherche d’un emploi adoptées dès le début de la colonisation en vue de contrôler cette main-d’œuvre – est ordonnée à la suite de la crise de 1929.


La résistance de l'élite politique noire
Face à cette intensification de l’apartheid, l’élite politique noire, organisée depuis 1912 avec une plate-forme réformiste et modérée au sein de la South African Native National Convention (SANNC), rebaptisé African National Congress (ANC) en 1923, tente de consolider sa résistance avec celle de l'All African Convention (AAC) en 1935. Elle essaie surtout, depuis la création, en 1919, de l'Industrial and Commercial Workers Union (ICU), de développer son action sur le terrain syndical. Malgré quelques succès, cette mobilisation sociale se solde cependant par un échec à la fin des années 1920.
Par ailleurs, fondé 1921, le parti communiste sud africain (South African Communist Party ou SACP) est la première organisation politique non raciale du pays.
L'United Party
Alors que James Hertzog et Jan Smuts décident de faire alliance en créant l’United South African National Party, ou United Party (UP), qui remporte les élections de 1934, Daniel Malan et ses partisans font scission pour créer un « parti national purifié », qui prend la tête de la minorité raciste et extrémiste au Parlement.


La Seconde Guerre mondiale
En 1939, Hertzog, qui a proposé la neutralité, est mis en minorité et démissionne, rejoignant le Dr Malan au sein d’un Parti national réunifié (Herenigde Nasionale Party, HNP). Smuts, qui lui succède (1939-1948), lutte contre l'influence du nazisme, mais ne peut contenir la vague des « pauvres Blancs », qui proclament la supériorité des Afrikaners sur les Anglais et celle des Blancs sur les Noirs.
3.4. La poussée ségrégationniste (1948-1961)

La politique stricte d'apartheid du Dr Malan
À la tête du National Party (nouveau nom du HNP), le Dr Malan triomphe aux élections de 1948 et devient Premier ministre (1948-1954) : la politique d'apartheid s'étend dès lors non seulement aux Noirs, mais aussi aux Indiens du Natal, privés du droit de vote (1948). Les mariages mixtes sont interdits puis les relations sexuelles entre Blancs et non Blancs ; toute une législation (Population Registration Act, Group Areas Act, 1950-1953) sépare les communautés sur une base raciale, restreint les libertés des Noirs et vise même à gêner l'installation de Britanniques dans l'Union et l'éventuel développement du parti communiste.
Parallèlement, la politique expansionniste se poursuit : l'annexion du Sud-Ouest devient effective en 1949.
Le référendum de 1960 : vers la République d'Afrique du Sud
Les successeurs du Dr Malan, J. C. Strijdom (1954-1958) et Hendrik Frensch Verwoerd, accentuent sa politique. C'est ainsi que les métis du Cap sont rayés des listes électorales (1956).
Ces mesures exaspèrent l'opposition indienne et noire. En 1952, l'African National Congress et son chef, Albert Luthuli, lancent un « mouvement de défi », caractérisé par la désobéissance civile. Malgré la répression, le mouvement se poursuit et culmine lors du massacre de Sharpeville, où, le 21 mars 1960, 69 protestataires pacifiques sont tués par la police.
Exaspéré par les critiques de l'ONU et du Commonwealth à l'égard de sa politique, et particulièrement de l'apartheid, le National Party organise le 5 octobre 1960 un référendum, qui s'avère largement favorable à la république et à la sécession à l'égard du Commonwealth.
Pour en savoir plus, voir l'article Afrique du Sud : vie politique depuis 1961.

 

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L'ÉGYPTE ANCIENNE

 

Égypte : histoire de l'Égypte ancienne et préislamique

Cet article fait partie du dossier consacré à l'Égypte ancienne.
1. L'époque archaïque

On divise généralement l'histoire égyptienne en périodes correspondant aux 30 dynasties royales recensées par Manéthon, chroniqueur égyptien du iiie siècle avant J.-C. Si les recherches les plus récentes (juin 2010) en vue d’établir une chronologie absolue grâce à la datation par le carbone 14 d’échantillons de divers objets ou plantes attribués à une période ou à un règne, sont de manière générale en accord avec la plupart des travaux déjà menés, la chronologie de l’Égypte pharaonique diffère toutefois toujours selon les historiens et archéologues avec parfois des écarts sensibles, pouvant atteindre plus d’un siècle. La datation présentée ici est ainsi, parmi d’autres, approximative. La période antérieure à 3200 avant J.-C., pour laquelle on ne dispose d'aucun témoignage écrit, est dite prédynastique ; elle est maintenant beaucoup mieux connue grâce à l'archéologie.
1.1. La période prédynastique

À une époque nettement antérieure à 5000 avant J.-C., de nombreuses communautés de chasseurs-cueilleurs vivent sur les plateaux surplombant le Nil et dans les savanes qui s'étendent à l'est et à l'ouest. Quand la baisse des précipitations et celle, relative, des crues, en particulier après 4000, entraînent une désertification des terres occidentales, ces populations colonisent densément la vallée du Nil et ses abords immédiats. Néanmoins, la faune de ces plateaux, parmi laquelle des éléphants et des girafes, persiste jusqu'aux environs de 2300, avant de se replier définitivement vers le sud.
La vallée du Nil, qui présente des bassins d'irrigation naturels retenant les eaux de crue, est un emplacement idéal pour passer de l'économie mésolithique dotée d'un embryon d'agriculture à une économie fondée sur une agriculture sédentaire accompagnée d'élevage.
En Basse-Égypte, au sud du Delta, à Merimdeh et dans le Fayoum (5000-4000), les fouilles archéologiques montrent l'importance d'une société paysanne, dont les villages étaient construits en clayonnages de roseaux, et produisant une poterie monochrome parfois rehaussée de décors incisés ou appliqués.
1.2. L'avance prise par la Haute-Égypte

À la même période, en Haute-Égypte, le pouvoir paraît déjà beaucoup plus fort, centralisateur ; des phénomènes urbains apparaissent à Hiéraconpolis. Les trois époques successives de la culture de Nagada produisent une poterie très différente de celle du Nord – plus proche de celle de Khartoum, plus ancienne – et de superbes objets de pierre polie.
C'est à cette époque que des schémas historiques généraux se dessinent, avec l’émergence d'élites politiques asseyant leur pouvoir sur la prospérité de l'agriculture et sur le contrôle des matières précieuses, qui commencent à être exploitées par des techniques nouvelles.
Si les outils et les armes sont initialement en pierre ou en matériaux organiques, le cuivre et les métaux précieux acquièrent une importance croissante en Haute-Égypte et, plus tard, en Basse-Égypte. La culture de Nagada (milieu du IVe millénaire) voit la construction de bateaux de rivière plus grands et plus performants, et l'essor du commerce sur le Nil. Ces facteurs, parmi d'autres, favorisent l'apparition d'une élite dont les sépultures sont plus grandes et plus somptueuses que précédemment (on peut même reconnaître celles des chefs politiques provinciaux sur différents sites). Selon des traditions ultérieures, deux royaumes seraient apparus à la fin de l'époque prédynastique, la prééminence matérielle et politique de la Haute-Égypte étant plus nette.
1.3. Le commerce

