Arrêt provisoire des cours pour raison médicale.

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UNE MOLÉCULE À DEUX VISAGES

 

Une molécule à deux visages


cerveau - par Alain Buisson et Denis Vivien dans mensuel n°341 daté avril 2001 à la page 16 (1139 mots) | Gratuit
Un vaisseau cérébral s'obstrue ou éclate, et, dans la partie du cerveau privée de sang, voilà les neurones qui commencent à mourir. Déboucher les vaisseaux ne suffit pas : encore faut-il stopper la mort neuronale. Mais dans quelle direction s'orienter quand l'agent bénéfique dans le premier cas se révèle néfaste dans le second ?

Les attaques cérébrales, ou « accidents vasculaires cérébraux » AVC ont un coût très lourd en matière de santé publique. En France, où 140 000 nouveaux cas sont déclarés chaque année, elles constituent la troisième cause de mortalité et la première cause de handicap. Il est établi que 25 % à 30 % des patients ayant subi une attaque cérébrale décèdent rapidement. Et, si un quart des survivants récupère sans séquelles apparentes, les autres souffrent de handicaps dont la nature et l'ampleur diffèrent selon l'étendue et la localisation de la région cérébrale affectée paralysie, déficits d'apprentissage, pertes de mémoire, troubles comportementaux et moteurs. A ce sombre constat une raison majeure : les moyens thérapeutiques susceptibles d'enrayer précocement les dégâts provoqués par un AVC semblent avoir une efficacité limitée. Et la molécule la plus prometteuse, actuellement utilisée aux Etats-Unis, a un double visage...

Manque critique. Les AVC regroupent deux types de pathologies, l'attaque ischémique* et l'hémorragie cérébrale, qui résultent respectivement de l'occlusion d'une artère cérébrale et d'une rupture de la paroi vasculaire. Dans l'un et l'autre cas, l'inadéquation entre les apports sanguins et les besoins métaboliques et énergétiques du cerveau conduit à des altérations irréversibles du métabolisme* cérébral et, à terme, à la mort des cellules nerveuses. Schématiquement, un AVC est donc constitué de deux phases : une phase vasculaire et une phase cérébrale. La phase vasculaire est caractérisée par une réduction brutale du débit sanguin cérébral au niveau de la zone en aval de l'occlusion. Cette zone est bordée d'une région, appelée pénombre, qui présente une réduction plus faible du débit sanguin cérébral : sa capacité à survivre dépend de la durée de l'occlusion. Si celle-ci se prolonge, la pénombre évolue lentement, parfois en plusieurs jours, vers une lésion totale. Par quel mécanisme ? Un neurotransmetteur, le glutamate, est massivement libéré par les neurones « ischémiés » dans l'espace extracellulaire. En résulte une activation excessive des récepteurs au glutamate situés sur les neurones voisins. Or, ces récepteurs sont des canaux permettant, quand ils sont activés, l'entrée de calcium. Lors d'un AVC, leur activation massive entraîne une telle entrée de calcium dans les neurones cibles que ceux-ci en meurent.

Les recherches visant à limiter les lésions cérébrales induites par une ischémie sont orientées selon deux stratégies principales : la première a pour but de dissoudre le caillot à l'origine de l'occlusion artérielle, la deuxième vise à bloquer la cascade d'événements délétères impliquant le glutamate. Malgré de bons résultats obtenus sur des modèles animaux reproduisant cette pathologie, la plupart des agents pharmacologiques bloquant directement ou indirectement la neurotransmission* provoquée par le glutamate se sont révélés décevants chez l'homme. La seule thérapie ayant démontré une certaine efficacité clinique, utilisée à l'heure actuelle aux Etats-Unis et au Canada, est l'administration d'une protéine capable de « déboucher » les vaisseaux ou les artères : l'activateur tissulaire du plasminogène t-PA. Cette molécule est une protéase qui intervient dans le système de dégradation du réseau de fibrine des caillots. Elle existe in vivo ,où elle est essentiellement produite par les cellules endothéliales. Mais elle a également été détectée dans les neurones, et semble impliquée tant dans le développement neuronal que dans la plasticité synaptique.