Tout au long de cette période, de 5000 à 3100, les influences étrangères directes ou indirectes sont décisives, mais il est difficile de déterminer leur part respective. La culture des céréales et l'élevage de certains animaux, introduits de Syrie et de Palestine, est un signe de l'influence de ces régions. La Haute et la Basse-Égypte commercent avec la Syrie, la Palestine et l'Afrique du Nord.
On n'a, jusqu'aujourd'hui, retrouvé en Haute-Égypte que des sceaux cylindriques, des poteries et des motifs décoratifs de style mésopotamien, particulièrement remarquables, probablement apportés par des intermédiaires plutôt que par contact direct.
Les témoins les plus parlants de l'architecture prédynastique se trouvent dans les nécropoles ; les fosses funéraires sont tapissées de bois ou de briques et couvertes d'un toit de sparterie ou de pavés ; certaines tombes sont surmontées de petites structures solides en brique ou en remblai. Des campements ont fait l'objet de fouilles partielles, et l'on a découvert récemment à Hiéraconpolis un temple probablement prédynastique.
2. L'Égypte pharaonique

2.1. La période thinite (vers 3200-vers 2778 avant J.-C.)

L'Égypte ancienne
Vers 3200 avant J.-C., Narmer, originaire de Hiéraconpolis, unifie les deux royaumes existant alors : celui de Haute-Égypte (capitale Hiéraconpolis ; divinité tutélaire : la déesse-vautour Nekhbet ; insigne : la couronne blanche) et celui de Basse-Égypte (capitale Bouto ; divinité tutélaire : la déesse-serpent Ouadjet ; insigne : la couronne rouge). Ceignant les deux couronnes (nommées en égyptien « les deux puissantes », en transcription grecque : le pschent), il est le premier des rois qui, durant 30 dynasties (selon le schéma traditionnel de source égyptienne, transmis par Manéthon) au cours de trois millénaires, vont administrer l'Égypte jusqu'en 333 avant J.-C., date de l'arrivée d'Alexandre de Macédoine. Narmer établit sa capitale à This (près d'Abydos), où règnent les rois des deux premières dynasties ; celles-ci sont connues grâce aux découvertes faites dans les nécropoles d'Abydos, de Saqqarah et d'Hélouân (en Basse-Égypte). Il est possible que Narmer ait jeté les fondations de la ville nouvelle de Memphis, à la pointe du Delta du Nil.
L'œuvre de ces premiers souverains, qui maintiennent fermement l'unité du royaume, semble importante : création d'une économie nouvelle (mise en valeur des terres par l'organisation d'une politique nationale d'irrigation, développement de l'agriculture et de l'élevage) ; établissement des principes de la nouvelle monarchie, unificatrice et d'essence divine ; mise en place des éléments de gestion politique (les rouages de l'administration centrale et ceux de l'administration provinciale étant « dans la main du roi », monarque tout-puissant).
Les pharaons des Iere et IIe dynasties sont les successeurs de Narmer. D'après certains spécialistes, des rois de la Iere dynastie auraient été enterrés à Abydos, dans des fosses funéraires coiffées de structures analogues à des tumulus et assorties d'édifices cultuels ; cette architecture a sans doute annoncé les complexes pyramidaux postérieurs. Cette thèse confère au pharaon un statut à part dès l'origine. Or les sépultures royales de la Iere dynastie, dans les environs de Saqqarah, sont de taille et d'architecture analogues à celles des autres élites. Ainsi a été établie la certitude que le statut royal est seulement en germe. On dispose de bien moins d'éléments sur les sépultures royales de la IIe dynastie ; il y en a deux à Abydos, auxquelles sont adjoints des complexes cultuels ; les autres se trouvent à Saqqarah.
2.2. L'Ancien Empire (2778-2420 avant J.-C., IIIe à VIe dynastie)

Djoser
Il est convenu d’organiser la succession des pharaons en dynasties. L'Ancien Empire, qui couvre un peu plus d'un demi-millénaire, en compte quatre : de la IIIe dynastie, à partir de laquelle le pouvoir royal va fortement s'accroître, à la VIe dynastie, où il s'affaiblit.
2.2.1. Les pyramides
Sphinx et pyramide de KhephrenSphinx et pyramide de Khephren
Vers 2778 avant J.-C., la IIIe dynastie et son premier souverain Djoser établissent la capitale à Memphis. L'Ancien Empire est aussi l'âge des pyramides ; c'est l'architecte Imhotep, ministre de Djoser, qui donne à l'architecture de pierre un immense développement.
La Grande Pyramide, KheopsLa Grande Pyramide, Kheops
À Saqqarah, Gizeh, Meidoum, Abousir, les tombes royales dominent encore le désert de leurs hautes masses pointant vers le ciel, immortalisant notamment les noms de Kheops, Khephren, Mykerinus.
2.2.2. L'organisation du pouvoir
Sous les IVe et Ve dynasties, le pouvoir du pharaon s'affirme ; en raison de l'importance croissante prise par l'administration, le pharaon Snefrou crée la charge de vizir, homme de confiance du roi, qui gère en son nom justice, police, armée, notamment ; à la cour memphite, une classe de favoris, hauts fonctionnaires, se développe, recherchant les grâces royales, car le roi demeure l'instance suprême de tout élément directeur de l'Égypte ; il dispose aussi du pouvoir spirituel, donnant la faveur au dieu solaire Rê, dont il se dit « le fils », et qui devient alors un véritable dieu d'État.
2.2.3. Le rayonnement de l'Égypte
L'Égypte n'est pas un pays isolé : les rapports et les échanges commerciaux sont importants avec Byblos et la Phénicie, avec Chypre, la Crète et les îles de la Méditerranée, avec le Sinaï (dont les mines ont été exploitées et mises en valeur par les Égyptiens dès les débuts de l'Ancien Empire), avec la Mésopotamie ; l'Afrique, considérée comme le prolongement naturel de l'Égypte, est reconnue jusqu'aux abords de la troisième cataracte du Nil : les territoires nubiens sous hégémonie égyptienne contribuent par leurs apports (blé, bétail, ivoire, ébène, plumes d'autruche, peaux de léopard et de panthère) à la richesse du royaume ; de grandes expéditions maritimes organisées vers le pays de Pount (l'actuelle Somalie) donnent aux Égyptiens des produits précieux (surtout les arbres à encens).
2.2.4. Le déclin à partir de la VIe dynastie
Sous la VIe dynastie (→ Teti, Pepi Ier, Pepi II), la toute-puissance du pharaon est menacée par la montée d'une oligarchie (courtisans et favoris, hauts fonctionnaires de province) et peut-être par l'opposition de couches populaires. L'obscurité règne sur la période qui sépare la fin de la VIe dynastie de l'avènement de la XIe, dont les historiens font traditionnellement le point de départ du Moyen Empire ; le pouvoir n'est cependant pas demeuré vacant et les noms de certains pharaons nous sont connus. Le désordre social est certain pendant une période relativement longue, mais on en connaît mal les causes.
2.3. La première période intermédiaire (2420-2160 avant J.-C.)

Durant plus de deux siècles alors, on émet l’hypothèse d’une révolution sociale qui livre le pays à l'anarchie, à la récession économique, à la famine, aux infiltrations étrangères, sous les VIIe et VIIIe dynasties memphites, notamment. On pense qu’au cours de la première période intermédiaire, les pharaons de Memphis sont impuissants à empêcher les gouverneurs militaires locaux de livrer bataille pour le contrôle de territoires. Deux royaumes distincts finissent par se constituer, l'un sous la domination des IXe et Xe dynasties de Héracléopolis ; l'autre, quasi contemporaine, sous celle de la XIe dynastie de Thèbes. Ils se disputent l'hégémonie mais se heurtent à l'autonomie des gouverneurs de province.
2.4. Le Moyen Empire (vers 2160-vers 1785 avant J.-C., XIe à XIVe dynastie)

2.4.1. L'unité retrouvée
L'unité est reconstituée par les princes de Thèbes, les Antef, qui fondent la XIe dynastie et inaugurent le Moyen Empire (2160-vers 1785 avant J.-C.). Cette dynastie, qui a pour capitale Thèbes et pour souverains les Antef et les Montouhotep, donne, pour la première fois, la primauté religieuse au dieu thébain Amon. Avec la XIIe dynastie, celle des Amenemhat et des Sésostris – dont la capitale est sise, de nouveau, plus au nord, à Licht (près de Fayoum) –, la monarchie, centralisée, retrouve sa puissance, patronnée par le dieu d'État, Amon-Rê (dont la personnalité divine résulte d'un compromis entre le clergé de Thèbes et celui d'Héliopolis).
2.4.2. L'organisation de la société
Les bouleversements sociaux sont considérables. Autour du pharaon (ressenti désormais comme « le bon berger » du peuple, médiateur officiel entre les dieux et les hommes) se rassemble une société plus différenciée. Les sujets ont une conscience accrue de leurs droits individuels. La religion en est affectée : les croyances et les rites funéraires, jusqu'alors apanage des pharaons, se diffusent dans toutes les couches de la société. Sous la XIIe dynastie, la politique royale favorise même l'émergence d'une classe moyenne aisée (scribes, artisans, etc.) qui joue un rôle actif dans des centres cultuels tels que celui d'Abydos.
Dans le domaine idéologique, le Moyen Empire est marqué par une évolution fort importante : le développement du culte d'Osiris permet désormais à tout homme (et non au roi seul) l'accession à l'éternité, s'il reproduit les rites qui ont présidé à la passion et à la résurrection du dieu.
2.4.3. La protection du royaume
La région du Fayoum est systématiquement mise en valeur, cependant qu'est instaurée une politique de défense des frontières. Au nord-est, il faut avant tout, d'une part, mettre le Delta à l'abri des incursions des Asiatiques – qui, après la VIe dynastie, constituent un réel fléau – et, d'autre part, assurer la liberté du commerce pour les villes de Basse-Égypte. Pour assurer la protection de la voie de terre Amenemhat Ier fait construire sur la frontière orientale du Delta une série de forteresses, les « Murs du Prince », qui, pourvues de garnisons permanentes, protègent le royaume. Au sud, la pénétration en Afrique se développe et s'organise : une administration « coloniale » est créée, en même temps qu'est construite la ville de Bouhen (deuxième cataracte), qui devient le siège du vice-roi d'Égypte ; des forteresses égyptiennes jalonnent désormais le cours du Nil, en Nubie et au Soudan.
À partir de 1900 avant J.-C., des invasions progressives de peuples indo-européens, venus des régions de la mer Caspienne et de la mer Noire, vont « remodeler » la carte du Proche-Orient, entraînant la création de puissants États asiatiques : le Hatti (terre des Hittites, sur les plateaux d'Anatolie), le Mitanni (dans les hautes vallées du Tigre et de l'Euphrate), cependant qu'une dynastie nouvelle s'installe à Babylone.
2.5. La deuxième période intermédiaire (vers 1785-vers 1580 avant J.-C., XVe à XVIIe dynastie)

Les populations autochtones, chassées par ces invasions, fuient vers le sud, refluant jusqu'en Égypte, où, sous le nom de Hyksos, elles vont d'abord s'installer dans le nord-est du Delta, autour de la ville d'Avaris. Favorisés par la faiblesse des XIIIe et XIVe dynasties indigènes, les Hyksos, devenus puissants grâce à l'arrivée de nouveaux contingents d'Asiatiques refoulés, conquièrent peu à peu le royaume, sans toutefois étendre réellement leur pouvoir sur la Haute-Égypte ; ils règnent durant les XVe et XVIe dynasties. Les princes thébains mettent fin à cette seconde deuxième intermédiaire en entreprenant une guerre de libération. Les pharaons Kames, puis Ahmosis chassent les Hyksos, prennent Avaris, poursuivant l'ennemi jusqu'à Sharouhen.
2.6. Le Nouvel Empire (1580-1085 avant J.-C., XVIIIe à XXe dynastie)

 L'âge d'or de la monarchie pharaonique
Le Nouvel Empire qui commence alors, et dont la capitale est fixée à Thèbes (palais royal à Louqsor), est l'âge d'or de la monarchie pharaonique. Les Aménophis, les Thoutmosis, Seti, Mineptah, les Ramsès œuvrèrent pour la grandeur de leur terre.
C'est une période de luxe, caractérisée par une intense activité artistique : Karnak (sur la rive droite du Nil) devient une aire architecturale immense où se succèdent, jusqu'à l'époque romaine, les constructions grandioses entreprises pour la gloire du dieu Amon-Rê, notamment ; les hypogées royaux et privés sont creusés sur la rive gauche (Vallée des rois, Vallée des Reines).
La XVIIIe dynastie, celle des Thoutmosis et des Aménophis, connaît trois entorses à l'ordre des successions royales. La première est le règne d'une reine, Hatshepsout, qui exerce la régence pendant l'enfance de son neveu, le futur Thoutmosis III ; elle se proclame pharaon et gouverne une vingtaine d'années. Après sa mort, Thoutmosis s'acharne à effacer toutes les traces de son règne, faisant abattre des obélisques et défigurer ses monuments ; il va jusqu'à détruire l'un des plus beaux temples de toute l'histoire égyptienne, celui qu'Hatshepsout avait fait édifier à Deir el-Bahari.
La deuxième entorse est le bref règne du jeune Toutankhamon ; la troisième est, à la mort de ce dernier, l'usurpation du pouvoir pharaonique par Horemheb, un simple général. Son règne met un terme à la dynastie.
Les XIXe et XXe dynasties, celles des Seti et des Ramessides (Ramsès Ier à Ramsès XI), participent également à la gloire militaire et au rayonnement culturel de la monarchie pharaonique.
 La politique extérieure
Sous ces trois dynasties, qui gouvernent l'Égypte pendant près de cinq siècles, la politique extérieure est remarquable. La reconquête de la haute Nubie, celle de la Palestine, les interventions dans les affaires du Proche-Orient constituent une constante.
Le pharaon, dont le royaume est menacé maintenant par les États puissants qui viennent de se constituer au Proche-Orient, devient, pour la défense de son pays, un grand conquérant : créant et organisant un vaste empire, pratiquant aussi une véritable politique internationale menée par une diplomatie nouvelle, importante, avisée. Thoutmosis III, en 17 campagnes militaires (relatées par le texte des Annales sculptées dans le grand temple d'Amon-Rê à Karnak), dénoue la dangereuse coalition liée par le Mitanni, et Aménophis II s'allie finalement avec ce pays.