En 1995, des travaux réalisés au National Institute of Neurological Disorders and Stroke par le rt-PA Stroke Study Group ont porté sur l'effet d'une injection intraveineuse de t-PA recombinant chez 624 patients, dans un intervalle de temps situé trois heures après l'apparition des symptômes aigus1 : ce traitement permet un recouvrement total des fonctions neurologiques chez 11 % à 13 % des patients et n'aggrave pas l'état des autres patients2. Bien qu'il augmente de dix fois les risques d'hémorragies intracérébrales, ce qui restreint ses conditions de prescription, il a été approuvé par la Food and Drug Administration comme agent pharmacologique dans le traitement de l'ischémie cérébrale.

Toutefois, son application est limitée par une fenêtre d'utilisation extrêmement réduite trois heures maximum après l'apparition des troubles neurologiques, et on estime qu'en raison de cet impératif, 1,5 % seulement des patients américains victimes d'une attaque cérébrale ont pu en bénéficier. Par ailleurs3, des neurobiologistes américains ont observé que après une ischémie cérébrale, des souris génétiquement modifiées afin de ne plus exprimer de t-PA développaient des lésions cérébrales 50 % plus petites que des souris normales. A l'opposé, après injection de t-PA, la taille des lésions est accrue de 33 % chez les souris normales, et de 50 % chez les souris modifiées. Ces résultats suggèrent que le t-PA serait impliqué dans la cascade délétère des événements conduisant à la mort neuronale d'origine ischémique. Mais par quel mécanisme agit-il ?

Activité accrue. Quand des neurones en culture sont stimulés avec une substance appelée NMDA qui active, en fait, le récepteur au glutamate, ils sont dans des conditions qui se rapprochent de celles que l'on trouve au cours d'un accident vasculaire cérébral, et meurent. Or, si l'on ajoute un inhibiteur du t-PA, ce phénomène est amoindri4 : preuve indirecte que, dans des conditions ischémiques, du t-PA est libéré par les neurones en souffrance et accentue l'effet du NMDA. Par ailleurs, la mort neuronale est accrue quand on ajoute du t-PA, et ces observations sont corrélées à une augmentation du calcium intracellulaire, ce qui laisse présager d'un changement d'activité du récepteur au NMDA. Changement directement induit par le t-PA ? Il est fort possible que ce soit le cas. Nous avons en effet démontré4 que le t-PA coupe une partie extracellulaire du récepteur au NMDA, modifiant probablement, de ce fait, son activité. Voilà qui explique, en tout cas, l'absence d'effets délétères du t-PA sur un cerveau normal : son activité néfaste est conditionnée à l'activation du récepteur au glutamate.

S'il est clair que le t-PA accentue la mort cellulaire de neurones ischémiés tant dans des modèles in vitro que dans des modèles animaux, peut-on et doit-on pour autant extrapoler ces résultats à l'homme ? Certes, les effets bénéfiques du traitement des AVC par le t-PA, liés à sa capacité à déboucher les artères ou les vaisseaux, sont vraisemblablement minimisés par ses effets délétères sur la survie des neurones. Mais quelle est la part exacte du t-PA vasculaire et du t-PA cérébral dans la mort neuronale causée par un AVC ?

Si nos travaux ne répondent pas à cette question, ils ouvrent par contre une nouvelle piste thérapeutique. En effet, nous avons montré que l'ajout d'un inhibiteur du t-PA apparaît capable de restreindre la mort de neurones soumis à un stress neurotoxique de type ischémie. Ne serait-il pas envisageable de limiter les conséquences d'un AVC en détruisant d'abord le caillot sanguin, puis en mettant à profit les propriétés d'un inhibiteur du t-PA pour freiner la mort neuronale ?