Ramsès II, Temple d'Abu-SimbelRamsès II
Ramsès II abat la puissance hittite (bataille de Qadesh) et les deux États concluent aussi une alliance (dont le texte a été retrouvé dans les archives égyptiennes et hittites). Mineptah et Ramsès III luttent contre les invasions des peuples du Nord et de la mer (vaste ligue, constituée par les populations côtières de l'Asie Mineure et par les Achéens, chassés de leurs terres, les uns par de nouvelles invasions indo-européennes venues du nord, les autres par l'arrivée des Doriens en Grèce, et tous en quête d'un nouvel habitat) : vainqueur sur terre et sur mer (bataille navale dans les bouches du Nil), Ramsès III maintient l'intégrité de son royaume. Les rois du Nouvel Empire doivent aussi lutter contre d'autres dangers venus de l'Assyrie et de la Libye. Au sud, leur pouvoir s'étend jusqu'au-delà de la quatrième cataracte du Nil. Les territoires africains conquis sont maintenus sous régime « colonial », administrés par des fonctionnaires égyptiens, cependant que les territoires asiatiques sous hégémonie (celle-ci s'étendant jusqu'à l'Euphrate, officiellement, mais pratiquement jusqu'à l'Oronte) connaissent une organisation qui respecte les pouvoirs locaux, établissant seulement un certain nombre de « devoirs », notamment le paiement de redevances.
 Un pouvoir centralisé
La transformation de l'ancien système de vassalité des Hyksos en une autocratie centralisée est d'une plus grande portée. Les grandes armées royales, qui avaient été levées en vue des guerres contre les pays étrangers, intimident les pouvoirs rivaux ; l'administration est rationalisée, et un Premier ministre nommé à la tête de chacune des parties de l'Empire. En l'absence de conseil et de parlement, toutes les nominations et les révocations émanent directement des pharaons, qui entreprennent souvent des voyages d'inspection.
 Le Ka divin du pharaon
Le pharaon est encore doté d'une double nature, humaine et divine, ce dernier aspect étant alors très valorisé. Le dogme impérial enseigne que chaque pharaon est possédé par le ka divin, qui désigne les énergies vitales dans leurs fonctions créatrice et conservatrice ; Horus est, selon la mythologie, le dernier dieu à avoir gouverné la terre dans la nuit des temps, et que l'on identifie à Amon-Rê. Ce dieu, qui figure l'alliance de la divinité thébaine avec le dieu solaire, est la divinité tutélaire de l'Empire.
 Le clergé
Akhenaton
Le clergé d'Amon, enrichi par les dons royaux (recevant notamment une part du butin recueilli lors des campagnes militaires), devient une puissance dangereuse ; à partir de la XIXe dynastie, il dispose de grands domaines, de milices privées, de tribunaux spéciaux. La réaction d'Aménophis IV contre l'ingérence amonienne dans les affaires de l'État (instauration du culte unique du disque solaire Aton, suppression des clergés, notamment) fut de courte durée ; pour diminuer l'importance prise par Thèbes, les Ramsès établissent une seconde capitale, dans le Delta, près de Tanis.
Le déclin
À la fin de la XXe dynastie, le développement de la corruption, le danger que représente le clergé d'Amon, les prétentions au pouvoir des chefs militaires étrangers (Libyens, notamment) finissent par affaiblir le pouvoir central : on pille les tombes royales, on complote contre le pharaon. Le Nouvel Empire se termine par une guerre civile sous Ramsès XI.
2.7. La Basse Époque (v. 1085-v. 333 avant J.-C. ; XXIe à XXXIe dynastie)

Influences et dominations
Vers 1085 avant J.-C., Smendès (originaire de Tanis) fonde la XXIe dynastie, qui gère le Delta, cependant qu'une souveraineté parallèle s'installe à Thèbes, avec Herihor, grand prêtre d'Amon et premier des rois-pontifes. La scission semble consommée. C'est le début de la Basse Époque, durant laquelle règnent plusieurs dynasties étrangères, dans le pays livré aux invasions. La XXIIe dynastie, d'origine libyenne (les Sheshonq, Osorkon, Takélot), règne, à Bubastis, en même temps que la XXIIIe dynastie installée à Tanis (Pedoubast) ; le Delta aussi est divisé.
Il est possible que, lors de l'avènement de Sheshonq Ier, une partie du clergé amonien ait alors fui à Thèbes et se soit réfugié au Soudan à Napata, où il aurait implanté le culte d'Amon et construit un temple grandiose pour ce dieu ; en tout cas, le roi de Napata, Piankhi (descendant de Herihor ?), vers 750 avant J.-C., remonte le fleuve jusqu'à Thèbes et étend son pouvoir sur la Haute-Égypte. Le Delta est alors administré par la XXIVe dynastie, indigène de Saïs (Tefnakht et Bocchoris).
Vers 715 avant J.-C., Shabaka établit le pouvoir soudanais en Égypte avec la XXVe dynastie, et les rois du Sud, pour renforcer leur mainmise, placent leurs parentes comme « divines adoratrices d'Amon » (épouses du dieu) à Thèbes ; mais les rois locaux de Basse-Égypte ne se soumettent pas.
La civilisation saïte
Vers 671 avant J.-C., Assarhaddon et les Assyriens font du Delta un protectorat de Ninive ; Assourbanipal descend le fleuve à deux reprises jusqu'à Thèbes. La seconde fois, il fait saccager la grande ville. Mais Psammétique Ier, roi de Saïs, chasse les Assyriens de Basse-Égypte et les Soudanais de Haute-Égypte, et instaure la XXVIe dynastie, égyptienne ; jusqu'en 525 avant J.-C., on assiste à un renouveau national.
 La domination perse
Vers 525 avant J.-C., le roi perse Cambyse s'empare de toute l'Égypte et, jusqu'à Darios II (vers 404 avant J.-C.), la XXVIIe dynastie sera formée par les souverains achéménides, le pays étant devenu une satrapie du vaste empire des Darios et des Xerxès. Appuyé par les Grecs, le roi de Saïs, Amyrtée, chasse les Perses et fonde la XXVIIIe dynastie (404-398 avant J.-C.) ; il mène de nouveau une politique nationale, comme ses successeurs les rois de la XXIXe dynastie (398-378 avant J.-C.) et de la XXXe (378-341 avant J.-C.), celle-ci étant la dernière des dynasties indigènes ; vers 341 avant J.-C., en effet, Nectanebo II ne peut résister à une nouvelle invasion et empêcher une seconde domination perse (341-333 avant J.-C.). La défaite de Darios III Codoman, à Issos puis à Gaugamèles (333 et 331), laisse le pouvoir à Alexandre de Macédoine, qui pénètre alors en Égypte.
3. La religion de l'Égypte pharaonique

Louqsor, peinture de la tombe de SenedjemLouqsor, peinture de la tombe de Senedjem
Dans l'Égypte primitive, la religion est essentiellement locale : chacun honore le dieu de sa bourgade, puis celui qui règne sur la métropole de sa province, ou nome. Les nomes possèdent des « enseignes », symboles de divinités représentant des animaux, des plantes ou des objets.
L'Égypte (comme tous les peuples de l'Antiquité) divinise les forces de la nature et les éléments (animés ou non) de l'univers créé, pour rendre hommage à leurs bienfaits ou se concilier leur éventuelle agressivité, établissant ainsi entre eux un courant d'« échanges », un lien, à vertu magique.
3.1. Les principaux dieux

Horus
Sont ainsi adorés Khnoum (le bélier, l'animal reproducteur du troupeau, dieu créateur par excellence), Hathor (la vache, féconde et nourricière – assimilée au ciel, lien fécond de l'univers, parce que donneur de lumière et de chaleur –, déesse donc aussi de la joie et de la danse), Sebek (le crocodile, qui guette sa proie tapi dans l'eau du fleuve), Anubis (le chacal, qui deviendra le divin embaumeur, très tôt mis en rapport avec le monde des défunts car l'animal hante toujours les abords des nécropoles en quête de possibles nourritures), Horus (le faucon, assimilé souvent au ciel ou au soleil, car, ailes largement étendues, l'oiseau qui plane semble se confondre avec l'étendue céleste), Min (dieu humain de la fertilité), Ptah (dieu de Memphis, première capitale de l'Égypte), etc. Chacune de ces divinités est adorée principalement dans une ville (parfois plusieurs) et est ressentie comme netjer, « le dieu », pour ses fidèles. Deux grandes forces bénéfiques de la nature sont particulièrement révérées : le soleil, Rê, qui donne et entretient la vie de chaque jour, et Osiris, dieu du Nil et de la végétation toujours renaissante, le dieu qui, par sa passion et sa résurrection, donne aux hommes l'exemple et les « moyens » de la vie éternellement renouvelée.
3.2. Les syncrétismes

Les vicissitudes de la politique créent les premiers syncrétismes nationaux et déterminent l'existence de dieux d'État (sommets du panthéon, comme le roi est celui de la société) : Rê, sous l'Ancien Empire, acquiert, à partir de son centre culturel d'Héliopolis (près de Memphis), une valeur nationale ; le roi, dieu lui-même, est son fils. Au Moyen et au Nouvel Empire, Amon de Thèbes (nouvelle capitale) « coiffe » les autres divinités, qui sont officiellement ses hypostases, mais s'allie avec le puissant Héliopolitain : Amon-Rê qui est alors le maître divin de l'Égypte.

Osiris
Des syncrétismes religieux internationaux se développent aussi au Nouvel Empire, période des grandes conquêtes en Asie. La confusion des divinités justifie alors et légitime la conquête : Amon-Rê et Shamash (dieu solaire babylonien) sont assimilés, Osiris, Baal et Adonaï sont mêlés en une même foi dans la vitalité des forces végétantes, Ptah prend pour parèdre Ashtart (déesse mère de l'Asie antérieure) ; Sontekh (l'Asiatique) et Seth (l'Égyptien, dieu des forces néfastes et hostiles) confondent leur puissance guerrière.
3.3. Le clergé

Pour le service des dieux et des morts, des clergés, d'importance diverse, se constituent. Dans les temples divins, le roi – théoriquement, officiant unique – délègue son pouvoir à des prêtres. Un service quotidien est assuré : sortie, toilette et purification, nourriture de la statue divine, sous forme de riches offrandes alimentaires. Militants, les prêtres composent des systèmes théologiques où leur dieu est le créateur du monde : Ennéade héliopolitaine, Ogdoade hermopolitaine (menée par le dieu-ibis Thot), système « intellectuel » de Memphis, autour de Ptah. Gérants des biens du dieu, les prêtres possèdent souvent une grande richesse temporelle, notamment le clergé thébain d'Amon-Rê, enrichi par les dons royaux (butin rapporté des campagnes militaires, octroi de terres). Ainsi, ils peuvent parfois concurrencer, voire menacer la puissance politique du pharaon lui-même : des querelles d'influence naissent, des discussions sont apparentes, la « guerre » larvée entraîne peu à peu la réforme d'Aménophis IV à Amarna, mais vaut aussi aux rois-prêtres de la XXIe dynastie l'accès aux fonctions royales.
3.4. Les rites funéraires

Momie de Ramsès IIMomie de Ramsès II
Les prêtres funéraires s'activent à maintenir la vie du défunt dans les temples funéraires royaux et les tombes privées ; la survie du corps étant garantie par la momification, tout un appareil funéraire est encore indispensable. Les prêtres (qui remplissent, dans cet office, le rôle du fils aîné) apportent, chaque jour, les offrandes alimentaires nécessaires à l'entretien de la force vitale, ou ka (l’esprit), du mort. La vie étant ainsi maintenue sous les épaisses bandelettes qui enserrent le corps, il faut aussi recouvrer la liberté du mouvement et la possibilité de revivre le quotidien ; élément ailé de l'être, le ba (oiseau à tête humaine), s'échappant du corps étendu, s'en va chercher sur terre les souffles vivificateurs et, à tire-d'aile, revient ainsi revigorer le défunt.
→ momie.

Livre des morts
Cette survie en deux temps est encore insuffisante : l'Égyptien fabrique alors des « corps de rechange » sculptés en ronde bosse ou en bas relief (à la ressemblance du personnage), et dans lesquels peut se glisser le ba (l’âme) qui les réanime, pour une reprise des habitudes du temps de vie (de là, la grande imagerie des tombes, qui reproduit les scènes de la vie quotidienne) ; l'art devient ainsi le médiateur de l'immortalité. Enfin, pour le voyage dans l'au-delà, la connaissance des formules est indispensable (notamment lors du jugement par-devant Osiris) ; c'est la fonction (au Nouvel Empire) des papyrus du « Livre des morts », destinés à guider efficacement le défunt dans l'autre monde.

Isis sous l'apparence d'HathorIsis sous l'apparence d'Hathor
Religion de la tolérance et de l'espérance, la religion égyptienne s'inscrit dans l'ensemble des grandes religions panthéistes de l'Antiquité, qu'elle a fortement influencées. À l'époque tardive, elle essaime dans le monde clanique ; le culte d'Isis (l'épouse d'Osiris, magicienne de la résurrection) fleurit en Grèce, à Rome et dans tout le monde méditerranéen. Cette religion est d'une haute valeur morale, où la soumission au dieu, le respect des principes de paix et de charité sont essentiels. La déesse Maât, déesse de la Vérité et de la Justice (seuls principes abstraits déifiés), est le garant de l'ordre de l'univers.
4. L'Égypte hellénistique (332-30 avant J.-C.)

4.1. D'Alexandre aux Lagides

L'Égypte est libérée de la domination perse par la conquête d'Alexandre. Soumise à l'autorité des souverains hellénistiques, ses successeurs, elle appartient désormais au monde grec.
Dans son court séjour (automne 332-printemps 331 avant J.-C.), Alexandre le Grand se pose en libérateur et, laissant aux indigènes leurs lois, il s'assure la bienveillance des prêtres en faisant reconnaître sa filiation divine au temple d'Amon, en l'oasis de Siouah. Il fonde Alexandrie, qui doit être le débouché maritime d'un pays jusque-là replié sur lui-même. Après sa mort (323 avant J.-C.), ses généraux attribuent la satrapie d'Égypte à un noble macédonien Ptolémée, fils de Lagos, qui se proclame roi en 305 avant J.-C., fondant la dynastie des Lagides (ou Ptolémées ; 305-30 avant J.-C.). Ces souverains, qui ajoutent au nom dynastique Ptolémée un surnom personnel, ont une histoire des plus agitées. À l'imitation des pharaons, ils épousent leur sœur et les intrigues familiales sont nombreuses à partir du règne de Ptolémée IV, affaiblissant la dynastie, que ne peuvent sauver quelques reines particulièrement énergiques (ainsi Cléopâtre VII). La dynastie possède également Cyrène, Chypre, un grand nombre d'îles grecques et de villes littorales d'Asie Mineure ou de l'Hellespont ; elle dispute aux Séleucides la Syrie, débouché des routes du commerce oriental vers la Méditerranée et région productrice de ce bois qui manque à l'Égypte pour ses constructions navales.
4.2. La vie et la société à l'époque ptolémaïque