Par Alain Buisson et Denis Vivien


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LES PERTURBATEURS HORMONAUX

 

Le casse-tête des perturbateurs hormonaux


environnement - par Yves Sciama dans mensuel n°372 daté février 2004 à la page 56 (2454 mots) | Gratuit
Certains produits chimiques qui s'accumulent dans l'environnement brouillent les signaux hormonaux. Comment les identifier, décider de substances prioritaires, définir des seuils de dangerosité ? La mise au point d'une réglementation se heurte à de multiples inconnues. L'Europe y consacre un programme de recherches, mais le chantier s'annonce pharaonique.

Quasi inconnu il y a seulement dix ans, le problème des perturbateurs endocriniens, ces polluants qui provoquent des désordres hormonaux chez les êtres vivants, figure aujourd'hui au nombre des casse-tête environnementaux à résoudre. L'Europe lui consacre depuis l'année dernière un programme de recherche qui associe 64 laboratoires, doté de 20 millions d'euros sur trois ans. Aux États-Unis, la dépense ? répartie entre autorités sanitaires et environnementales ? est du même ordre mais... chaque année. Quant au Japon, les sommes investies y seraient encore plus importantes. Et le nombre de projets de recherche recensés dans le monde ne cesse d'augmenter [1].

Cette mobilisation générale s'explique par la gravité et la diversité des anomalies constatées dans le monde animal, attestées à ce jour par des centaines d'articles. La galerie des troubles endocriniens que l'on relie à une exposition à des produits chimiques disséminés dans l'environnement tient en effet de l'inventaire à la Prévert, la poésie en moins. On y trouve des poissons qui changent de sexe [2] ou qui présentent des phénomènes d'intersexualité, tels que des ovocytes dans les testicules ; des oiseaux à la reproduction sinistrée, notamment par l'amincissement de la coquille des oeufs [3] ; des aberrations du développement ou de la métamorphose chez les amphibiens [4] ; et jusqu'à des dysfonctionnements du comportement ou des troubles du système immunitaire chez des mammifères marins [3]. Des mollusques aux ours blancs, tout le règne animal est touché.

Chez l'homme, les effets sont difficiles à étudier étant donné l'impossibilité d'expérimenter in vivo. Mais on voit mal pourquoi Homo sapiens échapperait au problème, son système hormonal n'étant pas d'une originalité particu- lière. Dans un rapport daté de 1999 [5], les autorités européennes ont d'ailleurs admis une « association » entre les perturbateurs endocriniens et une série de pathologies humaines de plus en plus fréquentes, telles que « les cancers des testicules, du sein et de la prostate, la baisse du nombre de spermatozoïdes, les malformations des organes reproducteurs, les dérèglements thyroïdiens, ainsi que les troubles intellectuels et neurologiques », tout en précisant que le « rôle d'agent causal n'a pas été confirmé »... Depuis cette date, ces présomptions se sont considérablement renforcées.

La nécessité d'une gestion de ces perturbateurs s'est imposée, mais elle s'annonce assez inextricable. Les inconnues sont nombreuses, à commencer par celles concernant les produits en cause. Rien n'indique a priori si un composé a des effets hormonaux ou pas. Quelques dizaines seulement ont été identifiés. Ils appartiennent à des familles chimiques étonnamment diverses métaux lourds, polyphénols, phtalates, PCBs, etc. et se retrouvent dans des produits allant des pesticides aux peintures industrielles, en passant par les cosmétiques ou les plastiques. Cette diversité a une double explication. Premièrement, il y a bien des façons de « brouiller » des signaux hormonaux : imiter la structure des hormones ce qui renforce leurs effets ; saturer leurs récepteurs ce qui les rend inopérantes ; entraver leur synthèse ; gêner leur dégradation, leur excrétion ou n'importe quelle étape de leur métabolisme... Deuxièmement, une telle variété reflète tout simplement celle des hormones : on en compte plus de 50 chez les vertébrés, et on ne les connaît pas toutes chez les invertébrés.