La domination des Lagides sur l'Égypte est de type colonial : les indigènes sont écartés de toute charge importante ; l'administration ou plutôt l'exploitation du pays est le fait d'étrangers privilégiés qui appartiennent à la race des conquérants hellènes (Macédoniens ou Grecs) ou qui ont acquis par leurs vertus militaires droit à un statut spécial (Perses, Juifs). Cela est d'autant plus mal ressenti des Égyptiens que le recrutement des allogènes est insuffisant pour assurer la puissance des armées lagides : il a fallu en 217 avant J.-C. (malgré tous les avantages dont bénéficiaient les soldats royaux, en particulier la concession en quasi-propriété de terres) engager des troupes égyptiennes pour lutter contre les Séleucides et les vaincre (bataille de Raphia).
Cette date marque le début de nombreuses révoltes qui déchirent le royaume (la Haute-Égypte a maintenu son indépendance, sous l'autorité de dynastes locaux, durant de très longues années). La mégalopole d'Alexandrie est agitée par des querelles entre les groupes ethniques, Grecs, indigènes plus ou moins hellénisés ou Juifs, ceux-ci, nombreux, s'administrant eux-mêmes dans leur quartier réservé. Bien que constituant une caste privilégiée, les Grecs n'échappent pas au pouvoir absolu des rois. Conservant leurs coutumes, leur genre de vie (fréquentation du gymnase, éphébie) et l'usage de leur langue, jugés selon le droit grec, ils sont essentiellement regroupés dans trois cités (Alexandrie, Ptolémaïs et Naukratis) pourvues d'institutions grecques traditionnelles, mais qui ne leur donnent qu'une apparence de libertés. Fonctionnaires ou militaires, ils assurent l'encadrement de la population indigène, au sein d'une administration pléthorique, très minutieuse et tatillonne : les archives, écrites sur papyrus, montrent avec quel soin est traitée la moindre affaire ; grâce à elles, on peut connaître avec assez de précision l'organigramme du système étatique.
L'unique fonction de cette administration est de faire entrer dans les caisses royales la plus grande partie des produits de l'activité de tous les habitants du royaume entre dans les caisses royales ; les souverains veulent amasser le plus possible, ce qui implique la mise en œuvre de techniques diverses : les fonctionnaires sont rendus financièrement responsables des effets de leur administration, on multiplie les monopoles. Le mieux connu de ces derniers, celui de l'huile, implique une politique douanière dissuasive ; le monopole de la monnaie, qui est de règle dans les monarchies hellénistiques, s'accompagne de la mise en service d'un numéraire fiduciaire qui permet au roi de contrôler parfaitement la circulation du métal précieux. L'exploitation des monopoles est confiée à des fermiers.
Si les prêtres détenteurs de secrets prestigieux continuent d'assurer le culte royal et sont comblés par le nouveau pharaon de privilèges qui récompensent leur action pour lui assurer la fidélité des masses, les autochtones sont pressurés par le régime. Le plus souvent ce sont des paysans ; ils louent au roi (seul propriétaire de la totalité du sol égyptien) des tenures sur lesquelles ils sèment (le roi est seul habilité à prêter des semences, il se fait rembourser principal et intérêts) en fonction d'un plan de culture établi par l'État (parcelle par parcelle, l'administration fixant la nature des cultures à réaliser), avant de récolter (si le Nil atteint un niveau suffisant) et de vendre le produit. Au prix fixé par le roi, outre le loyer de la terre, l'intérêt de l'emprunt, il faut aussi ajouter les impôts. Quand la situation devient trop difficile pour les paysans, ils font grève en fuyant vers les confins désertiques (anachorète), et les champs royaux restent en friche. Privée des ressources procurées par tel ou tel terrain, l'administration doit en venir à des mesures de coercition plus efficaces ou accorder (ce qui affaiblit la monarchie) des privilèges nouveaux à qui voudra bien se charger de telle ou telle exploitation.
 Une monarchie prestigieuse
Grecs et indigènes vivent dans deux communautés complètement séparées (ou presque). À l'obstacle de la langue s'ajoute le fait que chacune a un régime juridique différent ; leur seul point commun est de vivre au service exclusif de la monarchie. De leurs immenses richesses les rois tirent un prestige qui leur permet de mener en Méditerranée une politique active (Ptolémée III ira jusqu'en Babylonie), d'attirer à Alexandrie, pour des fêtes célébrées à la gloire de la dynastie (les Ptolemaia, dont l'importance sera égale à celle des concours olympiques), des foules énormes de dépendants, d'apparaître un temps comme les maîtres du jeu dans le monde hellénistique. Ptolémée Ier aura le très grand mérite de vouloir aussi fonder sa gloire sur les services rendus au développement de la culture grecque : à Alexandrie (d'où les Égyptiens étaient exclus) il rassemble dans le Musée les savants les plus remarquables (Archimède, Ératosthène, Euclide, Héron), des hommes de lettres de qualité (Apollonios de Rhodes, Callimaque), des érudits au dévouement et à la science inlassables (Aristarque), et les dote d'une bibliothèque extraordinairement riche. C'est grâce à la dynastie que nous connaissons Homère, les tragédies d'Eschyle ou de Sophocle ; par elle sera transmise aux savants arabes la science d'Aristote, des mathématiciens et des médecins hellénistiques.
Le protectorat romain
En 168 avant J.-C., le roi séleucide Antiochos IV est sur le point de s'emparer d'Alexandrie et de détrôner les rois lagides quand Rome, pour maintenir l'équilibre du monde hellénistique, envoie Popilius Laenas remettre en selle Ptolémée VI. Le grand royaume devient alors une sorte de protectorat romain à la tête duquel se succèdent des fantoches (Ptolémée XII Aulète), tandis que les Romains annexent Cyrène (74 avant J.-C.) et Chypre (58 avant J.-C.). Par sa passion pour Cléopâtre VII, Antoine se met au service des intérêts de la dynastie, et rêve pour ses enfants (Cléopâtre Silène II et Ptolémée Philadelphe) d'un nouvel empire de l'Orient, mais, vainqueur (30 avant J.-C.), Octave annexe le pays du Nil.
5. L'Égypte romaine (30 avant J.-C.-395 après J.-C.)

Les hommes politiques romains ont depuis longtemps décelé les faiblesses internes de la monarchie lagide, qui se cachent derrière une façade brillante. C'est pourquoi Octave, en prononçant l'annexion, en 30 avant J.-C., ne fait que concrétiser leurs aspirations. Il prend des mesures originales : l'entrée de l'Égypte est interdite aux sénateurs, même s'ils y possèdent des domaines ; c'est la seule province importante où l'empereur est représenté par un personnage de rang équestre, le préfet d'Alexandrie et d'Égypte, qui a par ailleurs les pouvoirs d'un légat propréteur ; autre anomalie, les légions sont commandées par des préfets également de l'ordre équestre. On a émis l’hypothèse qu'Auguste ne tenait pas à ce que les sénateurs voient le princeps honoré comme un pharaon, dans ce pays dont le régime ne ressemble pas à celui du reste du monde romain.
5.1. Vie et société sous domination romaine