Détection difficile

Les composés perturbateurs sont donc loin d'être tous connus. Mais, surtout, ils déconcertent les toxicologues dont les outils, voire les concepts, d'évaluation des doses dangereuses se révèlent peu adaptés à des polluants qui agissent sur le système hormonal.

Un article retentissant, publié en 2002 dans les comptes rendus de l'Académie des sciences américaine, illustre en partie ces difficultés [6]. Dans cette étude, Tyrone Hayes et ses collègues de l'université de Berkeley ont étudié les effets de l'atrazine, le pesticide le plus utilisé aux États-Unis, sur des grenouilles Xenopus laevis. Ils ont montré qu'une exposition des têtards à 0,1 microgramme par litre µg/l seulement de ce produit ? une concentration très faible et couramment atteinte dans l'eau de pluie ? induit l'amorce d'un développement ovarien chez la grenouille mâle adulte. Or, un tel effet ne peut être détecté dans le cadre des procédures actuelles d'homologation des pesticides, les tests n'étudiant que la toxicité directe c'est-à-dire la mortalité, la réduction de poids, etc.. En l'occurrence, réalisés sur des amphibiens adultes, aucun impact en dessous de 47 µg/l n'avait été constaté !

Cette étude souligne aussi que l'extrême sensibilité des récepteurs hormonaux, bien connue par ailleurs, rend la détection de doses dangereuses d'autant plus difficile. Jorg Oehlmann, écotoxicologue à l'université de Francfort et responsable d'un des projets de recherche européens, indique que « la plupart des toxiques "ordinaires" ne sont pas actifs en dessous du microgramme par litre, même s'il existe quelques exceptions comme la toxine botulique. Or, avec les perturbateurs endocriniens nous devons parfois étudier les effets de concentrations cent fois plus faibles, ce qui pose ? entre autres ? de sérieux problèmes techniques. »

Au tableau des difficultés spécifiques à ces perturbateurs il faut en ajouter une autre, et elle est de taille : la relation entre dose et conséquences est inhabituelle. Comme l'explique Jorg Oehlmann : « Le principal paradigme de la toxicologie, est : "La dose fait le poison." Toute l'actuelle procédure d'évaluation du risque toxique est fondée sur le postulat que la toxicité s'accroît avec la dose appliquée. » Or cela est faux avec l'activité hormonale. Dès lors que l'on agit sur des récepteurs hormonaux, la relation dose/effets ne vaut que dans une gamme de valeurs réduite. Jorg Oehlmann et ses collègues l'ont par exemple montré dans le cas de mollusques aquatiques exposés à du bisphénol-A, une molécule synthétisée dans les années trente et couramment présente dans l'environnement elle entre dans la composition de certains plastiques, de fongicides, ignifugeants et autres antioxydants. Exposés à 100 µg/l de bisphénol-A, les mollusques présentaient une hypertrophie des ovaires et une ovogenèse suractivée. Mais cet effet « féminisant » n'a pas diminué avec la concentration, au contraire : à 25 µg/l, il était trois fois plus fort qu'à 100... Puis, ce cap passé, il a commencé à décroître [7].

Mystérieux mélanges

Depuis, des dizaines d'autres exemples de ce type ont été observés, avec des effets qui s'annulent, s'inversent ou changent radicalement lorsqu'on augmente les doses. Ainsi, commente le chercheur : « Contrairement au cas des cancérigènes, par exemple, un effet peut être induit dans une fenêtre de concentration très étroite sans que vous puissiez l'observer si vous appliquez une dose plus forte. Or, les procédures actuelles d'évaluation du risque reposent sur la détermination d'une dose minimale sans effet observable. Mais si l'on redoute qu'en deçà de ce seuil il existe une étroite fenêtre de concentration induisant des effets négatifs, alors il faut revoir toute la procédure... »

Les scientifiques se heurtent encore à un autre problème plus classique mais auquel les perturbateurs endocriniens ne semblent pas échapper, celui des « mélanges » : l'effet de la combinaison de produits correspond rarement à la somme des conséquences attendues pour chacun d'entre eux pris isolément.