Gouvernement, administration, exploitation économique sont calqués sur les méthodes des Lagides. Auguste se contente de réprimer les abus apparus avec l'affaiblissement de la dynastie macédonienne : il aurait supprimé, ou peut-être réduit, la terre concédée aux temples, la participation de l'État aux frais du culte et les grands domaines usurpés sur la terre royale auraient été repris. Pour mieux régner, l'empereur divise : il maintient le système des castes ; les indigènes, considérés comme « déditices » (peuple soumis), ne peuvent accéder à la cité romaine. Il refuse à la province l'occasion de s'unir en célébrant le culte impérial, qui n'existe ici que sous la forme municipale. Il installe 3 légions et 12 corps auxiliaires (23 000 hommes au total) pour surveiller Alexandrie ou les campagnes turbulentes de la Thébaïde. Pour suivre la tradition locale, on recrute les soldats dans les ex-castris (hors du camp), ce qui ne se fait nulle part ailleurs. Il ne semble pas que les Romains, qui restaurent sans cesse le système d'irrigation, aient tiré de l'Égypte plus que les Lagides : l'annone nourrit assez régulièrement les Romains quatre mois par an avec le blé égyptien, mais, les mauvaises années, la disette se fait sentir sur les bords du Nil. Pour l'Égypte, le changement de domination n'a pas produit de grands effets : les dirigeants sont maintenant des Romains, mais le grec reste la langue officielle ; la monnaie de compte (différente de celle du reste de l'Empire) est toujours la drachme. Les papyrus grecs, démotiques, encore plus nombreux que sous les Lagides, les ostraca, les règlements (comme le « Gnomon de l'Idiologue », code fiscal de l’Égypte romaine) témoignent de cette continuité : recensements, contrôles, réclamations.
Quelques faits pourtant se détachent dans l'histoire de ces premiers siècles de notre ère. Le voyage en Inde devient plus facile lorsque le navigateur alexandrin Hippalos découvre la mousson : chaque année, cent vingt vaisseaux partent des ports de la mer Rouge pour aller chercher les soieries, les perles et les parfums de l'Inde, et l'importance commerciale d'Alexandrie, qui redistribue ces denrées précieuses est encore accrue.
La communauté juive d'Alexandrie est en fermentation depuis longtemps : ces Juifs, qui ne parlent plus que le grec, ont généralement gardé leurs traditions (par la Bible des Septante), et le cas du philosophe juif Philon, qui tente une interprétation platonicienne de la Bible, n'est pas courant. L'antisémitisme se développe : sous Claude, déjà, des heurts éclatent entre Grecs et Juifs d'Alexandrie. Le soulèvement général des Juifs en 66 aurait coûté la vie à 50 000 de ceux-ci à Alexandrie ; celui de 117 aurait fait 240 000 victimes. Les empereurs essaient d'augmenter le rendement de leurs propriétés ; ils confisquent les grands domaines, utilisent la concession emphytéotique, pour retenir les paysans. Ils semblent devenus plus généreux à l'égard du clergé, et les temples de Philæ, d'Esnèh sont terminés au iie s. Le Musée est toujours subventionné, et la science alexandrine jette un dernier éclat avec Ptolémée (sous Hadrien) et l’historien Appien (à l'époque d'Antonin).
Septime Sévère, pour assurer la rentrée des impôts, établit le régime des curies dans les villes, et Alexandrie reçoit une boulê (assemblée) ; Coeranus est le premier Égyptien à entrer au sénat (vers 210). Déjà le commerce avec l'Extrême-Orient décline : Rome a épuisé le stock métallique qui permettait ces échanges. Vers 250, les Blemmyes, des Éthiopiens, envahissent les districts frontières et coupent les routes du Nil à la mer Rouge, sans doute moins bien défendues : depuis le iie s., il n'y a plus qu'une légion en Égypte. La méfiance des empereurs amène des transformations administratives, et, au ive s., le pays fait partie du diocèse d'Orient et dépend du comte qui réside à Antioche, mais il garde un préfet qui surveille les gouverneurs des provinces.
5.2. L'Égypte chrétienne

Le Christ et saint MenasLe Christ et saint Menas
Le christianisme a dû pénétrer d'abord dans la communauté juive d'Alexandrie, et il est sans doute à l'origine des troubles qui s'y produisent sous Claude. Par la suite, sa diffusion semble avoir été facile chez un peuple aussi déshérité, et, dès le iiie s., il a conquis la majorité de la population. Les Égyptiens, que les Anciens voyaient comme les plus religieux des hommes, apportent un caractère original à la nouvelle religion avec l'érémitisme et le monachisme. Saint Antoine (250-356) est le premier anachorète chrétien ; installé dans le désert, il attire des disciples, qui vivent comme lui dans des cabanes isolées. Vers 320, saint Pacôme fonde un koinobion (centre de vie commune) à l'ouest de Thèbes, où il groupe 2 500 moines. Sa sœur Marie fonde le premier couvent de femmes. L'Égypte chrétienne, qui en adoptant l'écriture copte entend préserver sa culture nationale, n'a pas renié le centre intellectuel d'Alexandrie. Au iie s., Pantène, philosophe converti, oppose au Musée l'école des catéchètes. Saint Clément, son élève et son successeur (vers 190), présente le christianisme comme la forme supérieure de la gnose (gnosticisme). Il doit fuir la persécution (202) et l'évêque Démétrios le remplace par le jeune Origène, qui mêle hellénisme et culture biblique jusqu'au jour où il est déposé et forcé de s'éloigner (vers 230). La fin du iiie s. est marquée par des querelles sur la nature du Christ ; le prêtre Arius, d'Alexandrie, qui a nié la divinité du Christ, est excommunié par l'évêque Alexandre (323), puis par le concile de Nicée (325). Le successeur d'Alexandre [à Alexandrie], saint Athanase (328-373), passe sa vie à lutter contre l'arianisme et les empereurs, qui le chassent de son diocèse. Enfin Théodose se prononce contre la doctrine d'Arius (379) et l'Égypte s'apaise.
Les païens n'ont pas voulu s'avouer vaincus. À la fin du iie s., le philosophe Ammonios Sakkas, qui abandonne le christianisme, fonde à Alexandrie l'école néoplatonicienne, et a pour disciples Origène et Plotin. L'école maintient ses traditions intellectuelles jusqu'au jour où les violences de la foule chrétienne en imposent la fermeture (415). Le culte païen est interdit par Théodose en 392.
6. L'Égypte byzantine (395-642)

L'Égypte fait partie de l'empire d'Orient jusqu'à la conquête arabe. Depuis Théodose, le préfet d'Égypte, appelé préfet augustal, a les attributions d'un vicaire dans la vallée du Nil ; les provinces sont confiées à des ducs, dont la charge essentielle est de percevoir l'impôt et de veiller à l'annone ; l'Égypte, toujours exploitée par les étrangers, ravitaille maintenant Constantinople. Malgré les efforts des empereurs, la grande propriété se développe au profit de hauts fonctionnaires.
L'Égypte présente un intérêt nouveau pour la politique extérieure. Partis de son territoire, des missionnaires ont évangélisé le royaume éthiopien d'Aksoum et le pays des Himyarites (Yémen). Byzance compte sur ces deux peuples pour se débarrasser du contrôle des Sassanides sur la route de l'Inde, mais l'Égypte est trop excentrique, les menaces d'invasion sont trop nombreuses ailleurs pour que l'on songe longtemps à une expédition navale au-delà de la mer Rouge. Malgré son nom, Cosmas Indikopleustês (« le navigateur vers l'Inde »), auteur de la Topographie chrétienne de l'univers (vers 550), n'a pas dépassé les ports d'Arabie. Le rôle d'Alexandrie décline donc au profit des ports syriens, où aboutissent les caravanes venues d'Extrême-Orient.
Si l'empereur continue à exploiter le pays, il est loin d'y exercer une autorité sans partage. L'Égypte byzantine est avant tout une Égypte chrétienne. Le nouveau pharaon, comme disent ses adversaires, c'est l'évêque d'Alexandrie ; depuis le concile de Constantinople (381), il est reconnu comme patriarche, supérieur aux autres évêques d'Orient, désignant et installant à plusieurs reprises les évêques de la capitale ; il est le seul en Orient à avoir conservé le titre de pape. Il nomme les évêques d'Égypte (une centaine) et peut compter sur un clergé nombreux et docile ; il s'appuie sur les bandes fanatiques des moines du désert, alors commandés par Chénouté, abbé du Couvent Blanc. Fort riche, il distribue l'argent à bon escient, et les fonctionnaires impériaux sont à sa dévotion.
Mais, surtout, il ressuscite à son profit l'esprit national des Égyptiens, très montés contre le pouvoir des Grecs, qui continuent à les exploiter. Maître de l'Égypte, il espère supplanter son rival de Constantinople et il peut compter sur le pape, inquiet de la puissance de l'évêque de la nouvelle capitale de l'Empire.
6.1. La querelle du monophysisme