Andreas Kortenkamp, de la London School of Pharmacy, a par exemple étudié les effets d'un cocktail de 8 composés faiblement oestrogènes féminisants, chacun à une concentration bien inférieure à son seuil d'activité observable [8]. Pour cela, il a utilisé un test courant, dit YES pour Yeast Estrogen Screen, qui consiste à doter des levures d'un récepteur humain de l'hormone oestrogène. Grâce à une manipulation génétique ad hoc, l'activation du récepteur s'accompagne de la synthèse d'une enzyme facile à doser. Résultat : l'activité du mélange est apparue bien supé- rieure à la somme de celle des 8 constituants. Pour un mélange constitué d'un oestrogène extrêmement puissant le 17b-oestradiol et 11 composés notablement moins actifs trois cent cinquante à cent mille fois, l'observation est la même. Certes, il s'agit de résultats in vitro : on ne peut donc les extrapoler à notre métabolisme général, vraisemblablement protégé par des mécanismes régulateurs. Mais le problème soulevé est de taille : et s'il était impossible de définir des seuils réglementaires de contamination pour une substance isolée ?

De cette accumulation de questions n'émerge pour l'instant qu'une certitude : la découverte de la perturbation endocrinienne va tôt ou tard contraindre à réexaminer la majorité des 90 000 composés nouveaux synthétisés par l'homme depuis le début de l'ère industrielle. Un chantier pharaonique qui durera au moins quinze ans, sinon beaucoup plus. Pour commencer à s'y attaquer, les autorités de la plupart des grands pays ont défini dès 1998 des stratégies convergentes. Elles consistent, en simplifié, à établir d'abord une liste de produits urgents à étudier, puis à leur faire subir une série de tests approximatifs et à étudier enfin en détail ceux qui se seront montrés les plus actifs, de façon à produire une estimation du risque.

Pour l'instant, tout cela relève du voeu pieux. A priori, la mauvaise volonté n'est pas en cause : rarement un problème d'environnement aura reçu tant d'attention dès les premières alertes. Mais la complexité du phénomène semble avoir raison de tous ces efforts. La simple sélection de substances prioritaires à étudier se révèle particulièrement laborieuse. Cette première étape repose en effet sur la littérature préexistante, sur les volumes de production, sur la persistance dans l'environnement, sur l'exposition, etc. Bref, sur un cocktail de facteurs inconfortablement subjectif. D'ailleurs les États-Unis n'ont à ce jour pas encore franchi cette étape. L'Europe, elle, a confié cette tâche à un bureau d'études des Pays-Bas, qui a retenu 553 substances, s'attirant aussitôt les critiques de l'industrie mais aussi celles du comité chargé des toxiques, qui relève de la Commission européenne CSTEE. Ce dernier a, entre autres, dénoncé des critères de sélection « trop restrictifs » ayant probablement conduit à « manquer certains produits » [3]. Mais il a tout de même fini par adopter cette liste comme base provisoire de travail. Le Japon, quant à lui, a sélectionné 948 molécules prioritaires.

« Enfer réglementaire »

L'étape suivante le tri et les essais pose encore plus de problèmes. Cette étape nécessite une batterie de tests suffisamment fiables, sensibles et complets pour qu'une molécule puisse être considérée comme inoffensive ? au moins provisoirement. Or, la mise au point de ces tests se heurte à toutes sortes de difficultés, liées à la complexité du sujet. D'après Gary Timm, membre du comité chargé de la perturbation endocrinienne mis sur pied par l'administration américaine : « L'Agence de protection de l'environnement américaine l'EPA devrait commencer les essais en 2005, probablement avec une liste de substances très limitée, une centaine au maximum. Nous verrons alors si nos tests fonctionnent, s'il faut les améliorer, et nous essaierons d'avancer. » Et l'Europe ne sera certainement pas prête avant...

Quant à la troisième étape, l'évaluation des risques, elle sera difficile en l'absence de données solides sur l'exposition de l'homme et des écosystèmes à une vaste palette de composés, pour tenir compte des synergies. Or, personne ne sait au juste pour quels produits il importe en priorité de mesurer l'exposition, et seules des études disparates portant sur un faible nombre de molécules ont jusqu'à présent été menées.

Rien d'étonnant donc à ce qu'un spécialiste ait récemment qualifié la phase actuelle d'« enfer réglementaire ». Dans les faits, lorsque des substances particulières apparaissent comme posant un problème aigu, elles sont traitées au cas par cas, en fonction des informations disponibles et des pressions exercées par les uns et les autres. Le Japon a par exemple demandé à ses industriels, en 1998, de tout faire pour réduire les émissions de nonylphénol, un produit utilisé en masse pendant plus de quarante ans, notamment dans des détergents, émulsifiants, agents dispersants, dont les concentrations dans l'environnement apparaissaient problématiques féminisation de certains poissons d'eau douce. Selon Taisen Ogushi, l'un des principaux spécialistes nippons, cette simple demande, non assortie de contraintes réglementaires, a suffi à réduire la contamination à un niveau acceptable en moins d'un an.

Dans ce dossier, l'industrie chimique plaide que « sans une compréhension améliorée de la perturbation endocrinienne et de meilleurs outils d'évaluation, toute mesure de précaution au-delà de ce qui est déjà prévu par les contrôles existants ne serait qu'un saut dans l'inconnu, qui ferait sans doute plus de mal que de bien [9] ». Les industriels soulignent qu'il ne faudrait pas mettre en circulation des listes de produits actifs, qui sèmeraient gratuitement la suspicion, mais effectuer de réelles analyses de risque. Scientifiquement, cela se défend... mais cela aboutit à différer toute possibilité de légiférer avant l'accumulation d'une quantité énorme de données, autrement dit avant de nombreuses années.

À l'inverse, les associations de protection de la nature réclament une application stricte du principe de précaution et des mesures énergiques. Aux États-Unis, les choses sont allées jusqu'à un retentissant procès intenté à l'EPA par plusieurs associations, au terme duquel l'administration a été condamnée à hâter l'évaluation de certains produits, calendrier contraignant à la clé [10]. Une soixantaine de spécialistes en vue ont par ailleurs signé une pétition récente du WWF [11], exigeant que partout où il existe des produits de substitution sûrs « safe alternatives », il soit mis fin à l'utilisation de substances ayant une activité hormonale malgré les incertitudes scientifiques. Comme le résume Jorg Oehlmann : « Il a même été réclamé que les perturbateurs endocriniens soient tout simplement interdits en tant que tels. C'est évidemment stu- pide ? mais en dehors de cette position extrême pour l'instant il n'y a rien. » Car on ne peut interdire une substance au motif qu'elle a un effet hormonal en laboratoire, sans étudier si cet effet est négligeable ou problématique dans l'environnement réel.

L'ère des décisions en matière de perturbation endocrinienne paraît encore lointaine. D'autant que si le travail de recherche repose aujourd'hui principalement sur des fonds publics, les autorités européennes comme américaines semblent décidées à faire financer les essais ? lorsqu'ils seront au point ? par l'industrie chimique. Des essais qui coûteront 250 000 dollars par molécule pour un diagnostic rapide, et dix fois plus pour des tests approfondis, selon les Américains. Autant dire que les choses n'iront pas toutes seules, et que le problème des perturbateurs endocriniens risque de faire parler de lui encore un certain temps. Comme le remarque Gary Timm : « C'est sûrement un domaine offrant d'excellentes possibilités de carrière...