En 404, Le patriarche d'Alexandrie, Théophile (385-412), provoque la chute de saint Jean Chrysostome, évêque de Constantinople, tandis que son successeur, saint Cyrille (412-444), fait condamner en 431 Nestorius, patriarche de Constantinople, comme hérétique (nestorianisme) : on est alors en pleine querelle christologique sur la personne et les natures du Fils.
Le patriarche Dioscore (444-451) soutient les théories de l'archimandrite Eutychès (eutychianisme), qui sont à l'origine du monophysisme (affirmant l'union du divin et de l'humain dans le Christ en une seule nature, le premier ayant abosrbé le second), et au concile d'Éphèse (449) il fait déposer Flavien, patriarche de Constantinople, qui avait condamné Eutychès.
Mais les violences exercées par des moines égyptiens à l'encontre des év^ques (à l'occasion de de concile qualifié de « brigandage) d'Éphèse », attirent l'attention du pape Léon Ier, qui redoute les prétentions d'Alexandrie. Au concile de Chalcédoine (451), Dioscore est déposé. L'Égypte n'accepte pas cette décision et adhère alors avec ardeur au monophysisme, parce qu'il est condamné par Constantinople.
Pendant deux siècles environ, le monophysisme devient alors le symbole de la résistance nationale et religieuse de l'Égypte à l'autotité de Byzance. De nombreuses persécutions à l'encontre de l'Église égyptienne s'en suivent mais les Coptes continuent de nommer leurs propres patriarches et la rupture donne naissance à une Église nationale qui gardera des racines profondes.
Dès 457, Alexandrie se soulève et le patriarche chalcédonien est tué, l'usurpateur monophysite bénéficiant des luttes politiques qui se déroulent à Constantinople. À partir de 460, deux patriarches s'opposent : le patriarche melkite (royal, car le mot « impérial » est inconnu en Orient), toujours menacé par la colère populaire, et le patriarche monophysite, toujours appuyé par la majorité des indigènes. Au vie siècle, les monophysites se divisent en sectes ennemies, toutes d'accord cependant pour refuser toute compromission avec le pouvoir impérial. Cette période agitée est la grande époque de l'art et de la littérature coptes.
Au viie siècle, l'empereur Héraclius (610-641), qui a reconquis ses provinces orientales sur les Sassanides (les Perses ont occupé l'Égypte de 616 à 629), veut à tout prix rétablir l'unité de croyance. Ses édits, qui imposent aux juifs le baptême, aux sectes chrétiennes rivales la doctrine nouvelle du monothélisme, provoquent des réactions violentes, et la haine des Grecs et du pouvoir impérial est à son comble lorsque les Arabes envahissent l'Égypte.

 

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CHAMPOLLION

 

Jean-François Champollion
dit Champollion le Jeune

Jean-François ChampollionJean-François Champollion
Égyptologue français (Figeac 1790-Paris 1832).
LA VIE ET LA CARRIÈRE

Ce fils d'un libraire de Figeac grandit au milieu des livres et fait preuve d'une extraordinaire précocité. À cinq ans, il apprend à lire seul ; à onze ans, il part pour Grenoble, où il se consacre au latin, au grec, à l'hébreu, puis au copte, et, quelques années plus tard, il communique à l'académie de cette ville le plan d'un ouvrage sur l'Égypte des Pharaons (publié en 1814). De 1807 à 1809, il est à Paris, suit des cours de perse, de sanskrit, d'arabe, se penche sur une copie de la pierre de Rosette et tente d'en déchiffrer les inscriptions. Interrompant ses études parisiennes, il va occuper à Grenoble une chaire d'histoire à la faculté, chaire qu'il conserve jusqu'en 1821 (avec une interruption de 1815 à 1818), avant de retourner à Paris. Le 7 août 1809, il présente une théorie sur l'écriture égyptienne : il découvre qu'entre les hiéroglyphes et le démotique il existe une troisième écriture, l'« hiératique », déformation cursive signe pour signe des hiéroglyphes. Outre le fac-similé de la pierre de Rosette, il dispose alors de textes nombreux, notamment de ceux qui, au retour de l'expédition de Bonaparte, ont été publiés dans les luxueux volumes de la Description de l'Égypte (1809).
En mai 1821, Champollion est capable de traduire un texte démotique en hiératique pour le transposer ensuite en hiéroglyphes. Sachant que le nom d'un souverain inscrit dans le cartouche de la pierre de Rosette est Ptolémée, il déduit que ce nom est écrit phonétiquement dans le texte : p-t-o-l-m-j-s. L'année suivante, il a sous les yeux la copie lithographiée de l'inscription hiéroglyphique de l'obélisque de Philæ découverte par un collectionneur anglais, William John Bankes : l'inscription correspond à un texte grec gravé sur le socle. Il vérifie que le nom de Cléopâtre est écrit exactement tel qu'il l'a reconstitué à partir du démotique. Les deux cartouches « Ptolémée » et « Cléopâtre » lui fournissent ainsi douze lettres hiéroglyphiques différentes, base solide pour tout déchiffrement et qui lui permettra de reconnaître Alexandre, Tibère, Germanicus, Trajan. Le 14 septembre 1822, il examine les dessins d'hiéroglyphes que vient de lui envoyer d'Égypte l'architecte français Jean Nicolas Huyot : il y lit avec émotion non plus les noms de rois grecs ou d'empereurs romains de l'époque tardive, mais les noms de Ramsès (R-m-s-s) et de Thoutmôsis (Thot-m-s).
Champollion consigne ses résultats dans la fameuse Lettre à M. Dacier relative à l'alphabet des hiéroglyphes phonétiques, présentée à l'Académie des inscriptions et belles-lettres à la fin septembre 1822 : selon lui, l'élément phonétique constitue, à côté des signes idéographiques, la base de tout le système de l'écriture égyptienne. En 1824, son Précis du système hiéroglyphique précise les données de la Lettre, donne la lecture de nombreux autres noms, traduit des fragments entiers. De 1824 à 1826, Champollion visite les collections égyptologiques d'Italie, dont celle de Turin. En 1826, il est nommé conservateur du département égyptien du Louvre, puis, de 1828 à 1830, il parcourt la vallée du Nil et relève les inscriptions des monuments. Professeur d'égyptologie au Collège de France en 1831, il meurt le 4 mars 1832 d'une attaque d'apoplexie.
Son frère aîné, Jacques (Figeac 1778-Fontainebleau 1867), publia après sa mort ses Lettres écrites d'Égypte et de Nubie (1833), ses Monuments de l'Égypte et de la Nubie (1835-1845), sa Grammaire égyptienne (1835-1841), « carte de visite pour l'éternité », suivant le mot de Champollion lui-même, et le Dictionnaire égyptien en écriture hiéroglyphique (1841-1843).


LA PIERRE DE ROSETTE

Cette stèle de basalte noir, de 114 cm de hauteur sur 72 cm de largeur, fut découverte pendant l'expédition d'Égypte, au cours de l'été 1799, par un soldat de l'officier du génie Bouchard lors de travaux au vieux fort de Rosette (en arabe Rachīd, à 70 km à l'est d'Alexandrie), appelé plus tard fort Julien. Elle porte trois inscriptions : l'une, mutilée, est en hiéroglyphes ; la deuxième est en caractères démotiques ; la troisième, écrite en grec, se termine par une ligne qui indique qu'il s'agit d'un seul et même décret, pris au printemps de l'an 196 avant J.-C. par une assemblée de prêtres égyptiens réunis à Memphis, en l'honneur du roi Ptolémée V Épiphane.
Le 15 septembre 1799, le Courrier de l'Égypte, № 37, décrit la pierre et signale qu'elle donnera peut-être la clef des hiéroglyphes. Elle est transportée à l'Institut d'Égypte du Caire, où l'on fait des copies des inscriptions à destination de la France. Un peu plus tard, elle est installée à Alexandrie, chez le général de Menou, mais, lorsque celui-ci capitule (1801), la pierre est saisie par les Anglais et envoyée au British Museum, où elle se trouve actuellement.


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