LE Contexte En 1996, une journaliste et deux zoologues américains publient Our Stolen Future, une enquête sur les perturbations graves du système hormonal observées dans le règne animal, liées à l'accu- mulation dans l'environnement de polluants fabriqués par l'homme. En quelques mois, le livre devient un best-seller aux États-Unis, et la perturbation endocrinienne entre sur la scène publique. Dès 1997, les crédits de recherche commencent à affluer aux États-Unis, au Japon, puis en Europe. En ce début du XXIe siècle, le problème est devenu l'une des grandes préoccupations environnementales.

Par Yves Sciama

 

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NEUROCHIRURGIE ET ROBOTIQUE

 

  00:16:00  1990  SD 4/3  Sonore
L'équipe de neurochirurgie du Professeur Benabid, assistée par un robot mis au point à l'Hôpital de La Tronche, près de Grenoble, pratique une biopsie crânienne stéréotaxique. Un logiciel permet grâce à une modélisation 3D, réalisée à partir d'imagerie RMN et X, de piloter le robot qui permettra au chirurgien d'optimiser la définition de la trajectoire des instruments.
Dominique Hoffman, neurochirurgien, le Professeur Alim-Louis Benabid, chef du service de neurochirurgie, et le Professeur Demongeot, chef du service d'informatique médicale, expliquent comment un travail conjoint avec des mathématiciens et des informaticiens a permis la numérisation d'un atlas du cerveau, la représentation 3D des images médicales et la mise en correspondance de toutes ces données.
La chirurgie assistée par ordinateur permet de s'aventurer dans des zones qui jusqu'ici étaient peu visibles.

Producteur : CNRS AV
  
Auteur : PAPILLAULT Anne (CNRS AV, UPS CNRS, Meudon) DARS Jean-François (CNRS AV, UPS CNRS, Meudon)
Réalisateur : PAPILLAULT Anne (CNRS AV, UPS CNRS, Meudon) DARS Jean-François (CNRS AV, UPS CNRS, Meudon)
Conseiller scientifique : LAVALLEE Stéphane CINQUIN Philippe

 

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UN MÉDICAMENT POUR REFROIDIR LE CERVEAU ...

 

Bientôt un médicament pour refroidir le cerveau ?
Sylvie Riou-MilliotPar

Publié le 27-03-2015 à 09h30

Le froid est le meilleur des neuroprotecteurs pour tenter d'éviter la mort cellulaire quand le cœur s'arrête. Une société de biotech française, Vect-Horus, va démarrer les essais d'un médicament chez l’homme.
Le froid est le meilleur des neuroprotecteurs pour tenter de limiter les conséquences néfastes en évitant la mort cellulaire cAPA / Science Photo Library / AFPLe froid est le meilleur des neuroprotecteurs pour tenter de limiter les conséquences néfastes en évitant la mort cellulaire cAPA / Science Photo Library / AFP


NEUROPROTECTION. Quand le cœur s’arrête, le cerveau, qui ne reçoit plus de sang, souffre. Or, le froid est le meilleur des neuroprotecteurs pour tenter de limiter les conséquences néfastes en évitant la mort cellulaire. Aujourd’hui, différentes techniques induisant une hypothermie (baisse de la température) dite thérapeutique sont possibles (voir encadré ci-dessous) mais elles ne sont pas toujours simples à mettre en œuvre et nécessitent des équipes entraînées. Surtout, aucune substance médicamenteuse facile à administrer et induisant cette hypothermie n’est encore disponible. Refroidir le cerveau stressé avec une molécule administrée par une simple injection intraveineuse : c’est tout l’enjeu des travaux menés par une société de biotech française, Vect-Horus, qui va bientôt démarrer les essais de son candidat médicament, VH-N439 (Neurotensin) chez l’homme.


Le froid, une parade déjà bien connue

Utiliser le froid n’est donc pas nouveau en soi. Les réanimateurs savent en effet depuis les années 1950 qu’il est l’une des meilleures parades qui puisse être utilisées, en cas, par exemple, d’arrêt cardiorespiratoire, d’accident vasculaire cérébral (AVC), d’asphyxie périnatale ou de traumatisme crânien compliqué avec hypertension intracrânienne réfractaire... Autant de situations urgentes où le cerveau se retrouve en souffrance. "La neuroprotection induite par l’hypothermie n’est pas simplement due au ralentissement du métabolisme cellulaire, précise le Dr Lionel Velly, réanimateur à l’hôpital La Timone (Marseille). Elle réduit également les phénomènes d’apoptose (mort cellulaire) et limite la réaction inflammatoire". Elle permet aussi une meilleure récupération.

Cerveau : et pour quelques degrés de moins
De la traditionnelle "saharienne" (glaçons, draps mouillés et ventilateur), incontestablement la méthode plus économique, à la plus sophistiquée (solutions de refroidissement administrées par perfusion intraveineuse via un cathéter) et la plus coûteuse, en passant par des gilets constitués de patch glacés, des casques et couvertures réfrigérants, des dispositifs intra nasaux, des gaz froids, etc. Les réanimateurs ont plutôt l’embarras du choix pour tenter de refroidir un cerveau en souffrance. Mais "à l’heure actuelle, les recommandations internationales ne favorisent aucune méthode", détaille le Dr Lionel Velly, réanimateur à l’hôpital de La Timone (Marseille). En pratique, la sélection se fait en fonction des équipes, des habitudes, des moyens... Mais l’objectif est toujours le même : "Maintenir une température entre 33°C et 36°C, selon des recommandations qui vont être réactualisées avant la fin de cette année", précise le spécialiste. En pratique, trois phases se succèdent : l’induction, le maintien (sur environ 24h) puis le réchauffement qui doit être progressif. A noter une difficulté souvent rencontrée lors de ces manipulations : les frissons, qui disparaissent à 33°C. Pour les atténuer, les réanimateurs utilisent par exemple des curares.

Il faut ruser pour franchir la barrière hémato-encéphalique du cerveau

Or si aucune approche médicamenteuse permettant ce refroidissement cérébral protecteur n’est disponible, c’est que les molécules connues pour induire cette hypothermie ne passent la barrière hémato-encéphalique (BHE), cette frontière physiologique présente au niveau cérébral, entre circulation sanguine et système nerveux central. C’est notamment le cas de la neurotensine, un peptide naturellement synthétisé par l’organisme. Pour franchir cette barrière, il faut donc ruser.

"Nous avons utilisé la technique du cheval de Troie en associant la neurotensine à un vecteur, un peptide de 8 acides aminés, qui trompe le cerveau. Cela permet alors l’ouverture de la BHE sans effraction", précise le Dr Jamal Temsamani, directeur scientifique du développement de Vect-Horus. Qui poursuit : "Nos essais chez l’animal ont montré une baisse significative de 4°C mais aussi son maintien stable pendant plusieurs heures".

Une première injection intraveineuse suivie d’une perfusion lente

Le protocole, en cours d’élaboration, reposera sur une première injection intraveineuse (dite bolus), abaissant rapidement la température, suivie d’une perfusion lente du produit pour la maintenir entre 33 et 36°C  pendant plusieurs heures, entre 12 et 24h. "Nous allons dans un premier temps et d’ici à quelques mois démarrer des essais précliniques chez des volontaires sains", détaille le Dr Temsamani. Une phase où le médicament devra évidemment démontrer son innocuité, c’est-à-dire son absence de toxicité, et sa tolérance. Ensuite, il sera testé d’abord chez des patients en arrêt cardiorespiratoire puis victimes d’accident vasculaire cérébral.

"Nos résultats laissent espérer à terme un positionnement de VH-N439 comme un médicament dit ‘first in class’, le premier de sa catégorie", poursuit le Dr Temsamani. Cette action ciblée devrait aussi permettre à la petite start-up de se tourner vers d’autres secteurs, comme les maladies neurodégénératives. Des collaborations  scientifiques avec d’autres laboratoires (Sanofi) détenteurs, eux, de molécules prometteuses qui ne demandent qu’à franchir la fameuse BHE, ont déjà été signées.

 

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